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GALATES (ÉPITRE AUX)

conférence de Jérusalem (Cornely, Hausrath, Pfleiderer) ; à Antioche (Renan, Ramsay) ; à Éphèse, pendant le troisième voyage missionnaire (Meyer, Reuss, Holtzmann, Lipsius) ; à Corinthe, après son séjour de trois ans à Éphèse (Bleek, Lightfoot) ; à Rome (saint Jérôme, Schrader). Établissons d’abord les faits auxquels doit satisfaire une solution du problème. L’Épître a dû être écrite après le concile de Jérusalem, puisque, de l’aveu de presque tous les critiques, le voyage à Jérusalem et les entretiens de Paul avec les chrétiens de cette ville et les apôtres, Gal., ii, 1-10, doivent être identifiés, avec le voyage de Paul, raconté au ch. XV des Actes. En outre, elle a été écrite après une seconde visite aux Églises de Galatie, car saint Paul dit à ses lecteurs : Vous savez que je vous ai pour la première fois annoncé l’Évangile à cause d’une infirmité de la chair, IV, 13 ; ce qui suppose que l’apôtre a visité ces Églises au moins une seconde fois. Il est vrai que πρότερον ne signifie pas nécessairement une première fois, mais peut être traduit par : auparavant, antérieurement. Cependant, qu’il y ait eu une seconde visite aux Églises de Galatie avant l’envoi de l’Épître, cela ressort assez nettement du ch. i, 8, fi : « Mais quand nous-même, quand un ange du ciel annoncerait un autre Évangile que celui que nous vous avons prêché, qu’il soit anathème ! Comme nous l’avons dit précédemment et maintenant je le dis de nouveau : si quelqu’un vous annonce un autre Évangile que celui que vous avez reçu, qu’il soit anathème. » Il est impossible que ces mots, comme nous l’avons dit précédemment, se rapportent à ce qui vient d’être dit, que ce soit une simple répétition. Ils font allusion à une parole prononcée, lors d’une visite aux Églises évangélisées. Or, elles n’ont pu être dites lors de la première évangélisation, car, à cette époque, il n’y avait pas lieu de prémunir les convertis contre un autre Évangile qui leur aurait été prêché. En outre, la lettre fut écrite peu de temps après cette seconde visite, car saint Paul exprime aux Galates son étonnement de ce qu’ils se sont détournés aussi promptement de celui qui les a appelés par la grâce du Christ, i, 6. Le terme ταχέως est, il est vrai, assez vague, mais cependant ne permet pas de supposer un trop grand espace de temps entre la conversion des Galates et leur défection. À quel moment eut donc lieu cette seconde visite aux Églises de Galatie ? Pour les uns la seconde visite est celle dont il est parlé au ch. xvi, 6, des Actes. L’évangélisation du pays est racontée aux ch. xiii et xiv. Paul aurait donc écrit sa lettre pendant, son deuxième voyage missionnaire ; à quel moment précis et en quel lieu, il est difficile de le dire exactement. Le P. Cornely, Comm. in Gal., p. 368, pense qu’elle a pu être écrite à Troade, où Paul aurait appris par Luc les menées des judaïsants et les succès de leur prédication chez les Galates. L’Épître aux Galates aurait donc été la première en date des lettres de saint Paul. Cependant, pour rester, en accord avec les Pères et les critiques catholiques, qui placent en première ligne les Épîtres aux Thessaloniciens, il suppose que l’Épître aux Galates a été écrite à Corinthe vers l’an 53. Il pense même que le porteur de la lettre fut Silas, le compagnon de saint Paul, pendant ce voyage. Chargé par les apôtres, Act., xv, 22, de porter à Antioche le décret de Jérusalem, il était mieux à même que personne de rétablir l’exactitude des faits, dénaturés par les judaïsants. La première épître de Pierre, v, 12, prouve que Silas ou Silvanus était bien connu des Églises de Galatie. Zahn, Einleit., t. i, p. 140, pense aussi que l’Épître aux Galates a été écrite à Corinthe, probablement vers mars 53, mais avant les Épîtres aux Thessaloniciens, parce que dans la lettre aux Galates il n’est fait aucune mention de Silas et de Timothée, bien connus cependant des Galates ; c’est donc qu’elle a été écrite avant que les deux missionnaires, qui s’étaient séparés de Paul à Bérée, Act., xvii, 15, ne l’eussent rejoint à Corinthe. Act., xviii, 30. Pour d’autres critiques, l’évangélisation est racontée au ch. xvi, 6, des Actes et la seconde visite est mentionnée au ch. xviii, 23. Ce serait donc à Éphèse, où Paul se rendit après avoir parcouru les hautes provinces de l’Asie, Act., xix, 1, qu’il écrivit sa lettre aux Galates. À peu près à cette époque, en l’espace de deux ou trois ans, l’apôtre écrivit ses Épîtres aux Galates, aux Corinthiens et aux Romains. Or, il y a entre ces lettres, surtout celles aux Galates et aux Romains, des ressemblances indéniables, ressemblances d’idées et même très souvent d’expressions. Nous le montrerons bientôt d’une manière précise. Il faut donc placer l’Épître aux Galates, à peu près au même temps que les autres Épîtres aux Romains et aux Corinthiens, par conséquent à Éphèse, vers l’an 55-57, ou à Corinthe en 58. La conclusion n’est pas inattaquable. Elle peut avoir sa valeur pour les critiques, qui admettent chez l’apôtre un développement doctrinal et pensent que ses idées ont suivi le cours des événements, et que Paul n’avait pas de son Évangile une idée complète et définitive avant les controverses avec les judaïsants. C’est pour répondre à leurs attaques que l’apôtre aurait esquissé, d’abord dans sa lettre aux Galates, son système théologique et qu’il l’aurait développé ensuite dans l’Épître aux Romains. Dans la première lettre il avait établi la déchéance de la loi et montré la raison d’être de la loi mosaïque dans le plan divin ; dans la deuxième, il développe dans son ensemble le plan de Dieu dans l’histoire de l’humanité et prouve que la loi mosaïque n’a été qu’un moment de cette histoire. Nous dirons plus loin quels sont les rapports entre les Épîtres aux Galates et aux Romains, et nous reconnaîtrons que la seconde peut être regardée comme un complément ou un développement de la première, mais cette constatation ne nous oblige pas du tout à croire que saint Paul n’a vu que peu à peu l’ensemble de sa doctrine. — Dans l’Épître aux Galates, épître de circonstance, il adapte ses enseignements à une situation donnée, et, par suite, traite une partie seulement de la question, celle qui était l’objet des attaques des judaïsants, tandis que, dans l’Épître aux Romains, il présente un exposé complet de son Évangile, destiné à préparer les chrétiens de Rome à le recevoir et à accepter sa doctrine. En outre, la situation de l’Église de Corinthe, telle qu’elle nous est présentée surtout dans la seconde Épître aux Corinthiens, offre des analogies frappantes avec celle des Églises de Galatie. Des deux côtés, ce sont les mêmes insinuations, les mêmes attaques contre l’autorité apostolique de Paul, les mêmes adversaires, des judaïsants. Les Épîtres aux Galates, aux Corinthiens et aux Romains ont donc certainement été écrites à peu près à la même époque, et à un moment où la situation était à peu près identique, mais il peut y avoir eu entre elles un intervalle de quelques années. Le contenu même de ces lettres le prouve. Dans les premières, la polémique est ardente, elle est personnelle ; dans la dernière il semble qu’elle est apaisée. L’Épître aux Romains est une exposition large et tranquille d’une vérité désormais assurée. Il est donc possible que Paul ait écrit l’Épître aux Galates vers l’an 53, les Épîtres aux Corinthiens en 57 et l’Épître aux Romains en 58, à moins qu’on ne préfère rapprocher davantage l’Épître aux Galates des autres Épîtres et la placer en l’an 56-57.

IV. Canonicité. — La canonicité de l’Épître aux Galates ressort de ce fait que, ainsi qne nous allons le démontrer, elle a été très probablement connue des Pères apostoliques, qu’elle a été certainement employée par les Pères de l’Église, dès le milieu du iie siècle, et qu’elle est cataloguée dans la plus ancienne liste d’écrits canoniques, le canon de Muratori, et dans les autres canons. Elle est dans les vieilles versions latines, syriaques, égyptiennes, et dans les plus anciens manuscrits, Vaticanus, Sinaiticus, Alexandrinus, etc.