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EUROAQUILON — EUSÈBE

l’Eurus et le Notus, c’est-à-dire lèvent du sud-sud-est. Jules Vars, L’art nautique dans l’antiquité, in-12, Paris, 1887, p. 204-208. Cf. pl. à la page 32. La marche de ce vent est décrite par saint Luc avec des détails d’une grande précision et d’une parfaite exactitude. Smith, Voyage and Shipwreck of St. Paul, Londres, 1856, p. 97, 144, 245 ; Conybeare et Howson, Life and Epistles of St. Paul, Londres, 1856, t. ii, p. 401, 402.

E. Beurlier.

EUROCLYDON (Εὐροκλύδων), nom donné, dans le textus receptus grec, au vent appelé par la Vulgate Euroaguilo. Act., xxvii, 14. Voir Euroaquilon.


EUSÈBE, évêque de Césarée en Palestine, dit Eusèbe de Pamphile, naquit en 265. Palestinien d’origine, il vint tout jeune se fixer à Césarée, où il jouit longtemps des leçons du prêtre Pamphile, qui y avait ouvert une école théologique célèbre. Dans sa reconnaissance pour son maître, il voulut s’appeler Εὐσέβιος τοῦ Παμφίλου. Lorsque, pendant la persécution de Maximin, Pamphile fut emprisonné pour la foi, Eusèbe l’accompagna dans sa détention jusqu’en 309, date du martyre de Pamphile. Après la mort de son maître, Eusèbe quitta Césarée et s’enfuit à Tyr et en Égypte. Il fut pourtant arrêté et passa dans les fers un temps indéterminé. En 313, il fut élevé sur le siège de Césarée. Très lié avec l’empereur Constantin, il se montra assez faible dans la question de l’arianisme ; mais toutefois au concile de Nicée, en 325, il souscrivit à la formule de l’ὁμοούσιος. En 330, Eusèbe prit part au synode d’Antioche, et, en 335, à celui de Tyr. Il réapparaît ensuite dans les annales de l’histoire pour célébrer par un discours, cette même année 335, la fête du trentenaire de l’avènement de Constantin et, en 337, pour faire son oraison funèbre. Il mourut quelques années plus tard, probablement vers 340. — L’activité littéraire d’Eusèbe fut immense au témoignage de S. Jérôme, De vir. ill., 81, t. xxiii, col. 689. Nous n’avons à signaler ici que l’œuvre exégétique d’Eusèbe. On peut y distinguer ce qui se rapporte à l’exégèse générale et à l’exégèse spéciale.

I. Exégèse générale. — 1o  On lit dans la Vie de Constantin écrite par Eusèbe, Vita Constantini, iv, 36, t. xix, col. 1185, que l’empereur demanda à son ami Eusèbe de faire écrire, à l’usage des églises de Constantinople, cinquante exemplaires de la Bible. Eusèbe, loc. cit., iv, 37, se rendit à ce désir et fit copier ces volumes en ternions (τρισσά) et quaternions (τετρασσά). M.  Harnack, Geschichte der altchristlichen Litteratur, t. i, p. 572, ne croit pas qu’il se soit agi d’exemplaires complets de la Bible, et pour lui le sens des mots τρισσά et τετρασσά demeure douteux. Toutefois l’opinion de M. Harnack, qui pense qu’Eusèbe a composé pour Constantin une sorte de chrestomathie biblique, est contraire au texte formel de la Vita Constantini. Des érudits se sont livrés à des recherches pour retrouver quelqu’un des exemplaires d’Eusèbe dans les principaux manuscrits bibliques qui nous restent ; ces recherches n’ont pas abouti. Voir E. A. Frommann, De Codicibus sacris jussu Constantini magni adornatis, dans ses Opuscula philologica et historica, Cobourg, 1770, p. 303 ; Wieseler, Die Sinaitische Bibelhandschrift, dans les Theologische Studien und Kritiken, 1864, p. 409, 415, 418 ; Scrivener, A full Collation of the Codex Sinaiticus with the received Text of the New Testament, 1864, p. xxx-xxxvii ; id., Introduction to the Criticism of the New Testament, 4e édit., 1894, p. 118, n. 2 ; Burgon, Last twelve Verses of St. Mark, 1872, p. 293. — 2o  En tête d’un grand nombre de manuscrits tant grecs et syriaques que latins de la Bible, on trouve dix tables de concordances des Évangiles qui portent le nom de sections et de canons. Ces tables sont précédées d’une lettre d’Eusèbe à Carpianus. Migne, Patr. gr., t. xxii, col. 1275-1291. On attribuait jadis ces sections à Ammonius, voilà pourquoi elles sont souvent indiquées par l’abréviation Amm. ; mais, en 1827, {{lang|en|Lloyd (Novum Testamentum græcum, Oxford, p. viii-xi ; cf. Burgon, Last Verses, p. 295 ; Tischendorf, Novum Testamentum græcum, Prolegomena de Gregory, Leipzig, 1886, part. i, p. 143-144 ; G. H. Gwilliam, The Ammonian sections, Oxford, 1890, p. 241-272) a démontré qu’elles aussi sont l’œuvre d’Eusèbe. Ammonius d’Alexandrie avait, vers 220, dressé une Concordance ou Diatessaron des Évangiles. Partant du texte de saint Matthieu, il avait placé sur une même ligne les passages qui dans cet Évangile concordent avec les textes parallèles des trois autres. Comme Eusèbe le déclare dans sa lettre à Carpianus, le travail d’Ammonius lui suggéra l’idée du sien ; mais il lui donna une forme personnelle. Ammonius ne donnait en lecture suivie que l’Évangile de saint Matthieu, la suite des autres Évangiles était interrompue. Eusèbe désira fournir le texte continu de tous les récits. Il divisa donc séparément les Évangiles en un certain nombre de sections, ἀριθμοί, 335 pour saint Matthieu, 236 pour saint Marc, 342 pour saint Luc, 232 pour saint Jean. En même temps, il dressait une table de dix canons, κανόνες, dont chacun contenait une liste de textes : le canon i, tous les passages (71) communs aux quatre évangélistes ; le canon ii, ceux (111) qui se trouvent à la fois dans saint Matthieu, saint Marc et saint Luc ; le canon iii indique les textes correspondants (22) de saint Matthieu, de saint Luc et de saint Jean ; le canon iv, ceux (26) qui se répondent dans saint Matthieu, saint Marc et saint Jean ; le canon v a les parallélismes (82) de saint Matthieu et de saint Luc ; le canon vi, ceux de saint Matthieu et de saint Marc (47). Le canon vi compare les Évangiles de saint Matthieu et de saint Jean (7 textes), le canon viii, ceux de saint Luc et de saint Marc (14 passages) ; dans le canon ix on a les passages correspondants (21) de saint Luc et de saint Jean ; enfin le canon x renferme les textes propres à chaque évangéliste, 62 pour saint Matthieu, 21 pour saint Marc, 71 pour saint Luc, 97 pour saint Jean. Dans le texte préparé pour l’usage des sections et des canons d’Eusèbe, chaque section est indiquée par un chiffre à l’encre noire ; sous ce chiffre est marqué un autre au vermillon, pour indiquer le canon auquel se rapporte la section. En consultant le canon ainsi désigné, le lecteur pouvait voir d’un coup d’œil à quel passage des autres évangélistes répondait le texte en question. Exemple : saint Matthieu, xiii, 54, était marqué , c’est-à-dire que la section 141e de saint Matthieu (ρμαʹ) appartient au canon 1 (αʹ). Or dans ce canon on trouve établie la concordance suivante :

ΜΤ ΜΡ Λ ΙΩ
ρμαʹ νʹ ιθʹ νθʹ

c’est-à-dire que la 141e section de saint Matthieu correspond à la 50e (νʹ) de saint Marc, à la 19e (ιθʹ) de saint Luc et à la 59e (νθʹ) de saint Jean. Dans les diverses versions de la Bible, le nombre des sections eusébiennes n’est pas partout le même. Ainsi dans le manuscrit syriaque de la bibliothèque de Médicis, à Florence, écrit en l’an 586, il y a pour saint Jean 270 sections au lieu de 232. M. Burgon, Last Verses, p. 310, a pensé que ce chiffre du manuscrit syriaque pouvait représenter la division primitive adoptée par Eusèbe. Cet avis n’est point partagé par Lightfoot, dans Smith, A Dictionary of Christian Biography, t. ii, p. 335. Du reste, le chiffre des sections, tel qu’il se trouve dans les manuscrits latins, et qui concorde avec le chiffre des manuscrits grecs, est attesté par saint Jérôme. On trouve de bonnes reproductions des canons d’Eusèbe dans le Catalogue of ancient MSS in the British Museum, part. ii, Londres, 1884, fol. 18, et surtout dans A. Valentini, Eusebio, Concordanze dei Vangeli Codice Queriniano, Brescia, 1887. Les canons d’Eusèbe ont été souvent publiés. — 3o  Il faut signaler, au point de vue exégétique, la part prise par Eusèbe à la diffusion des travaux d’Origène sur la critique textuelle.