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CHARBON DES BLÉS — CHARBONS ARDENTS


le genre Ustilago, et la plus répandue est l’Ustilago Carbo (fig. 201). — Les spores, souvent mêlées aux graines des céréales, germent avec elles, et presque simultanément, sur les sillons où le semis a été opéré. Il en sort un court filament, invisible à l’œil nu, nommé promycélium, qui donne naissance au bout de peu de jours à d’autres spores secondaires, d’une extrême petitesse, ou sporidies, destinées à se développer immédiatement, si le vent les porte en un milieu favorable" ; autrement elles périssent. Ce milieu n’est autre que l’épiderme du blé naissant ; le parasite pénètre par un stomate, vers le collet de la jeune racine, pousse un long tube, qui se ramifie à l’intérieur

201. — Ustilago Caria. « , épi d’orge charbonné. — 6, groupe triftore vu par le (Jo3, grossi. — c, spores à divers états de germination, grossies environ 1 000 fois. — d, Promycelium.

des tissus de la plante nourrice, jusqu’à l’envahir totalement. C’est le vrai mycélium, dont les branches innombrables ne se contentent pas de serpenter dans les espaces libres entre les cellules, mais poussent des suçoirs jusque dans la profondeur de leur protoplasma. Malgré la pénétration intime de tous ses organes par le parasite, le blé continue son développement normal en apparence. L’état maladif et les lésions internes ne se manifestent qu’au moment où le charbon va former ses spores, juste à l’époque où le blé va lui-même fleurir. Alors les filaments mycéliens se pelotonnent en un glomérule mucilagineux à l’intérieur de l’ovaire de la graminée, se substituent à la graine qui devait y prendre naissance, et remplissent l’organe d’une multitude de cellules noires, imitant la poussière de charbon, qui ne sont autres que les spores et qui ont donné son nom à la maladie. À la maturité l’ovaire charbonné se rompt, et les spores incluses sont mises en liberté. Celles-ci ne germent pas immédiatement, mais restent à un état de vie latente, qui peut se prolonger de longues années, jusqu’à une prochaine saison favorable, au retour des pluies.

Les anciens considéraient les maladies du charbon comme une dégénérescence spontanée des grains. Adanson et B. de Jussieu reconnurent leur origine parasitaire. Il ne faut pas confondre le charbon avec la carie des blés, champignon entophyte du genre Tilletia, très voisin de l’Ustilago par ses caractères et son mode de vie. Il en diffère par le promycelium non cloisonné et les filaments

sporigènes, qui ne subissent pas d’altération mucilagineuse. Enfin les spores ne sont pas mises en liberté par la rupture spontanée de l’organe qui les renferme. La principale espèce est le Tillelia Caries. F. Hy.

II. Exégèse.— Le siddâfôn est un des fléaux dont Dieu menace son peuple s’il est infidèle, Deut., xxviii, 22 ; et qu’il détournera s’il vient le prier dans son temple. III Reg., viii, 37-40 ; II Par., vi, 28. Ce fléau sévit plusieurs fois. Amos, iv, 9 ; Agg., ii, 18 (hébreu, 17). Les traducteurs grecs et latins ne sont pas bien fixés sur le sens de ce mot, qu’ils rendent de façons très diverses. D’après son étymologie, sadaf, « brûler, noircir, » le siddâfôn pourrait être le charbon ou la carie. L’union habituelle de ce fléau avec le yêrâqôn, autre maladie des céréales, la rouille, rend plausible cette opinion maintenant assez suivie. Quant à distinguer entre le charbon ou la carie, il est probable que les Hébreux, comme souvent les cultivateurs de nos jours, confondaient les deux maladies à cause de leur étroite ressemblance.

E. Levesque.

    1. CHARBONS ARDENTS##

CHARBONS ARDENTS (hébreu : gahélét, d’un radical gâl}al, probablement analogue à l’arabe gâham, « allumer le feu, » Gesenius, Thésaurus, p. 280, et gahâlê’êS, e charbons de feu ; » Septante : av6paxe ; « vpé ; , aMSpaxti, « brasier ; » Vulgate : carbones, ignis, pruna). La Sainte Écriture parle assez souvent de charbons ardents, mais en différents sens.

1° Sens propre. — Le charbon noir (non enflammé), péfyâm, se change en gahélét, « charbon ardent », Prov., xxvi, 21. Exceptionnellement, pêhâm, qui vient du radical pâham, « être noir, » désigne aussi des charbons enflammés. Is., xliv, 12 ; liv, 16. Ils sont employés pour brûler l’encens. Lev., xvi, 12 ; pour cuire le pain, rôtir la viande, Is., xliv, 12, 19, et les poissons, Joa., xxi, 9 ; Tob., vi, 8 ; vin, 2 ; pour chauffer la forge, Is., liv, 16, faire bouillir la chaudière, Ezech., xxiv, 11, et alimenter les réchauds au moyen desquels on se garantit du froid. Jer., xxxvi, 22 ; Joa., xviii, 18. Le Sage, pour marquer le danger des mauvaises fréquentations, les compare aux charbons enflammés qui brûlent les pieds de ceux qui marchent dessus. Prov., vi, 28.

2° Sens métaphorique. — 1° Dans sa description du crocodile, l’auteur de Job, xli, 12, dit de l’animal :

Son souffle allume des charbons,

Et la flamme se précipite de sa bouche.

Par cette métaphore hardie, l’écrivain sacré veut donner une idée du curieux effet de lumière qui se produit quand le saurien projette violemment de l’eau par la bouche ou les narines, sous les rayons d’un soleil éclatant. Voir Crocodile. — 2° Le charbon ardent est parfois considéré comme le dernier reste qui pourrait rallumer le feu. Il devient alors l’image du dernier héritier d’une famille. Pour apitoyer le roi en faveur d’Absalom, une femme de Thécué, à laquelle Joab a fait la leçon, vient trouver David et se plaint qu’on veuille éteindre « le charbon qui reste », c’est-à-dire mettre à mort son dernier enfant. II Reg., xiv, 7. La Vulgate rend ici le mot gahélét par scintilla. C’est sous cette forme d’  « étincelle » et non de « charbon enflammé » que la métaphore a passé dans notre langue. La locution proverbiale dont se sert Notre-Seigneur, à la suite d’Isaïe, xui, 3, « ne pas éteindre la mèche qui fume encore, » Matth., xii, 20, n’est pas sans analogie avec celle du livre des Rois, quant à la forme sinon quant au sens. Isaïe, xlvii, 14, se sert aussi de l’image du charbon pour signifier qu’il n’y aura plus de maisons, quand il dit qu’après la ruine de Babylone il ne lui restera plus « ni charbon auquel on se chauffe, ni feu devant lequel on puisse s’asseoir ». — 3° Le Siracide recommande de « ne pas enflammer les charbons des méchants », c’est-à-dire de ne pas exciter leurs mauvais instincts, même par de justes remontrances, « de peur d’être consumé par le feu de leurs forfaits. » Eccli., viii, 13.