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GALATES (EPITRE AUX)

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avaient des assemblées, où ils mangeaient en commun. Act., ii, 46 ; xx, 7. Or, le Juif et surtout le pharisien ne pouvaient, d’après leur coutume, participer à un repas, où se trouvaient des incirconcis. La conclusion était donc qu’il fallait circoncire les païens convertis. La discussion sur ce point, soulevée à Antioche, fut réglée par le concile de Jérusalem. Les incirconcis furent admis dans la société chrétienne sans être astreints à la circoncision et à l’observance de la loi mosaïque. Mais certains Juifs, surtout parmi les pharisiens, ne désarmèrent pas tout d’abord, et la question, de purement doctrinale, devint personnelle. Ils attaquèrent celui qui représentait cette doctrine de la déchéance de la loi, saint Paul, et le représentèrent comme un apôtre secondaire, un homme qui n’avait aucune autorité, sinon celle qu’il se donnait lui-même. Nous trouvons dans les Actes les faits qui trahissent cette hostilité contre saint Paul et dans la deuxième Épître aux Corinthiens, sinon déjà dans la première, nous voyons saint Paul défendre son autorité apostolique contre les judaïsants. Or, si nous examinons PÉpltre aux Galates, nous constatons que son contenu répond à l’ensemble de ces faits et de ces doctrines. 1. Saint Paul établit son indépendance apostolique, en racontant à sa manière ce qui nous est connu par ailleurs ; en y ajoutant des détails tout personnels, que nous ne connaissons pas par d’autres écrits, ce qu’un faussaire n’aurait pu faire ; en procédant souvent par des allusions, que nous ne comprenons plus, et qui engendrent des difficultés inextricables pour nous, mais très intelligibles pour les lecteurs du temps. Or, à quelle autre époque, sinon du vivant de Paul, était-il nécessaire de démontrer son indépendance apostolique ? et a-t-elle été discutée plus tard ? Tout au contraire. Un grand nombre d’Églises réclamèrent saint Paul comme leur fondateur et bientôt il fut appelé l’apôtre par excellence et réuni à saint Pierre comme un des piliers de l’Église naissante. Si, dans le milieu du IIe siècle, une secte infime, issue du judéo-christianisme, les ébionites, attaqua saint Paul, ce ne fut pas comme apôtre qu’il fut pris à parti, mais comme menteur, imposteur ; ce qui n’est pas du tout le cas des adversaires, dont il est parlé dans l’Épltre aux Galates. — 2. Dans l’Épitre aux Galates on voit que la controverse sur les observances légales, close en principe, renaît sous une forme atténuée ; les Galates se sont laissé persuader que, pour faire partie de la vraie communauté chrétienne ou, tout au moins, pour atteindre à un plus haut degré de perfection, il fallait être circoncis, sinon, on restait dans un état inférieur. C’était bien la manière devoir de certains chrétiens primitifs de Jérusalem, telle qu’elle ressort du récit des Actes. Mais voit-on que, plus tard, c’est-à-dire après leur tentative auprès des chrétiens de Galatie, les Juifs convertis aient voulu imposer là circoncision ? Ce fut leur dernier effort et peu après, à Corinthe, ils n’essayent plus de le faire ; ils attaquent surtout l’autorité de Paul. À quoi donc aurait servi au n » siècle la démonstration, que donne saint Paul, de l’inutilité de la circoncision pour le salut ? C’était une question tranchée depuis longtemps. Aussi, aucun document dé la fin du I er ou du iie siècle ne fait allusion à cette controverse, et l’on voit les païens convertis entrer de plain pied dans la communauté chrétienne. Les ébionites attaquèrent l’enseignement de saint Paul, mais n’essayèrent pas d’imposer la circoncision aux païens convertis. Le contenu de l’Épitre aux Galates s’adapte donc bien aux circonstances historiques et doctrinales du temps de saint Paul et ne répond à aucune des situations historiques postérieures. Donc elle a été écrite par saint Paul, car on ne peut supposer qu’un contemporain ait pu avec succès prendre son nom. Comme confirmation, on pourrait trouver, en comparant cette Épître aux autres lettres de Paul ou anx Actes, des rapports de faits, qui ne s’expliquent pas, si l’auteur n’est pas l’Apôtre. Citons seulement les allusions, que

fait Panl à des souffrances, qu’il a éprouvées en sa chair chez les Galates, IV, 11-16, souffrances, dont il parle aussi aux Corinthiens, II Cor., xii, 7, mais en les mêlant à des idées totalement différentes, ce qui exclut toute idée de copie. Citons encore ce qui est dit de saint Jacques, ch. i et ii, et qui se trouve en parfaite conformité avec ce qu’en disent tes Actes, ch. rv. On trouve, v, 19, une de ces énumérations de péchés et de vertus, qui leur sont opposées, très familières à saint Paul ; Rom., i, 29 ; I Cor., vi, 9 ; II Cor., xii, 20 ; Eph., v, 3, 5, 9 ; Col., iii, 5, 12, etc. — 2° Nous retrouvons dans l’Épitre aux Galates les doctrines des autres Épitres de saint Paul et principalement celles de l’Épitre aux Romains. Les points de contact entre ces deux lettres sont très nombreux ; ils le sont même tellement qu’on a pu soutenir que l’une est, en partie, empruntée à l’autre. Il faut donc reconnaître les rapports étroits q’ii existent entre elles, mais montrer que les arguments, tout en étant les mêmes, sont employés de telle façon, qu’ils prouvent l’identité d’auteur et non des emprunts, faits par un faussaire. Les idées, ainsi que la doctrine à établir, sont identiques, mais ni l’ordre dans lequel elles sont disposées, ni les termes qui les expriment ne sont les mêmes. Il y a rapprochement et non dépendance littéraire. Relevons d’abord les idées exprimées en termes assez rapprochés. On a signalé vingt-quatre ressemblances avec l’Épitre aux Romains ; Gal., iii, 11 ; Rom., iii, 20 ; Gal., iii, 19 ; Rom., v, 20 ; Gal., iii, 23 ; Rom., iii, 18 ; Gal., iii, 27 ; Rom., vi, 3, etc., quatorze avec la première Épttre aux Corinthiens, Gal., i, 8, 9 ; I Cor., xvi, 22 ; Gal., iii, 26 ; I Cor., xii, 13, etc., et onze avec la deuxième Épître aux Corinthiens. Gal., iv, 17 ; II Cor., xi, 2 ; Gal., x, 10 ; II Cor., ii, 3, etc. Ce sont, pour la très grande majorité, des phrases, exprimant, il est vrai, la même idée, ce qui prouve l’identité d’auteur, mais en des termes différents, quoique très rapprochés, ce qui exclut la dépendance littéraire. Citons quelques exemples : Gal., i, 20 : & Se YP^w 6| « v, 150ù êv<iirtov to0 6eo0, ott où ^eûSonou, et Rom., ix, 1 : àlrflzuxv lfu> iv Xpi<rt<S, où’J/eySoiiai, et II Cor., xi, 31 : <5 9eô ; … olSev oti où ij/eOSonai. Ou encore : Gal., iii, 27, oW eW Xpio-rbv à6 « im<rf>Y]Te Xpiutôv ivefiûffaofle, et Rom., xiii, 14, êvS-jaaofle xôv xûpiov’Irjaoviv Xpio-roV Les rapprochements les plus textuels sont les suivants : Gal., iv, 30, àU « t£ Xéysi r| yP « ?*Ij et Rom., iv, 3, xi y « p *i YP a 1°î ^yet ; Gal., i, 11, YvwpiÇio Si û|iîv, &Ht ?oi, tô s0aYY^'O"'> tô eùaYY^’iflèv ûit’èjioO, et I Cor., xv, 1, YVdipiîdi 8s (i[J.ïv, àSe), ço(, to t>orc(é<.ai, h eOaYY^KTaixïiv û|iîv ; Gal., v, 9, (iixpà ïv|M) 8), ov tô çiipapa C’jjjloî, et I Cor., v, 6, oùx opaxe ô’ti (iixpà Ç’V r i ô’Xov tô 9Ûp « |ia Çu(toï. Cf. encore Gal., iii, 6 ; Rom v iv, 3 ; Gal., m, 12 ; Rom., x, 5 ; Gal., v, 14 ; Rom., xiii, 9. Or, ces ressemblances textuelles, bien peu nombreuses, on le voit, ne prouvent pas du tout qu’un faussaire a copié les -Épitres de Paul pour écrire la lettre aux Galates. La première est une formule de citation, la troisième un proverbe et la deuxième une idée très générale, toutes formes, qu’on ne peut s’étonner de retrouver sous la plume de saint Paul à plusieurs reprises. Les autres textes mis en présence sont des citations de l’Ancien Testament. Un faussaire empruntant à saint Paul des passages en aussi grand nombre les aurait copiés plus textuellement et n’aurait pas su les varier ainsi par des formules différentes, quoique reproduisant la même idée. C’est l’Apotre lui-même qui, ayant à exprimer des idées analogues, n’a pas craint de se répéter lui-même mais non servilement. Pourquoi d’ailleurs n’aurait-il pas agi ainsi dans ses différentes lettres lorsqu’on le voit suivre ce procédé dans le cours d’une même lettre ? Cf. Rom., m, 17 ; ix, 4, etc. (consulter les références marginales de l’Épitre aux Romains).

Si maintenant nous étudions la doctrine des deux épîtres dans son ensemble, nous constatons que, des deux côtés, ’il est établi que la circoncision est inutile