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COLOSSIENS (ÉPITRE AUX)


étroites. Saint Paul est arrivé à Rome au printemps de 61, et il est resté captif dans cette ville pendant deux ans. L’Épître aux Colossiens a été écrite avant celle aux Philippiens ; or il a dû se passer un changement de situation pour l’Apôtre entre les deux dates d’envoi de ces lettres, car dans la lettre aux Philippiens il se plaint vivement de ceux qui l’entourent, i, 15, 17 ; ii, 21, et il parle d’une condamnation à mort comme possible, ii, 17. Quelque temps a été nécessaire pour la production de ces événements. Qu’il y ait eu un intervalle de temps entre les deux lettres, cela est prouvé encore par le fait que Luc et Aristarque, qui avaient accompagné l’Apôtre de Césarée à Rome, sont nommés dans l’Épître aux Colossiens, iv, 10, 14, tandis qu’il n’en est pas parlé dans l’Épître aux Philippiens. Leurs salutations auraient été certainement envoyées à Philippes, puisque Aristarque était de Thessalonique, Act., xx, 4, et que saint Luc avait habité longtemps à Philippes. Donc, si nous plaçons la lettre aux Philippiens vers la fin de 62 ou le commencement de 63, celle aux Colossiens aura été écrite fin de 61 ou commencement de 62. Disons cependant que Cornely, Introductio specialis in N. T. libros, p. 449, rappelant que saint Paul demande à Philémon de lui préparer un logement, croit que celui-ci a le ferme espoir de sa libération prochaine ; par conséquent il a écrit vers le terme de sa première captivité, fin de 63.

IV. Texte, de l’Épître aux Colossiens. — Mort, The New Testament in original Greek, t. ii, p. 127, affirme que l’Épître aux Colossiens, et plus spécialement le second chapitre, a été mal conservée dans les temps anciens, et que quelques-unes des difficultés qui s’y rencontrent sont dues à cette corruption primitive. Comme le critique anglais ne donne aucune preuve de cette affirmation, il est permis de n’en pas tenir compte. Nous reconnaîtrons cependant certaines altérations, dues à une cause spéciale. Ainsi qu’il sera dit plus loin, l’Épître aux Colossiens présente de nombreux points de contact avec l’Épître aux Ephésiens. Aussi, comme dans les textes parallèles, les Évangiles synoptiques, par exemple, il y a eu quelquefois assimilation de textes. Les diverses variantes ont été discutées par Lightfoot, Epistle to t/ie Colossians, in-8°, Londres, 1892, p. 244-255 ; de l’examen il ressort que le manuscrit B (Vaticanus) est celui qui se montre le plus exempt d’assimilations. Il préfère donc ses leçons même à celles qui sont le mieux appuyées ; il ne faudra pas oublier cependant que ce manuscrit a une tendance à supprimer tous les mots qui lui paraissent superflus. La variante la plus intéressante est celle de ii, 18 : S w (oùx) êwpaxev s[16aTS-jwv, « pénétrant dans les choses qu’il n’a point vues ; » ou ci swpav.sv i(16 « Te - Jwv, « scrutant les choses qu’il a vues. » Le sens est tout différent. Lightfoot affame que la deuxième leçon est la plus ancienne et la meilleure ; nous serions moins affirmatif que lui. Il est à remarquer que la première leçon semble avoir été le texte officiel, adopté par l’Église d’Orient et par celle d’Occident.

V. Analyse de l’Épître. — On peut distinguer le préambule, le corps de l’Épître et l’épilogue. Le corps de l’Épître se subdivise en deux : une partie dogmatique et une partie morale. La partie dogmatique se divise à son tour en deux : une partie didactique et une polémique. Dans la partie morale, il faut distinguer les exhortations générales et les exhortations spéciales.

I. préambule, i, 1-14. — 1° Salutation apostolique de Paul et de Timothée aux frères de Colosses, i, 1-3. — 2° Action de grâces, i, 3-8, offerte à Dieu pour les vertus de foi, d’espérance et de charité, 3-5, dont sont animés les Colossiens depuis qu’ils ont reçu l’Évangile par le ministère d’Épaphras, 5-7, qui a rendu d’eux à saint Paul un bon témoignage, 8. — 3° Prière, 9-13, pour que les Colossiens croissent dans la science du salut en force et en constance, 9-11, comme héritiers du royaume de Jésus-Christ, 12-13.

II. corps de L’Épître, i, 14-iv, 7. — § I. Partie dogmatique, i, 14-m, 1. — i. Partie didactique, i, 14-23.

— 1° Dignité de Jésus-Christ, i, 14-20, notre rédempteur, i, 14, par rapport : 1. à Dieu le Père, dont il est l’image, 15 ;

— 2. à toutes les créatures qui ont été créées et qui sont conservées par lui, 16-17 ; — 3. à l’Église, dont il est le chef, en vertu de sa résurrection et parce qu’en lui habite la plénitude de la divinité, 18-19. — 2° Grandeur de l’œuvre de Jésus-Christ, i, ’20-23, qui, par sa mort réconciliatrice, est l’auteur du salut pour toutes choses au ciel et sur la terre, 20, et pour les Colossiens, s’ils demeurent dans la foi et ne se laissent pas détourner de l’Évangile, 21-23. — n. Partie polémique, i, 21-m, 1.

— 1° Préambule, i, 24-n, 8, dans lequel l’Apôtre explique pourquoi il écrit. — 1. Il a été chargé par Dieu d’annoncer le mystère de Jésus-Christ, i, 24-29.

— 2. Sollicitude de saint Paul pour les Églises de Colosses, de Laodicée, et pour tous ceux qui ne l’ont pas vii, afin qu’ils arrivent à la pleine connaissance du mystère de Dieu, ii, 1-3. — 3. Exhortation à ne pas se laisser séduire, mais à continuer à marcher avec Jésus-Christ, affermis parla foi et attachés à JésusChrist, ii, 4-7. — 2° Mise en garde contre les hérétiques, ii, 8111, 1. — 1. Principes, ii, 8-16 : Ne pas se laisser séduire par la philosophie, qui s’appuie sur la tradition des hommes et non sur Jésus-Christ, 8, en qui habite toute la plénitude de la divinité, 9 ; — en qui nous avons tout et qui est le chef de tous les anges, 10 ; — en qui vous avez été circoncis spirituellement, ayant été ensevelis avec lui par le baptême et étant ressuscites en lui par la foi, 11-12 ; — qui vous a vivifiés avec lui, vous qui étiez morts, vous a pardonné vos péchés ; qui a détruit le décret qui vous était contraire et a triomphé en la croix des esprits mauvais, 13-15. — 2. Ligne de conduite, n, 16- iii, 1 : Ne plus tenir compte des lois cérémonielles juives, ombres de la réalité, qui est JésusChrist, 16-17 ;

— ni rendre un culte aux anges, en pénétrant des choses qui n’ont point été vues ( variante : en scrutant des visions) ; mais ne tenant pas ferme au chef, qui est Jésus-Christ, 18-19 ; — ni s’astreindre à des pratiques ascétiques, pernicieuses, et qui ne sont bonnes qu’en apparence, 20-23.

§ n. Partie morale, iii, 1-iv, 6. — i. Exhortations générales, iii, 1-18. — 1° Puisqu’ils sont ressuscites, qu’ils cherchent les choses d’en haut, iii, 1-4 ; — 2° qu’ils dépouillent le vieil homme de péché, en rejetant les vices des païens, 5-9 ; — 3° qu’ils revêtent l’homme nouveau, fait à l’image de Jésus-Christ, et pratiquent les vertus chrétiennes, surtout la charité et la paix de Jésus-Christ, 10-16 ; — 4° qu’ils s’édifient mutuellement par des hymnes, des psaumes, et que toutes leurs actions se fessent au nom du Seigneur Jésus, 17. — n. Exhortations spéciales, m, 18-iv, 1. — 1° Devoirs mutuels des époux, iii, 18-19 ;

— 2° des enfants et des parents, 20-21 ; — 3° des esclaves et des maîtres, iii, 22-iv, 1, — m. Conseils généraux de conduite comme conclusion, iv, 2-6. — 1° Persévérer dans la prière, et prier pour lui, iv, 2-4. — 2° Prudence dans les actions et dans les paroles, 5-6.

/II. épilogue, iv, 7-18. — 1° Mission de Tychique et d’Onésime, iv, 7-9. — 2° Salutations diverses, 10-15. — 3° Communication de cette lettre à l’Église de Laodicée, 16-17. — 4° Adieu autographe et bénédiction apostolique, 18.

VI. Canonicité et authenticité. — Dès les premiers temps de l’Église chrétienne, l’Épître aux Colossiens a été acceptée comme écrite par saint Paul, et par conséquent rangée parmi les écrits canoniques. En établissant la canonicité de cette Épitre, nous en prouvons en même temps l’authenticité.

Nous la trouvons mentionnée dans la liste la plus ancienne de livres canoniques que nous avons, le canon de Xluratori. Mais elle était connue plus anciennement, voir Clément Romain, I Cor., xxiv, 1, t. i, col. 260, et