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CANTIQUE DES CANTIQUES


le Cantique, 1713, p. 150 ; Dictionnaire de la Bible, 1730, t. i, p. 377, suppose que le mariage de Salomon avec la fille du roi d’Egypte a été l’occasion, et par conséquent marque l’époque de la composition du poème. Gietmann, Comment, in Cant. cant., Paris, 1890, p. 341, soutient, au contraire, que le Cantique n’a été écrit que dans les dernières années du roi, devenu repentant. C’est pour cela que le livre occuperait ordinairement dans les Bibles, sauf dans celle des Massorètes, le troisième rang après les Proverbes et l’Ecclésiaste. Il présente du reste une bien plus grande analogie de style avec ce dernier livre, œuvre de la vieillesse de Salomon, qu’avec le premier. En particulier, le relatif apocope, à, Se, si caractéristique, se

rencontre fréquemment dans l’Ecclésiaste, mais jamais dans les Proverbes. — La solution de cette question, d’ailleurs peu importante, dépend en grande partie de l’opinion qu’on embrasse au sujet de la conversion de Salomon. Voir Salomon.

Il n’est pas possible non plus de déterminer de quelle manière le poème a été écrit. Salomon en a-t-il composé lui-même toutes les pièces ? Y a-t-il fait entrer quelques morceaux antérieurs à lui ou composés par d’autres poètes ? Le tout n’a-t-il été recueilli et mis dans l’ordre actuel qu’après la mort du roi ? On l’ignore. En somme, la définition de l’Église oblige à admettre l’inspiration et le caractère divin du Cantique, dans la forme définitive où il a été transmis par les Juifs ; la tradition permet d’assurer que le livre est l’œuvre de Salomon, et l’examen de l’ouvrage fournit un témoignage concordant. Là s’arrêtent les certitudes. Les autres questions de détail sont du domaine de l’hypothèse.

IV. Forme littéraire du Cantique. — D’après la notation métrique de Bickell, Carmina Vet. Testant., p. 103, le Cantique des cantiques se composerait de poésies de différents mètres ainsi agencées : Cant., i, 1-8, six strophes ayant chacune cinq vers de six syllabes ; I, 9-n, 6, cinq strophes de six vers ayant même mesure ; ii, 7, deux slrophes de trois vers, dont deux de quatre et un de huit syllabes ; ii, 8-16, six strophes de six vers hexasyllabiques ; m, 1-4, cinq strophes de trois vers ayant même mesure ; m’, 6, strophe de quatre vers alternativement de huit et de six syllabes ; iii, 7-iv, 8, trois strophes de six vers hexasyllabiques ; IV, 9-11, trois strophes de trois vers octosyllabiques ; iv, 12-v, 1, neuf strophes de trois vers, deux de quatre et un de six syllabes ; de v, 2 à vii, 10, reprennent les vers hexasyllabiques à six par strophe, sauf v, 8-16, composés de quatrains, et vi, 10- vii, 1, dont les quatrains sont formés de vers alternativement octosyllabiques et hexasyllabiques ; vii, 2-10, cinq strophes de six vers hexasyllabiques ; de vii, 11 à viii, 7, quatrains de vers alternatifs de huit et de six syllabes ; Vin, 8-10, quatrains hexasyllabiques ; viii, 11, 12, deux strophes de trois vers dont deux de six et un de huit syllabes ; viii, 13, 14, deux strophes de trois vers hexasyllabiques.

Au point de vue des idées, la division du texte n’est point aisée à établir. Le lien logique entre les différentes pièces du poème fait à peu près défaut. Aussi les résultats obtenus par les interprètes qui ont tenté d’analyser le texte sont loin de concorder. Bossuet, In Canticum cant., Prtef., iii, édit. de Bar-Ie-Duc, t. iii, 1863, p. 413, suivi par Calmet et Lowth, divise le Cantique en sept chants correspondant aux sept jours de la semaine. Il trouve la raison d’être de cette division dans les passages du Cantique, il, 7, iii, 5 ; ii, 17 ; iv, 6, et pense que chaque journée marque un progrès dans l’amour : I er jour, Cant., i-n, 6, amour imparfait ; IIe jour, II, 7-17, amour pénitent ; IIIe jour, m -IV, 1, amour épuré par l’épreuve ; IVe jour, iv, 2- vi, 8, amour perfectionné par l’épreuve ; v « jour, vi, 9- vii, 10, amour digne d’admiration ; VIe jour, vii, 11viii, 3, amour se donnant sans réserve ; VIIe jour, viii, 4-14, amour au repos. — L’idée de Bossuet a séduit tous les interprètes postérieurs par son caractère judicieux, et

tous ceux qui l’ont suivi, protestants et rationalistes même, en ont admis au moins le principe. Malheureusement les divergences s’accusent dès qu’on en vient aux détails. Voici cependant la manière dont les principaux auteurs disposent le Cantique. Ewald, Dos Hohelied Salomo’s, Gœttingue, 1826, le divise en cinq actes comprenant chacun différentes scènes : act. i, se. 1 : i, 1-8 ; se. 2 : i, 9-n, 7. Act. ii, se. 1 : ii, 8-17 ; se. 2 : iii, 1-5. Act. iii, se. 1 : iii, 6-11 ; se. 2 : iv, 1-v, 1 ; se. 3 : v, 2-8. Act. IV, se. 1 : v, 9vi, 3 ; se. 2 : vi, 4-vn, 1 ; se. 3 : vii, 2-10 ; se. 4 : vii, 11-vm, 4. Act. v : viii, 5-14. — F. Hitzig, Das Hohe Lied, Leipzig, 1855, partage le Cantique en neuf scènes : se. 1 : i, 1-8 ; se. 2 : i, 9-n, 7 ; se. 3 : ii, 8-m, 5 ; se. 4 : iii, 6-v, I ; se. 5 : v, 2- vi, 3 ; se. 6 : vi, 4- vii, 1 ; se. 7 : vii, 2-11 ; se. 8 : vii, 12- viii, 4 ; se. 9 : viii, 5-14. — Brown, dans le Dictionary of the Bible de Smith, 1863, t. i, p. 271, fait du Cantique un drame qui se divise en cinq sections : sect. 1 : i-n, 7 ; sect. 2 : ii, 8-m, 5 ; seet. 3 : iii, 6-v, 1 ; sect. 4 : v, 2-vin, 4 ; sect. 5 : viii, 5-14. — E. Renan, Le Cantique des cantiques, Paris, 1870, voit dans le Cantique une scène de harem. Comme le théâtre n’était pas à la mode chez les Hébreux, « ce poème se représentait dans des jeux privés et en famille, » p. 83. Il s doit être envisagé comme tenant le milieu entre le drame régulier et l’églogue ou la pastorale dialoguée. Il a de moins que le premier la marche continue ; il a de plus que la seconde le nœud, l’action et les incidents », p. 88. L’auteur y distingue cinq actes : act. i, se. 1 : I, 1-6 ; se. 2 : I, 7-11 ; se. 3 : i, 12-n, 7. Act. ii, se. 1 : ii, 8-17 ; se. 2 : iii, 1-5. Act. iii, se. 1 : iii, 6-11 ; se. 2 : iv, 1-6 ; se. 3 : iv, 7-v, 1. Act. iv : v, 2- VI, 3. Act. v, se. 1 : vi, 4-9 ; se. 2 : vi, 10vn, 11 ; se. 3 : vii, 12-vin, 4 ; se. 4 : viii, 5-7. Épilogue : vm, 8-14. — Frz. Delitzsch, Hohes Lied, 1875, p. 10, appelle le poème une « pastorale dramatique », et le partage en six actes : Act. i, se 1 : i, 2-8 ; se. 2 : i, 9-n, 7. Act. ii, se. 1 : ii, 8-17 ; se. 2 : iii, 1-5. Act. iii, se. 1 : iii, 6-11 ; se. 2 : iv, 1-v, 1. Act. iv, se. 1 : v, 2-vi, 3 ; se. 2 : vi, 4-9. Act. v, se. 1 : vi, 10- vii, 6 ; se. 2 : vii, 7-vm, 4. Act. vi, se. 1 : viii, 5-7 ; se. 2 : viii, 8-14. — O. Zbckler, Das Hohelied, Bielefeld, 1868, admet la même division, avec cette différence qu’il ne fait qu’un seul acte de v, 2vlli, 14. — Éd. Reuss, Le Cantique des Cantiques, Paris, 1879, compte seize morceaux détachés : 1° i, 1-8 ; 2* I, 9h, 7 ; 3° ii, 8-17 ; 4° iii, 1-5 ; 5° iii, 6-11 ; 6° iv, 1-7 ; 7° iv, 8-H ; 8° iv, 12-v, 1 ; 9° v, 2-vi, 3 ; 10° vi, 4-10 ; 11° vii, 2-10 ; 12° vii, 11-vm, 4 ; 13° viii, 5-7 ; 14° viii, 8-10 ; 15° viii, 11-12 ; 16° viii, 13, 14. Il est à remarquer que les divisions adoptées par cet auteur concordent assez bien avec celles de Bickell. — Enfin Stickel, Das Hohelied, Berlin, 1888, pour lequel le Cantique est un mélodrame en actes et en scènes, p. 157, a aussi sa division en cinq actes : Act. i, se. 1 : i, 2-6 ; se. 2 : i, 7, 8 ; se. 3 : i, 9-14 ; se. 4 : i, 15-n, 4 ; se. 5 : ii, 5-7. Act. ii, se. 1 : ii, 8-17 ; se. 2 : iii, 1-5. Act. iii, se. 1 : iii, 6-11 ; se. 2 : iv, 1-6 ; se. 3 : iv, 7-v, 1. Act. iv, se. 1 : v, 2-vi, 3 ; se. 2 : vi, 4viii, 4. Act. v, se. 1 : viii, 5-7 ; se. 2 : viii, 8-12 ; se. 3 : vm, 13, 14.

Parmi les auteurs catholiques, A. Le Hir, Le Cantique des cantiques, Paris, 1882, partage le poème en huit parties, sans indiquer l’idée qui préside à cette division : 1° i, 1-3 ; 2° i, 4-n, 7 ; 3° ii, 8-17 ; 4° iii, 1-5 ; 5° iii, 6-vi, 1 ; 6° vi, 2- vii, 10 ; 7° vii, 11-vin, 4 ; 8° viii, 5-14. — Ut’Meignan, Salomon, Paris, 1890, p. 467-560, préfère la division en cinq chants : 1° désirs et rencontres, Cant., i-ii, 7 ; 2° une rêverie, la recherche et la rencontre, ii, 8-m, 5 ; 3° la pompe du cortège royal et la simple beauté de la Sulamite, iii, 6-v, 1 ; 4° l’attente patiente, la Sulamite méconnue et maltraitée, portrait de l’époux, bonheur de se retrouver, v, 2-vi, 2 ; 5° portrait de l’épouse et de l’époux, vi, 3-vin, 7 ; conclusion, viii, 8-14. — Gietmann, Comm. in Eccle. et Cant., p. 413, trouve dans le Cantique trois parties comprenant sept, scènes. Première partie : préparation de l’épouse, se. 1,