Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome III.djvu/560

Cette page n’a pas encore été corrigée
1073
1074
JACOB


tous ses enfants. Son discours est un testament en même temps qu’une prophétie. En vertu de sa puissance patriarcale, Israël dépouille Ruben de son droit de primogéniture parce qu’il a, lui, « son aine et sa force, » violé les lois les plus saintes de la famille et outragé son père dans ce que l’honneur paternel a de plus délicat. Gen., xlix, 3-4. Il punit aussi Siméon et Lévi pour avoir, au mépris de l’autorité paternelle, ravagé Sichem .par le meurtre et le pillage, ꝟ. 5-7. Ce n’est pas à eux que sera transféré le droit d’aînesse enlevé à Ruben quoiqu’ils viennent immédiatement après lui dans l’ordre de la naissance. Si Jacob avait suhi seulement le mouvement de son cœur, on peut penser que c’est Joseph qu’il aurait mis à la tête de ses frères, mais le saint vieillard parle et agit en ce moment sous l’inspiration de Dieu, et c’est Juda, placé par sa naissance après les trois premiers, qui recevra la primauté dont ils ne se sont pas montrés dignes ; c’est lui qui doit avoir la gloire de compter le Messie dans sa postérité et de préparer la venue de ce Roi par l’autorité royale dévolue à ses descendants, ꝟ. 8-12. Son discours fini, Jacob ordonna à ses enfants de l’ensevelir à Hébron, dans le tombeau où reposaient ses pères, ainsi que Lia son épouse ; puis il s’étendit sur sa couche et mourut. Joseph donna les plus vives marques de douleur en voyant son père mort ; toute l’Egypte s’associa à son deuil et pleura Jacob soixante-dix jours. Il le fit embaumer par ses médecins et, à l’expiration du deuil, il alla, accompagné de ses frères et des gens de sa maison et suivi d’un nombreux cortège, conduire le corps du patriarche dans la terre de Chanaan. Le convoi s’arrêta en chemin à l’aire d’Atad, au delà du Jourdain, où l’on célébra pendant sept jours des funérailles avec de grandes lamentations, après quoi on vint à Hébron où le cercueil de Jacob fut placé, comme il l’avait prescrit, dans la caverne double achetée autrefois par Abraham à Ephron l’Héthéen. Gen., xlix, 29 ; l, 13.

VI. Vertus de Jacob.

Jacob a été l’objet d’accusations injustes : on a dénaturé ses actes en lm prêtant dans tout ce qu’il a fait des intentions mauvaises et des vues égoïstes, ou bien on a exagéré la gravité des fautes dont il s’est réellement rendu coupable, telles que ses mensonges réitérés, Gen., xxvii, 19, 24 ; son affection trop marquée pour Rachel, xxix, 31, et pour Joseph, xxxvii, 3-4, les procédés dont il usa à l’égard de son frère Ésau et de son oncle Laban. Plus faible qu’eux, il triompha de l’un et de l’autre par la ruse. Si les moyens qu’il employa pour réussir ne furent pas tous irréprochables, il ne faut pas néanmoins, pour le juger, oublier que ceux au milieu de qui ils vivaient n’appréciaient pas moins l’astuce que la force, et que, si^ tout n’est pas à louer dans sa vie, le bien l’emporte de beaucoup sur le mal. L’Esprit-Saint lui-même, qui nous fait connaître ces fautes, rend témoignage à la sainteté du patriarche : l’Écriture l’appelle juste, Sap., x, 10 ; elle l’associe à Abraham et à Isaac dans toutes les louanges qu’elle donne aux ancêtres du peuple juif, et Notre-Seigneur nous le montre à côté d’eux dans le royaume des cieux. Matth., viii, 11. Son histoire nous apprend combien il méritait ces éloges et cette récompense par ses vertus si éprouvées, qui firent de lui le digne fils d’Abraham et d’Isaac. Comme eux, il donna, selon les circonstances, l’exemple d’une foi vive, d’un profond esprit de religion, d’une obéissance prompte et parfaite aux ordres de Dieu^ d’une persévérante confiance en lui, accompagnée de l’humble sentiment de sa propre misère. Gen., xxxii, 9-12. Il mérita que son double nom de Jacob et d’Israël devint le nom même du peuple de Dieu dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament, et que le vrai Dieu s’appelât le Dieu de Jacob, comme le Dieu d’Isaac et le Dieu d’Abraham. E. Palis.

2. JACOB, nom donné au peuple issu de Jacob. Ce

peuple est le plus souvent appelé Israël ou Benê Ièra’êl, « enfants d’Israël, » voir Israël 2, col. 995 ; mais il est aussi désigné par le nom de Jacob, spécialement dans les parties poétiques de l’Écriture, dans les Psaumes et dans les prophètes, où il est Qtoployé dans le parallélisme comme synonjme d’Israël. Gen., xlix, 7 ; Num., xxiii, 7, 10, 21, 23 ; xxiv, 5, 17, 18-19 ; Ps. xiii, 7 ; cxiii, 1 ; Is., xxvii, 6 ; Jer., ii, 4, etc. Tantôt il est nommé Jacob sans aucune addition, Deut., xxxii, 9 ; xxxiii, 10 ; Ps. XLHI, 5 ; Is., lix, 20 ; Jer., x, 25 ; xxxi, 11 ; Lam., Il, 3 ; Ainos, VI, 8 ; vii, 2 ; viii, 7 ; Rom., XI, 26 ; tantôt « maison de Jacob », Exod., xix, 3 ; Is., ii, 5, 6 ; viii, 17 ; xxvii, 9 ; Amos, iii, 13 ; ix, 8 ; Mich., ii, 7 ; Abd., 17, 18 ; « fils de Jacob, » III Reg., xviii, 31 ; Mal., iii, 6 ; « race de Jacob, » semen Jacob, Is., xlv, 19 ; Jer., xxxiii, 26 ; « assemblée de Jacob » (hébreu : qehillât Ya’aqôb ; Vulgate : multitudo Jacob). Deut., xxxiii, 4. — De même que le nom d’Israël, le nom de Jacob sert quelquefois à désigner le royaume schismatique des dix tribus. Is., ix, 8 ; xvii, 4 ; Ose., x, 11 ; xii, 2 ; Mich., i, 5. — Plus tard, lorsque le royaume d’Israël eut été détruit, le royaume de Juda fut désigné aussi quelquefois sous le nom de Jacob. Nahum, ii, 2. — Dans plusieurs passages des Livres Saints, le nom de Jacob, employé dans son acception ethnique, est considéré comme celui d’un individu : « Jacob, mon serviteur. » Is., xliv, 1 ; xlv, 4 ; XLvm, 20 ; Jer., xxx, 10 ; xlvi, 27, 28. Voir A. Ishâni, /aco6 and liræl, Ephraim and Juda ; or the discrinnnative use of thèse titles, in-12, Londres, 1854.

Le nom de Jacob semble avoir désigné sa postérité même avant l’époque de Moïse. On trouve du moins sur les trois listes de villes soumises par Thotmès III (voir A. Mariette, Karnak, in-f », Leipzig, 1875, pl. 17, 18, 19, n° 102) et représentées sur les pylônes du temple de Karnak, un nom de ville (le cent deuxième), qui es-t

écrit : À 1 A. i Iâ-q-ba-â-r (ou l), nom qui correspond probablement à l’hébreu bx-apy », Jacob-el, et semble la transcription égyptienne du nom hébreu Ya’âqôb, avec l’addition du nom de Dieu’El, ce qui fait du nom du patriarche un nom théophore comme tant d’autres que nous lisons dans l’Écriture, Ismæl, Samuel, etc. Cette forme complète du nom de Jacob se retrouve en assyrien, Yâqub-ilu, sur des contracts de l’époque d’Hammurabi, roi de Babylone, qui vivait probablement du temps d’Abraham (voir Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1. 1, p. 493). Cf. Fritz Hommel, Die Allisræhtische Ueberheferung, in-8°, Munich, 1897, p. 95, 203 ; A. H. Sayce, The Higher Critxcism and the Verdict of the Monuments, in-8°, Londres, 1894, p. 337-339 ; Ed. Meyer, Der Stamm Jakob, dans la Zeitschrift fur die alttestamentliche Wissensschaft, t. vi, 1886, p. 2-16 ; W. Max Muller, Asien und Europanach altagyptischen Denkmàler, in-8°, Leipzig, 1893, p. 162-165.

Iaqobel, dans les listes de Karnak, désigne une ville de la terre de Chanaan, située vraisemblablement dans la Palestine centrale, et l’on peut supposer, d’après son nom, qu’elle était habitée par des descendants de Jacob, de même que Josepal ou Joséphel, autre ville mentionnée sur les mêmes listes, aurait été habitée par des descendants de Joseph, pendant que le gros de la nation israélite était encore en Egypte. Le premier livre des Parahpomènes, vil, 21-24, rapporte que des descendants de Joseph avaient fait des incursions en Palestine avant la sortie d’Egypte. — Voir W. N. Groff, Lettre à M. Revillout sur le nom de Jacob et de Joseph en égyptien, in-4°, Paris, 1885, p. 5 ; F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 5e édit., t. iv, p. 373.

3. JACOB, nom, dans la Vulgate, I Mach., viii, 17, du grand-père d’Eupoleme que Judas MachaLée envoya