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HÉTHÉENS

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part des monuments que nous ont laissés les peuples d’Asie Mineure. Cf. Pefrot, Mémoires d’archéologie, d’epigraphie et d’histoire, p. 52-58, et Histoire de l’art dans l’antiquité, t. iv, p. 562-564. Il faut donc conclure que les Héthéens étaient de même race que les peuples de l’Asie Mineure. Cf. Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. iii, p. 299 et suiv. ; Max Mûller, Asien und Kuropa, p. 327-328. Peut-on aller plus loin et préciser davantage ? On a essayé de le faire. Lantsheere, De la race, p. 179, pense que c’est dans la Mélitène [ffanigalbat ] et les cantons avoisinants qu’il faut chercher le berceau de la race héthéenn’e ; Jensen, comme on l’a vii, soutient que les Héthéens sont de la même race que les Arméniens, Tout son livre est consacré à développer et démontrer cette thèse.

V. Écriture.

Forme.

L’écriture héthéenne est

hiéroglyphique : « Ces hiéroglyphes représentent parfois la figure humaine, parfois certains membres du corps, comme le pied, la main, parfois des animaux, des fleurs, des ustensiles divers : ils renferment aussi des signes sans rapports avec des objets naturels. L’homme n’est jamais reproduit en entier comme dans le système égyptien. Les animaux qui dominent sont la colombe, les têtes de chèvres, de taureaux, d’antilopes, de béliers ; on rencontre aussi le lièvre. Parmi les objets, on remarque surtout une sorte de triangle allongé, simple ou double, rappelant un obélisque ou une tiare, des demicercles, des croix, des lignes répétées ou séparées par un point, etc. Tous ces signes, à part quelques exceptions, sont sculptés en relief. Ils sont rangés en lignes horizontales qui se lisent alternativement de droite à gauche et de gauche à droite (boustrophédon), et parfois superposés verticalement dans ces lignes horizontales. En certains cas, ils couvrent une statue entière, sans respect pour le modelé ; dans d’autres, au contraire, la statue se détache sur un fond d’hiéroglyphes. Il paraît certain, dès à présent, que ce système graphique a subi dans le cours des siècles certaines modifications, et l’on peut distinguer une forme archaïque, plus pictographique, et une forme moderne, plus conventionnelle, dans les inscriptions que nous possédons. » De Lantsheere, De la race, p. 164-165. Cf. aussi l’article À Iphabet de Fr. Lenormant dans le Dictionnaire des antiquités grecques et romaines de Daremberg et Saglio, t. i, p. 188-218 ; Maspero, Histoire des peuples de l’Orient, 5e édit., Paris, 1893, p. 744 ;

Lieu d’origine des hiéroglyphes héthéens.

On ne

connaît rien de certain sur le lieu où furent inventés ces hiéroglyphes ; on sait seulement que les Héthéens possédaient leur système d’écriture avant leur migration en Syrie ; par conséquent il fut inventé hors de la Syrie et avant le xv » siècle : « Les inscriptions de Hamath. présentent certainement des têtes de bœuf, de bélier, et parmi les animaux que l’on chasse, de gazelle ; il en est de même pour les inscriptions de Djérabîs, pour autant qu’on puisse en juger : nous’y rencontrons aussi une tête de lièvre, et un lièvre entier figure sur le lion de Marasch. Quelques têtes n’ont pu être expliquées même par des zoologistes. Ce qui est certain, c’est que les bêtes carnassières et sauvages sont absentes : le lion surtout, qui a exercé sur la plastique et sur l’écriture hiéroglyphique des Assyriens et des Égyptiens une attraction bien constatée, n’a pas laissé de trace dans les inscriptions héthéennes. Le bas-relief tout à fait assyrianisé de Sakschegôzû représente aussi une chasse au lion ; mais comme le style seul et non l’objet de ce monument est emprunté à un pays étranger, on ne peut en conclure que le système des hiéroglyphes que nous étudions est antérieur à l’influence assyrienne. Il est démontré que la Syrie possédait dans ^antiquité des lions, sans parler des léopards, aujourd’hui disparus, des guépards, des chacals, des renards, dés loups (dans le Liban), des hyènes et des chats sauvages. Dès lors, une seule conclusion est

possible : le système hiéroglyphique en question a étéin venté ou fixé dans un pays où de pareils animaux, n’existaient pas… Chez quel peuple, pasteur et chasseur, à face glabre et à cheveux longs, dans quel pays septentrional — boisé et montagneux ? — est née cette écriture ? Nous l’ignorons. Originairement elle appartient aussi peu à la Syrie qu’à la partie de l’Asie Mineure où nous la rencontrons actuellement soit seule, soit avec d’autres monuments. » Hirschfeld, Die Felsenreliefs in-Kleinasien und dos Volk der Hittiter, Berlin, 1887, p. 55-56. Où donc cette écriture a-t-elle été inventée ? L’auteur, que nous venons de citer, laisse entendre qu& l’Arménie pourrait bien être le lieu d’origine des hiéroglyphes héthéens. Ibid., p. 71. Jensen se prononce pour cette opinion. Enfin de Lantsheere place dans la" Mélitène le berceau de cette écriture, De la race, p. 179.

Historique du déchiffrement.

Il est encore à

faire. Dès 1866, Chabas signalait le caractère original de la langue des Khitis, en s’appuyant sur l’onomastique des monuments égyptiens. Voyage d’un Égyptien en Syrie, p. 326-346. De son côté, Brugsch démontrait Yimpossibilité de ramener l’idiome héthéen au groupe sémitique. Geographische Inschriften der altâgyptischen Denkmâler, t. 11, p. 20-30 ; History of Egypt under the Pharaons, t. 11, p. 2-8. — Quelque temps après survint la découverte des inscriptions héthéennes d’Ëmath, que Wright attribua le premier (1872) aux Héthéens. Theempire of the Hittites, 2e édit., Londres, 1886, p. 124. Hyde Clarke compara ces inscriptions à l’himyarite fort ancien. Palestine exploration fund, Quarterly Statement, 1872, p. 74-75. Cf. R. F. Burton, Unexplored Syria, Londres, 1872, 1. 1, p. 359. Peu après, Dunbar Heath conjectura qu’elles étaient écrites en boustrophédon, et crut lire les noms de Thothmès III et d’Amenhotep I". Pales~ Une exploration fund, Quarterly Statement, 1872, 1873, p. 35. En 1879, le même auteur essaya d’interpréter ces inscriptions à l’aide du chaldéen. Journal of the anthropological Institute, 1880. Bunsen admit une affinité probable entre les Héthéens, les Gètes de la Thrace, les-Celtes, les Ioniens, les Pélasges et les Dardaniens. Transactions of the Society of biblical Archœology, n° 2, 1878, p. 596-597. Sayce rapprocha le premier certain » symboles héthéens des signes de l’alphabet cypriote. Transactions of the Society of biblical Archseology r 1876, p. 22-32. Cf. de Lantsheere, De la race, p. 172-173. Enfin la dernière tentative de déchiffrement est celle de Jensen, Hittiter, pl. i-x, à la fin du volume.

Caractère de la langue.

M. Sayce classe la langue

des Héthéens parmi les idiomes de la famille alarodienne [= Ourarti des anciens]. Cf. The monuments of the Hittites, dans les Transactions of the Society of biblical Archœology, t. viir, p. 248-293, et The Hittites. The Story of a forgotten empire, Londres, 1888, passim. — Conder, qui croyait en 1887 avoir déchiffré les inscriptions héthéennes, crut y reconnaître une langue touranienne. Altaïc hiéroglyphes and hittite inscriptions. — M. Halévy, en recourant au phénicien et à d’autres dialectes sémitiques, parvint à expliquer un certain nombre de mots héthéens et spécialement des noms patronymiques et topographiques. Revue des études juives, 1887, p. 184.

— Ce fut à l’aide de l’araméen et des langues indo-européennes que Bail s’efforça d’arracher leur secret aux hiéroglyphes héthéens. Proceedings of the Society of biblical Archœology, 1887, p., 67-77, 153 ; iM<l, 1888, p. 424436, 437-449. — En s’appuyant sur une comparaison portant sur l’onomastique, dont la plupart des éléments sont empruntés à Sayce, Proceedings of the Society of biblical Archseology, t. iv, 1882, p. 102-104, et à Fr. Lenormant, Les Origines de l’histoire, t. ir, p. 273, de Lantsheere arrive à la conclusion suivante : « La langue des Hittites était apparentée à celle des peuples de Gan-Roum, Patin, Milid, Tabal, Kummuh, Kasku et de la Cilicie. Certains indices donnent à penser que la langue