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1409 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 4410

qu’elle n’a pas la prétention d’être de tout point parfaite.

Le décret du concile de Trente sur l’authenticité de la Vulgate a été, dès le début, matière à controverse entre catholiques. Les jésuites ont en général soutenu l’opinion modérée, celle qui a fini par triompher ; à savoir que ce décret ne met pas la Vulgate à la place ou au-dessus des textes primitifs, ni même des autres versions non latines. Tel a été le sentiment de Lainez, cité par Mariana, Pro edit. vulg., c. xxi, dans Migne, Curs. Script. Sacr., t. i, col. 839 ; de Salmeron, Opéra, t. i, proleg. 3, p. 24 ; de Bellarmin, De edit. latina. Vulg. ; quo sensu a concilio Trident, definitum sit, ut ea pro authent. habeatur, ~Wuvzbovtrg, 1749, édit. P.Widenhofer, S. J. Il est vrai que le P. Frévier, S. J., écrivit contre cet opuscule pour en contester l’authenticité : La Vulgate authentique dans tout son texte, 1753. On peut citer encore en faveur de l’opinion modérée : Serarius, Proleg. Bibhc, c. XIX, 12, p. 118, Mayence, 1612 ; Pallavicini, Histor. concilii Tria., I. VI, c. xv, n. 1 et 99 ; et surtout Mariana, dans la dissertation que nous venons de citer, col. 739877. De nos jours les PP. Patrizi, Corluy, Franzelin et Cornely ont écrit dans le même sens.

IV. PRINCIPES GÉNÉRAUX D’EXÉGÈSE. — 1° Au début

du xviie siècle, le procès de Galilée est comme un épisode dans l’histoire des théories alors en cours sur l’interprétation traditionnelle du texte biblique. Quelques jésuites, et en particulier Bellarmin, créé cardinal par Clément VIII, en 1599, furent mêlés à cette affaire. Lors de son premier procès devant le tribunal du Saint-Office et la S. C. de l’Index (1615-1616), l’illustre Florentin trouva beaucoup de bienveillance auprès de Bellarmin, chargé de l’examiner. « Préoccupé de la nouvelle théorie, le cardinal consulta les quatre mathématiciens les plus renommés du Collège romain, les PP. Clavius, Griemberger, Malcozzo et Lembo qui rendirent à Galilée un témoignage favorable. En conséquence il se borna à lui conseiller de présenter sa théorie ex suppositione et non d’une manière absolue ; de donner à sa propagande un caractère plus calme ; surtout de ne pas appuyer son opinion sur l’Écriture Sainte. » Couderc, Le vén. cardinal Bellarmin, t. ii, p. 178. Il faut lire la lettre que le cardinal Bellarmin écrivit alors (12 avril 1615) au P. Foscarini, carme ; elle s’adresse autant, ou même plus, à Galilée qu’à son ami. Il ne nie pas que l’Écriture se puisse entendre en ce sens, mais il attend des preuves ; jusque-là il doutera. « Or, dans le cas de doute, on ne doit pas abandonner l’interprétation de l’Écriture donnée par les SS. Pères. » Telle était aussi l’opinion du P. Fabri, S. J. C’est dans ces conditions que Bellarmin donna à Galilée l’attestation du 16 mai 1616 qui commence par ces mots : « Galilée n’a abjuré entre nos mains, ni entre celles de personne à Rome ou’ailleurs, que nous sachions, aucune de ses opinions ou doctrines ; il n’a pas non plus reçu de pénitence salutaire. » — Quand se produisit devant l’Inquisition le procès de 1633, Bellarmin était mort depuis douze ans. « Les jésuites d’alors ont été considérés par Galilée et ses amis, comme les plus actifs promoteurs du procès qui allait s’engager ; mais rien ne justifie cette accusation. L’ardeur bien connue des Pères de la compagnie de Jésus pour la défense des décisions de l’autorité ecclésiastique explique la vivacité que montrèrent quelques-uns d’entre eux, tels que les PP. Grassi, Scheiner et Inchofer ; mais Galilée comptait des partisans parmi les jésuites, comme dans les autres ordres religieux. » J.-B. Jaugey, Diction, apolog., p. 1332.

2° La question préliminaire de savoir s’il n’.y a qu’un seul sens littéral pour un même passage de l’Écriture n’est pas sans influence sur l’exégèse. Du XVe siècle jusqu’à la fin du xviii’, la grande majorité des auteurs s’est prononcée en faveur de la pluralité. Sur ce point les auteurs jésuites se sont divisés. Ont écrit dans le sens de l’opinion commune, pour la pluralité des sens lirté

raux : Bellarmin, De verbo Dei, iii, 3 ; Serarius, Proleg. bibl., xxi, 12 ; Salmeron, Proleg. 8 ; Bonfrère, Præloquia, c. xx, sect. v ; Molina, Valentia, Vasquez, In Sum~ mam D. Thomse, p. 1, q. I, a. 10. — Contre la pluralité : Maldonat, In Isaiam, Lin, 4 ; In Jerem., XXXI, 15 ; Ribera, In Oseam, xi, n. 3-13 ; Pererius, In Genesim i, reg. I 1. C’est l’opinion qui a justement prévalu. Cf. Patrizi, De interpret. bibl., t. I, p. 15-51 ; Cornely, Introd. gêner, in S. S., 1. 1, n° 198.

3° D’une façon générale, on peut dire que, tout en restant conservatrice, l’exégèse des jésuites a su s’inspirer d’un principe de saint Augustin, souvent répété par saint Thomas : à savoir que l’intelligence du texte biblique doit profiter de tous les progrès que réalise la science humaine. De ce chef, elle a été sur plus d’un point initiatrice.

C’est ce qu’on remarque par exemple dans l’histoire des diverses interprétations de l’hexaméron de Moïse. Les quatre règles dont, au xvie siècle, Pererius, S. J., faisait précéder son commentaire sur la Genèse, sont d’une conception à la fois ferme et large, et elles gardent aujourd’hui encore toute leur valeur. Cf. Fr. de Hummelauer, In Gènes., 1895, p. 57. En s’inspirant des mêmes règles trois siècles plus tard, le P. Pianciani, S. J., pourra sur ce terrain engager exégèse catholique dans une voie toute nouvelle. In historiam creationis mosaicam commentatio, Naples, 1851 ; Cosmogonia naturale comparata col Genesi, Rome, 1862.

V. LES PREMIERS PROFESSEURS D’ÉCRITURE SAINTE.

— L’historien de la compagnie de Jésus, Orlandini, Hist. soc. Jesu, nous a gardé les noms de quelques-uns de ceux qui à l’origine professèrent avec un certain éclat le cours ordinaire d’Écriture Sainte dans les universités ou les collèges des jésuites. Les’noms de ces pionniers peuvent prendre place dans un dictionnaire de la Bible. Déjà en 1537, au lendemain de leur arrivée à Rome, le pape Paul III avait chargé le bienheureux Pierre Le Fèvre d’enseigner l’Écriture Sainte à l’université romaine de la Sapience, tandis que Jacques Lainez recevait la chaire de théologie scolastique. Ils y restèrent deux ans. Hist. soc. Jesu, part. i, t. ii, n » 33. En 1548, le P.Jérôme Nadal professa l’hébreu au collège de Messine ; le P. André Frusy, un Français, ne tarda pas à lui succéder (t. VIII, n° 13). Le même devint en 1553 professeur d’Jicriture Sainte au Collège romain (t. XIII, n » 2). En 1556, le P. Jean Covillon, de Lille, explique les Psaumes à l’université d’Ingolstadt (t. XVI, 23, 24). Ch. H. Verdière, S. J., L’université d’ingoldstadt, 2 in-8°, Pans, 1887. La même année, le P. Robert Claysson est professeur au collège de Billom (Auvergne) (t. XVI, n°37). En 1552, aux débuts mêmes du collège de Naples, le P. Pelten y enseigne le grec et l’hébreu. En 1576, au collège de Pont-à-Mousson, le P. Toussaint Roussel, remplacé l’année suivante par le P. Sager, explique pendant trois ans l’Épitre aux Romains, 1577-1579. Voir Eug. Martin, L’université de Pont-à-Mousson, 15721168, in-8°, Paris, 189-1, p. 340-341. Nous ne serions ni complet ni juste, si, aux noms de ceux qui ont péniblement ouvert parmi nous le sillon des études bibliques, nous n’ajoutions pas le nom du cinquième général de la compagnie, Claude Aquaviva, qui fut l’inspirateur intelligent et infatigable de toutes les entreprises qui ont honoré les jésuites au cours des vingt-cinq dernières années du xvie siècle. C’est par son ordre que fui exécutée l’édition princeps des œuvres de Maldonat et de Salmeron ; et c’est encore à ses soins que nous devons le Ratio studiorum dont il va être question. Il semble d’ailleurs que ses connaissances personnelsel lui aient permis d’imprimer avec compétence une direction aux travaux scripturaires. Une circonstance de la vie de Salmeron le donne à penser. « C’était une véritable intimité, qui unissait Salmeron à Aquaviva. Salmeron avait besoin du Nouveau Testament grec III. - 45