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DEMON


pas que le nom et la personnalité de Satan hissent inconnus des Hébreux avant la captivité. Les fréquentes allusions que l’un des livres salomoniens fait à l’arbre de vie, Prov., iii, 18 ; xi, 30 ; xiir, 12 ; xv, 4, et au che. min de vie, Prov., ii, 19 ; v, 6 ; x, 17 ; xii, 28, démontrent, au contraire, que l’histoire du paradis terrestre était alors familière à tous, et que le rôle joué par l’esprit du mal n’échappait à personne. Rosenmûller, Iobus, Leipzig, 1806, t. i, p. 51 ; Fr. Delitzsch, Bas Buch lob, Leipzig, 1876, p. 50. À l’époque où fut composé le livre de Job, le danger d’une déification de Satan était beaucoup moindre qu’au temps de Moïse. À plus forte raison en futil ainsi après la captivité de Babylone. Satan est nommé deux fois dans les livres postérieurs à cette époque. Tandis que le texte des Rois, II, xxiv, 1, dit simplement, à propos du dénombrement suggéré à David : « La fureur du Seigneur continua à s’irriter contre Israël, » le livre des Paralipomènes, I, xxi, 1, s’exprime ainsi : « Satan s’éleva contre Israël. » Zacharie, iii, 1, 2, signale la présence de Satan debout devant le grand prêtre Jésus pour lui faire opposition. — On a prétendu à tort que les Juifs avaient emprunté aux Perses, à la fin de la captivité, la notion de Satan. Les documents cunéiformes établissent que, longtemps avant les Perses, les Chaldéens admettaient l’existence d’esprits méchants, et c’est là une des croyances primitives de l’humanité. Voir Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, Crédit., t. i, p. 227.

3° Dans les Septante. — Après la captivité, le nom de Satan fut regardé comme exécrable, et il fut interdit de le prononcer. Berachoth, ꝟ. 60, 1. Aussi ne se trouvet-il jamais comme nom propre sous la plume des Septante, qui étaient des traducteurs juifs. Par contre, ceuxci se croient le droit de substituer le nom des « c démons » à d’autres noms moins précis usités dans les livres hébreux. Ainsi ils appellent formellement SatinSvc » les idoles de différents noms : se’îrîm, Lev, , xvir, 7 ; II Par., xi, 15 ; Mdîm, Deut., xxxii, 17 ; Ps. cvi (cv), 37 ; elilîm, Ps. xcvi (xcv), 6 ; d’autres idoles de nom inconnu, Bar., iv, 7, 35, et même des animaux du désert. Is., xxxiv, 14. Dans le livre de Tobie, iii, 8, il est question d’un irovïipbv Satuôvtov du nom d’Asmodée. Voir Asmodée. Dans la Sagesse, H, 24, le démon est appelé 8t160Xo ; . « Cependant nulle part la littérature hébraïque ne confond Satan avec une divinité adorée dans les contrées voisines ; nulle part il n’est dit que les hommages adressés à Baal ou à Moloch s’adressent en définitive à Satan. » Dëllinger, Paganisme et judaïsme, trad. J. de P., Bruxelles, 1858, t. iv, p. 232. Les Septante se contentent seulement d’identifier les idoles avec les démons en général. — Josèphe, Bell, jud., VII, vi, 3, donne le nom de 5a : y.6vux aux âmes des méchants qui sont morts. Celte idée n’a rien de biblique. 4° Dans le Nouveau Testament. — L’Évangile et les écrits des Apôtres nomment fréquemment Satan et les démons. Le Sauveur dénonce formellement aux hommes leur ennemi acharné, « celui qui peut perdre en enfer le corps et l’âme. » Matth., x, 28. Non seulement cette révélation rie court plus le risque de favoriser la démonolâtrie, mais elle est absolument nécessaire pour expliquer l’existence du mal moral au sein de l’humanité, faire comprendre la vie de Jésus-Christ venu « pour détruire les œuvres du démon », I Joa., iii, 8, et justifier la lutte à laquelle il convie ses disciples.

III. L’action du démon d’après l’Écriture. — 1° Au paradis terrestre. — La Genèse ne parle que d’un serpent. Saint Jean, à la dernière page des Saints Livres, déclare que Satan, le diable, est le serpent antique dont il est question à la première page. Apoc, xii, 9 ; xx, 2. C’est par son envie, par sa jalousie contre l’homme, que la mort est entrée dans le monde à la suite du péché. Sap., ii, 24 ; Hebr., ii, 14. Il est ainsi homicide dès le commencement. Joa., viii, 44. Sa jalousie contre l’homme vient de ce qu’il n’a pas su lui-même demeurer dans la

vérité, Joa., vni, 44, et qu’avec ses anges il a été précipité dans le feu éternel. Matth., xxv, 41.

2° Dans le livre de Job. — Satan se présente avec les anges au conseil de Dieu, parle de ses allées et venues sur la terre et tient sur Job des propos ironiques. Job, i, 6, 8, 10. Cette description fait partie du prologue d’un livre poétique, et les anciens interprètes ne se sont pas crus obligés d’y voir autre chose qu’une allégorie, destinée à rendre sensible ce que l’intelligence humaine ne pourrait naturellement concevoir. Knabenbauer, In Job, Pans, 1885, p. 41-43. Le récit « renferme au moins un fonds de vérité historique, savoir : que Satan a été l’instrument dont Dieu s’est servi pour éprouver son serviteur, et qu’il n’a rien pu que ce que Dieu lui a permis. Mais ces communications de Dieu avec de purs esprits, comprenons-nous comment elles se passent, et pouvons-nous les exprimer d’une manière simple et vulgaire autrement que par des métaphores ? Le langage figuré était donc ici nécessaire ». Le Hir, Le livre de Job, Paris, 1873, p. 234. — Satan fait le tour de la terre et la parcourt en tous sens. Job, i, 7. C’est « l’adversaire, le diable qui rôde partout comme un lion rugissant, à la recherche d’une proie ». I Petr., v, 8. — Satan accuse Job de ne pratiquer la vertu que par intérêt. Job, i, 10, 11 ; ii, 5. Saint Jean dit de lui : « Il est à bas l’accusateur de nos frères, lui qui les accusait nuit et jour en présence de notre Dieu. » Apoc, xii, 10. — Satan frappe Job dans ses biens et dans son corps, de même qu’il frappera les sept premiers maris de Sara, fille de Raguel, Tob., iii, 8, et beaucoup d’autres malheureux dont parle l’Évangile. Luc, xiii, 16, etc. — Les afflictions que Satan inflige à Job ne triomphent pas de sa vertu. Donc, non seulement Dieu commande en maître à Satan et règle la mesure de ses attaques, I Cor., x, 13 ; mais l’homme lui-même peut résister au démon et lui disputer victorieusement son âme.

3° Dans le livre de Tobie. — Contre le démon homicide Asmodée, la prière adressée à Dieu obtient le secours du saint ange du Seigneur Raphaël. Tob., iii, 8, 24, 25. Les hommes ne sont donc pas abandonnés à la malice des démons ; les bons anges interviennent pour les défendre. — Ce qui fait que le démon peut violenter les hommes, c’est que ceux-ci s’abandonnent à leurs mauvaises passions. Tob., vi, 17. — Raphaël, après que, sur son ordre, le jeune Tobie a brûlé le foie du poisson, « se saisit du démon et le relègue dans le désert de la haute Egypte. » Tob., viii, 3. À partir de ce moment, le démon n’inquiète plus Sara. Le désert était regardé comme l’habitation du démon. Bar., iv, 35. Notre -Seigneur dit que, « quand l’esprit immonde est sorti d’un homme, il s’en va errer dans les lieux arides et y cherche le repos sans le trouver. » Matth., xii, 43. C’est pourquoi les Septante parlent de 8ai(idvia dans deux passages d’Isaïe, xiii, 21 ; xxxiv, 14, où il n’est question que de bêtes du désert. Saint Jean fera aussi de Babylone ruinée et déserte l’habitation des démons et le repaire des esprits immondes. Apoc, xviii, 2. Ce séjour est assigné au démon parce qu’il n’y trouve point d’hommes auxquels il puisse nuire.

4° Dans les Évangiles et les Épîtres. — 1. La plupart des passages évangéliques qui parlent du démon se rapportent à des possessions. Voir Démoniaques. — 2. Le démon ne cherche pas seulement à nuire aux corps ; il s’attaque surtout aux âmes. Il les tente pour les faire tomber dans le mal, Act., v, 3 ; I Cor., vii, 5 ; II Cor., il, 11 ; il leur dresse des embûches, Ephes., iv, 27 ; vi, 11, et cherche à les prendre dans ses liens. I Tim., iii, 6, 7 ; vi, 9 ; II Tim., ii, 26. Pécheur dès l’origine, il travaille à faire commettre le péché. I Joa., iii, 8. Pour mieux guetter sa proie, il se tient dans les régions aériennes voisines de la terre. Ephes., vi, 12. Il en veut surtout à ceux qui sont chargés de procurer le salut des âmes, II Cor., xii, 7 ; il contrarie leurs projets, I Thess., ii, 18,