Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/486

Cette page n’a pas encore été corrigée
933
934
COPTES (VERSIONS) DE LA BIBLE


importance, a été d’abord connu par une collection de documents sur papyrus, provenant du couvent de Saint-Jérémie, près du Sérapéum, et publiés par E. Révillout, Papyrus coptes, Paris, 1876. Le nom de memphitique lui conviendrait très bien ; on évite pourtant de le désigner ainsi, pour ne pas le confondre avec le bohaïrique, qui pendant si longtemps a été connu sous ce nom. — 5° Uakhmimien, dialecte dans lequel sont rédigés les fragments trouvés dans les fouilles du cimetière d’Akhmim (l’ancienne Chemmis on Panopolis). M. Bouriant, à qui revient l’honneur "de la première publication de ces documents, avait provisoirement nommé ce dialecte bachmourique.

Ces cinq dialectes forment deux groupes bien caractérisés : le groupe du nord, représenté pour le moment par le bohaïrique seulement, et celui du sud par les quatre autres dialectes connus. Toutefois la transition d’un groupe à l’autre n’est pas brusque. Les dialectes du sud, géographiquement plus rapprochés du bohaïrique, s’en rapprochent aussi davantage au point de vue phonétique. Le bohaïrique et le sahidique marquent les deux extrêmes.

— Pour les particularités de ces dialectes, voir H. Ilyvernat, Étude sur les versions coptes, dans la Revue biblique, juillet 1896, p. 431-432 ; L. Stern, dans la Zeitschrift fur àgyptische Sprache, 1886, p. 129, et Koptische Grarnmatik, Leipzig, 1880 ; Steindorf, Koptische Grammatik, in-12, Berlin, 1894, p. 3 ; M. Bouriant, Les papyrus d’Akhmim, dans les Mémoires de la mission archéo* logique du Caire, t. i, p. 243-304 ; F. Krall, Mittheilungen, ii-m, p. 54-55.

Et maintenant quel est l’âge relatif de chacun de ces dialectes ? La question est de la plus haute importance au point de vue scripturaire, mais nous ne sommes pas encore à même de la résoudre d’une manière définitive. D’après Athanase de Kôs, que nous avons déjà cité, le dialecte sahidique était de son temps encore, c’est-à-dire au xie siècle, parlé au Caire ; d’où nous pouvons conclure que les autres dialectes de la Haute Egypte avaient déjà disparu. Pour les manuscrits écrits en akhmimien et en moyen égyptien, sinon pour ceux du dialecte fayoumien, c’est un brevet d’antiquité, dont le paléographe copte prendra note. Mais on ne peut de cela conclure que le sahidique est moins ancien que les dialectes qu’il a supplantés, de même qu’on ne pourrait conclure que le bohaïrique est plus récent que le sahidique pour l’avoir repoussé vers le sud, et finalement supplanté. Le fayoumien comme le dialecte de la Moyenne Egypte ont dû coexister dès les premiers siècles de notre ère avec l’akhmimien et le sahidique, d’une part, et le bohaïrique, d’autre part : rien dans la grammaire de ces différents dialectes ne nous permet de supposer le contraire. Le fait qu’on possède des manuscrits d’un dialecte plus ancien que le plus ancien monument d’un autre dialecte ne prouve absolument rien.

Aucun des manuscrits bohaïriques que nous avons ne remonte au delà du IXe siècle ; peut-on en conclure que le dialecte bohaïrique n’existait pas déjà depuis plusieurs siècles, même comme langue littéraire ? Ce que nous savons pourtant, c’est que du temps d’Athanase de Kôs les deux seuls dialectes qui eussent quelque importance littéraire étaient le bohaïrique et le sahidique. À cette époque les patriarches monophysites se décidèrent à transporter leur résidence d’Alexandrie au Caire. Ils apportèrent naturellement avec eux le dialecte bohaïrique. Le sahidique, qui avait absorbé l’akhmimien et le moyen égyptien, et probablement aussi le fayoumien, commença à reculer vers le sud, son lieu d’origine ; en sorte que maintenant le bohaïrique est devenu la langue sacrée de toute l’Égyp te - Cette conquête des dialectes du nord sur ceux du sud fut d’autant plus facile, que ceux-ci avaient déjà depuis longtemps commencé à faiblir, au moins comme langues parlées, devant la langue arabe, plus fortement implantée dans les environs du Caire. Le bohaïrique lui même ne résista pas longtemps à la poussée de la langue des conquérants ; il ne tarda pas à donner des signes évidents d’une décadence qui eût été sans doute retardée de plusieurs siècles, s’il était resté à l’abri des couvents de Nitrie, où il avait grandi.

II. Ce qui nous est parvenu des versions coptes. — 1° En bohaîr’jue. — Il n’existe à ma connaissance aucun exemplaire complet de la version bohaïrique. Suivant Quatremère, Recherches, p. 118, Marcel possédait un exemplaire entier de cette version, qu’il avait fait copier au Caire, sur le manuscrit du patriarche des Coptes. Cette copie fut achetée à la mort de Marcel, avec le reste de ses livres, par l’Anglais J. Lee de Hartwell, dans la bibliothèque duquel elle a été vue, en 1847, par J. Bardelli (Daniel copto-memphitice, Pise, 1849, p. xviii-xx professeur des langues sanscrite et copte à l’université de Pise. Elle n’était déjà plus complète ; Bardelli n’y a trouvé que les livres suivants : Genèse, Exode, Lévitique, Psaumes, Osée, Joël, Amos, Abdias et les autres petits Prophètes, les quatre Évangiles, les quatorze Epitres de saint Paul, l’Épltre de^ saint Jacques et la première Épitre de saint Pierre ; en tout quarante et un volâmes in-4°. Cette Bible, disait une note de Marcel, avait été copiée au Caire, par les soins du patriarche copte et par ses propres écrivains, sur un exemplaire très ancien, qu’il assurait être du vil" siècle et qu’il possédait dans sa bibliothèque, où Marcel l’avait vu. Les volumes qui manquaient à l’exemplaire du savant français avaient été consumés dans l’incendie de sa maison au Caire. Le texte copte du manuscrit original était d’une très belle écriture et accompagné d’une version arabe littérale. Cette version copte était fort différente de celle qui avait été publiée en Angleterre. (Marcel sans doute fait ici allusion à l’édition du Pentateuque et du Nouveau Testament de Wilkins.) La version arabe était faite sur la version copte et ne ressemblait à aucune des versions arabes publiées jusqu’alors. Il serait intéressant de savoir ce que sont devenus les manuscrits du patriarche des Coptes. Quant à la copie de Marcel, elle doit être encore en Angleterre ; peut-être les quarante et un volumes ontils été dispersés en différentes collections. — L’Étude sur les versions coptes, dans la Revue biblique, octobre 1896, p. 541-547, donne la liste des principaux manuscrits contenant des portions plus ou moins considérables de la version bohaïrique, principalement d’après les notes que j’ai recueillies au cours de mes recherches dans les bibliothèques publiques ou privées de la France et de l’étranger.

2° En sahidique. — Nous ne possédons non plus aucun exemplaire complet de cette version ; bien peu de manuscrits contenant dans leur entier tel ou tel livre de l’Ancien ou du Nouveau Testament nous sont parvenus. A mesure que le dialecte bohaïrique supplantait le dialecte memphitique, les manuscrits écrits dans ce dernier dialecte étaient mis au rebut, quand ils n’étaient pas dépecés pour servir aux usages les plus divers. Quelques rares manuscrits ont échappé à peu près indemnes à la ruine de la littérature sahidique ; d’autres nous sont parvenus plus ou moins mutilés ; la plupart, ensevelis pendant des siècles sous les décombres des couvents ruinés, sont devenus depuis une centaine d’années un objet de spéculation pour les Arabes maraudeurs, qui les vendent au détail et au poids de l’or aux explorateurs et aux touristes. Quelques feuillets d’un manuscrit se trouvent ainsi dispersés dans les différentes bibliothèques publiques ou privées de l’Europe. Plusieurs milliers de ces précieux parchemins contiennent des fragments plus ou moins considérables des Saintes Écritures en sahidique ou dans quelque autre dialecte de la Haute Egypte. La plupart de ces collections ont été publiées dans les dix dernières années, séparément et telles quelles, dans le mémo désordre qui avait présidé à leur formation. Il reste à classer tous ces fragments au point de vue paléographique d’abord, puis au point de vue de la linguistique