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COUSIN


très douloureuse et est suivie de gonflement et d’inflammation. — La femelle du cousin pond jusqu'à trois cents œufs à la fois, et sept générations d’insectes peuvent se produire dans une même année. Mais l’animal passe par différentes phases avant d’atteindre son développement. Ses œufs, déposés dans l’eau croupissante, donnent d’abord des vers très petits, qui, après s'être transformés trois fois en quinze jours ou trois semaines, passent à l'état de nymphes, se dégagent enfin de leur dernière enveloppe par une opération très compliquée et s’envolent dans l’air. Les poissons et les oiseaux détruisent heureusement un très grand nombre de ces insectes à leurs différents états. Les cousins se rencontrent sous les latitudes les plus opposées, dans les pays très chauds et humides et dans les régions les plus froides, comme la Suède, la Norvège et la Laponie. Réaumur, Mémoires pour servir à l’histoire des insectes, Paris, 1734-1742, t. iv, p. 573-624. On ne peut se garantir de la piqûre

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Le cousin. Grossissement du double.

des cousins qu’en s’enveloppant complètement de couvertures ou de voiles. On donne également à ces insectes le nom de « moustiques », dérivé par transposition de lettres de l’espagnol mosquitos, qui vient lui-même de musca, « mouche. »

II. Les cousins dans la Bible. — 1° La troisième plaie d’Egypte. — Aaron reçut l’ordre de frapper la poussière avec sa verge ; « les kinnim se mirent alors sur les hommes et sur les animaux, et toute la poussière du pays fut changée en kinnîm dans toute la terre d’Egypte. » Exod., viii, 16, 17 ; Ps. civ, 31. D’après Josèphe, Ant. jud., II, xiv, 3, les kinnîm seraient des poux, çâîtpé ; . Bochart, Hierozoicon, Leipzig, 1796, t. iii, p. 456, défend cette interprétation. Dans le Talmud, Schabbath, t. 52, 1, le mot kinnâh veut aussi dire « pou ». Buxtorf, Lexicon chaldaicum, Leipzig, 1875, p. 536. D’autres ont voulu traduire kinnîm par « tiques », nom désignant des arachnides qui sucent le sang des animaux, ou encore des acarides, autres insectes qui s’attaquent à la fois aux animaux et à l’homme. Wood, Bible animais, Londres, 1884, p. 636-638. Le mot employé par les Septante, o-xvtçeç, est le nom de petits vers qui piquent le bois. Aristote, Hist. anim., ix, 9, 1. Le axvttli est idendique au y.vi’l/, insecte qui vit sous l'écorce des arbres, Théophraste, Hist. plant., II, viii, 3, et les verbes xvâu et xvîîu, dont le radical, analogue à celui de l’hébreu kên, se retrouve dans -/.vîi et dans trxvty, ont le sens de « gratter, chatouiller, piquer, irriter », d’où xvi « (iôç, « démangeaison. » Aristophane, Plutus, 974. Le mot des Septante désignerait donc en général un insecte qui pique et produit des démangeaisons. On admet communément qu’aucun animal ne répond mieux que le cousin aux exigences du texte. Rosenmûller, Scholia in Exo dum, Leipzig, 1795, p. 436-437 ; Gesenius, Thésaurus, 1835, p. 694 ; Hupfeld, Die Psalmen, Gotha, 1871, t. iv, p. 122 ; Delitzsch, Die Psalmen, Leipzig, 1874, t. ii, p. 169 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. ii, p. 325 ; Thalhofer, Erklàrùng der Psalmen, Ratisbonne, 1880, p. 618. L’identification des kinnîm est d’ailleurs rendue indubitable par la similitude de leur nom hébreu avec celui que portent dans l’ancien égyptien les cousins ou moustiques. Ces insectes étaient désignés dans la vallée du Nil par le mot henemmés, que l’auteur de l’Exode s’est contenté de transcrire en hébreu. Brugsch, Uieroglyphisch-demotisches Wôrterbuch, Leipzig, 1868, t. iii, p. 1103. Il faut remarquer enfin que le texte sacré parle de poussière changée en kinnîm, ce qui suppose des insectes venant du dehors et non des parasites nés sur le corps des hommes ou des animaux. — Les moustiques ont toujours paru en grande quantité en Egypte après l’inondation. Hérodote, ii, 95, en fait mention. Il dit que pour s’en garantir on montait sur des espèces de tours, ou bien que sur le sol on se couvrait des filets qui servaient à la pêche et que les insectes ne traversaient jamais. Philon, qui écrivait à Alexandrie, Vita Mosis, i, Paris, 1640, p. 618-619, représente ce moucheron comme « un animal très petit, mais néanmoins fort désagréable ; car il ne se contente pas d’incommoder superficiellement, il excite des démangeaisons insupportables et très douloureuses. Il pénètre même à l’intérieur des oreilles et des narines, et s’attaque en volant à la pupille des yeux, si l’on n’y prend garde ». Origène, Homil. iv in Exod., t. xii, col. 332, qui vivait aussi en Egypte, dit également de l’insecte mentionné par l’Exode : « C’est un animal qui se soutient sur des ailes pour voler dans les airs ; mais il est si petit et si léger, qu’il échappe aux regards de ceux qui n’ont pas une vue très perçante. Quand il s’est posé sur le corps, il le perce d’un dard très aigu, et si l’on avait peine à le voir voler, on ne sent que trop sa piqûre. » Le naturaliste P. Belon, Observations de plusieurs singularités et choses mémorables, etc., Paris, 1553, ii, 35, raconte que, « quand il était au Caire, les cousins le maltraitaient si bien la nuit pendant son sommeil, que le matin son visage était couvert d’efflorescences rouges. Aussi fallait-il dormir à l’abri des moustiquaires, le visage couvert, ou à la partie supérieure des mafsons. » L. de Laborde, Commentaire géographique sur l’Exode, Paris, 1841, p. 32, décrit avec plus de détails le tourment qu’infligent les moustiques : « Un seul cousin d’Egypte suffit pour mettre au supplice. Est-on éveillé, on entend un bourdonnement aigu qui s’approche, s'éloigne, se déplace et cesse tout d’un coup. C’est l’insecte qui s’est posé, qui a déjà percé la peau et occasionné une démangeaison insupportable. Chassé une première fois, il revient une seconde fois, une troisième, et alors ce ne sont plus des souffrances, c’est une fièvre que l’on éprouve… Après un long séjour en Orient, j’avais adopté la manière de dormir des habitants. C’est le plus sûr moustiquaire et la meilleure garde contre les cousins. On étend son manteau ou sa couverture par-dessus sa tête, et l’on dort paisiblement sous cet abri. » — Quand Moïse déchaîna la troisième plaie, les Égyptiens durent donc cruellement souffrir, et leurs animaux mêmes ne furent pas épargnés. D’ordinaire les habitants savaient se garantir pendant la nuit en s’enveloppant complètement ; et, durant le jour, les grands se faisaient accompagner de porteurs d'éventails pour écarter les insectes. Mais, sur l’ordre du Seigneur, le fléau prit un caractère miraculeux qui en étendit l’action douloureuse à toute la population. Les moustiques ne naissaient pas de l’eau, puisque la merveille s’accomplissait à une époque de l’année où le Nil était au plus bas et où tous les canaux et tous les bassins étaient desséchés ; ils sortaient de la poussière, si prodigieusement nombreux, que, selon la remarque de l'écrivain sacré, la poussière se changeait en moustiques. Les Égyptiens se trouvaient