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JESUS-CHRIST


38. Il a une compassion sans bornes pour toutes les misères corporelles ; il use de son pouvoir miraculeux pour guérir tous les malades, délivrer tous les possédés et ressusciter les morts. Les misères morales émeuvent son cœur bien davantage encore. Les pauvres pécheurs sont l’objet de toutes ses prévenances, tels la Samaritaine, Joa., iv, 7-27, le publicain Matthieu, Matth., ix, 9-13, Marie-Madeleine, Luc, vii, 37-47 ; Zachée, Luc, XIX, 1-10 ; il a pour eux tous les pardons. Luc, v, 20 ; Joa., viii, 2-11, etc. Sa tendre compassion à leur égard a son émouvante expression dans la parabole de l’enfant prodigue. Luc, xv, 11-32. Les enfants attirent son cœur par leur simplicité et leur innocence. Matth., xviii, 1-5 ; xix, 13-15 ; Marc, x, 13-16 ; Luc, xviii, 15. Aux pauvres Galiléens, aussi bien qu’aux docteurs de Jérusalem, il prodigue ses enseignements. Matth., xi, 5 ; Luc, vii, 22. Ses pires ennemis ne sont pas exclus de son amour, Matth., xxiii, 37 ; Luc, xxil, 51, et même pendant qu’ils le crucifient, il implore leur pardon. Luc, xxiii, 34. S’il se montre parfois sévère à l’égard des scribes et des pharisiens, on s’aperçoit que c’est surtout à cause des préjugés qu’ils sèment dans le peuple pour l’empêcher d’arriver à la vérité et au salut. Matth., xxiii, 4, 13, 15. « Venez à moi, vous tous qui peinez et qui êtes surchargés, et je vous referai ! » Matth., xi, 28. Tel est le sentiment d’amour et de compassion qui pénètre toutes les pages de l’Évangile. Le Sauveur ne s’en tient pas là. Après avoir dit que « la perfection de l’amour, c’est de donner sa vie pour ceux qu’on aime », Joa., xv, 13, il réalise de son plein gré le vœu de Caiphe : « Il est utile qu’un.homme meure pour le peuple, plutôt que le peuple ne périsse. » Joa., xi, 50. Il va au-devant des supplices qu’il lui eût été si facile d’éviter, Matth., xxvi, 53, il affronte en silence tous les outrages, il se laisse déshonorer devant tout un peuple, condamner comme un malfaiteur ; il répand son sang et donne sa vie pour les hommes. Matth., xxvi, 28 ; Marc, xiv, 24 ; Luc, xxii, 20. Cf. Dupanloup, Histoire de N.-S. J.-C., Paris, 1870, p. xi-lix. Ce principe d’amour pour les hommes s’étendait, dans l’intention - de Notre-Seigneur, non seulement aux choses qui concernent le salut des âmes, mais encore à tout ce qui intéresse le bonheur de la vie présente, pour les sociétés comme pour les individus. Matth., vi, 33 ; Luc, xii, 31. 3° Jésus modèle de toutes les vertus.

Enfin, considéré

en lui-même, le divin Maître nous apparaît comme le type surhumain de toutes les vertus. Rien de heurté, de violent, d’irritant dans sa conduite ; tout, au contraire, est mesuré, harmonieux et d’une parfaite dignité. Sa jeunesse se passe dans l’obéissance, Luc, ii, 51, et le travail. Matth., xiii, 55. Dans sa vie publique, une large part est faite à la pénitence, Matth., IV, 2, à la pauvreté, Matth., viii, 20 ; Luc, viii, 3 ; ix, 58, à l’humilité, Matth., xii, 16 ; Marc, i, 25, 43, iii, 12 ; Luc, xviii, 19 ; Joa., vm, 50 ; xiii, 4, 5, sans cependant que les habitudes de cette vie tranchent trop violemment dans le milieu où il se trouve. Mr.tth., xi, 18 ; Luc, vii, 34. Son autorité personnelle est irrésistible. Matth., iv, 19 ; ix, 9. Elle se manifeste par une fermeté sereine et inébranlable en face des contradicteurs et des ennemis, Matth., xxvi, 55 ; Marc, v, 40 ; Luc, iv, 30 ; xiii, 32 ; Joa., h. 19 ; vu, 33 ; viii, 48, 49 ; x, 32, et par une intrépidité aussi calme qu’énergique en face du danger. Matth., xxvi, 46 ; Marc, xiv, 42 ; Joa., xi, 8. Sa patience au milieu des indélicatesses de son entourage, des froissements, des affronts, des souffrances, est vraiment surhumaine. Matth., xxvi, 33-35 ; Luc, xxii, 68 ; xxiii, 9 ; Joa., xviii, 23. Pendant les longues heures de sa passion, il porte aux dernières limites la possession de.soi-même, le C-dme et la présence d’esprit au milieu de la conspiration la plus odieuse qui fût jamais, la résignation dans l’humiliation la plus profonde et les tortures les plus imméritées, la sérénité d’âme même entre les bras

de la croix. Toutes les actions de sa vie ont été réglées avec une admirable prudence. Matth., xvii, 9 ; cf. Luc., xiii, 27-29 ; xxi, 8. La douceur de ses procédés est merveilleuse, Matth., xii, 19-20 ; Luc, ix, 54-56, et il apporte dans ses rapports avec les autres une gracieuseté incomparable. Matth, , xx, 22 ; Marc, v, 32-34 ; xii, 43 ; Luc, x, 41-42 ; xix, 9 ; Joa., i, 47 ; iv, 7 ; v, 6 ; ix, 35-36, etc. Rien de plus délicat que sa manière d’adresser des reproches, Luc, xxii, 61 ; Joa., viii, 8, et quand il apparaît quelque dureté dans ses paroles, c’est toujours l’indice d’une précieuse compensation qui se prépare. Matth., xv, 24-28 ; xvi, 23 ; Marc, ix, 18 ; Joa., iv, 48. Cette égalité de caractère, cette possession de soi sont d’autant plus remarquables que, dès le début de son ministère public, le Sauveur se voit en butte à une hostilité sauvage qu’exaltent, an lieu de la désarmer, les miracles de bonté qu’il ne cesse d’opérer. On sait comment les gens de Nazareth procédèrent à son égard quand il reparut au milieu d’eux. Luc, iv, 29. À la seconde Pàque, les Juifs commencent à le traiter en ennemi, à cause du miracle de la piscine Probatique. Joa., v, 16. Au retour, quand il a guéri dans une synagogue l’homme à la main desséchée, les pharisiens complotent déjà sa mort de concert avec les hérodiens. Matth., xii, 14 ; Marc, iii, 6 ; Luc, vi, 11. Dès lors, des scribes sont envoyés de Jérusalem pour le traquer partout où il va et s’efforcer d’inspirer aux Galiléens la haine irraisonnée qui anime les Juifs contre lui. Marc, m, 22. De la sorte le divin Maître vit, parle et agit dans une atmosphère de suspicion et d’hostilité sourde qui eût suffi à aigrir ou du moins à décourager l’âme la mieux trempée. Et pourtant rien ne lui fait perdre son calme, rien ne lasse sa patience, et si son cœur est blessé par tant d’ingratitude, sa compatissante générosité ne laisse échapper aucune occasion de s’exercer. Tout se résume par le don qu’il fait de lui-même aux hommes en instituant son Eucharistie la veille même de sa mort, au moment où il sait que les complots ourdis contre lui vont aboutir à une exécution violente. Il voyait au fond même des cœurs toutes les haines accumulées contre sa personne et contre son œuvre. Il n’en tient compte que pour se dévouer avec plus de magnanimité. Tel était le Sauveur, vivant à la manière des hommes sans doute, puisqu’il s’était fait homme, mais pratiquant les plus merveilleuses vertus, de manière à charmer tous ceux qui vivaient près de lui, montrant aux plus parfaits un idéal qu’ils ne peuvent atteindre, et aux plus simples un modèle qu’il ne leur est pas permis de trouver hors de leur portée. Cette vie est digne d’un Dieu lait homme ; loin de constituer une objection à l’affirmation de celui qui s’est dit Fils de Dieu, elle en corrobore la vérité ; et si, du temps du Sauveur, « le peuple entier se réjouissait de tout ce qu’il faisait avec tant de gloire, » Luc, xiii, 17, l’humanité, qui ne retrouve que son portrait dans l’Évangile, a pour lui la même admiration joyeuse que les Galiléens. Cf. Bougaud, Le christianisme et les temps présents, Paris, 1877, t. ii, p. 610619 ; Lescœur, Jésus-Christ, p. 239-267 ; de Place, Jésus-Christ, sa divinité, son caractère, son œuvre et son cœur, Paris, 1875 ; de Broglie, Problèmes et conclusions de l’histoire des religions, p. 334-340 ; d’Hulst, Caième de Notre-Dame, 1895, Retraite.

IX. Jésus-Christ d’après l’enseignement des Apôtres.

— Après la Pentecôte, les Apôtres ont prêché Jésus-Christ à travers le monde. Leur pensée sur le diin Maître nous est parvenue, consignée dans les Actes des Apôtres, les Épîtres et l’Apocalypse. De ces écrits, nous pouvons donc tirer la confirmation, l’interprétation et les conclusions des récits évangéliques.

l. la vie du sauveur. — 1° Jésus-Christ est préparé par Dieu dés l’origine du monde, Rom., i, 4 ; I Pet., i, 20 ; Apoc, xiii, 8 ; c’est lui qu’attendent les patriarches et qu’annoncent Moise et les prophètes. Act., iii, 21-25 ;