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CALMET


la-Horgne, auprès de Commercy (Meuse), et mort à l’abbaye de Senones, le 25 octobre 1757. Après avoir fait ses humanités au prieuré de Breuil et sa rhétorique (1687-1688) à l’université de Pont- à -Mousson, il prit l’habit monastique à l’abbaye bénédictine de Saint-Mansuy de Toul, et, son noviciat terminé, y fit profession religieuse, le 23 octobre 1689. Ses études de philosophie, commencées à Saint-Èvre de Toul, furent achevées, aussi bien que celles de théologie, à Munster, en Alsace. Dans la bibliothèque de cette abbaye, dom Augustin trouva la petite grammaire hébraïque de Buxtorf et quelques livres de la Bible dans leur langue originale. Cette circonstance insignifiante eut une influence notable sur le reste de sa vie et fui le point de départ de ses travaux sur l’Écriture. Il emporta secrètement ces volumes dans sa cellule et entreprit d’apprendre l’hébreu sans le secours d’aucun maître. Au bout de quelques mois il obtint, non sans peine, la permission de consulter le ministre luthérien Fabre, qui administrait la communauté protestante de Munster et avait une connaissance étendue de la langue hébraïque. Ce ministre donna des conseils à l’étudiant bénédictin et lui prêta la Bible hébraïque de Hutter et un des dictionnaires de Bux-’toi’f. À l’aide de ces ressources, Calmet devint bientôt assez habile pour comprendre le texte sacré dans l’original. Il s’appliqua aussi au grec, dont l’intelligence ne lui était pas moins nécessaire pour les travaux d’exégèse qu’il méditait. Ordonné prêtre le 17 mars 1696, dom Calmet passa à Moyen-Moutier et devint membre d’une académie que dirigeait dom Hyacinthe Alliot le jeune. Là et à Toul, où il résida quelques mois, sous un maître habile et avec le concours de ses confrères, il entreprit dans les écrits des Pères et des commentateurs modernes, dans les classiques grecs et latins et mémo dans les relations des voyageurs, des recherches sur tout ce qui pouvait éclairer les passages difficiles de l’Écriture. En six années, il rédigea presque tout son Commentaire sur l’Ancien Testament et quelques dissertations spéciales. Sur deux d’entre elles, concernant Ophir et Tanis, il consulta, au mois de mai 1704, Mabillon. Nommé sous-prieur de l’abbaye de Munster, en 1704, il termina avec l’aide de jeunes religieux, dont il dirigeait les études, l’œuvre qui devait l’immortaliser, et qu’il résolut définitivement alors de publier. Dans ce dessein, au commencement de 1706, il demanda au chapitre général de sa congrégation l’autorisation d’aller habiter Paris, afin d’y consulter des livres rares qui ne se trouvaient pas en Lorraine et d’y chercher un éditeur. Sur le conseil de l’abbé Duguet et malgré des avis diil’érents, Calmet se décida à donner son ouvrage en français, comme il avait été écrit. Le premier volume parut en 1707, chez Pierre Émery, sous le titre de Commentaire littéral sur tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament. Les autres, imprimés successivement, furent accueillis avec faveur par le clergé et les savants. Ce légitime succès n’empêcha pas les critiques. En 1709, Fourmont attaqua vivement, dans deux lettres, divers passages du commentaire sur la Genèse, et reprocha à l’auteur de n’avoir pas tenu assez compte des interprétations des rabbins. L’année suivante, Calmet publia quatre Lettres de l’auteur du Commentaire littéral sur la Genèse, pour servir de réponse à la critique de M. Fourmont contre cet ouvrage. Richard Simon, dans une série de lettres adressées au P. Souciet et à d’autres savants, discuta plusieurs explications de Calmet. Comme la publication de ces lettres ne fut pas autorisée, la réponse de Calmet resta inédite. Ces hostilités, les lenteurs du libraire et un procès intenté au typographe pour avoir imprimé la traduction française de la Bible de Sacy retardaient l’apparition des deux derniers volumes du Commentaire. La première édition ne fut terminée qu’en 1716 ; elle compte 23 volumes in-4°. Dans l’intervalle, l’auteur avait été nommé, en 1715, prieur de Lay-Saint-Christophe. Mais, pour satisfaire aux nombreuses dernmdes du public, l’éditeur dut, avant l’achèvement de

la première édition, en entreprendre une deuxième, dont le tome premier parut en 1714, et le dernier en 1720 ; elle compte 25 volumes in-4°. Une troisième et magnifique édition en 9 volumes in-f° fut publiée à Paris encore, de 1724 à 1726. Le dominicain Jean Dominique Mansi fit une traduction latine du Commentaire, Lucques, 1730-1738, 8 tomes en 9 volumes in-f° ; réimprimée à Augsbourg et à Gràtz, chez Weith frères, 1734, etc., 8 in-f°, et à Wùrzbourg, 1789-1793, 19 in-4°. Un religieux somasque, François Vecelli, publia une autre traduction latine à Venise, 1730, 6 in-f", et à Francfort-surle -Mcin, 6 in-f".

Dans ce vaste ouvrage, on trouve : 1° une introduction particulière à chacun des livres de la Bible ; 2° en regard du texte latin de la Vulgate, la version française de Sacy ; 3° sur un ou plusieurs versets, au bas de chaque page, un commentaire plus ou moins étendu ; 4° des dissertations, au nombre de cent quatorze, sur des points spéciaux et les passages difficiles du texte sacré. Le commentaire expose principalement le sens littéral. L’auteur reproduit les meilleures explications des exégèles anciens et modernes, auxquelles il ajoute au besoin ses propres interprétations. Résultat d’immenses recherches et de connaissances fort étendues, son œuvre laisse à désirer. « Dom Calmet avait travaillé avec un peu trop de vitesse, sa critique n’était pas toujours assez judicieuse, assez sûre. Versé médiocrement dans la connaissance de l’hébreu, il n’avait point étudié les autres langues orientales, qui offrent, pour la parfaite intelligence du langage des livres de l’Ancien Testament, un secours précieux et même indispensable. » Quatremère, dans le Journal des savants, octobre 1845, p. 595. Il a passé trop légèrement sur des textes difficiles, et s’est contenté trop souvent d’aligner des interprétations différentes, sans porter de jugement et laissant le, lecteur indécis. Son style est négligé, diffus et trop uniforme. Lui-même l’a justement caractérisé dans une lettre à dom Matthieu Petitdidier, du 20 novembre 1711 : « J’écris tout simplement comme je pense, sans détours et sans finesse. » Néanmoins son ouvrage, « d’un travail très considérable et d’une grande érudition » (Ellies Dupin, Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques du xra’siècle, t. vii, p. 174), a ramené les commentateurs de la Bible à une sage exégèse, et a servi longtemps de base aux études scripturaires des catholiques et des protestants eux-mêmes.

En préparant son Commentaire, Calmet recueillit les matériaux d’une Histoire de l’Ancien et du Nouveau-Testament et des Juifs, pour servir d’introduction à l’Histoire ecclésiastique de M. Fleury, Paris, 1718, 2 in-4°. Des additions nombreuses augmentèrent l’étendue des autres éditions, 1718, 4 in-12 ; 1725, 7 in-12 ;

; 1737, 4 in-4° ; 1770, 5 in-4°. Elle fut traduite en anglais

par Th. Stadehouse, 2 in-f », Londres, 1740 ; en allemand, 1 in-f°, Augsbourg, 1759, et en latin, 5 in-8°, Augsbourg. L’auteur s’était flatté de la voir devenir « classique » ; mais elle était trop étendue et sa composition trop peu attachante pour mériter cet honneur. L’Histoire de la vie et des miracles de JésusChrist, in-12, Paris, 1720 ; Nancy, 1728, extraite en partie de l’ouvrage précédent, contient un exposé clair et concis de la vie du Sauveur et une bonne dissertation sur sa double généalogie.

Devenu abbé de Saint -Léopold de Nancy, Calmet acheva son Dictionnaire historique, critique, chronologique, géographique et littéral de la Bible, commencé dès 1711. Son but était de populariser la science sacrée et de disposer par ordre alphabétique toute la substance du Commentaire et d’autres documents qu’il n’y avait pas employés. Les deux in-folio dont l’ouvrage se composait étaient complètement imprimés avant la fin de 1719, lorsque les éditeurs s’imaginèrent que le débit serait plus prompt et plus assuré, s’ils y joignaient des gravures. Ils firent donc exécuter cent cinquante planches, très médiocres, qu’ils y insérèrent. L’auteur, de son côté, ajouta au tome premier une Bibliothèque sacrée, ou liste très étendue et non sans