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CARIATH-SÉPHER — CARIE


porte sont, comme sa position elle-même, l’objet de controverses. Pour nous en tenir à CariathSépher, la version grecque n’a mis qu’une fois, Jud., i, 11, le nom propre, ajoutant l’explication littérale, iroXiç ypan^âTciv, « la ville des lettres, » qu’on trouve seule dans les autres endroits. Jos., xv, 15, 16 ; Jud., i, 12. La Vulgate a ajouté la même interprétation : « Cariath-Sepher, id est, civitas litterarum. » Jos., xv, 15 ; Jud., i, 11. La paraphrase chaldaïque traduit par Qiryat’arkê, « la ville des archives, » comme si cette place eût été le dépôt des monuments littéraires de la nation chananéenne, et qu’elle eut conservé les archives de la contrée. Cf. J. Levy, Chaldàisches Wôrterbuch, Leipzig, 1881, p. 64. Le Talmud de Babylone, Abodah Zarah, prenant le mot Debir dans le sens de « parole » ou « science », ramène à la même idée les deux noms de la ville. On y lit : « Les Perses appellent un livre debir, ce qui est une allusion au verset « le nom « de Debir était autrefois Kiryath Sépher. » Cf. A. Neubauer, La géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 127. Cette explication est sans fondement ; mais les traditions juives, attestées par les Septante, ne sont probablement pas dénuées de valeur historique. La terre de Chanaan était située entre la Chaldée et l’Egypte, qui avaient ensemble de fréquents rapports. Dans ces deux pays, les lettres étaient très cultivées. Les découvertes de Tell el-Amarna, en Egypte, qui nous donnent les tablettes de correspondance des pharaons et renferment plusieurs lettres de leurs agents en Palestine, montrent que l’écriture était bien connue des habitants de ce dernier pays. Cf. Palestine Exploration Fund, Quarterly Stateinent, 1888, p. 281. Y avait-il aussi dans les villes et à Cariath -Sépher en particulier, des collections d’archives, comme dans certaines villes d’Egypte et dans la plupart îles villes de Chaldée ? C’est ce que des fouilles, qui n’ont pas encore été faites, pourront seules nous apprendre. — Certains auteurs pensent que Cariath -Sépher et Cariath-Senna renferment le nom d’un héros éponyme, Sépher ou Senna, d’où viendrait l’appellation de la ville, comme on retrouve dans Cariath-Arbé le nom du fondateur d’Héî >ron. Cf. F. de Hummelauer, Commentarius in libros Judiciwi et Rulh, inr8°, Paris, 1888, p. 44. Cette étymoiogie, possible pour Cariath -Senna, n’est pas probable pour le nom de Cariath -Sépher. Pour l’emplacement et

la description, voir Dabir.

A. Legendre.

1. CARIE (Kapt’a), région de l’Asie Mineure. La Carie est indiquée parmi les endroits où furent envoyées parles Romains des lettres annonçant qu’ils prenaient le grand prêtre Simon et le peuple juif sous leur protection. I Mach., xv, 23. Elle était située à l’angle sud-ouest de l’Asie Mineure. La côte de Carie est coupée par des golfes profonds de la mer Egée, les golfes lassique, Céramique et Dorique. Elle forme plusieurs presqu’îles rocheuses, dans lesquelles se trouvent des anses très nombreuses, mais inhospitalières. Les lies adjacentes sont le prolongement des chaînes de montagnes qui parcourent le pays. De toute antiquité, les Cariens apparaissent comme un peuple puissant sur la mer. Ils occupaient la plaine du Méandre, et les monts Messogis formaient leur limite du côté du nord. Au nord-est, la Carie confinait à la Phrygie ; à l’est, sa limite était les monts Salbace, limite orientale du bassin du Calbis et la rivière du Glaucus. Voir la carte, fig. 80.

Les Cariens sont appelés par les Grecs (Japêapôiiovot. Homère, Iliad., ii, 867 ; Strabon, viii, 6, 6 ; xiv, 2, 27. Leur origine est un problème. Tandis que quelques auteurs les rangent parmi les Sémites, D. Wachsmuth, Die Stadt Athen, in-8°, Leip/.ig, 1874, p. 446, d’autres plus nombreux contestent cette opinion, E. Renan, Histoire générale des langues sémitiques ! in-8°, Paris, 1863, t. i, p. 49 ; Schœmann, Antiquités grecques, trad. franc., Paris, 1884, t. i, p. 2 et 102 ; Curtius, Histoire grecque, trad. franc., Paris, 1880, t. i, p. 57. Voir aussi Lassen, dans la

Zeitschrift der morgenlândische Gesellschaft, t. x, 1856, p. 368 ; Neuen Jahrbûcher fur Philologie, 1861, p. 444. Ramsay, Journal of Hellenic studies, 1888, p. 360, pense qu’il y a eu deux couches successives de population, la première sémitique, la seconde grecque. En tout cas, c’était certainement un peuple très mélangé.

Les migrations des Grecs, et en particulier des Ioniens, qui s’établirent sur la côte, repoussèrent les Cariens à l’intérieur du pays, Strabon, vii, 7, 2 ; viii, 7, 1 ; et les villes de Milet et de Myonte, ainsi que leurs environs, sont dans le prolongement de l’Ionie sur la côte carienne. Les parties avancées dans la mer formèrent la Doride, ainsi nommée à cause des colonies doriennes qui y furent établies. Alabanda, Mylasa, Halicarnasse, Tralles, Bargylia,

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80. — Carte de la Carie,

Physcos et Cnide sont les principales. Sur la côte entourant ces villes dominaient les insulaires de Cos et de Rhodes. Les Cariens réfugiés dans les montagnes formèrent une confédération dont le centre fut le temple de Zeus Chrysaor. Strabon, xiv, 2, 25.

La Carie lit partie du royaume lydien de Crésus, Hérodote, i, 28, puis elle passa sous la domination des Perses, Hérodote, I, 174, et prit part à la révolte ionienne de 499 avant J.-C. Hérodote, v, 119-121. Les Perses, après leur victoire, établirent une dynastie de princes cariens qui gouvernèrent sous leur suzeraineté et qui fixèrent leur résidence à Halicarnasse. Après la fin des guerres médiques, les villes grecques de la côte de Carie, ainsi que les îles adjacentes, entrèrent dans la confédération délienne. Il y eut une circonscription appelée le « Tribut carien », Kapixo ; çôpo ; . Corpus Inscript, atticarum, t. i, 240. Thucydide, II, 9. La Carie retomba sous le joug des Perses à la suite du traité d’Antalcidas, en 387. Xénophon, Hellenic, v, 1, 31. Alexandre, dans son expédition, entra en Carie, et pour récompenser la reine Ada, qui lui avait rendu la place forte d’Alinda, la rétablit sur le trône. Arrien, Anabase, i, 23 ; Diodore de Sicile, xvii, 24. La Carie devint ensuite une province des Séleucides. C’était sa situation au moment où fut écrite la lettre des Romains. I Mach., xv, 23. Après la défaite d’Antiochus, en 190, les Romains partagèrent la Carie