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HÉLI — HÉLIODORE


diction de longévité sera refusée à la postérité d’Héli, et ses descendants, tout en restant revêtus du sacerdoce, ne seront que des prêtres abaissés, objet de compassion pour leurs frères. Le Seigneur se. choisira dans la branche d’Eléazar, la rivale de celle d’Ithamar, un prêtre docile et fidèle auquel il assurera une longue postérité, et de cette postérité le suprême sacerdoce ne sortira jamais plus. I Reg., ii, 27-36. Cette menace eut son accomplissement dans les premiers temps du règne de Salomon. Le grand-prêtre Abiathar, descendant d’Héli, compromis une première fois vers la fin du règne de David dans le complot d’Âdonias, III Reg., i, 7, et continuant dans la suite de favoriser les visées ambitieuses de ce prince, fut relégué par Salomon dans sa terre d’Anathoth avec interdiction de remplir les fonctions sacerdotales, III Reg., ii, 26-27, bien qu’il continuât à porter le titre de grand-prêtre en même temps que Sadoc de la famille d’Eléazar. III Reg., iv, 4. Sadoc, depuis longtemps le collègue d’Abiathar dans le pontificat, exerça seul désormais cette charge et la transmit en héritage à ses descendants, à l’exclusion perpétuelle de ceux d’Ithamar et d’Héli. Voir Abiathar et Sadoc.

L’historien sacré ne dit rien qui puisse nous renseigner sur le temps qui s’écoula entre ce premier avertissement et celui dont fut chargé Samuel. Il nous raconte seulement comment cette mission fut confiée au jeune lévite et de quelle manière il s’en acquitta. Une nuit, appelé trois fois par une voix qu’il prit pour celle d’Héli, il accourut chaque fois auprès du pontife. Celui-ci reconnut dans ces appels réitérés une intervention de Dieu ; aussi après le troisième, recommanda-t-il à Samuel de répondre, si on l’appelait encore : « Parlez, Seigneur, votre serviteur vous écoute. » Samuel le fit, et Dieu confirma ses premières menaces contre Héli et sa famille, qu’il allait rejeter à tout jamais, après des événements tels que « les deux oreilles en tinteraient à quiconque en apprendrait la nouvelle ». Le matin venu, Héli appela Samuel qui n’osait se présenter ; il l’adjura de ne rien lui cacher ; puis, ayant entendu la sentence de Dieu, il dit : « Il est le Seigneur, que ce qui est bon à ses yeux soit fait. » I Reg., iii, 2-17.

Il semblerait, d’après I Reg., iii, 11, que le châtiment annoncé était proche ; mais le ꝟ. 19 tait supposer, au contraire, qu’il se fit encore attendre assez longtemps. Quoi qu’il en soit, à l’heure marquée par Dieu, il éclata comme un coup de foudre et atteignit à la fois Héli, sa famille et le peuple d’Israël. Attaqués et battus par les Philistins à Aphec, les Israélites envoyèrent prendre l’arche à Silo, comptant que sa présence serait pour eux un gage de victoire ; mais cette confiance fut cruellement déçue : quatre mille hommes avaient péri dans le premier engagement, vingt mille restèrent cette fois sur le champ de bataille, et parmi eux Ophni et Phinées. De plus, l’arche fut prise par les Philistins et resta entre leurs mains. I Reg., iv, 1-11. Pendant ce temps Héli, qui était devenu aveugle, attendait l’issue du combat, assis, probablement à la porte du sanctuaire selon sa coutume, et tourné vers le chemin d’Aphec ; il tremblait pour l’arche du Seigneur. Un homme de Benjamin, échappé au désastre, courut en porter la nouvelle à Silo ; toute la ville retentit alors de clameurs et de gémisse* ments. Héli demandait ce que voulaient dire ces plaintes et ce tumulte confus, lorsque le Benjamite arriva enfin jusqu’à lui et lui annonça successivement la défaite de l’armée, la mort de ses deux fils et la capture de l’arche. Cette dernière nouvelle le frappa au cœur, il tomba de son siège à la renverse et se brisa la tête. Il avait quatrevingt-dix-huit ans. I Reg., iv, 12-18.

On a porté sur Héli des jugements opposés. Certains, surtout parmi les anciens, considérant plutôt les réprimandes divines et le châtiment terrible qu’il s’attira, le jugent avec une grande sévérité ; quelques Pères vont même jusqu’à désespérer de son salut. Les autres com mentateurs en plus grand nombre, principalement les modernes, se montrent indulgents. Cf. S. Jean Chrysostome, Adv. oppttgn., iii, 3, t. XL vii, col. 352 ; Hom. lix in Gen., 5, t. liv, col. 519 ; ffo » i. xril inMatth., 7, t. lvii, col. 264 ; Hom. viii in Act., 3, t. lx, col. 73 ; Hom. de viduis, 8, t. li, col. 328. Sans justifier une faiblesse que Dieu a condamnée, ils voient dans le caractère violent de ces deux prêtres corrompus et incorrigibles, Ophni et Phinées, une circonstance qui peut excuser en partie la timidité avec laquelle Héli réprime leurs désordres et atténuer sa culpabilité. Ils font ressortir d’autre part les vertus réelles d’Héli que lui reconnaissent d’ailleurs ses censeurs les plus rigoureux. Il est certain en effet que le malheureux pontife nous apparaît doué des qualités les plus recommandables. Accessible à tous, doux et bienveillant, I Reg., 1, 17, 26 ; ii, 20, il parle d’ailleurs et agit toujours comme un homme profondément religieux, et la pensée de Dieu revient dans tous ses discours ; il s’incline humblement devant les arrêts du Seigneur, sans murmurer ni s’excuser, I Reg., ii, 27-36 ; iii, 18 ; il veille au respect dû au lieu saint, I Reg., i, 13-14, et ne s’en éloigne ni le jour ni la nuit, i, 9, 25 ; ii, 19-20 ; m, 2-3, 15 ; rv. On dirait qu’il ne vit que pour la maison de Dieu et pour l’arche sainte sur laquelle le Seigneur réside ; il est plus soucieux du sort de l’arche emmenée à Aphec que de celui de ses deux fils et, tandis qu’il avait appris leur mort sans défaillir, il ne put supporter la nouvelle que l’arche était tombée au pouvoir des ennemis de Dieu. I Reg., iv, 13, 18. On peut même dire que les jugements favorables à Héli sont implicitement confirmés par l’historien sacré, car d’après I Reg., i, 17, 19-20, et surtout d’après ii, 20-21, la bénédiction et les prières d’Héli paraissent avoir contribué à obtenir à Anne la fécondité si ardemment désirée. Dieu lui-même en confiant à Héli, par un dessein particulier de sa providence, l’éducation de Samuel, a rendu témoignage à la vertu du grand-prêtre. Pour former l’esprit et le cœur de celui qui devait, dans les plans divins, faire l’unité nationale d’Israël par l’établissement de la royauté et assurer en même temps l’existence de la théocratie par l’institution du prophétisme, les leçons d’un maître ne suffisaient pas ; il fallait en outre le spectacle prolongé et constant des vertus de l’homme privé et de celles du chef du peuple. E. Palis.

2. HÉLI (grec : ’HXt), donné dans saint Luc, iii, 23, comme le dernier des ancêtres de Notre -Seigneur, selon la chair. Il est regardé par plusieurs Pères et des exégètes comme le même que Joachim, le père de la Vierge Marie, selon les évangiles apocryphes et certaines traditions orientales. Voir Généalogie 2, col. 166.

    1. HÉLIODORE##

HÉLIODORE (’HM8wpoç, « don du soleil » ), ministre du roi de Syrie, Séleucus IV Philopator. Lorsque Apollonius, gouverneur de Cœlésyrie, à l’instigation de Simon, intendant du Temple, eut persuadé à Séleucus de s’emparer des trésors conservés dans l’enceinte sacrée, le roi envoya à Jérusalem Héliodore, son ministre des finances, avec ordre de s’emparer de l’argent. Héliodore se mit en route, en apparence pour visiter les villes de Syrie et de Phénicie, maisen réalité pour exécuter l’ordre du roi. Arrivé à Jérusalem et reçu cordialement par le grandprêtre Onias, il lui déclara le but de sa mission. C’était un usage commun dans l’antiquité de confier aux temples la garde du trésor des particuliers. Onias représenta à Héliodore que cet argent était en dépôt, que c’était la subsistance des veuves et des orphelins et qu’il était impossible de tromper ceux qui avaient eu confiance dans un temple honoré dans le monde entier pour sa sainteté. Héliodore passa outre et s’apprêta à exécuter les ordres du roi. Le jour où il entra dans le temple, les prêtres, les femmes et tout le peuple se mirent en prières pour demander à Dieu de protéger lui-même le dépôt