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JÉSUS-CHRIST


iv, 33, 10, t. vii, col. 1079. — 2. Parmi ces textes messianiques, la plupart sont pris dans le sens littéral, c’est-à-dire qu’ils ne se rapportent à aucun autre personnage que le Messie futur. D’autres textes sont pris dans le sens spirituel, se rapportant à un premier objet, puis, dans un sens supérieur et figuratif, au Messie. C’est ainsi que le texte : « Vous ne briserez aucun de ses os, » Exod., xii, 46 ; Num., ix, 12, est entendu de Jésus-Christ par saint Jean, six, 36. Les paroles : « Je serai pour lui un père et il sera pour moi un fils, » II Reg., vii, 14, dites à propos de Saloinon, sont ensuite appliquées au Fils de Dieu. Heb., i, 5. David célèbre l’ascension de l’arche sur le mont Sion : « Tu montes en haut, traînant les captifs à ta suite, tu reçois les présents des hommes, même des rebelles, » Ps. lxviii (lxvii), 19, et saint Paul applique directement ces paroles à l’ascension du Sauveur. Eph., iv, 8, etc. Enfin il arrive quelquefois que les écrivains du Nouveau Testament allèguent comme textes prophétiques des passages qui ont littéralement un autre sens dans l’Ancien Testament. La parole d’Osée, xi, 1 : « J’appelai mon fils hors de l’Egypte, » dont saint Matthieu, ii, 15, signale l’accomplissement au retour de l’enfant Jésus, après son exil, est une prophétie dans le sens spirituel ; elle a trait originairement à la sortie d’Egypte des Hébreux. Le même Ëvangéliste, parlant du séjour de Notre-Seigneur à Nazareth, dit que c’est pour l’accomplissement de ce qui a été écrit par les prophètes : « Il sera appelé nazaréen. » Matth., ii, 23. Or aucun prophète ne fait mention du séjour du Messie à Nazareth. Mais Isaie, xi, l, appelle le Messie nêsér, <s. rejeton, » et d’autres, puisque samtMatthieu vise plusieurs prophètes, lui donnent le nom équivalent de sémah, « germe. » Jer., xxiii, 5 ; Zach., iii, 8 (Vulgate : Oriens). Ce nom suffit à l'écrivain sacré pour justifier son allusion. On trouverait un autre exemple d’accommodation encore beaucoup plus saillant en comparant Deut., xxx, 11-14, avec la citation que saint Paul en fait et l’argument qu’il en tire. Rom., x, 4-9. Dans les textes de cette dernière espèce, il nous serait difficile de reconnaître à première vue des prophéties messianiques. Si les Apôtres leur ont attribué cette valeur et s’ils ont raisonné en conséquence, c’est que ce genre d’interprétation avait des bases réelles et qu’en tous cas il était accepté comme parfaitement démonstratif par leurs contemporains. Or, l’un des buts principaux des écrivains sacrés du Nouveau Testament était de faire accepter Jésus-Christ comme le Messie, en montrant en lui la réalité de ce qu’avaient annoncé les prophètes. Il leur était donc loisible de se servir, dans certains cas, des rapprochements qu’autorisait sans difficulté l’exégèse de leur temps. Pour nous, qui avons tant d’autres arguments à notre disposition, nous pouvons nous en tenir aux prophéties messianiques dont le sens littéral est démontrable ou dont le sens spirituel est suffisamment autorisé, et négliger celles qu’acceptait au temps des Apôtres une exégèse moins rigoureuse que la nôtre. — 3. À prendre les prophéties messianiques dans leur sens obvie et naturel, on est logiquement obligé de reconnaître qu’elles ont en vue un homme et non une collectivité quelconque. Quand, par exemple, Jérémie, xxxru, 16-18, écrit : « David ne manquera jamais d’un successeur assis sur le trône de la maison d’Israël ; les prêtres et les lévites ne manqueront jamais devant moi de successeurs, pour offrir les holocaustes, brûler l’encens avec les offrandes et faire les sacrifices quotidiens, «  les Juifs étaient exposés, en s’en tenant au sens littéral, à compter sur une dynastie perpétuelle qui assurerait leur prospérité et sur un sacerdoce lévitique non moins durable. Mais, près de deux siècles avant Jérémie, Isaïe avait formellement présenté cette descendance royale de David, destinée à régner à jamais, sous les traits d’un enfant nouveau-né, qui était en même temps

I le Dieu fort, l’Emmanuel, en un mot le Messie homme et Dieu. Is., vii, 14 ; ix, 6 ; xi, 1 ; xvi, 5, etc. — Le Messie est encore annoncé par les prophètes comme « serviteur de Jéhovah ». Ce serviteur apparaît comme prophète, prédicateur de la vérité, en butte à la souffrance et victime de la mort pour les péchés de son peuple, sans qu’il soit rattaché à la descendance de David, ni investi de la royauté. Mais ce serviteur ne peut être collectivement ni le peuple d’Israël, ni même l'élite de ce peuple. Isaïe, xlix, 6, distingue très nettement le serviteur d’avec le peuple : « C’est peu que tu sois mon serviteur pour restaurer les tribus de Jacob et convertir les restes d’Israël : je t'établis pour être la lumière des nations. » D’ailleurs, on convient généralement que le chapitre Lin du même prophète décrit des souffrances individuelles et nullement celles d’une collectivité. Il faudrait en dire tout autant du psaume xxi. Ce qui prouve encore ce vrai sens des prophéties messianiques, c’est qu’elles trouvent dans la vie de Jésus-Christ une explication et une réalisation pleinement satisfaisantes, tandis qu’entendues d’un peuple ou d’une collectivité quelconque, elles cadrent mal avec l’hisloire et ne s’expliquent qu'à condition d'être dénaturées. — 4. Quelque opinion qu’on puisse adopter sur la date où ont été formulées les prophéties messianiques, on est forcé d’admettre qu’elles sont toutes antérieures d’au moins quatre cents ans à Jésus-Christ. Là est leur valeur probante. Peu importe, d’ailleurs, qu’elles aient été plus ou moins bien comprises par leurs auteurs, qu’elles aient été entendues par les Juifs dans un sens ou dans l’autre. Les prophéties ne s’expliquent clairement, pour l’ordinaire, qu'à la lumière des événements. Jésus-Christ est venu, il a vécu et il est mort comme l’avaient dit les prophètes, et, du même coup, sa vie a expliqué les prophéties et les prophéties ont prouvé son caractère messianique. — Sur les prophéties messianiques, voir S. Justin, Dialog. cum Tryphon., 5X1-55, 66, 108, t. vi col. 586 ; cf. Freppel, S. Justin, Paris, 1869, p. 387-390 ; S. Augustin, De av. Dei, xviii, 28-35, t. xli, col. 584-596 ; Huet, Démonst. evang., dans les Démonst. évang. de Migne, t. v, col. 487-934 ; Stanhope, Défense de la religion chrétienne, ibid., 1843, t. vi, col. 530-542 ; Hooke, De vera religione, dans le Cursus theol. de Migne, 1853, t. iii, col. 66-149 ; Meignan, Les prophéties messianiques, Paris, 1858 ; Les deux premiers livres des Rots, Paris, 1878 ; David, Paris, 1889 ; Les prophètes d’Israël, Paris, 1892 ; Reinke, Die messianischen Weissagungen bei den Propheten, Giessen, 1859 ; Tholuck, Die Prophelen und ihre Weissagungen, Gotha, 1860 ; Morisot, Le Christ avant Bethléem, Paris, 1870 ; Castelli, Il Messia secundo gli Ebrei, Florence, 1874 ; Bougaud, Le christianisme et les temps présents, Paris, 1878, t. iii, p. 518-558 ; Trochon, Introduction générale aux prophètes, Paris, 1883, p. lixcxiv ; Schelling, Vaticinia messiana in modum chrestomathix hebraicw, , Ljon, 1883-1884 ; De Bolle, Christologia Antiqui Testamenti, Evere, 1884 ; Frz. Dehtzsch, Messianische Weissagungen in geschichtlichen Folge, Leipzig, 1890 ; De Broghe, Questions bibliques, Paris, 1897, p. 321-380.

m. l’attente du messie par les juifs. — 1° Époque de la venue du Messie. — Deux prophéties permettaient aux Juifs de savoir à peu près exactement l'époque à laquelle paraîtrait le Messie. —1. La première était celle de Jacob annonçant que « le sceptre ne sortirait pas de Juda ni le bâton de commandement d’entre ses pieds » jusqu'à ce que vienne celui qu’on attendait. Gen., XLIX, 10. Cette prophétie semblait très claire en elle-même ; mais l’histoire montre que son accomplissement souffrit des intermittences. Tout d’abord, le sceptre n’est mis aux mains de Juda qu'à l’avènement de David. Ce roi et son fils Salomon commandent seuls à toute la nation. Leurs successeurs ne régnent que sur deux tribus. La captivité vient interrompre ce règne. Zorobabel, qui