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EVANGILES


vient de s + a + À + p + B + ng ; celui de saint Luc, deN+a + p + B + Y + r + ag ; enfin l’Evangile grec de saint Matthieu est la traduction de l’Evangile araméen du même auteur, avec des additions empruntées à ag et aux Évangiles de saint Marc et de saint Luc. — Eichhorn, Einleitung in das Neue Testament, Leipzig, 1804, t. i, p. 353, reprit le sujet et développa sa première hypothèse. Pour expliquer l’accord verbal du texte grec des Synoptiques, il recourut lui aussi à des traductions grecques de l’Évangile primitif. Il aboutit à cette généalogie des textes : 1. l’Évangile primitif araméen ; 2. sa traduction grecque ; 3. une revision de l’original araméen, À ; 4. la version grecque de cette revision ; 5. une seconde retouche de l’Évangile primitif, B ; 6. la combinaison des deux revisions À et B, qui en donne une troisième, G ; 7. une quatrième recension araméenne de l’Évangile primitif, D ; 8. sa traduction grecque, faite à l’aide de la version grecque primitive ; 9. l’Évangile hébreu de saint Matthieu, E, formé de la réunion de À et de D ; 10. la traduction grecque de saint Matthieu, formée par la fusion des versions grecques de À et de D ; 11. l’Évangile de Marc est la traduction de C, qui est composé de À et de B : l’auteur se sert de la traduction grecque de A, mais traduit lui-même les passages qui proviennent de B ; 12. l’Évangile de saint Luc, F, combine B et D, en y insérant une histoire des voyages de Jésus : l’auteur se sert de la version grecque de D, mais traduit lui-même ce qui est emprunté à B. — Si dans son premier état l’hypothèse de YUrevangelium n’expliquait pas tous les éléments du problème, elle dévia évidemment dans ses explications subséquentes, par suite de l’ingéniosité avec laquelle on cherchait à l’étayer sur une foule d’autres hypothèses. Il est invraisemblable que les premiers chrétiens eussent fait tant d’éditions de l’histoire évangélique, dont il n’est pas resté trace ni souvenir dans la tradition. C’était accorder une trop large place aux tablettes à écrire et transformer les premiers disciples de Jésus en un peuple de scribes. Cf. Hug, Einleitung in die SchHften des Neuen Testaments, 2e édit., 1821, p. 76-91. Gratz, Neuer Versuch die Enstehung der drey ersten Evangelien zu erklâren, Tubingue, 1812, chercha à simplifier cette genèse, trop compliquée des Synoptiques, et il se contenta de deux documents, YUrevangelium syro-chaldaïque, qui servit de base à l’Évangile araméen de saint Matthieu, et sa traduction grecque, qui fut utilisée par saint Marc et saint Luc. En outre, chaque évangéliste ajoutait à la source primitive des fragments très courts. Bertbold, Einleitung in sàmmtliche Schriften desvlten und Neuen Testaments, t. iii, p. 1205, se contente de l’Évangile primitif. Herder, Von Gottes Sohn der Welt Heiland nach Johannes Evangelium, 1797, avait accepté l’hypothèse de YUrevangelium, mais en l’expliquant d’une autre manière. Cet Évangile source, composé en araméen, ne fut pas publié et servit seulement aux évangélistes. Saint Marc nous en donne l’idée la plus exacte, car il le traduisit en grec avant qu’il n’ait subi aucune modification. Plus tard, il fut revu et augmenté en araméen par saint Matthieu ; c’est l’Évangile hébreu de cet apôtre. Saint Luc prit pour base de son Évangile grec YUrevangelium, mais il utilisa aussi l’édition plus étendue donnée par saint Matthieu et l’Évangile de Marc, en leur empruntant au moins quelques passages. Enfin l’Évangile hébreu de saint Matthieu fut traduit en grec assez librement et reçut quelques additions. Ces explications, moins compliquées, n’échappaient pas à tout reproche. Elles supposaient gratuitement l’existence d’un Évangile primitif, que les anciens écrivains ecclésiastiques n’avaient pas connu. Aussi, après avoir eu de la vogue, elles tombèrent dans l’oubli et furent remplacées par de nouvelles théories. Au lieu de cet Évangile primitif, unique malgré ses divers remaniements, on préféra recourir à plusieurs sources distinctes. ; Cette idée, qui avait d’abord été émise en passant, fut ;

reprise par Schleiermacher, Kritischer Versuch ûber die Schriften des Lukas, 1817. Ce théologien est le véritable créateur de la théorie de la pluralité des sources, par laquelle il crut résoudre enfin complètement le problème synoptique. Il donna à son opinion le nom grec de Atr r yeiTi ; ou narration. « Elle consiste à supposer que les trois Synoptiques se composaient d’un certain nombre de récits, que nos trois premiers évangélistes ont trouvés déjà rédigés et qu’ils se sont appropriés, qui plus, qui moins ; de là leurs ressemblances et aussi leurs différences, selon qu’ils ont pris les mêmes morceaux ou des morceaux divers, dans l’ordre qu’il leur a semblé bon d’adopter. Paulus, Introductio in N. T., 1799 ; Exeg. Handb., 1830, avait déjà émis la conjecture que les rédacteurs des Évangiles s’étaient servis de courts mémoires provenant de la Sainte Vierge, de saint Jean ou d’autres disciples. Schleiermacher n’attribuait à ces récits ni une telle origine ni une telle forme ; il pensait que, selon les occasions et les circonstances, des écrivains inconnus avaient fixé par écrit les narrations qu’ils avaient entendu raconter, des épisodes ou des séries d’anecdotes, des paraboles et des discours. Ces écrivains étaient des Grecs devenus chrétiens. Plus tard, leurs récits furent insérés dans les Évangiles canoniques. » F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique, Paris, 1886, t. ii, p. 467-468. À cette multiplicité de documents on fit une objection grave. On dit que si les divers récits des trois premiers évangélistes provenaient de sources si nombreuses, ils auraient été coinposés dans des lieux différents et par des écrivains de caractère et de style très dissemblables. Il devait donc y avoir dans les morceaux primitifs une variété de ton, de caractère et de langage, qu’on ne remarque pas dans les parties différentes des Évangiles.

Aussi à cette multitude indéterminée de documents employés par les évangélistes on substitua un nombre déterminé de sources, dont on reconnaissait la trace dans les Évangiles actuels. Ewald, Die drei ersten Evangelien, Gœttingue, 1850 ; Geschir.hte Christus, 3e édit., 1867, distinguait deux sources principales : 1. un Proto-Marc, écrit en grec et racontant les principaux traits de la vie du Sauveur ; 2. une collection de discours de Jésus, composée en hébreu par saint Matthieu. L’Évangile actuel de Marc a été rédigé à l’aide de ces deux sources. D’autres petits écrits, racontant différents faits de l’histoireévangélique, auraient été insérés avec les renseignements des deux sources principales dans les Évangiles de saint Matthieu et de saint Luc. Cf. Fillion, Introduction générale aux Évangiles, Paris, 1889, p. 135-137. Cette opinion eut un immense succès. Elle fut adoptée par le plus grand nombre des critiques, et elle jouit encore aujourd’hui d’une grande vogue. A. Réville, Études critiques sur l’Évangile selon saint Matthieu, Leyde, 1862 ; La question des Évangiles, dans la Revue des Deux Mondes, t. Lxiit, 1866, p. 623-641 ; Jésus de Nazareth, Paris, 1897, t. i, p. 295-329 et 461-477 ; Michel Nicolas, Études critiques sur la Bible, Nouveau Testament, Paris, 1804, p. 82-126 ; Reuss, Les Évangiles synoptiques, dans la Revue de théologie, Strasbourg, t. xi, p. 164-170, et dans la Nouvelle revue de théologie, t. ii, p. 17-60 ; Histoire évangélique, Paris, 1876 ; Renan, Les Evangiles et la seconde génération chrétienne, Paris, 1877, p. 94-127, 173-1’J7 et 251-285 ; Holtzmann, Die Synoptischen Evangelien, Leipzig, 1863 ; Einleitung in das Neues Testament, 1885 ; Weizsâcker, Untersuchungeii ûber die evangelische Geschichte, ihre Quellen und den Gang ihrer Entwicklung, Gotha, 1864 ; Das Apostolische Zeitalter, Fribourg-en-Brisgau, 1886 ; Schenkel, Bibel-Lexicon, Leipzig, t. ri, 1869, art. Evangelien ; Geschichtsquellen des N. T. ; t. iii, 1871, art. Johannes ; t. iv, 1872, art. Lukas, Marcus, Matthâus ; B. "Weiss, Das Marcusevangelium, Berlin, 1872 ; Das Matthàusevangelium und seine Lucas-Parallelen, Halle, 1876 ; Das Leben Jesu, Berlin, 1882 ; Einleitung in das N. T., Berlin, 1886 ; "Witlichen, Leben