Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/801

Cette page n’a pas encore été corrigée

1537

    1. ECCLÉSIASTE##

ECCLÉSIASTE (LE LIVRE DE L’)

1538 « la sagesse », à « l’ordre » et à la « paix domestique ». il, 26 ; ix, 9 ; cf. xi, 8-xii, l ; ii, 24 ; iii, 13, 22 ; v, 11, 17. Qui oserait affirmer que cette morale est l’épicurisme païen ? Morale élémentaire, soit ; mais morale irréprochable, convenant à des lecteurs de Salomon vivant sous un régime de rémunérations terrestres. A. Motais, L’Ecclésiaste, Paris, 1877, p. 66-118 ; Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4e édit., t. v, p. 69-79. III. Division et analyse. — Il y a dissentiment parmi les auteurs sur la division du livre. Il en est qui le partagent en deux parties, d’autres en trois. Plusieurs en font quatre parties. Quelques-uns même vont jusqu’à sept et treize parties. Les divisions en deux ou trois parties sont les plus communément admises. B. Schàffer, Nette Untersuchungen ûber das Buch Koheleth, Frihourg-en-Brisgau, 1870, p. 172. Nous allons donner dans l’analyse la division en trois parties, parce que c’est celle qui répond le mieux, selon nous, à l’allure libre et quelque peu irrégulière de l’ouvrage. — L’Ecclésiaste comprend un prologue, trois parties et un épilogue. — Prologue. I, 1-11. — Vanité des choses en général. Toutes choses sont vaines : l’homme passe, tandis que tout autour de lui demeure, i, 1-7 ; il ne sait que peu de chose de ce qui est toujours, i, 8-11. — Première partie, i, 12-m, 15. — Vanité des choses dans la vie privée. Vaine est la science. I, 12-18. Vain le plaisir. Il, 1, 2. Vaines les grandes choses faites avec une prudence achevée : les maisons, les vignes, les jardins, les vergers, les réservoirs, ii, 3-11. Comparaison de cette prudence avec la fausse sagesse, ii, 12-17. Et cela aussi est vain ; car le fruit de son labeur, c’est à un autre, à un inconnu qu’on le laisse, ii, 18 23. Mieux vaut jouir de ce que l’on a fait, de ce qui vient de Dieu, ii, 24-26.

— Appendice : Toutes choses ont un temps fixé, et l’homme ne peut rien y changer, iii, 1-15. — Deuxième partie, iii, 16-vi, 6. — Vanité dans la vie civile. Vaine est la douleur de ceux qui s’indignent en voyant d’iniques jugements, iii, 16-22, d’iniques oppressions, iv, 1, 2. Vaine est la jalousie, vain l’effort pour surpasser son semblable, iv, 4-6. Vain est l’homme solitaire (l’avare), que Je dédain des conseils isole de la société, iv, 7-16. — Récapitulation. — Indignation contre l’injustice, iv, 17*v, 7. Cf. G. Gietmann, In Eccl., p. 193. Censure de l’avarice, v, 8-19. Folie du roi qui méprise les conseils, vi, 1-6 ; cf. iv, 13-16. — Amplification. Répétition : 1. Soumission à la volonté arrêtée de Dieu, vt, 7-vu, 1 (Vul^ate) ; cf. m. — 2. Excès dans la légèreté et la joie, vii, 2-7 ; cf. n. — 3. Excès dans la tristesse et l’indignation, vu, 8-15 ; cf. iii, 16. — 4. Louange de la médiocrité, qui se tient entre ces extrêmes, vii, 16-23. — 5. Cause profonde de l’universelle vanité : la femme « dont le cœur est un lacs, et les mains des chaînes », vii, 24-29, et le premier péché, vii, 30. — Troisième partie : Préceptes de sagesse pratique. ( Ils ont des affinités avec ce qui précède. ) viii, 1-xii, 8. — 1° Observe le temps du roi (Dieu), et ne cherche pas à t’y soustraire, viii, 1-8. — 2° Reste calme et froid devant les injustices de ce monde, viii, 9-15. Réjouis-toi modérément. — 3° Réprime le désir de connaître tout ce qui se passe sous le soleil, viii, 16 IX, 1 ; cf. i, 13-18. — 4° Affranchis-toi de tout vain désir. Jouis de la vie, qui est meilleure que la mort, et attends en paix l’heure de la destinée, qui t’est inconnue, jx, 3-12 ; cf. ii, 1-11 ; iv, 1-16. — 5° Cherche la vraie sagesse, IX, 13 X, 3. — 6° Surtout garde-toi de l’indignation, x, 4-15 ; cf. iii, 16 ; iv, 1. — 7° Du reste travaille hardiment et assidûment, x, 16-xi, 6 ; cf. x, 10. — 8° Enfin jouis de la vie, selon Dieu. Souviens-toi de ton Créateur jusqu’à la vieillesse. ( Belle et saisissante description de la vieillesse, xii, 2-8.) xi, 7- xii, 8. — Épilogue. L’Ecclésiaste y loue les « dires des sages », et y proclame que craindre Dieu et observer ses commandements, c’est là tout l’homme ; car le jugement attend chacune de ses actions. Tel est le résumé du livre, xii, 9-16.

DICT. SE LA BIDLE.

IV. Forme, langue. — L’Ecclésiaste est sous le rapj port du style et de la langue unique en son genre. Ne

considérons ici son hébreu qu’en lui-même. On sait qu’à côté de la langue des livres, classique et savante, il y a la langue parlée, nécessairement moins polie et moins pure, avec des mots et des tournures de provenance étrangère. L’hébreu de Qohélét se rapproche plutôt de celle-ci que de celle-là. Son vocabulaire, ses particularités grammaticales, ses périodes qui sentent l’artifice et la recherche, . les sens singuliers attribués à des mots, en font comme un hébreu à part dans les écrits salomoniens. — i. Vocabulaire : 1° Mots aryens : 1. pardesîm, horti (paradis), m, 5 ; — 2. pifgam, sententia, viii, 11. — 2° Mots araméens : 1. békén, tune, viii, 10 ; — 2. bâtai (forme hébr.), otiosus fuit, xii, 3 ; — 3. zemân, tempus, iii, 1 ;

— 4. kisrôn, sollicitudo, iii, 21 ; iv, 4 (industria) ; — 5.’anîân, ratio, i, 13 (peut être hébreu) ; — 6. pésar, explicatio, viii, 1 ; — 7. re’ûf, pastio, I, 14, etc. ; — 8. kebar, i, 10 ; — 9. besal, propter quod, viii, 17 ; — 10. taqan, rectus fuit, i, 15 ; — 11. nekâsîm, v, 18 ;

— 12. zua’, commotus est, xii, 3 ; — 13.’illû, etiamsi, vi, 6 ; — 14. kânas, congregavit, ii, 8, 26 ; — 15. miskén, pauper, iv, 13 ; — 16. medinâh, provincia, ii, 8. B. Schïffer, Neue Untersuchungen, p. 151-155 ; Bohl, De aramaismis libri Koheleth, Erlangen, 1861. La liste des àîtaÇ Xey<S|j.sva et des mots qu’on dit volontiers chaldéens ou usités seulement dans les écrits postérieurs à la captivité de Babylone et particulièrement dans la Mischna, les Targums et les livres rabbiniques, a été dressée avec soin par Frz. Delitzsch, Hoheslied und Koheleth, Leipzig, 1875, p. 197-206 : c’est cette liste, trop abondante, que l’on reproduit encore aujourd’hui. V. C. H. Wright, Ecclesiastes, Excursus iv, p. 488-500. — n. Particularités grammaticales. Les verbes dits lamed-aleph se conjuguent comme les verbes lamed-hé : hôte’pour hôte’, viii, 12 ; yôsâ’pour yôse’dh, x, 5. Quelques-uns nient que ce soit une particularité de Qohélé(. G. Gietmann, In Eccl., p. 24. Certains modes sont relativement très peu usités : l’optatif, vii, 23 ; le subjonctif, vii, 16, 18 ; x, 4. Une autre singularité est la rareté du vav conversif, i, 17 ; iv, 1, 7. Une particularité facile à remarquer est le verbe suivi du pronom personnel qui en est le sujet, i, 16 ; ii, 1, 11, 12, 13, 15, 18, 20, etc. Les participes et les adjeclifs verbaux sont aussi très souvent suivis de leur pronom. Le relatif *, s, composé ou non avec les particules, se lit dans le livre soixante-huit fois : c’est certainement un de ses traits les plus caractéristiques. Voir C. H. Wright, Ecclesiastes, p. 199. — m. La syntaxe des phrases est assez fréquemment irrégulière. — Tel est l’hébreu de Qôhélé(, un hébreu original, comme l’exigeaient le sujet du livre et le cercle dos lecteurs, hébreux et non hébreux, pour lesquels Salomon l’écrivait. Oratoire en général, poétique par endroits, le style de la dernière partie ressemble beaucoup au style de la poésie proverbiale.

V. Texte original. — Le texte original actuel est l’hébreu massorétique. Nul doute qu’il ne représente dogmatiquement et, en un sens, diplomatiquement même l’hébreu primitif. M. G. Bickell, il est vrai, ne le pense pas : il a imaginé deux reconstitutions du texte qui font honneur à la finesse de sa critique, mais que nous ne pouvons admettre parce qu’elles sont difficilement conciliables avec la notion d’intégrité substantielle et d’inspiration. Voir G. Bickell, Der Prediger ûber den Werth des Daseins, Inspruck, 1881, p. 53, 54, 57-110. Cf. Theologische Zeitschrift, 1886, p. 556 et suiv. ; 1887, p. 203 et suiv. ; S. Euringer, Der Masorahtext des Koheleth, "Leipzig, 1890, p. 19-29 ; R. Coruely, Introductio, p. 159-160. Il faut donc s’en tenir au texte actuel. Il ne paraît pas avoir souffert, du moins en ce qui concerne les mots et les consonnes. Les manuscrits présentent sans doute des variantes ; mais de ces variantes très peu portent sur les lettres mêmes, un grand nombre ont trait aux voyelles,

II. — 49