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CASSIODORE — CASTALION


graphes, les Verba dierum (Paralipomènes, Esdras, Esther), les Évangiles, les Apôtres. — 3° Une autre Bible latine, exemplaire complet, qualifié par Cassiodore de codex grandior, comptant 95 cahiers, soit 760 feuillets, écrits en caractères plus espacés, littera clariore, et donnant un texte préhiéronymien de la Bible. L’Ancien Testament y était divisé en 44 livres, le Nouveau en 26 livres, total 70, qui est « le nombre des palmes trouvées par les Hébreux à Élim ». Exod., xv, 27. Cassiodore, en nous donnant l’ordre des livres selon l’ancienne version, De institut., 14, col. 1125, donne l’ordre de son Codex grandior ; et c’est précisément, à d’insignifiantes différences près, l’ordre où sont énuinérés les livres bibliques dans le catalogue ou décret attribué au pape Gélase (492-496), Cette seconde Bible de Cassiodore, d’accord dans sa distribution avec l’usage romain du VIe siècle, l'était aussi dans son texte, puisque le texte biblique reçu à Rome au ve siècle et aussi au VIe n'était point encore la Vulgate hiéronymienne, mais une ancienne version : ce Codex grandior devait être un exemplaire d’origine romaine. Voir S. Berger, La Bible du pape Hilarus, dans le Bidletin critique, t. xm (1893), p. 147-152. Cassiodore en outre nous informe, De institut., 5, col. 1116, Exposit. Psalm. xiv, col. 109, qu’il avait intercalé dans son Codex grandior des peintures, depicta subtiliter lineamenlis propriis, représentant le tabernacle et le temple : nous y reviendrons plus loin.

Ces diverses éditions de la Bible, d’autres encore peutêtre, servirent à Cassiodore à entreprendre une édition nouvelle de la Bible latine, c’est-à-dire de la Vulgate hiéronymienne. Il décrit lui-même sa méthode : ayant fait transcrire le texte, il l’a collationné sur les vieux manuscrits, aidé par des amis qui lisaient devant lui un texte ancien, pendant qu’il suivait attentivement sur sa copie : « J’ai fait, dit-il, ce que peut un vieillard, et j’y ai dépensé un grand travail, ne voulant point laisser passer une variante, ni corriger témérairement. » De institut., præf., col. 1109. Son texte, il l’a divisé en versets, intégralement, colis et commatibus ; saint Jérôme n’avait divisé ainsi per cola et commata que le texte d’Isaïe. Cassiodore a fait copier toute la Bible d’après ce système, si capable d’aider la lecture courante. La Bible cassiodorienne était distribuée en neuf manuscrits : 1° l’Octateuque, 2° les Rois et les Paralipomènes, 3° les Prophètes, 4° les Psaumes, 5° Salomon, 6° les Hagiographies, 7° les Évangiles, 8° les Épîtres, 9° les Actes et l’Apocalypse ; distribution en 71 livres, qui est celle que Cassiodore lui-même attribue à saint Augustin, De institut., 13, col. 1124 En tête de chacun des neuf volumes on avait transcrit un résumé analytique ou compendium de leur contenu, constitué par la série des titres que « nos anciens ont pris l’habitude de transcrire le long du texte courant », titulos a maioribus nostris ordine currente descriptos : voir ce que nous disons plus haut, col. 338, du Liber titulorum, publié séparément par Cassiodore. Enfin chacun des neuf volumes contenait autre chose encore que le texte sacré ; on y avait joint, en effet, les commentaires latins ou traduits du grec les plus autorisés, saint Basile, saint Ambroise, saint Augustin, Origène, etc., et non seulement les commentateurs, mais aussi les introducteurs, Ticonius, Junilius, etc. C'était la première fois que la Sainte Écriture était publiée avec un appareil semblable.

L’activité de Cassiodore et de sa librairie nous a valu la conservation ou la diffusion de plus d’un de ces commentaires, aussi bien qu’elle a contribué à la propagation du texte hiéronymien de la Bible. Dans son zèle pour la Bible, Cassiodore conjure ses moines de la copier, et de la copier avec un soin religieux : qu’ils pensent que « leur main prêchera ainsi aux hommes, que leurs doigts délieront les langues…, que leurs copies se dissémineront sur toute la terre, qu’elles seront lues dans les plus saints lieux » ; qu’ils copient avec un soin scrupuleux de la correction grammaticale et orthographique ; qu’ils relient

enfin leurs manuscrits de leur mieux, et que les exemplaires de la Sainte Écriture, comme les convives du festin céleste, soient revêtus de robes nuptiales. De institut., 30, col. 1145. Tant de soins n’ont pu faire que les manuscrits bibliques sortis de la librairie cassiodorienne aient laissé de trace reconnaissable. Nous avons eu l’occasion de marquer, à propos du Codex. Amiatinus, t. i, col. 482, que ce manuscrit de la Vulgate hiéronymienne est indépendant de Cassiodore. Les sommaires placés par Cassiodore en tête de chacun des livres bibliques ne se retrouvent pas dans les manuscrits existant actuellement. Les divisions des Épîtres, des Actes, de l’Apocalypse, indiquées par les Complexiones, ne se retrouvent pas davantage. On a dit que Bède (672-735) avait connu le Codex grandior, la seconde Bible de Cassiodore, ou des manuscrits contenant les représentations en peinture du tabernacle et du temple exécutées par les soins de Cassiodore : vérification faite des textes allégués de Bède, De templo, 16, t. xci, col. 775, et De tabernaculo, ii, 12, col. 454, il paraît douteux que Bède parle de ces peintures cassiodoriennes de visu plutôt que d’après la description écrite qu’en donna Cassiodore lui-même. Voir cependant de Rossi, La Bibbia offerla da Ceolfrido al sepolcro diS. Pietro, Rome, 1888, p. 19. En telle sorte que l'œuvre biblique de Cassiodore ne nous est connue aujourd’hui que par ce que lui-même nous en rapporte ; mais cela suffit à marquer sa place entre saint Jérôme et Alcuin. — Voir Teuffel, Geschichte der rômischen Literatur, ¥ édit., Leipzig, 1882, p. 1150-1157, et édit. franc., Paris, 1883, t. iii, p. 305-310 ; les prolégomènes de l'édition de dom Garet (Rouen, 1679), reproduite par Migne, t. lxix, col. 425-500 ; A. Franz, Cassiodorius Senator, ein Beitrag zur Geschichte der theologische Literatur, Breslau, 1872.

P. Batiffol. 2. CASSIODORE DE REYNA, hébraïsànt espagnol, protestant, né à Séville, mort à Francfort le 15 mare 1591. Il avait embrassé l'état ecclésiastique ; puis, se retirant à Francfort, il se livra au commerce. Il passa ensuite à Londres, où il semble avoir de nouveau exercé les fonctions ecclésiastiques. Mais ce ne fut que pour peu de temps. Nous le retrouvons à Anvers, puis à Francfort, où il se déclara ouvertement partisan de la confession d’Augsbourg. Il fit imprimer à Bàle une version espagnole des Livres Saints. Dans la préface, signée des initiales C. R., il s’efforce de paraître bon catholique et veut prouver qu’il est utile de traduire les Saintes Écritures en langue vulgaire. Pour cette œuvre, l’auteur s’est beaucoup servi de la traduction de Pagnino et de la version espagnole des Juifs, publiée à Ferrare, en 1553. En marge du texte, Cassiodore de Reyna a mis quelques notes pour expliquer les passages les plus difficiles. Voici le titre de cette traduction, souvent appelée Bible de l’Ours, de la marque de l’imprimeur : La Biblia que es los sacros libros del Viejo y Nuevo Testamento, trasladada en espanol, in-4°, 1569. Cette même version corrigée, augmentée de variantes, a été réimprimée par Cyprien de Valera, in-f°, Amsterdam, 1602. On doit encore à Cassiodore de Reyna : Annotationes in loca selectiora Evangelii Joannis, in-4°, Francfort, 1573. Cf. R. Simon, llist. cril. du Vieux Test., 1685, p. 340.

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CASTAGNETTES. Voir Cymbale, col. 1164.

    1. CASTALION Sébastien##

CASTALION Sébastien, appelé aussi Castalio et Castellion, du nom de sa famille Chateillon, latinisé en Castalion, théologien protestant, né à Saint-Martin-du-Fresne, dans le Bugey, en 1515, mort à Bàle le 23 décembre 1563. Il étudia avec ardeur dès sa jeunesse les langues anciennes, et particulièrement le grec et l’hébreu. Étant allé à Strasbourg, en 1540, il se lia avec Calvin, chez qui il passa deux années, jusqu'à ce que, grâce à cet influent protecteur, il eût obtenu une chaire de professeur au collège de Rive, à Genève, où il devint peu après principal.