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DIMANCHE — DIME


mier jour de la semaine pour la fraction du pain, c’est-à-dire pour la célébration de la liturgie eucharistique. Ce n’était pas là un événement accidentel, mais régulier ; l’expression dont se sert saint Paul, xaxà (nav aaëëâxo-j, suppose un fait hebdomadaire, et qui avait lieu le premier jour de la semaine. La locution de l’Apôtre, que la Vulgate a traduite par per unam sabbali, contient deux hébraïsmes : unam est mis pour primam, selon l’habitude des Hébreux, qui se servaient de chiures cardinaux à défaut de nombres ordinaux ; sabbatum est mis pour hébdomas, « semaine. » Saint Paul estimait avec raison que le dimanche, autrement dit le jour où les fidèles se réunissaient spécialement pour les cérémonies de leur culte, était aussi le moment favorable pour accomplir les œuvres de charité. De là la recommandation expresse qu’il adresse aux Corinthiens de prélever pour les pauvres, « le premier jour de chaque semaine, » une portion de leurs gains ou de leurs revenus, « ce que chacun aura prospéré. » — Il est moins certain qu’on ait donné dès l’origine le nom de dies dominica ou « dimanche » au premier jour de la semaine chrétienne. Le texte de saint Jean, fui in spiritu in die dominica, n’est pas un argument décisif en faveur de l’opinion affirmative. Cette expression peut désigner, par exemple, le jour de Pâques, qui était par excellence le jour du Seigneur. Ce qui donne à cette hypothèse une certaine vraisemblance, c’est d’abord l’absence d’uniformité dans la terminologie des premiers siècles pour désigner le premier jour de la semaine chrétienne, et ensuite le témoignage de l’historien Nicéphore Callixte, H. E., 1. vii, c. xlvi, t. cxlv, col. 1320, qui attribue à l’empereur Constantin l’honneur d’avoir fixé d’une manière définitive la dénomination qui a prévalu depuis, « jour du Seigneur. » La question, on le voit, reste indécise. — L’Église s’est appuyée sur un fondement biblique pour choisir le dimanche comme jour officiel de la célébration du culte chrétien. C’est, en effet, en ce jour qu’ont eu lieu les deux grands faits de la résurrection de Jésus-Christ et de la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres. Cf. Joa., xx, 1-18 ; Luc, xxiv, 1-12 ; Marc, xvi, 1-11 ; Matth., xxviii, 1-15, etvct., n. Le dimanche est ainsi le mémorial de la Pâque’et de la Pentecôte chrétiennes.

J. Bellamy.

DÎME (hébreu : ma’âsêr, de’è'sèr, « dix ; » Septante : S£xâT7), Séxiiov ; Vulgate : décima), redevance d’un dixième sur les fruits de la terre, les troupeaux ou toute source de revenus.

I. Origine de la dîme. — 1° Chez plusieurs peuples de l’antiquité, on constate un prélèvement du dixième sur les biens de la terre et l’affectation de ce produit au culte de la divinité, ou à l’entretien de ceux qui la représentent ou la servent, le prince et le prêtre. En Egypte, l’impôt foncier payé au prince s’élevait à la dime du produit brut du sol. Il en était ainsi au temps des Ptolémées, comme « n fait foi l’inscription de Phila ( Lepsius, Denkmâler, Abth. IV, Bl. 27 b), et probablement aussi à l’époque des anciens pharaons. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, 1. 1, 1895, p. 330. Quand Joseph annonce au pharaon sept années d’abondance que suivront sept années de disette, il lui recommande de percevoir pendant les sept premières années le cinquième des produits du sol, c’est-à-dire la double dime, en prévision de la période suivante durant laquelle les impôts ne pourront pas rentrer. Gen., xli, 34. — Abraham, qui venait de Chaldée, donne à Melchisédech, prêtre du Très -Haut, la dime de tout ce qu’il possède. Gen., xiv, 20. Jacob promet au Seigneur la dime de tout ce qu’il recevra de lui. Gen., xxviii, 22. Cette même redevance se retrouve en vigueur chez les anciens peuples de Syrie, I Reg., viii, 15 ; chez les Grecs et les Romains, soit comme impôt civil, soit surtout comme tribut payé aux dieux. Hérodote, i, 89 ; ii, 135 ; iv, 152 ; v, 77 ; vii, 132 ; ix, 81 ; Diodore de Sicile, v, 42 ; xi, 33 ; xx, 14 ; Xénophon, Anabas., V, iii, 9 ; Hellenic, III, v, 5 ; VI, iii,

20, etc. ; Plutarque, Rornul., 18 ; Camill., 8 ; Pausanias, V, x, 2 ; X, x, 1 ; Macrobe, Sal., iii, 6 ; Justin, xvii, 7 ; xx, 3 ; Polybe, ix, 39 ; Cicéron, Verr., Il, iii, 6, 7 ; Pro leg. manil. , 6 ; Pline, H. N., xii, 14, etc. Les Séleucides percevaient aussi la dime, I Mach., xi, 35, et César autorisa Jean Hyrcan et ses enfants à se la faire payer par les Juifs. Josèphe, Ant. jud., XIV, x, 6. — 2° Rien ne permet de penser que cette offrande d’un dixième des récoltes ou des biens acquis soit la conséquence d’une révélation divine faite aux premiers hommes. La dîme est donc d’institution purement humaine. Mais pourquoi le choix de cette fraction, un dixième, plutôt que celui d’une autre fraction ou plus faible, comme un douzième, ou plus forte, comme un septième ? Bàhr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1837, t. i, p. 175-183, cherche à démontrer que le nombre dix implique l’idée symbolique de totalité, de plénitude et de perfection. Comme cette plénitude est en Dieu et vient de lui, toutes les fois que l’homme y participe en recevant dix portions de biens, il en consacre une à Dieu pour témoigner de sa reconnaissance ; autrement dit, il offre la dîme des biens qu’il a reçus. Mais ce symbolisme du nombre dix est surtout basé sur des exemples postérieurs à l’existence de la dime dans l’histoire du peuple de Dieu, et même, malgré les exemples cités, la fixation de l’idée de perfection dans le nombre dix garde toujours quelque chose d’arbitraire. En réalité, bien que la dime apparaisse tout d’abord dans l’histoire avec un caractère religieux, et qu’elle ne soit payée au prince et au prêtre qu’à raison de leur qualité de représentants ou de serviteurs directs de la divinité à laquelle tous les biens de la terre appartiennent excellemment, la quotité de cette redevance semble tenir à une cause purement profane. Le système décimal était exclusivement en usage dans la numération des Égyptiens ; chez les Chaldéens, il se combinait avec le système duodécimal. Dans l’écriture cunéiforme, les chiffres étaient groupés par dizaines, comme dans notre système actuel. Il est donc fort probable que, dès le principe, la fraction du dixième se sera imposée comme d’un usage plus facile pour des peuples qui employaient le système décimal. L’expérience montra d’ailleurs que ce prélèvement constituait en général une offrande suffisamment respectueuse pour Dieu, sans être trop onéreuse pour l’homme. II. La dîme d’après la loi mosaïque. — 1° Au Seigneur appartient la dîme de tout ce que produit la terre, grains ou fruits des arbres. Elle doit être payée en nature ; mais si quelqu’un veut la racheter, c’est-à-dire la remplacer par sa valeur en argent, il doit majorer cette valeur d’un cinquième. Cette majoration représentait soit les frais de transport dont s’exonérait le possesseur, soit la plus-value qu’il espérait recueillir des biens en nature.

— Sont également sujets à la dîme tous les animaux, bœufs, brebis, chèvres, qui passent sous la verge du pasteur, c’est-à-dire qu’on mène paître dans les champs. Quand on les comptait, le pasteur frappait chaque dixième de son bâton, et celui-là appartenait au Seigneur, que l’animal fût d’ailleurs bon ou mauvais. Quand le nombre dix atteignait une belle bête, le possesseur pouvait être tenté de lui en substituer une autre de qualité inférieure. Pour punir cette déloyauté, le Seigneur revendiquait alors les deux animaux, le bon et le mauvais, et interdisait en même temps la faculté de rachat. Cette dernière clause suppose que les animaux pouvaient être rachetés, aux mêmes conditions que les céréales et les fruits, bien que la loi ne le dise pas positivement. Lev., xxvii, 30-33.

— 2° Le produit des dîmes est attribué aux lévites et constitue leur unique moyen d’existence, puisqu’ils sont consacrés au service du Tabernacle. Â leur tour, les lévites doivent prélever la dixième partie de ce qu’ils reçoivent, par conséquent la dime de la dime, et la donner au grand prêtre, pour l’usage des autres prêtres. Seulement ils n’ont pas la faculté dont bénéficiait l’Israélite ordinaire de réserver au Seigneur même l’animal