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CHAMPSNEUFS — CHANAAN

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Cum brevi, accurata et litîerali obscuriorum verborum <ic sententiarum explanatione, in-8°, Paris, 1648. — S" Davidis suspiria, in-12, Paris, 1659 ; in-24, Cologne, 1673 ; in-18, Avignon, 1837. Traduit en espagnol, en français et en polonais. — 4° Axiomata evangelica Christi Domini et Aposlolorum verbis concepta, in-12, Paris, 1659.

C. SOMMERVOGEL.

CHANAAN. Hébreu : Kena’an ; Septante : Xavaiv. Ce nom apparaît comme nom de pays deux siècles avant l’Exode, sous la forme de Kinahhi, dans une dépêche de Bournabouriâs, roi de Babylone, adressée au roi d’Egypte Aménophis IV, et retrouvée parmi les tablettes de Tell el-Amarna. Voir H. Winckler, Der Thontafelfund von El-Amarna, in-4°, Berlin, 1889, t. i, p. 7, lett. viii, lignes 15, 17 ; J. Halévy, La correspondance d’Aménophis III et d’Aménophis IV, dans le Journal asiatique, septembre-octobre 1890, p. 325. Dans la Bible, il est employé comme nom d’homme et comme nom de pays ; — mais, dans ce dernier cas, on dit presque toujours : « le pays de Chanaan. » De ce nom est dérivé aussi le mot « Chananéen », Kena’ânî, Xavavaïo ; , — et comme les Chananéens de la Phénicie étaient les grands commerçants de l’ancien monde, Chananéen, outre sa signification ordinaire, a pris encore celle de « marchand, trafiquant », par exemple, Job, xl, 30 (Vulgate, 25). Même, par un retour assez bizarre, ce même sens s’est communiqué ensuite au nom primitif de Kena’an, par exemple, 1s., xxiii, 8. — On ne saurait douter que le mot ne soit une dérivation de la racine kâna’, qui évidemment signifiait : « se courber, s’incliner, s’abaisser, » signification que le mot a encore en arabe, et à laquelle correspondent ea hébreu les formes dérivées niphal et hiphil, les seules que la Bible nous ait conservées. Il est donc assez naturel que dans le « pays de Chanaan » on ait voulu trouver soit un « pays subjugué ou assujetti » par des conquérants quelconques, soit plus communément un « pays bas et enfoncé ». Voir Amorrhéens, t. i, p. 505. Toutefois cette manière de voir rencontre des difficultés. Le pays qui, selon l’usage biblique, s’appelle « le pays de Chanaan », est en général plutôt un pays de montagnes. Pour soutenir la signification de « pays bas », on a supposé que ce nom avait été donné par comparaison avec les montagnes plus élevées du Liban et du Grand Hermon, ou même avec les plateaux beaucoup trop éloignés du pays araméen, — ou bien l’on admet qu’à l’origine il ne désignait qu’une petite partie de la Palestine, naturellement la plus basse, le long de la côte. — Voir Dillmann, dans Schenkel’s BibelLexikon, art. Kenaan, t. iii, p. 513. Il est vrai que dans Isaie, xxiii, 11, le nom s’applique au pays phénicien, et dans Sophonie, ii, 5, à celui des Philistins ; mais c’est longtemps après la conquête israélite, par laquelle le reste de la Palestine était devenu la terre d’Israël. Il est vrai encore que dans le Pentateuque ces « pays bas » sont habités par le « Chananéen » dans le sens le plus strict du mot (voir ci-dessous), et qu’une ou deux fois, Gen., x, 19 [ ?] ; Deut., i, 7 ; xi, 30, ils s’appellent « la terre du Chananéen » ; mais dans les mêmes livres le « pays de Chanaan » a constamment un sens plus large. Il semble donc que le peuple a plutôt donné son nom aux pays bas de la côte que vice versa. Et dans ce cas le peuple (aussi bien que le « pays de Chanaan » ) tire le sien du petit-fils de Noé, dont il descendait. On est d’autant plus autorisé à chercher l’étymologie du pays dans un nom d’homme, que le mot se retrouve ailleurs comme tel dans la forme Kena’ânâh ou Kèna’nâh. I Par., vii, 10 ; II Par., xviii, 10. Voir Chanaana et Chanana. Ajoutons que d’après Furst, Handwôrterbuch, 3e édit., cette dernière forme serait la plus primitive, et que les anciens Phéniciens connaissaient aussi un personnage du nom de Xvô comme un de leurs ancêtres, dont le surnom Plténix se serait perpétué dans la Phénicie. Voir Sanchoniaton, dans Eusèbe, Prsep. Evang., 1, x, 26, t. xxi, col. 81. Le nom peut donc signi fier soit le « courbé », soit l’  « humble », le « vil » ou quelque chose d’analogue. La dernière signification serait bien appropriée au caractère du fils de Cham. Aussi est-elle donnée déjà par saint Augustin, Enarr. in Ps. civ, 7, t. xxxvii, col. 1394, et par saint Jérôme, De nomin. hebr., t. xxiii, col. 777.

1. CHANAAN, fils de Cham, père des tribus chananéennes. L’histoire sacrée ne nous donne que peu de renseignements sur Chanaan. Il n’en est question que dans les passages suivants : Gen., ix, 18 et 22, où Cham est appelé le « père de Chanaan » ; Gen., IX, 25-27, où se lit la célèbre malédiction de Noé à l’adresse de Chanaan ; Gen., x, 6, où sont énumérés les fils de Cham, et Gen., x, 15-18, qui porte : « Chanaan engendra Sidon son premierna, et Heth, et le Jébuséen…, » avec plusieurs autres noms de tribus chananéennes. Dans les deux derniers passages, l’auteur, sous le nom de Chanaan, semble plutôt désigner sa descendance que l’individu lui-même. Car d’abord la plus grande partie du chap. x est évidemment ethnographique, et au jL 6, parmi les quatre « fils » de Cham, il y a le nom de Mesraïm, dont la forme duelle ne convient guère à un individu, mais convient parfaitement aux deux parties de l’Egypte, la haute et la basse. Ainsi, à cause de la nature différente des documents conservés dans les chap. ix et x, on ne peut conclure de ce dernier passage que Chanaan était le plus jeune des quatre fils de Cham. L’auteur du chap. x ne semble parler que des peuples issus de Chanaan, et il ne les met à la dernière place qu’à cause de leur proximité ; car dans son énumération des peuples il suit généralement un ordre géographique, en commençant par les plus éloignés et en se rapprochant toujours de la Palestine. Voir Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, 2e partie, p. 252^

Au chap. ix, au contraire, nous trouvons bien un individu, fils de Cham, quoique considéré encore en relation avec sa descendance. Les « fils de Noé » qui avec leur père sortent de l’arche, ꝟ. 18, ne peuvent être que trois individus. Et après leurs noms, Sem, Cham et Japheth, il est ajouté immédiatement : « Et Cham fut le père de Chanaan. » La même relation entre Cham et Chanaan est répétée au ꝟ. 22, où l’historien sacré raconte le péché de Cham, probablement pour insinuer quelque participation du fils dans le crime du père, ou du moins quelque ressemblance de caractère et de mœurs. Car en dehors de cette hypothèse on ne conçoit guère pourquoi, dans la malédiction prononcée par Noé, Chanaan semble prendre la place de son père. « Lorsque Noé se réveilla et apprit ce que son fils cadet lui avait fait, il dit : Maudit soit Chanaan ! qu’il soit le serviteur des serviteurs de ses frères. » Et après la bénédiction ou plutôt la prophétie messianique regardant Sem et Japheth, la même sentence se répète à l’adresse de Chanaan : « Béni soit Jéhovah, Dieu de Sem, et que Chanaan soit son serviteur. Que Dieu dilate Japheth, et qu’il habite dans les tentes de Sem, et que Chanaan soit son serviteur. » Nous n’avons pas ici à expliquer cette prophétie, qui contient en germe l’histoire du monde. Remarquons seulement que Chanaan y est mis sur la même ligne que Sem et Japheth, ses « frères » (dans le sens large qu’on connaît au mot hébreu), présents devant Noé. Si l’on suppose que Chanaan n’est qu’une tribu qui se formera longtemps après Noé et tirera son nom d’une partie basse de la Palestine, la prophétie de Noé n’a plus de sens pour ses auditeurs immédiats. Ce n’est pas à dire toutefois qu’il ne s’agit pas en premier lieu des descendants de Chanaan, comme de ceux. de Senri et de Japheth ; mais ces descendants supposent les ancêtres dont ils tirent leurs noms, et qui seuls entendirent les paroles prophétiques du second père de l’humanité.

Sur la raison pour laquelle la malédiction méritée par Cham frappe son fils Chanaan, voir Cham, col. 513. La Genèse ne nous dit pas comment la prédiction de Noé