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GIÉZI — GIGAS LIBRORUM


lui annonça qu’elle serait mère dans un an. IV Reg., iy, 11-17. L’enfant, ainsi annoncé, grandit, fut frappé d’insolation et mourut. Sa mère, pleine de foi, recourut à nlisée. Le prophète, retiré sur le Carmel, la vit venir de loin et signala son arrivée à Giézi, qu’il envoya à sa rencontre demander ai tout allait bien à la maison. La femme de Sunam répondit évasivement au serviteur : « Tout va bien ; » mais arrivée auprès de l’homme de Dieu, elle se prosterna devant lui et lui saisit les pieds en suppliante. Giézi, jugeant cette action peu respectueuse et trop familière, voulut écarter la Sunamite. Elisée lui commanda de la laisser expliquer son chagrin. Ému de la mort de reniant, il envoya Giézi en toute hâte pour le rappeler à la vie : « Ceins tes reins, prends mon bâton dans ta main et pars. Si tu rencontres quelqu’un, ne le salue point, et si quelqu’un te salue, ne lui réponds pas, et mets mon bâton sur le visage de l’enfant. » Théodoret, Quæst. in IV Reg., int. xvii, t. lxxx, col. 756, a pensé qu’Elisée fit ces recommandations, parce qu’il craignait que son serviteur, orgueilleux et vaniteux, ne s’arrêtât pour dire aux passants le motif de sa course précipitée et n’empêchât par sa vaine gloire l’accomplissement du miracle ; mais rien dans le texte n’indique cette crainte. Cependant, la mère éplorée emmena le prophète avec elle. Giézi, qui les avait précédés, ne réussit pas à rappeler l’enfant à la vie. Bien qu’il eût exécuté exactement les ordres de son maître et placé son bâton sur le visage du mort, celui-ci ne reprit ni la voix, ni lé sentiment. Étonné, Giézi annonça à Elisée son insuccès. Plus heureux, le prophète ressuscita le cadavre et ordonna à son serviteur d’appeler la mère pour lui rendre son fils plein de vie. IV Reg., IV, 18-37. Voir t. ii, col. 1692. Les commentateurs n’attribuent pas l’insuccès de Giézi à ses défauts ; ils pensent généralement que Dieu voulait glorifier directement et sans intermédiaire son prophète.

Giézi eut un rôle moins beau dans l’épisode de la guérison de Naaman. Elisée avait refusé les généreuses offrandes du général syrien. IV Reg., v, 16. Moins désintéressé que son maître, le serviteur courut après Naaman qui, à sa vue, descendit de son char et vint à sa rencontre. Par un impudent mensonge, Giézi attribua à Elisée la requête qu’il adressait au riche officier : « Mon maître m’a envoyé vous dire : « Deux jeunes fils des « prophètes sont arrivés tout à l’heure de la montagne « d’Éphraïm ; donnez-leur un talent d’argent et deux vêtements de rechange. » Naaman donna deux talents et deux vêtements, qu’il fit porter par ses serviteurs. Le soir venu, Giézi serra les cadeaux dans sa maison et renvoya les porteurs. Pour dissimuler sa manœuvre et détourner les. soupçons, il se présenta à Elisée, sans être mandé. Le prophète, qui savait par révélation l’indigne conduite de son serviteur, l’interrogea : « D’où viens-tu, Giézi ? » Continuant à mentir, Giézi répondit : « Votre serviteur n’est allé nulle part. » Le prophète lui reprocha alors sévèrement ce qu’il avait fait et l’en punit : « Tu as reçu de l’argent et des habits pour acheter des plants d’oliviers, des vignes, des bœufs, des brebis, des serviteurs et des servantes. Mais aussi la lèpre de Naaman s’attachera à toi et à toute ta race pour jamais. » Giézi se retira, couvert d’une lèpre blanche comme la neige. IV Reg-, v, 20-27. Voir t. ii, col. 1693. Cette punition était méritée, car la demande de Giézi et son acceptation de présents étaient de nature à discréditer auprès des Syriens les prophètes du vrai Dien et à les faire paraître aussi cupides que les prophètes des idoles. D’ailleurs, Giézi avait abusé du nom de son maître et avait voulu le tromper. On en conclut qu’il quitta dès lors définitivement le service d’Elisée. Plus tard, si on admet que le récit biblique suit l’ordre chronologique, après la lamine de sept ans qui désola le pays, la Sunamite qui, sur le conseil d’Elisée, s’était retirée chez les Philistins, vint demander à Joram que sa maison et ses terres lui

soient rendues. Le roi conversait alors avec Giézi et se faisait raconter les merveilles opérées par Elisée. Giézi venait de rappeler la résurrection du fils de la Sunamite, lorsque les apercevant il les désigna au roi qui leur fit rendre justice. IV Reg., viii, 1-6. Toutefois, on a pensé que ce récit n’est pas à sa place et que l’épisode de la conversation de Giézi avec le roi avait précédé la guérison de Naaman et la punition de Giézi, car le roi n’aurait pas parlé avec un lépreux. Les rabbins ont jugé sévèrement Giézi et ont dit que si Elisée était saint, son serviteur ne l’était pas. Talmud de Jérusalem, Berakhoth, t, 5, trad. Schwab, 1. 1, Paris, 1881, p. 263 ; Yebaniolh, II, 4, t. vii, 1885, p. 28. Ils ont enseigné, Sanhédrin, x, 2, t. XI, 1889, p. 45, 55-57, qu’il était un des quatre particuliers, n’ayant point de part à la vie future. Il était fort instruit dans l’étude de la loi, mais il avait trois défauts : il était jaloux, de mœurs relâchées, et il ne croyait pas à la résurrection des morts. Ces reproches des rabbins ne sont fondés que sur des interprétations étranges de quelques versets bibliques. Le texte sacré ne lui attribue expressément que la cupidité des biens terrestres et le mensonge. E. Mangenot.

    1. GIGAS LIBRORUM##


GIGAS LIBRORUM, manuscrit de la Vulgate latine, ainsi nommé parce qu’il est de très grande dimension, d’un poids si considérable qu’il faut deux ou trois hommes pour le porter. On l’appelle aussi Teufelsbibel, « la Bible du diable, » parce que, d’après une légende, un moine, qui avait été condamné à mort, eut la vie sauve pour l’avoir écrit tout entier en une nuit avec l’aide du diable, dont on voit l’image, dans le volume, à la feuille 290. Une notice contenue dans le manuscrit et datée de 1295 donne ce codex comme une des sept merveilles du monde.

Description.

Les feuillets sont en parchemin

épais, de peau d’âne, à ce qu’on croit. Ils ont environ m, 875 de hauteur et iii, 45 de largeur, de sorte que la largeur du livre ouvert est à peu près de iii, 90. Leur nombre est de 309, sans compter trois bandes de parchemin dont deux sont adhérentes à la couverture supérieure et la troisième est cousue à la feuille 273 qui contient la fin de l’Apocalypse. Huit feuillets manquent, parmi lesquels le premier qui contenait les six premiers chapitres de la Genèse. Le manuscrit est écrit en grandes lettres minuscules bien lisibles ; les mots sont séparés et ont quelques signes de ponctuation. Il est difficile de savoir si le manuscrit est tout entier de la même main. Les ouvrages profanes qu’il renferme avec la Bible sont d’une écriture plus petite et les lettres initiales sont de forme différente, de sorte qu’il semble que le « Géant » a été écrit au moins par deux copistes différents. Le codex est partagé en deux colonnes, dont chacune a régulièrement 106 lignes, quelques pages exceptées (287-294).

Histoire.

Le Gigas librorum est conservé aujourd’hui

à la Bibliothèque royale de Stockholm. D’après une notice écrite sur la couverture supérieure, il a appartenu au monastère bénédictin de Podlazic en Bohême, et, après avoir été mis pendant quelque temps en gage, il fut vendu en 1295 au monastère de Brevnov, près ae Prague. Il devait avoir été achevé en 1239. Le copiste fut peutêtre un Hermannus monachus inclusus, mentionné dans un calendrier qui y fut ajouté postérieurement. Après diverses péripéties, le codex était arrivé à Prague, où il devint le butin des Suédois, avec le célèbre Codex argenteus d’Upsal, le 16 (26) juillet 1648. Il est conservé à Stockholm depuis cette année 1648.

Contenu.

Tout l’Ancien Testament est reproduit

dans les 118 premiers feuillets (à part la lacune du feuillet 1) ; puis viennent les écrits de Josèphe, les Étymologies de saint Isidore de Séville, etc. Le Nouveau Testament remplit les feuillets 253-286. — L’Ancien Testament est la reproduction de notre Vulgate latine, à l’exception des Psaumes qui sont donnés d’après la ver-