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COMMERCE


précieuses et d’or. Ceux de Haran, de Ghen, d’Éden, les commerçants de Saba, les Assyriens de Chelmad, trafiquent avec toi. Ils sont tes fournisseurs pour les objets les plus précieux, les étoffes d’hyacinthe et brodées, les ballots de vêtements de prix, empaquetés et liés de cordes, tels qu’on les voit sur tes marchés. Les vaisseaux de ïharsis sont à la tête de ton trafic, et toi, tu es opulente et glorieuse au sein même de la mer. » fꝟ. 12-25. C’est cette ville qui sera châtiée et que « siffleront les commerçants étrangers », y. 36. Un des derniers prophètes, Zacharie, ix, 3, 4, constate que Tyr « a amassé l’argent comme la poussière, et l’or comme la boue des rues », mais qu’elle sera punie. Au temps des Machabées, Tyr achetait à Ménélaùs une partie des vases d’or soustraits au Temple de Jérusalem. II Mach., iv, 32. À l’époque de saint Paul, il est encore parlé de cargaisons débarquées dans le port de Tyr. Act., xxi, 3.

5° Les Hébreux. — À un moment de leur histoire, les Israélites se mêlèrent au mouvement commercial des peuples voisins. Salomon entreprit de créer au profit de son royaume un trafic d’exportation et d’importation. Il commença par bâtir Palmyre, au cœur même du désert, pour protéger contre les attaques des Bédouins pillards les caravanes qui se rendaient de Palestine aux bords de l’Euphrate. Il inaugura ensuite les relations commerciales directes avec l’Egypte et fit venir de ce pays des chevaux et des chars. III Reg., x, 28, 29 ; II Par., r, 16, "17. Cf. Cûa. Des achats semblables étaient faits chez les Héthéens et, les Syriens. Mais il eut surtout à cœur de créer une marine de commerce. Déjà, dans les plus anciens temps, les tribus de Dan et d’Aser avaient possédé des ports et des bateaux sur la Méditerranée. Jud., v, 17. Mais leur commerce fort restreint n’avait pas dû tarder à disparaître devant la concurrence phénicienne. C’est du côté de la mer Rouge que Salomon tournait ses regards, vers ces rivages dont la conquête de lTdumée, faite par David, II Reg., viii, 14, lui assurait le libre accès. Il s’entendit donc avec les Phéniciens, seuls capables de lui fournir des marins. De concert avec Hiram, roi de Tyr, dont les navires ne pouvaient plus depuis longtemps se rendre dans le golfe Persique, il fonda, au fond du golfe Élanitique, les deux ports d’Élath et d’Asiongaber. Voir la carte, t. i, col. 1099. De là, les matelots phéniciens et israélites partaient de conserve pour aller chercher à Ophir, probablement dans l’Inde, les produits précieux de la contrée. Ils rapportèrent à Salomon une énorme quantité d’or, des pierres précieuses, de l’ivoire, du bois de santal, des singes et des paons. III Reg., ix, 26-28 ; x, 11, 22 ; II Par., ix, 10, 11. Ces voyages maritimes en commun se faisaient tous les trois ans. III Reg., x, 22. Les Israélites en étaient fort émerveillés. On comparait la femme forte à un de ces navires marchands qui s’en allaient au loin chercher les produits étrangers, Prov., xxxi, 14, et Salomon lui-même appelait « poudre de marchand » les aromates précieux qu’on apportait à Jérusalem. Cant., iii, 6 (hébreu). Le grand commerce ne survécut pas à Salomon chez les Israélites. Le schisme paralysait les forces de la nation et interdisait les expéditions lointaines. Un instant les deux rois de Juda et d’Israël, Josaphat et Ochosias, s’entendirent pour fréter une flotte à Asiongaber et l’envoyer chercher l’or d’Ophir. Mais le prophète Éliézer signifia à Josaphat que le Seigneur réprouvait cette alliance, et la flotte périt dans le port même. Ochosias proposa de renouveler la tentative ; mais le roi de Juda n’y consentit point. III Reg., xxii, 49, 50 ; II Par., xx, 36, 37. Les Hébreux exportaient principalement les produits de leur sol, l’huile en Egypte, Ose., xii, 1 ; le blé, le baume, le miel, l’huile, la résine chez les Phéniciens. Parmi les objets manufacturés, la Rible ne cite que les ceintures. Prov., xxxi, 24. Voir Heeren, De la politique et du commerce des peuples dans l’antiquité, trad. Suckau, Paris, 1830-1833, t. v, p. 308-332, 474-489 ; Lindsay, Hïstory of merchant Shipping and ancient Commerce, Londres, ]

1874-1876, 1. 1, p. 26-27, et dans ce volume la carte des routes suivies par les caravanes ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iii, p. 358-397 ; Ancessi, Atlas géographique et archéologique, Paris, 1876, carte xiv, mouvement commercial de l’ancien monde. En somme, les Hébreux des temps antérieurs à la captivité n’ont pas été de grands commerçants comme les Arabes et les Phéniciens. Voici ce que dit Josèphe, Cont. Apion., i, 12, à ce sujet : « Pour nous, nous habitons un pays qui n’est pas maritime, nous n’avons pas de goût pour le commerce ni pour les relations qu’il établit avec les étrangers. Nos villes sont loin de la mer, et nous cultivons avec soin la contrée qui nous est échue. Plus que tous les autres, nous aimons à veiller sur l’éducation des enfants et à observer les lois, parce que nous regardons la fidélité à les exécuter comme l’affaire la plus nécessaire de la vie. En outre, comme notre manière de vivre est toute particulière, rien dans les temps anciens n’a pu nous faire contracter avec les Grecs des relations comme en avaient les Égyptiens pour l’exportation ou l’importation, et comme les Phéniciens, qui, habitant les bords de la mer, s’adonnent par cupidité au trafic et.au négoce. » Josèphe appuie surtout sur la conformation de la Palestine pour expliquer la répugnance des Hébreux à l’égard des entreprises commerciales. Cette raison n’est certainement pas la principale. Plusieurs grandes routes de caravanes passaient par leurs pays ; ils auraient pu avoir sur la Méditerranée un port à Joppé, sans parler de ceux qui furent créés par Salomon dans le golfe Élanitique. Leur situation géographique était même excellente au point de vue commercial. On ne peut pas dire non plus qu’ils sont restés inactifs sous ce rapport faute d’aptitude ; la suite de leur histoire a montré ce dont ils étaient capables dans les affaires de trafic et de finance. La raison capitale est la première qu’indique Josèphe. L’esprit de la loi, sinon la lettre, éloignait les Israélites de tout contact avec les étrangers idolâtres, et cet éloignement n’avait fait que s’accentuer avec le temps, comme le montrent les hésitations de saint Pierre, quand il lui fallut entrer en rapport avec les gentils. Act., x, 13-16, 28 ; xi, 3. Du reste, le dessein de la Providence fut certainement de les tenir ainsi à l’écart des autres peuples, tant que leur mission principale dut être la garde de la révélation. Quand leur rôle religieux eut pris fin, ils purent se livrer au commerce et mettre ainsi en relief une des aptitudes les plus remarquables de. leur race. Cf. Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 393.

6° Les Romains. — Au commencement du vu siècle avant J.-C., les Grecs se mirent à faire une concurrence sérieuse aux Phéniciens dans tout le bassin de la Méditerranée. Sur toutes les côtes, ils fondèrent des colonies et des comptoirs. Les deux grands sièges que subit Tyr, sous Nabuchodonosor (574) et sous Alexandre le Grand (332), portèrent un coup terrible à la prospérité commerciale de cette cité, et Carthage devint le principal entrepôt du trafic phénicien. La prépondérance de Tyr sur les marchés méditerranéens passa aux Grecs. La Sainte Écriture ne fait pas mention de l’activité commerciale de ces derniers. Ils furent, du reste, bientôt évincés par les Romains, qui s’emparèrent successivement de tous les grands centres de l’ancien trafic, de l’Espagne (202), de la Macédoine (148), de la Grèce (146), de Carthage (146) et enfin de l’Asie Mineure et de la cote de Syrie. Le premier livre des Machabées, viii, 3, mentionne la conquête de l’Espagne, où les Romains « firent passer en leur pouvoir les mines d’argent et d’or qui s’y trouvent ».

A l’époque évangélique, ce sont les publicains qui, par leur présence, nous révèlent l’existence d’un transit commercial assez considérable en Palestine. Ces publicains sont chargés de percevoir, pour le compte de Rome, les impôts indirects, et spécialement les droits de péage au passage des caravanes marchandes. Ils perçoivent ces