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CÉDAR


1. CÉDAR. Nom du second fils d’Ismaël. Gen., xxv, 13 ; 1 Par., i, 29. Nous n’avons sur lui aucun renseignement ; ses descendants sont appelés une fois, Is., xxi, 17, Benê-Qëdâr, « les lils de Cédar. »

2. CÉDAR, Benê Qêdâr, Arabes nomades, descendants d’Ismaël par Cédai -, son second fils, et habitant une région à laquelle ils donnèrent leur nom. Ps. cxix (hébreu, cxx), 5 ; Cant., i, 4 (hébreu et Septante, 5) ; Is., xxr, 16, 17 ; xlii, 11 ; lx, 7 ; Jer., ii, 10 ; xux, 28 ; Ezech., xxvil, 21. La Vulgate, Judith, i, 8, nomme aussi Cédar, mais le texte grec porte en cet endroit TaXaââ, qui parait être la leçon véritable. Les Benê Qêdâr sont mentionnés à côté des Nabatéens, Gen., xxv, 13 ; I Par., i, 29 ; Is., lx, 7, et dans les inscriptions assyriennes, où ils sont appelés Qidrai ( Qi-id-ra-ai ; Qid-ra-ai). Cf. E. Schrader, Die Keilinschriften und das Aile Testament, in-8°, Giessen, 1883, p. 147. Ce sont les Cedrei de Pline, H. N., v, 12, alliés fidèles des Nabatsei. On trouve de même, dans les anciennes généalogies arabes, les.tX^3, Qal dâr, auprès des Nabat. Cf. Gesenius, lier Prophet Jesaia, Leipzig, 1821, t. ii, p. 675, d’après Pococke, Spécimen historiée Arabum, édit. White, p. 40.

I. La tribu d’après l’Écriture. — L’Écriture nous. donne sur cette tribu des détails qui suffisent pour nous en montrer le caractère et l’importance. Dans les prophètes, les fils de Cédar sont les principaux représentants des Arabes nomades qui occupaient les déserts situés à l’est du Jourdain. C’était donc un peuple de pasteurs, habitant sous des tenles noires, semblables à celles des Bédouins de nos jours, fabriquées avec du poil de chèvres ou de chameaux. Ps. cxix (hébreu, cxx), 5. C’est pour cela que l’épouse du Cantique, i, 4, disait :

Je suis noire, mais belle, filles de Jérusalem,

[noire] comme les tentes de Cédar,

[ belle ] comme les pavillons de Salomon.

Ils avaient cependant des villages dépourvus de murailles, des hâsèrim, ou « lieux entourés de clôtures », comme les douars des Arabes d’Afrique. Voir Haséroth. Isaïe, xlii, 11, dans un chant gracieux, invitant l’univers à louer Jéhovah, juge et sauveur suprême, s’écriait : « Que le désert et ses villes élèvent la voix ; que les bourgs habités par Cédar [élèvent la voix, pour célébrer la gloire du Seigneur]. » Leurs troupeaux étaient nombreux, formant leur richesse et une partie de leur gloire, et comprenaient des chameaux, des agneaux, des béliers, des boucs, qu’ils allaient vendre aux marchés de Tyr. Is., lx, 7 ; Jer., xux, 29 ; Ezech., xxvil, 21. — lsaïe, prédisant la gloire finale de Jérusalem et décrivant en termes magnifiques l’empressement avec lequel les rois et les peuples y accourront, met en particulier ces paroles dans la bouche de Dieu, lx, 7 : « Tous les troupeaux de Cédar se rassembleront pour toi ; les béliers de Nabaïoth ( des Nabatéens) seront à ton service : ils monteront (seront immolés) sur mon autel et me seront agréables, et je remplirai de gloire la maison de ma majesté. » À la richesse, les hommes de cette tribu joignaient la vaillance, la force et l’habileté dans le maniement de l’arc. Is., xxi, 17. Ézéchiel, xxvil, 21, parle des « princes de Cédar ». C’est toute cette « gloire », dont Isaïe, xxi, 16, 17, annonçait le prochain anéantissement, quand il disait : « Encore une année, comme une année de mercenaire (c’est-à-dire mesurée en toute rigueur et exactitude), et toute la gloire de Cédar sera détruite. Et le nombre des robustes archers des fils de Cédar qui seront restés diminuera, car le Seigneur, le Dieu d’Israël a parlé. » Là, comme dans la prophétie semblable de Jérémie, xlix, 28, 29, la tribu représente toute l’Arabie, ou au moins une portion dsi pays des Benê-Qédém, « des fils dé l’Orient. » Le Ps. exix (hébreu, cxx), 5, fait allusion sans doute à leurs mœurs de pillards, en les

donnant comme un des types de l’ennemi cruel et sans pitié.

II. Pays. — Le pays de Cédar est appelé dans les inscriptions assyriennes Qidru (mât Qi-id-ri) et Qadru (mât Qa-ad-ri). Cf. Schrader, Keilinschriften, p. 147. Mais il est difficile, avec le caractère nomade des Ismaélites dont nous parlons, de savoir au juste à quelle région il correspond. L’Arabie de l’époque biblique et assyro-babylonienne, au sens le plus large, était bornée au sud par le Hedjàz actuel, à l’ouest par la Palestine transjordanique, la Damascène et l’Hamathène, à l’est par les solitudes du désert syrien, avec des limites incertaines cependant de ce dernier côté aussi bien que du côté du nord. Voir Arabie, t. i, col. 856, et la carte, col. 857. C’est donc dans les contrées qui s’étendent depuis le nord de la péninsule arabique jusqu’aux rives de l’Euphrate que les fils de Cédar transportaient leurs tentes ou établissaient leurs douars. Saint Jérôme, Comment, in Is., t. xxiv, col. 425, fait de Cédar « une région inhabitable au delà de l’Arabie des Sarrasins », et dans son livre De situ et nominibus locorum hebraicorum, t. xxiii, col. 888, il le place « dans le désert des Sarrasins », qu’Eusèbe et lui, Onomastica sacra, Gœ.ttingue, 1870, p. 136, 276, au mot Madian, cherchent à l’orient de la mer liouge. Théodoret, Comment, in Ps., t. lxxx, col. 1878, dit que les descendants de Cédar habitaient encore de son temps non loin de Babylone : de même Suidas, Lexicon, édit. Bernhardy, 1853, t. ii, p. 237. C’est pour cela que bon nombre de commentateurs modernes fixent d’une manière générale le séjour de ces nomades entre l’Arabie Pétrée et la Babylonie. D’après l’Écriture, nous voyons seulement qu’ils étaient assez distants de la Palestine pour être comptés parmi les nations lointaines. Jérémie, ii, 10, comparant la conduite des Juifs inconstants et infidèles à celle des peuples étrangers qui persévéraient dans la religion de leurs ancêtres, leur disait : « Passez aux lies de Céthim et regardez ; envoyez en Cédar et considérez attentivement, et voyez si chose semblable s’y fait. » Le prophète oppose ici Cédar, situé à l’est de la Palestine, aux contrées de l’ouest, aux îles ou aux côtes de la Méditerranée, à l’ile de Chypre en particulier. Cependant, si la tribu en question était assez éloignée des Hébreux pour leur donner l’idée d’un lointain exil, Ps. exix, 5, elle était assez rapprochée pour être parfaitement connue d’eux. Comme l’histoire mentionne fréquemment les fils de Cédar à côté des Nabatéens, il est naturel aussi de rapprocher les pays habités par ces deux peuples. Or, jusqu’au temps de Nabuchodonosor, les Nabatéens demeuraient sur ies limites du Hedjâz, avec Égra comme ville principale. A partir de l’époque perse, ils formèrent un puissant royaume dont la capitale était la ville de Pétra, l’ancienne résidence des rois iduméens. Voir Arabie, t. i, col. 862, et Nabatéens.

Il est donc probable que la tribu de Cédar occupait les régions sud-ouest du Hamad ou de l’Arabie déserte. Ils devaient errer dans Youadi Serhàn ou Sirhàn, oasis qui s’étend du nord-ouest au sud-est sur une longueur d’environ 430 kilomètres entre le Djebel Hauran et le Djôf septentrional. C’est une longue dépression de terrain dont le fond est à 150 mètres au-dessous du plateau environnant et représente celui d’un ancien lac ou mer intérieure. Ce fond de la vallée est formé de terre mélangée de sable ; il est assez humide pour donner naissance à une végétation relativement abondante, mais cependant rien moins que luxuriante. L’eau s’y rencontre en divers points, et le gazon, quoique ne restant pas vert toute l’année, y conserve du moins quelque temps sa fraîcheur. Les Scherrarat nomades y viennent pendant l’été, à cause des excellenls pâturages qu’y trouvent leurs troupeaux de chameaux. Le Djôf est une autre vallée qui peut avoir de l’ouest à l’est une longueur d’environ cent kilomètres sur quinze à vingt de largeur. La localité la