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GRAISSE — GRAMMATE


à l’apathie, à l’oubli de tout devoir et de tout sentiment. Ps. xvi (xvii), 10. — 4° De l’inintelligence à la méchanceté il n’y a qu’un pas. La graisse devient donc encore, dans la Sainte Écriture, un signe de méchanceté. Les méchants ont le corps bâri’, « gras, » et l’iniquité sort de leur graisse, hêléb. Ps. lxxii (lxxiii), 4, 7. Israël est devenu gras, puis’àbâh, « épais, » et kâèâh, « replet, » et il s’est révolté contre le Seigneur. Deut, xxxii, 15.

— 5° Pour tuer le dragon adoré des Babyloniens, Daniel lui fit avaler des boules composées de poix, de graisse et de poils. Dan., xiv, 26. La graisse n’entre ici que comme matière destinée à affriander l’animal, et lui faire avaler le mélange indigeste qui doit l’étouffer.

II. Dans les sacrifices.

1° La graisse était le symbole de ce qu’il y a de meilleur dans les choses qui servent à la nourriture, de plus puissant et de plus riche parmi les hommes. Les textes cités plus haut le donnent assez à entendre. On lit même dans l’Ecclésiastique, xlvii, 2 : « Comme la graisse est séparée de la chair, ainsi David le fut des enfants d’Israël. » C’est dire que la graisse l’emporte autant sur les autres parties de la victime que David l’emportait sur ses contemporains. A ce titre, la graisse constituait dans les sacrifices une part de choix, que le Seigneur se réservait expressément et qui devait être entièrement consumée sur son autel. Lev., x, 15. Elle était pour lui d’agréable odeur. Lev., m, 16 ; iv, 31. —2° Dès le premier âge du genre humain, Abel offrait déjà au Seigneur des premiers-nés de son troupeau et de leur hêléb, àizo xûv (rreocxcov aùxâv, de adipibus eorum. Gen., iv, 4. Il est vrai que Josèphe, Ant. jud., i, ii, 1, prend ici hêléb dans le sens de « lait », qu’il a en même temps que celui de « graisse ». Mais le lait eût été sans doute une assez mince offrande, à peine égale aux fruits de la terre qu’offrait Caïn. Il est donc plus probable qu’Abel consacrait quelques-uns des premiers-nés de son troupeau, et la graisse de ceux qu’il immolait, ou encore les plus gras de ses animaux.

— 3° La graisse étant ainsi dès l’origine comme la part réservée à Dieu, Moïse défendit aux Israélites, sous peine de retranchement, c’est-à-dire d’excommunication, de manger la graisse des animaux qu’on offre ordinairement en sacrifice, bœufs, agneaux ou chèvres. Lev., vii, 23, 25. La défense ne portait que sur la graisse agglomérée autour de certains organes, et non sur celle qui entrait dans la composition de la viande. Elle ne s’étendait pas non plus à la graisse des quadrupèdes qu’il est permis de manger, mais qui ne servent pas dans les sacrifices, cerf, gazelle, chevreuil, etc. Aussi quand on tuait un animal de la première espèce pour s’en nourrir, il fallait en faire brûler la graisse sur l’autel. Lev., xvii, 6. Lorsque les Israélites furent dispersés dans leurs villes, il ne leur fut plus possible d’accomplir cette prescription. Néanmoins, quoique la défense de manger de la graisse ne soit pas renouvelée comme celle de manger le sang, Deut., xii, 15, 21, on ne voit nulle part qu’elle ait été levée. — Il n’est pas impossible que l’offrande de la graisse au Seigneur, outre sa signification symbolique, n’ait été inspirée par d’autres raisons d’un ordre inférieur. La graisse est un mets de difficile digestion dans les pays chauds ; au point de vue hygiénique, il convenait donc d’en interdire l’usage aux Israélites. C’est en même temps, par sa composition chimique, an combustible actif, qui devait aider singulièrement le feu de l’autel à consumer les multiples victimes qu’on lui livrait. — Quand il s’agissait d’une bête morte, qui ne pouvait par là même être offerte en sacrifice, il n’était point permis d’en manger la graisse, mais on l’employait à d’autres usages profanes. Lev., vii, 24. Même en ce qui concerne la graisse des victimes immolées, on ne devait pas la garder jusqu’au lendemain, de peur qu’elle ne se corrompit. Exod., xxiii, 18. — 4° La graisse des victimes devait être entièrement brûlée par le feu de l’autel, dans l’holocauste, Lev., i, 8, 12 ; cf.

Ps. xx, 4 ; dans le sacrifice d’actions de grâces, Lev., iii, 3-5, 9, 10, 14-16 ; vii, 30, 31 ; dans le sacrifice d’expiation, Lev., iv, 8-10, 19, 26, 31, 35 ; vii, 3-5 ; xvi, 25 ; dans le sacrifice accompagnant la consécration du grandprêtre, Lev., viii, 16, 20, 25, ou des autres prêtres, Exod., xxrx, 13, 22 ; dans le sacrifice pour le rachat des premiers-nés. Num., xviii, 17. — 5° Dans tous ces cas, qu’il s’agît de victimes appartenant à la race des bœufs, des moutons ou des chèvres, la graisse à offrir devait être prise aux endroits du corps où elle s’accumule naturellement, autour des entrailles, du foie, des reins, des flancs de l’animal, et de la queue, quand la victime était de la race ovine. Cf. Brebis, t. i, col. 1912, Lev., m, 3-5, 9 ; iv, 8-10 ; vii, 3 ; etc. Cf. Bàhr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1839, t. ii, p. 353354 ; Reland, Antiquitates sacrse, Utrecht, 1741, p. 176, 177. Quand les victimes étaient des oiseaux, tourterelles ou petits de colombes, il n’y avait pas a en séparer la graisse, trop peu considérable pour être mise à part. — 6° Ces prescriptions de la Loi furent ordinairement observées dans les sacrifices. Aaron et ses fils s’y soumirent dès leur entrée en fonction. Lev., ix, 10, 19, 20, 24. — Sous le grand-prêtre Héli, de graves infractions furent commises. Les fils du pontife faisaient saisir la chair crue des victimes, « même avant qu’on fit brûler la graisse. »

I Reg., ii, 15, 16. Cette exigence contrevenait formellement au texte de la Loi. Lev., vii, 30, 31. — Les prescriptions mosaïques furent soigneusement suivies à la dédicace du Temple de Salomon, III Reg., viii, 64 ;

II Par., vii, 7 ; à la restauration du culte sous Ezéchias, II Par., xxix, 35 ; à la Pâque célébrée sous Josias. II Par., xxxv, 14. — 7° Cette combustion de la graisse dans les différents sacrifices constituait une sorte d’hommage à la souveraineté et à la libéralité du Seigneur. Cf. Bâhr, Symbolik, t. ii, p. 381, 382. Mais cette offrande avait quelque chose de grossier qui ne pouvait convenir qu’à l’ancienne Loi. Il n’est jamais question de graisse dans tout le Nouveau Testament. Aussi, dès les anciens temps, le Seigneur rappelait que « l’observation des commandements vaut mieux que la graisse des béliers ». I Reg., xv, 22. Dans les cultes idolâtriques, on s’imaginait volontiers que les divinités mangeaient la graisse des victimes qu’on leur présentait. Deut., xxxil. 38. Le Seigneur faisait déclarer par ses prophètes qu’il n’en était pas de même de lui, Is., xliii, 24, et que, depuis que les Israélites avaient osé offrir la graisse aux idoles, Ezech., xliv, 7, et se présenter à lui le cœur plein de péchés, il avait leur graisse et leurs victimes en horreur. Is., i, 11. — C’est seulement dans le nouveau Temple que les prêtres d’une nouvelle alliance offriront au Seigneur la graisse et le sang, Ezech., xliv, 15, symboles des dons spirituels qui seront apportés à

son autel.

H. Lesêtre.
    1. GRAMMATE##

GRAMMATE (grec : Ypa(Mia « ijç ; Vulgate : scriba), magistrat de la ville d’Ephèse mentionné dans les Act., xix, 35. Le grammate apaise par son discours l’émeute populaire que l’orfèvre Demétrius avait soulevée contre saint Paul. Le mot grammate désigne dans les cités grecques le greffier, c’est-à-dire le fonctionnaire chargé de la rédaction et de la conservation des actes publics. Les inscriptions d’Ephèse mentionnent plusieurs grammates différents : 1° le grammate du conseil, tÎ)ç BouXti ;. J. T. Wood, Discoveries at Ephesus, in-8°, Londres, 1877, Inscr. frorn the great Theater, i, col. 4, 1. 47 ; col. 5, 1. 4, 12, 52 ; le grammate du Sénat, Trjç yzpoualaç, ibid., col. 5, 1. 54 ; le grammate du peuple, xov S^fiov, ïbid., col. 5, 1. 58 ; col. 6, 1. 45, 52 ; Bulletin de correspondance hellénique, t. i, p. 291 ; enfin le grammate des Éphésiens, qui était probablement le même que celui du peuple. Ibid., col. 3, 1. 16. J. Ménadier, Qua condicione, p. 78, croit que chacun de ces emplois était occupé par plusieurs titulaires qui formaient un collège.