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    1. ÉPHRAÏM##

ÉPHRAÏM (TRIBU D’) — ÉPHRAÏM (FORÊT D")

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tribu la force des enfants d’Israël. Jacob l’avait prédit en ces termes, Gen., xlix :

y. 23. On le provoque, on l’attaque ;

Les archers le percent [de leurs flèches] ;

?. 24. Mais son arc reste fort,

Ses bras demeurent flexibles,

Par la main du [Dieu] puissant de Jacob,

Par le nom du Pasteur et du Rocher d’Israël.

Moïse le compare au buffle ou au taureau : « ses cornes sont comme celles du re’êm (Vulgate : du rhinocéros) : avec elles il lancera en l’air tous les peuples jusqu’aux extrémités de la terre. » Deut., xxxiii, 17. Si Benjamin est le loup ravisseur, Gen., xlix, 27, et Juda le lion, xlix, 9, caché dans ses montagnes sauvages, dans sa forteresse de Sion, gardant le sud de la Terre Sainte, Éphraïm, son rival, est le taureau moins belliqueux, mais non moins puissant, qui doit défendre le nord. Cependant le sentiment qu’il a de sa force, la fierté des promesses reçues, de la prééminence acquise, le poussent jusqu’à l’arrogance. Arrogant, il l’est vis-à-vis de Josué, quand il vient se plaindre, avec Manassé, de la faible part d’héritage concédée à « un peuple si nombreux, et que le Seigneur a béni ». Jos., xvii, 14. Il l’est vis-à-vis de Gédéon et de Jephté, à qui il fait durement le même reproche : « Pourquoi ne nous avez-vous pas appelés au combat ? » Jud., viii, 1 ; iii, 1. Il ne peut tolérer qu’on puisse se passer de lui. Quoi qu’il en soit, Dieu l’appelle « la force de sa tête », Ps. lix (hébreu, lx), 9 ; CVII (cviil), 9, bien qu’il lui ait préféré Juda. Ps. lxxvii (lxxviii), 67. Et la raison de cette préférence, c’est que ce superbe n’eut pas le courage de résister aux séductions de l’idolâtrie ; en abandonnant le Seigneur et sa loi, il fit comme un guerrier fanfaron, qui abandonne son poste au jour du combat. Ps. lxxvii, 9. — L’histoire du schibboleth, Jud., xii, 6, nous montre qu’il y avait en Éphraïm des provincialismes comme en Galilée. Matth., xxvi, 73.

A. Legendre.

3. ÉPHRAÏM (MONTAGNE D’) (hébreu : Har’Éfraim ; Septante : cfpo ; tô’Efpa’151, ou ô’po ; ’Efpaiji), nom par lequel est désignée’la partie montagneuse du territoire attribué à Éphraïm. Jos., xvii, 15. Voir Éphraïm 2. D’une façon générale, il indique la moitié septentrionale du massif qui court, entre la Méditerranée et le Jourdain, depuis le sud de la Palestine jusqu’à la plaine d’Esdrelon, la moitié méridionale étant appelée « montagne de Juda ». Jos., xi, 21 ; xx, 7. Ce district était aussi nommé « montagne d’Israël ». Jos., xi, 16, 21, et « montagne d’Amalec ». Jud., v, 14 ; xii, 15. Il s’étendait même jusque dans la tribu de Benjamin, Jud., iv, 5, allant ainsi de Béthel à Samarie. Il comprenait dans ses limites les villes suivantes : Thamnath Saraaou Thamnathsaré, Jos., XIX, 50 ; xxiv, 30 ; Jud., ii, 9 ; Sichem, Jos., xx, 7 ; xxi, 21 ; 1Il Reg., xii, 25 ; 1 Par., VI, 67 ; Gabaath de Phinées, jos., xxiv, 33 ; Béthel, Jud., iv, 5 ; Samir, Jud., x, 1 ; Ramathaïm-Sophim, I Reg., i, 1. C’était une des douze préfectures que Salomon avait établies pour l’entretien de sa maison, et l’intendant chargé d’y lever les impôts s’appelait Ben-Hur. III Reg., iv, 8. La contrée, en effet, était renommée pour sa fertilité, comme le Carmel, Basan et Galaad. Jer., l, 19. Elle était aussi bien boisée. Jos., XVII, 15 ; IV Reg., ii, 24. Comme c’était le centre du pays, Aod y fit entendre, par le son de la trompette, l’appel aux armes pour marcher contre les Moabites. Jud., iii, 27. Gédéon y envoya de même des courriers pour convoquer le peuple contre les Madianites. Jud., vu, 24. C’est là que demeuraient Michas ou Michée, dont l’histoire est racontée Jud., xvii, xviii, et le lévite dont la femme fut victime des habitants de Gabaa. Jud., xix. C’est de là qu’était Séba, fils de Bochri, qui s’était soulevé contre David. II Reg., xx, 21. Les rois de Juda y conquirent certaines villes. II Par. ; xiii, 19 ; xv, 8.

A. Legendre.

4. ÉPHRAÏM, ville de Palestine ainsi nommée II Reg., xili, 23. Dans d’autres passages de l’Ancien Testament, elle est appelée Ophéra, Éphron, etc. Dans le Nouveau, elle est appelée Éphrem. Voir Éphrem 1.

5. ÉPHRAÏM (FORÊT D’) (hébreu : Ya’ar’Éfràim ; Septante : Spïfiôç’Efpiiu. ; Vulgate : saltus Ephraim), forêt dans laquelle eut lieu le combat entre les armées de David et de son fils révolté Absalom, et où celui-ci trouva une mort tragique. II Reg., xviii, 6. Cet endroit n’est pas mentionné ailleurs, et l’on se demande de quel côté du Jourdain il faut le chercher. Comme la tribu d’Éphraïm habitait un pays bien boisé, Jos., xvii, 15, qu’Absalom lui-même avait des propriétés près de la ville de ce nom, II Reg., xiii, 23, on serait tout d’abord tenté de croire que ce bois tirait son nom ou du pays ou de la ville, et qu’il était par là même à l’ouest du Jourdain. On ajoute à ces raisons un détail du récit sacré, qui nous montre Achimaas prenant « le chemin du kikkar » ou de la vallée du Ghôr, pour aller porter des nouvelles de la bataille à David, resté à Mahanaïm, de l’autre côté du fleuve. II Reg., xviii, 23. Cette circonstance laisserait donc supposer que les événements se passèrent dans la région occidentale. Telle est l’opinion admise par certains auteurs, comme Winer, Biblisches Realwôrlerbuch, Leipzig, 1847, t. i, p. 334, et Keil, Die Bûcher Samueîs, Leipzig, 1875, p. 339. Il semble bien cependant, à considérer la marche et les opérations des deux armées, qu’elles se rencontrèrent à l’est du Jourdain. Ainsi : 1° David, après avoir franchi le fleuve, vient à Mahanaïm ; Absalom, suivi de tout Israël, « passe aussi le Jourdain, » et vient « camper dans le pays de Galaad », II Reg., xvii, 22, 24, 26, et l’on ne dit nulle part qu’il soit revenu sur ses pas. — 2° Le roi se tient dans la ville, afin de pouvoir en cas de besoin porter secours à son armée, II Reg., xviii, 3 ; l’engagement n’eut donc pas lieu très loin de là. — 3° Cette proximité ressort encore des points suivants : c’est le jour même de la bataille que David reçoit la nouvelle du succès de ses armes, II Reg., xviii, 20 ; les deux messagers paraissent avoir franchi la distance de la forêt à la ville tout d’une traite, et même en courant. II Reg., xviii, 22. On ajoute aussi que, après la victoire, l’armée de David revint à Mahanaïm, II Reg., xix, 3, tandis que, si le combat avait eu lieu en deçà du fleuve, elle eût marché directement sur Jérusalem. Mais on peut répondre que, la révolte étant terminée après la mort d’Absalom et la défaite des siens, les vainqueurs n’avaient plus qu’à aller chercher le roi à Mahanaïm, pour le ramener dans sa capitale, où personne ne devait penser à organiser la résistance.

On a dit, contre les deux premières preuves, qu’elles ne sauraient avoir de force que dans le cas où nous aurions le récit complet des faits qui se sont passés dans cette guerre. « Le combat décisif pourrait à la rigueur avoir été précédé de plusieurs autres, comme il arrive dans toutes les opérations militaires, et les mots : « le peuple sortit dans la plaine, » II Reg., xviii, 6, signifieraient uniquement que l’armée de David prit l’offensive. Ce serait alors à la suite de plusieurs échecs partiels qu’Absalom aurait repassé le Jourdain et se serait réfugié dans une région d’un accès difficile, afin de résister avec avantage. » Cf. Clair, Les livres des Rois, Paris, 1879, t. ii, p. 108. Avec ce système d’interprétation, on peut faire toutes les hypothèses ; mais ne donnei t-il point trop de facilité pour tout expliquer ? D’après le i récit biblique, tel que nous le possédons, les événements

! racontés semblent bien avoir eu pour théâtre une coni

trée située à l’orient du Jourdain et non loin du fleuve. Cependant l’expression dérék hak-kikkâr, littéralement « le chemin du cercle », II Reg., xviii, 23, signifie-t-elle « la vallée du Jourdain », qui aurait offert à Achimaas une voie plus facile pour arriver plus vite vers le roi ? Ce i n’est pas sûr. La Vulgate y a vu un « chemin plus court »,