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CILIGE — CILICIE


fig. 11, col. 23, III Reg., XX, 31, et par les pénitents (voir plusloin). C’était l’habit ordinaire des prophètes. ls., xx, 2 ; cf. II (IV) Reg., i, 8 ; Matth., iii, 4 ; Marc, i, 6. — A l’époque de Notre -Seigneur, le manteau militaire que les Juifs voyaient sur les épaules des soldats romains était d’un tissu analogue et portait aussi le nom de uâfoi ou sagum. Gesenius, Thésaurus lingux hebrœæ, p. 1336. Les étoffes en poils de chèvre et surtout en poils de chameau servaient aussi à la confection des tentes, cf. Act., xviii, 3, etc., et des voiles de navires. On trouve déjà ces tissus employés pour le Tabernacle. Exod., xxxv, 6, 23, 26 ; xxxvi, 14 ; Nùm., xxxi, 20. Les « noires tentes de Cédar », Cant., i, 4, étaient en poils de chèvre, comme les tentes des Bédouins d’aujourd’hui. Les voiles de navires se fabriquaient en Cilicie, et la trame devait en être assez serrée pour ne pas donner passage au vent.

111. Sa signification symbolique. — La couleur sombre du saq, sa grossièreté, sa rudesse, le rendaient particulièrement apte à caractériser la pauvreté, l’austérité, le deuil et la pénitence. Dans l’Ecclésiastique, xxv, 24, la figure repoussante d’une méchante femme est comparée au saq. Le cilice était surtout l’indice de la pénitence. De là l’expression biblique si souvent répétée : « faire pénitence dans le saq et dans la cendre. » III Reg., xxi, 27 ; IV Reg., vi, 30, etc. ; I Par., xxi, 16 ; Job, xvi, 16 <hébreu, 15) ; Ps. xxix, 12 ; xxxiv, 13 ; lxviii, 12 ; Is., m, 24 ; xv, 3 ; lviii, 5 ; Jer., iv, 8 ; vi, 26, etc. ; Lam., il, 10 ; Ezech., vii, 18 ; xxvii, 31 ; Dan., ix, 3 ; Joël, i, 8 ; Jon., iii, 5, 6, 8 ; Esth., iv, 1 ; I Mach., ii, 14, etc. ; Matth., xi, 21 ; Luc, x, 13. Chez les Hébreux, une pénitence extraordinaire n’allait pas sans ce signe extérieur. Jonas, iii, 8, dit même qu’à Ninive on couvrit du cilice les hommes et les animaux, ce qu’il faut entendre des chevaux, des mulets et des chameaux, auxquels on ôta leurs riches caparaçons pour mettre à la place, en signe du deuil général, . de grossières couvertures. Rosenmùller, Scholia in Prophetas-minores, Leipzig, 1813, t. ii, p. 406.

H. Lesêtre.

CILICIE. — I. Description. — La Cilicie est située sur les bords de la Méditerranée autour du Taurus. Elle était, d’après Strabon, xi, i, 2 ; xiii, 2 ; xiv, v, 1 ; divisée en deux parties, la Cilicie entôtaurique, qui comprenait la chaîne du Taurus et les vallées qu’elle forme, et la Cilicie cxôtaurique, située entre le Taurus et la mer. Il rattache la description de la Cilicie entôtaurique à celle de la Cappadoce. Strabon, xi, i, 2 ; xii, 2 (voir Cappapoce). Cette contrée était divisée en un grand nombre de petits États, dont chacun avait son chef et dont les habitants ne vivaient guère que de brigandage. Strabon, xii, vii, 3.

La Cilicie exôtaurique ou Cilicie propre était elle-même divisée en Cilicie rude ou Trachée, et en Cilicie de plaine. Strabon, xiv, iii, 1. La Cilicie Trachée formait une sorte de demi-cercle convexe, presque entièrement occupé par les ramifications du Taurus. D’après Strabon, xiv, v, 2, « lie commençait à la ville de Coracésium, limite de ce pays et de la Pamphylie. Pline, H. N., v, 93, donne pour limite aux deux provinces la rivière Mêlas, située à trente-neuf kilomètres à l’ouest de Coracésium. Il est très probable que Strabon veut seulement dire que la première ville qu’on rencontre en Cilicie est Coracésium. À partir du cap Anemurium, situé à environ deux cent dix kilomètres à l’est de Coracésium, la plaine devient plus large et moins rocheuse. Une chaîne de montagnes qui part du Taurus se dirige vers le cap Anemurium ; quelques géographes l’ont identifié avec l’Imbarus dont parle Pline, H. N., v, 8 ; mais c’est une conjecture. Entre les deux chaînes se trouve le Calycadmus, le plus grand fleuve du pays, qui coule du nord-ouest au sud-est. Il est alimenté par les torrents du Taurus, et son cours est parfois très rapide. La côte présente un grand nombre de ports et d’abris naturels, et les montagnes offrent des refuges presque inattaquables. Sur les hauteurs poussent des arbres dont le bois est excellent pour les constructions navales. Stra bon, xiv, v, 3 et 6. Les principales villes de la côte sont après Coracésium, Amaxia, Syédra, Celenderis, Holmi, Elæussa.

La Cilicie de plaine, ou Cilicia Campestris, est séparée de la Trachéptide par le cours du Lamus. Strabon, xiv, v, 6. Complètement fermée au nord par le Taurus, elle est limitée à l’est par l’Amanus, et entoure le golfe d’Issus. Strabon, xii, ii, 2. Elle comprend les vallées du Cydmus, du Sarus et du Pyramus. Les alluvions de ce dernier fleuve sont pour le pays une source considérable d’accroissement, de là l’oracle qui avait cours dans l’antiquité : « Un jour viendra où vos fils verront le Pyramus aux flots d’argent, reculant de plus en plus les limites du continent, atteindre jusqu’aux bords sacrés du Cypre. » Strabon, xii, i, 5. Les principales villes de la Cilicie de plaine étaient Soli, Tarse, sur le Cydnus ; Mopsueste, sur le Pyramus ; Mgex, sur le bord de la mer ; Anazarbe, sur un affluent du Pyramus, et Issus, près de laquelle Alexandre défit Darius. Une des principales productions de la Cilicie de plaine était le safran. Pline, H. N., xm. 5 ; xxi, 31. Les Ciliciens élevaient aussi de nombreux troupeaux de chèvres et fabriquaient avec leurs poils un tissu que les Romains appelaient cilicium, d’où est venu notre mot cilice. Cicéron, In Verr. Act. ii, i, 38, 95 ; Tite-Live, xxviii, 7 ; Virgile, Georg., iii, 311, etc. Voir ClUCE. La Cilicie dans son ensemble formait donc une contrée fermée. On y avait accès par d’étroits passages. Xénophon, Anab., i, ii, 19 et 21 ; Hérodien, iii, 8. De tous ces défilés le plus célèbre était les Pyles ou Portes ciliciennes, appelées aussi Pyles de Cilicie et de Syrie, situées près de Tyane, ville de Lycaonie, au nord du Taurus. Strabon, xii, ii, 7. C’est par cet endroit que passèrent Cyrus le jeune, Alexandre le Grand et Septime Sévère, en venant du nord. Saint Paul la traversa en sens contraire, dans son deuxième voyage, en allant de Cilicie en Lycaonie. Act. xv, 41-xvi, 1. Ce défilé porte aujourd’hui le nom de Gulek Boghaz. Avec la Syrie, la Cilicie communiquait par les Pyles Amanides. Polybe, xii, 17. Cf. Neumann, Neues Jahrbuch fur Philologie, 1883, p. 527 et 535. Une grand’route passait, à l’époque romaine, entre l’Amanus et la mer, pour aller de là à Issus, à Tarse et aux Pyles Ciliciennes.

On ignore de quelle race étaient les Ciliciens ; s’ils n’étaient pas Araméens, tout au moins étaientils fortement mélangés avec eux ainsi qu’avec les Phéniciens. Ils prirent une part très active à la fondation des colonies phéniciennes. — Josèphe identifie à tort la Tharsis, dont il est question dans la Genèse, x, 4, avec la Cilicie. « Les Ciliciens, dit-il, s’appelaient autrefois Tharses. » Ant. jud., i, vi, 1. Le seul nom de ce genre qui figure sur les inscriptions cunéiformes est le nom de la ville de Tarse, appelée Tarzou et non Tarschisch. E. Schrader, Keilinschriften und Geschichtsforschung, in-8°, Giessen, 1878, p. 241.

II. Histoire. — 1° La Cilicie au temps des Assyriens.

— C’est au livre de Judith, i, 7, que se rencontre la première mention de la Cilicie dans la Bible. Après sa victoire sur Arphaxad [Voir Arphaxad], Nabuchodonosor, c’est-à-dire Assurbanipal [Voir Assurbanipal], roi des Assyriens, envoya chez un certain nombre de peuples d’Occident des messagers pour faire reconnaître sa puissance. Parmi ces peuples sont nommés : « ceux qui habitent la Cilicie. » Ces peuples chassent honteusement les messagers et refusent obéissance. Holopherne est alors envoyé avec une armée pour les châtier. D’après le texte grec, Judith, ii, 21-23, « ils partirent de Ninive et, après trois jours de marche, ils arrivèrent à Baictilaith, et de Baictilaitli [Voir Bectileth] ils campèrent près de la montagne qui est à gauche de la haute Cilicie, et il (Holopherne) prit toute son armée, ses fantassins et ses cavaliers et ses chariots, et il pénétra dans les montagnes, et il rompit Phud et Lud et ses troupes pillèrent tous les enfants de Rassès et les enfants d’Ismaël, etc. » La Vulgate donne une rédac-