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CHUS — CHUSAI


rencontre purement fortuite de termes simplement homophones, mais bien un seul et même mot, c’est que les Égyptiens s’en servent, tout comme la Bible à ses dernières époques, pour désigner les peuples situés au sud de l’Egypte. Dès la xiie dynastie, par conséquent plusieurs siècles avant Moïse, les monuments égyptiens nous parlent du pays de Kes. (Lenormant, Histoire ancienne, Paris, 1882, t. ii, p. 109 ; Dillmann, Ueber die Anfànge des axumitischen Reiches, Berlin, 1879, extrait des Abhandl. der kônigl. Akad. der Wissenscliaften, 1878, p. 180.) Sous la xviiie et la xixe dynasties, l’héritier présomptif de la couronne d’Egypte portait le litre de fils royal ou prince de Kes (Masperp, Histoire ancienne, p. 115 et 194). Nul rapprochement philologique ne vaut de telles constatations, qui s’appuient sur les documents mêmes de l’histoire.

Chez les Assyriens, le Cousch africain est également connu et se lit Kusu. (Voir Strassmaier, Alphabetisches Verzeichniss der assyrischen Worter, Leipzig, 1880, n° 4570 ; Schrader, Die Keilinschriften und das Aile Testament, Giessen, 1883, p. 86-88 ; Fried. Delitzsch, Assyvische Grammatik, Berlin, 1889, p. 105.) Pour eux, comme pour les Égyptiens, le pays de Cousch est situé au sud de l’Egypte. C’est ce qu’établissent nettement les inscriptions cunéiformes à partir d’Asarhaddon, par conséquent à partir du vue siècle avant notre ère : Mat Musur mat Kusi, « pays d’Egypte et pays de Cousch, » deux noms accolés l’un à l’autre à chaque instant comme deux pays limitrophes. (Cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. i, pi. 48, n. 4, 1. 2 et n. 5, 1. 5 ; t. iii, pi. 35, n. 4. Cf. A. Delattre, VAsie occidentale dans les inscriptions assyriennes ; extrait de la Revue des questions scientifiques, 1884-1885, p. 149.)

Il ja donc accord parfait entre l’Écriture d’une part, les monuments assyriens et égyptiens de l’autre, pour placer au sud de l’Egypte un pays de Cousch ou d’Élhiopie, selon la traduction plus ou moins heureuse des Septante. Pouvons-nous ajouter que les Couschites d’Asie dont nous parle aussi la Bible sont également mentionnés dans les sources profanes ? Si le mot Éthiopien était.Féquivalent de Couschite, il n’y aurait pas lieu d’hésiter : les anciens géographes grecs ou latins ont reconnu des Éthiopiens en Asie comme en Afrique. Malheureusement, nous l’avons dit, les Éthiopiens pour les classiques ne sont pas seulement les Couschites, mais bien encore tous les peuples d’origine inconnue et particulièrement les populations de couleur. Peut-être même faut-il ajouter qu’aucun écrivain grec ou latin, en dehors des Septante, n’a soupçonné le rapport ethnologique possible entre les Éthiopiens et les Couschites. Seul, Josèphe, qui appartient plus au monde juif qu’à la civilisation grecque, nous a parlé expressément de Couschites asiatiques. Il nous dit, en effet, que les Éthiopiens sur lesquels régna Cousch, le fils de Cham, avaient gardé la mémoire de leurs origines, qu’ils se nommaient eux-mêmes Couschites et que les peuples de l’Asie leur donnaient aussi ce nom : Aidions yip, wv v t p£ev (Xo’jç), eti xa vûv ùitb éauToiv ts xal twv =v tt]’A<rîa 71âvTwv Xouffxtoi xa).oijvTai. Josèphe, Ant. jud., i, vi, 2.

On s’est demandé récemment s’il ne fallait point voir les Couschites asiatiques de la Bible dans les Kassi de la Babylonie, dont les rois KaraindaS, Agukakrimi, KarahardaS, s’intitulent eux-mêmes, au xve siècle avant notre ère, rois de Babilu, rois de Sumer et d’Akkad, rois des Kassi (Cuneiform Inscript, of Western Asia, t. iv, pi. 38, n. 3, 1. 6-11 ; t. v, pi. 33, col. 1, ]. 31-34 ; t. ii, pi. 65, 1. 8-11). On a pareillement recherché si nos anciens auteurs grecs et latins n’avaient point nommé des Couschites sans le savoir, quand ils parlent des Cissiens, Ki<T<Tiot, du pays de Ki-yai-t) (Hérodote, iii, 91 ; v, 49, 52 ; vu, 62, 86), ou bien encore des Cosséens, Kosaoeiot, situés à l’est du Tigre (Polybe, v, 44 ; Strabon, xi, 13, 6 ; xvi, 1, 18 ; Diodore, xvii, 111 ; Plutarque, Alex., lxxii ;

Arrien, Exp. Al.,-m, 15, l ; Hist. ind., xl ; Pline, H.N., vi, 31 ; Ptolémée, vi, 3). Ces questions ont été particulièrement débattues entre assyriologues, sans que la lumière ait pu se faire complètement. (Voir Fried. Delitzsch, Die Sprache der Kossâer, Leipzig, 1884 ; Hommel, Geschichte Babyloniens und Assyriens, Berlin, 1885, p. 275-278 ; Oppert, La langue cissienne, dans la Zeitschrift fur Assyriologie, 1888, p. 423 ; Halévy, ibid., 1889, p. 205 ; Jensen, ibid., 1891, p. 340 ; Lehmann, ibid., 1892, p. 328.) Quelque opinion que l’on embrasse sur la nature de la langue des Kassi, ou sur la distinction à établir entre les Kassi, les Cosséens et les Cissiens, il reste parfaitement possible que ces divers peuples aient dû leur nom et leur origine à l’antique race des Couschites. Cette hypothèse — car ce n’est encore qu’une hypothèse — concorderait même très bien avec la Genèse, qui place, comme on l’a vii, le berceau des Couschites daus la plaine de Sennaar. Mieux vaut en tout cas s’en tenir provisoirement à cette opinion, que de corriger l’auteur de la Genèse avec cette confiance ingénue qui caractérise la critique rationaliste. Cf. Schrader, Keilinschriften, p. 31-32 et 87-88. « La supposition, dit avec raispn M. Halévy, que l’auteur de la généalogie des Noachides aurait confondu le Cousch d’Afrique avec les Cashshites de Babylonie ne repose sur rien ; le double Cousch des Hébreux est parallèle a la double Ethiopie des Grecs. » Dans la Revue critique, 1884, i, p. 486. Ajoutons seulement que quand la double Ethiopie des Grecs ne correspondrait pas au double Kus de l’Écriture, celle-ci n’en demeurerait pas moins digne de foi et de toute créance. L. Méchineau.

2. CHUS (hébreu : Kûs), personnage de la tribu de Benjamin, appelé Chusi dans la Vulgate. Ps. vii, 1. Voir Chusi 2.

3. CHUS, localité dont le nom est omis dans notre Vulgate actuelle (Judith, vii, 8), mais qui est mentionnée sous cette forme dans l’ancienne Vulgate (P. Sabatier, Bibliorum Sacrorum versiones anliquse, seu Vêtus Italica, 31n-f°, Reims, 1743, t. i, p. 762) et, dans le texte grec du livre de Judith, vii, 18, sous les formes Xoij ; , Xouctî, Xouae ! , O-j ?. Voir Fred. Fritzsche, Handbuch zu den Apokryphen, t. ii, 1853, p. 159. Chusi était située dans les environs d’Écrebel. Nous lisons, en effet, dans le texte grec : « Et les fils d’Ésau montèrent avec les fils d’Ammon, et ils campèrent dans les montagnes vis-à-vis de Dothaïn, et ils envoyèrent de leurs hommes au midi et à l’est vis-à-vis d’Écrebel, qui est près de Chus (Chusi), sur le torrent de Mochmor, et le reste de l’armée des Assyriens était campé dans la plaine. » Il existe, à neuf kilomètres au sud de Naplouse, l’ancienne Sichem, un petit village appelé Kùzah ou Quzâh (voir la carte de la tribu d’Éphraïm), qui pourrait être le Chusi de Judith. Celte identification est d’autant plus plausible que Kùzah est dans le voisinage, c’est-à-dire à huit kilomètres environ à l’ouest d’Ékrebéh ouvqrabéh (voir t. i, col. 152), dont Écrebel peut n’être qu’une forme un peu altérée. Cf. The Survey of Western Palestine, Memoirs, 1882, t. ii, p. 285-286. F. Vigouroux.

    1. CHUSA##

CHUSA (XouïS : , Luc, viii, 3), intendant de la maison (ÈîttTpoTvoç) du roi Hérode Antipas. Sa femme Joanna était du nombre des saintes femmes qui suivaient le Seigneur dans ses missions et subvenaient à ses besoins et à ceux des Apôtres. Luc, viii, 3. Quelques interprètes ont pensé, mais sans pouvoir le prouver, que Chusa était ce fJaucXixô ; ou officier royal dont Jésus avait guéri le fils, et qui avait cru avec toute sa maison. Joa., iv, 46. En tout cas, il devait être bien disposé à l’égard du Sauveur, puisqu’il laissait à sa femme la liberté de le suivre. E. Levesque.

    1. CHUSAÏ##

CHUSAÏ (hébreu : Ifûsaï ; Septante, Xovui), appelé