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ISAIE (LE LIVRE D’)


anciennes : les Septante et la Peschito d’abord qui sont les versions les plus appréciées ; la version copte, l’éthiopienne, l’arménienne, la géorgienne, l’arabe. Ce fait, sur lequel il est inutile d’insister, prouve que le Livre d’Isaïe fut reçu dans toutes les Églises sans aucune contestation ; — 2° Ses nombreuses citations dans le Nouveau Testament ; nous les avons déjà éniimérées ; qu’il nous suffise de dire qu’il n’y a pas probablement de livre de l’Ancien Testament qui ait été plus cité dans le Nouveau que celui d’Isaïe. — 3e L’autorité des Pères : les Pères attestent la canonicité du livre d’Isaïe de deux façons : a) en le citant : Isaïe est très souvent cité par les Pères de l’Église ; nous ne pouvons pas avoir la prétention de rapporter toutes ces citations, parce que le travail n’en finirait pas ; qu’il nous suffise d’en rapporter quelques-unes, choisies principalement dans les Pères les plus anciens. D’abord les Pères apostoliques : saint Clément de Rome cite Isaïe, lxvi, 2 1 " : « mais qui regarderai-je, sinon le pauvre, celui qui a le cœur brisé et qui craint ma parole ? » I Cor., xiii, 4, Patrum apostolicorum opéra, ’édit. Oscar de Gebhardt et Ad. Hafnack, in-8 « , Leipzig, 1900, p. 8 ; le même Père cite aussi un long passage, Is., lui, 1-12 ; I Cor., xvi, 3-14, p. 9-10. L’Épître de saint Barnabe cite dans un seul chapitre trois fois Isaïe : l, 8, 9 ; xxviii, 16 ; l, 7, Epist., VI, 1-3 ; ibid., p. 51. Saint Ignace d’Antioche fait une évidente allusion à Is v v, 26, lorsqu’il dit de Notre-Seigneur : "va açi-i) a’jaar t).rri etçtoù ; a’.wva ; xrt. Smyrn., i, 2 ; ibid., p, 107. — Saint Irénée cite Is., viii, 3, Adv. hær., iii, 16, 4, t. vii, col. 923 ; il cite aussi Is., VIII, 4, col. 924 ; il cite également Is., iii, 1, c. xviii, n. 3, col. 931. De saint Justin nous ne mentionnerons que les citations qu’il fait d’Is., vii, 14, Apol., i, n. 33, t. vi, col. 381 ; d’Is., ix, 6, et lviii, 2 ; lxv, 2, ibid., n. 35, col. 384. Tertullien ne cesse de citer Isaïe ; cf. particulièrement, Cont, Marc, iii, 21, 22, 23, t. ii, col. 351355 ; iv, 1, col. 361-362 ; v, *4, col. 475-480. Pour les nombreuses citations d’Isaïe par les Pères, voir les notes de Kilber, Analysis biblica, édit. Tailhan, Paris, 1856, t. i, p. 349-394 ; — b) en le commentant ; beaucoup de Pères ont écrit des commentaires sur Isaïe, comme pn peut le voir à la Bibliographie.

X. Texte dd livre d’Isaïe. — 1° Texte original. — Le texte original des prophéties d’Isaïe est l’hébreu. Le texte hébreu, tel que neusj’avons aujourd’hui, ne paraît pas avoir subi de graves altérations. Cependant, en comparant notre texte massorétique actuel avec la traduction des Septante, on constate qu’à certains endroits il a été altéré et qu’il y aurait un certain nombre de corrections à faire. En nous aidant des travaux de critique textuelle modernes, nous signalerons les plus importantes : ix, 10 (héb.) ; èârê, « princes, » au lieu de sârê, « ennemis ; »

x, 4 : bêlfi kora’af ha(’asîr, « Beltis est humiliée, Osiris est terrifié, » au lieu de bîlfi kàra’(ahaf’asîr, « pour n’être pas accablés sous les chaînes ; » — xi, 15 : héfrérib, « dévaster, » au lieu de héhérîm, « anathématiser ; » Septante : ipruiûcret ; Peschito : nehreb, « dévaster ; » Vulgate : desolabit ; — xiii, 22 : be-’aremenôtàv, « dans ses palais, » au lieu de be-’alemenô(av, « dans ses veuves ; » Septante : xaTO’.x^ffoudi ; Peschito : sohorfhôn, « leurs palais ; » Vulgatejira œdibussuis ; Targum : be-bîmî(âhûn ; — xviii, 7° : mê’am, « du peuple, s au lieu de’ani, « peuple ; » Septante : èx Xocoû ; Vulgate : a populo ; Targum : le’ama’;

xxii, 15 : ’êlhaëokên, « pour l’habitant, » au lieu de’él-hasokên, « au trésorier ; » Septante : il ; tô ita(rcoçéptov ; Âquila : irpbç tôv <rxY)voOvToc ; Vulgate : ad eum qui habitat in tabernæi l> ; Targum : lot farnesa’; — xxiii, 13 ; Kena’ânîm, « Chananéens, » au lieu de : KaSdîm, « Chaldéens ; » Septante et Vulgate ont mal traduit : ei « fî v XaXSafwv ; terra Chaldœorum (ꝟ. 11) ; — xxiv, 15 : bâ-’umîm, « dans les nations, » au lieu de bâ-’urîm, « dans les feux ; » — xxxi, 8 ; W, « non, » au Heu de là, « à lui ; » Septante : oùx ; Vulgate : non ; Co dex Babyloniens, édit. Strack : « S ; — uv, 9 : > » >3,

t comme les jours, » au lieu de >o*>3 ; Septante ont mal

traduit : ôrarà toO OSixto ;  ; Peschito : yômt’hy, « les jours ; » Vulgate : sicut in diebus ; Targum : keyûmêy ; — lxvi, 19 : 1313, au lieu de bis ; Septante : *oJ5 ; Vulgate : invfricam ; cf. Strack, Zur Textkritik des lsàias, dans la Zeitschrift fur kath. Théologie, 1877, p. 17 ; Studer, Beitrâge zur Textkritik des Isaias, dans les Jahrb. fur protest. Théologie, 1877 ; Lagarde, Semitica, i, Gœltingue, 1878, p. 1 ; Cheyne, The prophecies of Isaiah, t. ii, Londres, 1881, p. 131, 271 ; Dillman, Der Prophet Jesaia, 5e édit., Leipzig, 1890 ; Kaulen, Einleitung, 3e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1892, p. 362.

Versions.

Comme une grande partie des versions

des Livres Saints, celles d’Isaïe se divisent en deux classes : les unes immédiates, les autres médiates. Les premières ont été faites sur le texte hébreu lui-même ce sont les versions grecques des Septante, d’Aquila, de Théodotion, de Symmaque ; la Peschito syriaque avec sa recension karkaphéenne ; et notre Vulgate actuelle. Les versions médiates ont été faites.sur le texte grec des Septante ; ce sont l’ancienne Itala, les trois versions coptes, memphitique, sahidique ou thébaine, basmuhrique ; les deux araméennes, syro-hexaplaire et philoxénienne ; la version éthiopienne, l’arabe, l’arménienne, la géorgienne, la gothique et la slavonne. On trouvera beaucoup de ces versions dans les Polyglottes de Londres et de Paris. La plupart de ces versions existent en entier ; des versions coptes il ne nous reste que des fragments ; les fragments sahidiques du Musée Borgia à Rome ont été publiés par Ciasca ; Bibliorum Sacrorum fragmenta copto-sahidica Musei Borgiani, 2 in-4°, t. ii, Rome, 1889, p. 219-249.

Langue.

Au sentiment de tous les critiques la

langue d’Isaïe est généralement pure, correcte et élégante. C’est du bel hébreu, de l’hébreu classique si l’on pouvait employer une pareille expression. En dépit des quelques mots très rares qui se ressentent des circonstances, le reste du livre est un modèle au point de vue de la langue.

Style.

Le style d’Isaïe est vraiment admirable et

digne des grands sujets qu’il traite. Un critique a pu dire : « Jamais peut-être un homme n’a parlé un plus beau langage. » L. Seinecke, Der Evangelist des alten Testamentes, ErklârungderWeissagungenJesaias, c.xLlxvi, Leipzig, 1870. Son style présente, en eflet, toutes les qualités qui font les grands écrivains ; il est à la fois élevé, coulant, vif, coloré, et en même temps simple et d’un naturel parfait. C’est à cause de cette clarté de langage que saint Isidore de Péluse a pu dire qu’Isaïe était le plus sage de tous les prophètes : <S ffaçéoratoç, Epist., 1. 1, ep. CCCLXVI, t. lxxviii, col. 389-390. fous les critiques sont du reste d’accord pour reconnaître la beauté littéraire et les charmes du style d’Isaïe. Ce style est à la fois châtié et digne ; le langage est choisi, et en même temps dépouillé de toute affectation ou raideur ; la noblesse, l’éclat et la sublimité semblent le caractériser ; chaque sentence est condensée et persuasive ; les périodes finissent par s’arrondir naturellement ; par exemple, Is., ii, 12-16 ; v, 26-30 ; xi, 1-9. Isaïe tantôt se plaît dans le pittoresque qui frappe et impressionne les masses, xvii, 12-14 ; xxviii, 7-8, 10 ; xxix, 6 ; tantôt il renforce ses idées et ses sentiments par une réelle assonance de mots, v, 7 ; x, 16 ; xvii, 1, 2 ; xxii, 5 ; xxix, 2, 9 ; xxx, 16 ; xxxii, 7, 19 ; son style n’est jamais diffus ; même ses longs discours ne sont jamais prolixes ni monotones ; il sait mettre en relief les points saillants et les présente sous de vives couleurs, v, 8-30 ; vit, 18-25 ; ix, 8-21 ; xix, 16-25. Il possède à merveille l’art d’adapter son langage aux circonstances et d’inculquer à ses auditeurs ce qu’il désire qu’ils comprennent ; c’est ainsi qu’à l’aide de quelques courtes sentences il montre la vanité des