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ITALIENNES (VERSIONS) DE LA BIBLE


autre d’Isaïe et, en 1859-1860, du Pentateuque. Cependant, il était loin, lorsqu’il mourut, d’avoir achevé sa version. Mais comme plusieurs livres étaient plus ou moins prêts, quelques-uns de ses disciples et de ses collaborateurs résolurent de terminer son œuvre et de donner an public l’Ancien Testament en entier. Il fut publié en effet, en quatre volumes, de 1868 à 1875 : La Sacra Bibbia volgarizzata da Samuele Vavide Luzzalo e continuatori, Royigo. Le quatrième Volume contient des préfaces sur ces différents traducteurs. La version du Fentateuque et des Juges est de Luzzatto ; les livres de Samuel ont été achevés par A. Mains ter, du collège rabbinique de Padoue, et les livrés des Rois, par Eude Lolli, de Goritz, né en 1826, maintenant grand rabbin à Padoue. Le même Lolli corrigea les livres de Jérémie, d'Ézéchiel, de Joël, d’Amos (avec Philoxène Luzzatto), de Zacharie, de Malachie et le premier livre des Chroniques, et fît lui-même la version du second livre des Chroniques et d’Aggée : Mainster revisa aussi la version d’Abacuc, et fit celle de Nahum ; Ehrenreich termina les versions d’Osée et Michée (avec Pardo) et fit celles de Daniel, d’Esdras et de NéhémiejViterbi traduisit Sophonie et les Proverbes ; Mortara (né en 1815, mort rabbin majeur à Mantoue) revisa les Psaumes ; Foa traduisit le 'Cantique. — La version est divisée en chapitres et en versets, sans aucune explication historique, ou autre, qui aide le lecteur à pénétrer le sens des auteurs sacrés. Seulement, là où il est nécessaire, au milieu du texte, des mots entre parenthèses carrées ou rondes expliquent les hébraïsmes ou les incertitudes du sens littéral. La langue et le style en sont durs et sans élégance ; la version paraît plus occupée de rendre l’expression de l’hébreu, que de l’adapter au génie du langage italien. Pour ces motifs, cette traduction n’a pas franchi les frontières du judaïsme, et elle est inconnue des catholiques. Cependant c’est un ouvrage d’assez grand mérite. 3° Il suffira de mentionner ici quelques autres versions publiées pendant le xix° siècle par des juifs en Italie : une version des Psaumes (Vienne, 1845), du rabbin Lelio délia Torre, né à Cuneo en 1805, mort à Padoue en 1871 ; une autre, en 1874, par le rabbin Jacob Rakkach avec commentaire ; une version de Job et des Lamentations (1874-1875), par Benjamin Consolo ; du Cantique, avec commentaire, de Noftama Cheleni, en 1873 ; du Cantique et des Lamentations par G. Barzilai ; la Prière d’Habacuc par Vito Anau (Ancône, 1883).

111. YBRSIONS D’VGDULENA, DE CVRCl ET DE CASTELLl. — 1° Grégoire Ugdulena naquit à Termini de Sicile, en 1815. Dès sa première enfance, il s’adonna à l'étude des ilangues classiques, et particulièrement du grec où il fit 'd'étonnants progrès. Il prit ensuite les ordres sacrés et entra dans l’enseignement. En 1843, il obtint, par son mérite en littérature biblique, la chaire d’hébreu et d’herméneutique à l’Université de Palerme, mais il la perdit à la suite des événements politiques de 1848-1849, auxquels il prit une part assez considérable. Rentré alors dans la vie privée, en 1850, il commença une nouvelle version de la Bible, faite directement sur les textes .originaux, et accompagnée d’introductions et de commentaires. Le premier volume parut en 1859, et contenait le Pentateuque. En 1850, il obtint de nouveau sa chaire à l’Université, prit une part active à la vie politique ; il fut ministre de l’Instruction publique en Sicile 'et député au parlement italien. En 1862, il publia le .second volume de sa version, contenant les livres des Rois. En 1865, il fut élu professeur de grec à l’Institut d'études supérieures de Florence, et, en 1870, de grec et d’hébreu à l’Université de Rome, où il mourut en juillet 1871. La version de la Bible en resta là, comme un remarquable fragment scientifique et littéraire ; l’auteur était très compétent, soit comme traducteur italien, soit pour la connaissance des langues sacrées et du mouve# ment scientifique-biblique en Allemagne. Le célèbre

Manzoni et le pape Pie IX étaient des admirateurs du travail du professeur sicilien, à présent presque oublié, parce qu’il est resté incomplet. A. de Gubernatis, Matériaux, p. 169 ; I. Cari iii, Di Gregorio Ugdulenae délie sue opère, Palerme, 1872.

2° Une série de versions fut entreprise plus tard par Charles-Marie Curci, Napolitain. Il naquit en 1809, et en. 1826 entra dans la compagnie de Jésus ; il en sortit plusieurs années après, jouissant déjà d’une grande célébrité en Italie, et s’adonna aux études politiques. Dans les dernières années de sa vie, il s’occupa activement d'études bibliques. En 1873, il publia à Florence un petit volume, contenant la version des Évangiles avec quelques notes, dont il se vendit en Italie, et surtout en Toscane, près de trente mille exemplaires. Ensuite, il fit dans des églises de Florence un cours exégétique sur le Nouveau Testament (de 1894 à 1896), et traduisit quelques autres livres de l’Ancien, qu’il publia successivement. Le Nouveau Testament parut à Naples en 1879-1880. En 1883, il donna aussi une version des Psaumes, d’après le texte hébreu : Jl N. T. volgarizzato ed esposto in note esegetichee morali, Naples, 18791880, avec des longues introductions et des notes plus longues encore : 3 in-4°. — Les Lezioni esegetichee morali sopra i quatlro Evangeli sont un ouvrage distinct (en 5 in-8°), mais le même pour le fond. — Le virtù domestiche ossia il libro di Tobia esposto in 18 lezioni, Florence, 1877 ; cet ouvrage fut réimprimé avec l’exposition du récit de la Genèse touchant Giuseppe in Egitto. — Ces travaux ont été encore publiés à Turin par YVnione tipografica éditrice : — Il Sallerio volgarizzato dall' ebreo ed esposto in note esegetichee morali, Rome, 1883. Les travaux et les leçons de Curci eurent beaucoup de succès pendant la vie de l’auteur, mais en réalité leur valeur est bien médiocre. L’auteur a certainement connu les travaux critiques sur la Bible et particulièrement sur le Nouveau Testament ; mais, comme il avait abordé ce genre d'études dans un âge déjà avancé, il n’avait pas acquis une véritable compétence. Il a fait de la science biblique en prédicateur, plutôt qu’en savant. La critique textuelle et historique est faible. Le texte italien de ses versions est dur, sans élégance, quelquefois trop concis, d’autres fois trop diffus. Dans les Psaumes, il a montré qu’il connaissait imparfaitement l’hébreu, et la traduction même, qui prétend rendre le rythme hébreu, est assez barbare.

3° Il reste à parler d’un hébraïsant, juif de naissance, , le professeur David Castelli, mort le 13 janvier 1901. Il était né à Livourne, le 30 décembre 1836. Son père, très instruit, lui donna dès sa plus tendre enfance le goût de la langue sacrée, qu’ensuite il étudia à fond sous la direction du rabbin Piperno qui possédait une solide connaissance de l’hébreu biblique, targumique et talmudique, et fut l’auteur d’une partie (lettre M) de YEncyclopêdie talmudique publiée par Isaac Lampronti (xvii «-xviiie siècles). Cependant le R. Pipêrno n'était pas un philologue dans le sens moderne du mot ; et D. Castelli dut lui-même se former à la méthode scientifique par des études personnelles. En 1863, il alla s'établir à Pise, ou il fut nommé chancelier de l’Université juive et se donna à l’enseignement particulier de la philosophie et des langues classiques. En 1876, il fut désigné pour la chaire d’hébreu à l’Institut d'études supérieures à Florence, où il resta jusqu'à sa mort. On lui doit une version de l’Ecclésiaste (1866), du livre de Job (1897), dn Cantique des cantiques (1892), avec introductions critiques et notes. Dans ses volumes sur la poésie biblique (1878), la prophétie dans la Bible (1882), la loi du peuple juif et son développement historique (1887), il y a aussi de nombreux passages traduits de différents livres de la Bible. Castelli était un rationaliste de l'école d’Ewald, Wellhausen, Nowack, etc. Très bon écrivain de langue italienne, ce qui est rare parmi ceux qui sont nés juifs,