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ISRAËL (PEUPLE ET ROYAUME D’)


la sainteté sur toute la terre. Exod., xix, 5, 6 ; Rom., iii, 1-2 ; Heb., i, 1. De lui enfin devait sortir le sauveur du genre humain. Joa., iv, 22 ; Rom., îx, 5. Cf. Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, t. i., p. 110-112. Mais, hélas ! Israël ne se montra pas toujours digne de sa vocation divine, et Dieu dut intervenir constamment dans son histoire pour lui faire remplir sa mission. Cette mission religieuse met Israël hors de pair et le rend supérieur aux Égyptiens et aux Assyriens en influence sur la véritable civilisation.

IV. Son histoire.

Nous ne donnerons ici qu’un aperçu sommaire de l’histoire du peuple d’Israël. Pour les détails, voir les articles spéciaux ; pour la chronologie, voir t. ii, col. 727-734. On peut diviser l’histoire du peuple d’Israël en trois périodes : la première, d’Abraham à Moïse, pendant laquelle il se forme et devient une nation ; la seconde, de Moïse à la captivité, pendant laquelle il a une existence indépendante ; la troisième, de la captivité à la ruine de Jérusalem, pendant laquelle il est plus ou moins asservi aux grands empires païens.

1°> période. — D’Abraham à Moïse. — L’histoire des patriarches est le prélude de l’histoire d’Israël ; elle est la préparation de ce peuple à part, soit par la migration d’Abraham loin de son pays et de sa famille, soit par l’isolement dans lequel Abraham, Isaac et Jacob vivent au milieu des populations chananéennes, soit par l’élimination des branches secondaires, Moabites, Ammonites, Ismaélites, Édomités. Ces patriarches et leur famille ont passé, au pays de Chanaan, comme des étrangers et des nomades, jusqu’au jour où la famine obligea Jacob à descendre en Egypte auprès de Joseph, son fils, devenu providentiellement le premier ministre du pharaon Apapi II. Établis dans la terre de Gessen (voir ce mot, col. 218-221), les enfants de Jacob y demeurèrent quatre cent trente ans, Exod., xii, 40, d’abord favorisés par la dynastie des rois pasteurs qui se souvenait de Joseph, puis laissés en paix par les rois indigènes de la xviiie dynastie, enfin persécutés, à l’avènement de la XIXe dynastie, par un roi qui ne connaissait pas Joseph. Exod., i, 8. Les fils d’Israël s’étaient multipliés sur la terre étrangère et étaient devenus un grand peuple. Exod., i, 7. Parce que leur nombre l’inquiétait, le pharaon, probablement Ramsès II, voulut les empêcher de croître encore, d’abord en leur imposant des corvées extraordinaires, puis en faisant périr à leur naissance tous leurs enfants mâles. Ces mesures de persécution’n’empêchèrent pas les enfants d’Israël de se multiplier. Exod., i, 8-22. Le séjour en Egypte eut pour Israël d’importantes conséquences. Il contribua à le protéger contre le danger de l’idolâtrie et à maintenir en lui la vraie foi en raison de son isolement au milieu des Égyptiens et de l’aversion que la population indigène avait pour lui. Il servit aussi à faire son éducation politique, à changer ses habitudes non « K des en celles de la vie sédentaire, à lui apprendre là cul-’ture des terres, à l’initier aux sciences et aux arts et à lui &ire connaître la constitution d’un État organise.-Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, t. i, p. 114-115 ; 179-181, 188-192.

2> période. — De Moïse à la captivité. — 1. Pour arracher son peuple à l’oppression des Égyptiens, Dieu suscita en Moïse un libérateur, un chef et un législateur. Sauvé des eaux du Nil, élevé à la/cour même du roi d’Egypte, ce sauveur se préparait à la mission qui devait lui être confiée. Dieu se révéla à lui et le chargea de tirer son peuple de l’Egypte. Par une série de châtiments divins, Moïse amena le pharaon à consentir au départ des Israélites. Voir Moïse. Ceux-ci étaient alors au nombre d’environ six cent mille, sans compter lés enfants. Une foule d’étrangers se joignit encore à eux. Exod., xii, 37, 38. La sortie d’Egypte a une importance capitale dans l’histoire d’Israël ; elle est pour ainsi dire le jour de sa naissance comme peuple de Dieu. Il était sons le joug pesant du pharaon ; Dieu l’en affranchit et acquit

par là sur lui un véritable droit de propriété. Exod., vi, 6, 7. Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, 1 i, p. 183203. La date de cet événement important est fixée, selon l’opinion la plus accréditée, au régne de Ménephtah I er, et elle est confirmée par le témoignage d’une inscription triomphale de ce roi, dans laquelle les Israélites sont mentionnés pour la première fois sur un monument égyptien. Leur nom y figure dans cette phrase : « Ceux A’hraîlou sont arrachés, il n’y en a plus de graine. » Israîlou est l’équivalent exact, en caractères hiéroglyphiques, de l’Israël biblique, car il n’y a aucune vraisemblance que ce soit un autre Israël. Ce texte si laconique atteste au moins deux faits, l’existence d’une tribu d’Israllou et une défaite que cette tribu aurait subie. A le prendre à la lettre, il. s’agirait d’une extermination complète, puisque Israël « n’a plus de graine ». Mais l’exagération habituelle de ces sortes d’inscriptions autorise à réduire de beaucoup la métaphore royale. On peut y voir une allusion à la tentative que Ménephtah fit d’anéantir en Egypte les enfants d’Israël. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, ^’édit., Paris, 1896, t. IV, p. 682-683. Maspero, dans le Journal des Débats, 14 juin 1896, et Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, Paris, 1898, p. 444, propose deux hypothèses. L’ordre dans lequel les Isratlou sont cités au milieu des autres peuples vaincus indique qu’ils habitaient alors au sud de là Syrie, peut-être au voisinage d’Ascalon et de Gazer. On peut donc supposer qu’ils venaient à peine de quitter l’Egypte et de commencer leurs courses errantes. Mais il ajoute qu’on pourrait aussi reconnaître en eux un clan resté au pays de Chanaan, alors que le gros de la nation avait émigré sur les rives du Nil. Toutefois, il n’est guère probable qu’une partie des tribus israélites soit demeurée en Chanaan malgré la famine. Il y a plutôt une allusion à l’exode. Ayant quitté l’Egypte, les Israélites n’existaient plus pour Ménephtah ; ils avaient disparu avec leurs femmes, leurs enfants, leurs troupeaux, ne laissant ainsi derrière eux aucune postérité, ou mieux peut-être, ils avaient abandonné leurs récoltes ravagées, ils n’avaient plus de blés. Cf. Bulletin critique, 2 « série, t> iii, 1897, p. 203, 204 ; Bévue d’histoire’et de littérature religieuses, t. ii, 1897, p. 561, 562 ; Revue biblique, t. v, 1896, p. 467, 468 ; t. viii, 1899, p. 267-277.

Parti de Ramessés et de Phithom, Moïse dirigea d’abord sa nombreuse caravane d’Israélites vers la terre de Chanaan. Mais à Étham (voir t. ii, col. 2002, 2003), il prit, sur l’ordre de Dieu, la direction du sud et conduisit le peuple, dont.il était le guide et le chef, sur les bords de la mer Rouge. Exod., xiii, 17, 18. Dieu voulait enlever aux Israélites toute possibilité de retourner en Egypte, en même temps que les préparer dans la presqu’île du Sinaï à se constituer en peuple. C’est aux pieds du Sinaï qu’il promulgua’laloi-religieuse et morale, qui devait en faire son peuple, et qu’il conclut avec eux une alliance perpétuelle. Exod.’, xix-xxxi. La révolte survenue à Cadèsbarnc fut châtiée par un séjour de trente-huit années dans le désert. Num., xiv. Quand la génération des rebelles eut disparu, le peuple réuni marcha vers le pays de Chanaan, dont il devait faire progressivement la conquête. Après avoir conquis par la guerre le droit de passage, Num., xx-xxxii, il accomplit, sous la conduite de Josué, le successeur de Moïse, la conquête et le partage de la terre promise par Dieu à ses ancêtres. L’alliance, conclue avec Dieu au Sinaï, fut renouvelée à Sichem. Jos., xxiv, 1-28. Une fois en possession du pays de Chanaan, Israël jouit complètement de son autonomie politique et nationale. Voir Josué.

2° D’étrangers et dé nomades qu’ils avaient été auparavant, devenus enfin sédentaires, les Israélites vécurent sous le régime patriarcal, restant indépendants les uns des autres, sans autre chef ordinaire que les chefs de famille et les chefs de tribu, et sans autre lien commun