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CHANTRES DU TEMPLE — CHAOS


lésukkôt, I Par., IX, 33, en face de celle des prêtres sacrificateurs, dans la cour intérieure, du côté nord. Ezech., XL, 44. C’est là que se conservaient les instruments de musique et les vêtements que les chantres et les exécutants portaient durant les cérémonies.

Nul texte ne détermine le nombre des musiciens employés dans les cérémonies du Temple. Les traditions rabbiniques fixent seulement un minimum de douze chantres pour l’office quotidien. Tr. Erachin, ii, 6. Les lévites n’étaient admis à chanter auprès de l’autel qu’à l’âge de vingt ans accomplis, I Par., xxiii, 27-30, et il fallait avant d’entrer en charge qu’ils se fussent exercés durant cinq années sous la direction de leurs anciens, silté haggibbôrim. Ugolini, Thésaurus, t. xxxil, col. v. Cependant de jeunes lévites se joignaient aux prêtres pour fournir les voix aiguës, mais seulement lorsque le chœur se tenait dans les cours extérieures ; l’accès du parvis des Prêtres n’était permis régulièrement qu’aux lévites remplissant leurs fonctions. Quant aux femmes, elles n’étaient pas admises, selon les rabbins, à chanter dans les cérémonies du culte. Voir Naumbourg, dit* utin

Recueil de chants religieux et populaires des Israélites’, précédé d’une étude historique, Paris, 1874, p. m. Un certain nombre d’auteurs cependant, voir Calmet, Z) issertation sur la musique, dans la Bible de Vence, t. ix, p. 451453, croient que les femmes chantaient dans le Temple. Ils apportent en preuve, sinon le texte de I Par., xxv, 5, — qui n’est qu’une parenthèse dans le dénombrement des musiciens fait par David, — du moins les témoignages d’Esdras et de Néhémie, qui comptent à la reconstruction du Temple, le premier <c deux cents », l’autre « deux cent quarantecinq chanteurs et chanteuses » (la leçon rYn"Wa étant supposée exacte). I Esdr., ii, 65 ; II Esdr.,

vu, 67. On allègue aussi l’autorité des Targums sur l’Ecclésiaste, qui rapporte au service du Temple ce que Salomon dit des splendeurs de son palais et paraphrase ainsi, Eccle., ii, 8 : « J’ai fait dans la maison du sanctuaire des instruments de musique pour les chanteurs et les chanteuses ; » et encore le texte de Philon, Vit. contempl., c. xr, fin, édit. Mangey, 485, 486, qui témoigne de l’usage où étaient les thérapeutes d’alterner leurs chants, composés selon les traditions antiques, entre des chœurs d’hommes et de femmes. Mais de tous ces témoignages il ne résulte nullement que les chanteuses aient pris part aux fonctions du sanctuaire. Si elles apparaissent dans les cérémonies religieuses, Exod., xv, 20, 21 ; Ps. lxviii (lxvii), 12, 26 ; Jud., xxi, 21 ; II Par., xxxv, 25, c’est toujours en dehors du Temple. On sait d’ailleurs que les femmes ne pouvaient franchir l’enceinte du parvis des Israélites. Quant à l’expression nin^y, ’âlàmôt, qu’on

peut à la rigueur prendre au sens obvie dans les textes musicaux (comme si elle désignait les chanteuses, le chœur des jeunes filles. Voir’Almiôt, t. i, col. 333), il est préférable de l’appliquer soit aux cordes « aiguës » des harpes, soit aux sons « élevés » des flûtes, par analogie avec l’acuité de la voix de femme (c’est de la même manière que les Grecs appelaient a-5Xô ; îtapôlvio ; une espèce particulière de flûte de très petite dimension et d’une sonorité aiguë. Voir Athénée, ûeipnos., c. xxiii, xxiv) ; plus simplement on peut, en rapprochant le terme’âlàmôt de la racine by, ’al, le traduire par « voix hautes ». Ce sens s’explique bien par l’expression du livre des Paralipomènes, rihya 1 ; Vns Vpz : « Les lévites chantaient

à voix haute, en élevant le ton, » II Par., xx, 19, expression que la langue syriaque rend exactement par l^i Il n- > beqâlà ràmâ. La version des Septante transcrit ici le mot’âlàmôt sans le traduire : ètù à).ai|xw9.

Dans tout l’Orient, les femmes prenaient part aux cérémonies du culte. En Egypte, dès le temps de l’Ancien Empire, des musiciennes étaient attachées à presque tous les temples. Fr. Leuormant, Histoire ancienne de

l’Orient, 9e édit., t. iii, p. 9. Les femmes juives, en dehors des fonctions religieuses, chantaient et jouaient des instruments dans toutes les réjouissances. Jud., xi, 34 ; Judith, xv, 15 ; 1 Reg., xviii, 6. Salomon, comme tous les rois de l’Orient, entretenait dans son palais des troupes de chanteurs et de musiciennes. Eccl., ii, 8. David lui-même eut des chanteuses à son service. II Reg., xix, 35.

J. Parisot.

    1. CHAOS##

CHAOS, état de l’univers et de la terre en particulier, avant que le Créateur n’en eût ordonné les éléments.

— Dans la Genèse, i, 2, cet état est exprimé par les deux mots tôhû bôhû, qui sont passés dans la langue française pour caractériser le désordre et la confusion. Le mot tôhû vient d’un radical tâhâh, en chaldéen feliâ’, « être vaste et désert ; » bôhû se rattache au radical arabe bâhàh, qui a les deux sens corrélatifs de « être pur et net » et <c être vide ». Les Chaldéens faisaient du désordre primordial une déesse Bahu. Voir F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. i, p. 208. En disant que la terre était tôhû vâbôhû, l’auteur sacré veut donc marquer qu’elle se trouvait alors à l’état d’immensité déserte et vide, dépourvue par conséquent de ce qui a constitué depuis sa physionomie, les reliefs orographiques, les cours d’eau sillonnant des continents, la végétation, les animaux, etc., et de plus la lumière éclairant toute sa surface. Les versions traduisent équivalemment ce sens de l’hébreu. Septante : la terre était iôpiro ; y.a’t àxaTaaxsOaaroç, « invisible et sans préparation, » par conséquent à l’état obscur et informe ; Aquila : xévwpia xal où8 ; v, « un espace vide et rien ; » Symmaque : àpyôv xai àSiàxpiTov, « quelque chose d’inactif et sans ordre ; » Théodotion : xsvbv xal oÙShv, « le vide et rien ; » Vulgate : inanis et vacua, « sans consistance et vide. » Cette dernière traduction et celle des Septante rendent le mieux le sens de l’hébreu. Le mot tôhû se retrouve dans la Bible pour désigner tantôt ce qui est vaste et désert, Deut., xxxii, 10 ; Job, vi, 18 ; xii, 24 ; xxvi, 7 ; Ps. cvn (evi), 40 ; tantôt la dévastation, Is., xxiv, 10 ; la vanité, I Reg., xii, 21 ; Is., xxix, 21 ; xii, 29 ; lix, 4, et ce qui n’est « rien », Is., xiiv, 9 ; xlix, 4. Les deux mots réunis se lisent encore dans Jérémie, iv, 23 : « Si je regarde la terre, elle est tôhû vâbôhû, » c’est-à-dire toute en désordre. Isaïe, xxxiv, 11, reproduit l’expression de la Genèse et l’applique au pays des Iduméens, frappé par le châtiment divin : « On étendra sur lui le cordeau de tôhû et le fil à plomb de bôhû. » Le sens des deux mots n’est donc pas douteux : il implique désordre, confusion, solitude, obscurité, en un mot l’état de la matière informe au début de l’œuvre organisatrice de la puissance divine. Les Grecs donnaient à la matière primordiale le nom de -/io ; . Ils personnifiaient même le chaos et en faisaient un dieu précédant tous les autres êtres. Hésiode, Theog., 116 ; Aristophane, Aves, 693 ; Platon, Conv., 178 b. Cf. Ovide, Metam., i, 5. Les Pères se sont servis du mot chaos pour traduire l’idée représentée par le fô/iû vâbôhû de la Genèse ; mais jamais ils n’ont attaché à ce terme le sens que lui prêtaient les philosophes grecs. Ils se sont contentés d’appeler chaos l’état de la matière primordiale créée par Dieu, comme l’enseigne le premier verset de la Genèse, et déjà soumise à l’action des lois générales posées par lui. Voir S. Bonaventure, Sentent., lib. ii, dist. xii, art. i, q. 3, édit. Vives, t. ii, p. 532 ; Pétau, De theolog. dogmat., de mund. opificio, I. ii, 1-10 ; iii, 1-4, édit. de 1868, t. iv, p. 237-244 ; F. Vigouroux, La cosmogonie mosaïque, Paris, 1882, p. 67-68. Les partisans du concordisme entre le récit de la Genèse et les systèmes eosmogoniques modernes pensent que le tôhû vâbôhû marque l’état de la terre pendant la condensation de la nébuleuse primitive, telle que la décrit Laplace dans l’exposé de sa célèbre hypothèse. Voir Cosmogonie, et Motais, Origine du monde, Paris, 1888, p. 58-61. — Dans la parabole du mauvais riche, Abraham dit à celui-ci, qui est enseveli dans l’enfer : « Entre