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1957
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ESPAGNOLES (VERSIONS) DE LA BIBLE


Livres Saints en langue vulgaire. Mais, à vrai dire, cette prohibition existait déjà en fait dés cette époque, comme l’affirmait, en 1543, François de Enzinas, dans la préface d*une version espagnole du Nouveau Testament dont il sera question plus loin. La traduction du religieux franciscain ne fut point cependant mise à l’index espagnol. Elle reparut même en 1601, sans réveiller, parait-il, aucune susceptibilité, ou du moins sans attirer sur l’œuvre aucune condamnation. Voir N. Antonio, Biblioteca hispana nova, 2° édif., Madrid, 1783, t. i, p. 64. — 2° Un anonyme donna, vers 1530, selon toute apparence, mais certainement quelques années après la publication de la Bible d’AJcala (1514-1517), puisqu’il la prend pour guide, une traduction restée manuscrite des quatre Évangiles, qu’il intitula : Nova translation y interprétation espanola de los cuatro Evangelios. L’auteur, dans son Prologue (Castro le reproduit intégralement, Biblioteca, t. i, p. 439-441), ne fait aucune mention des prohibitions de l’Index ; mais soit que l’Inquisition espagnole mit obstacle à l’impression de ce travail, soit pour toute autre cause, il est toujours resté manuscrit. La Bibliothèque de l’Escurial l’a conservé sous le n° 9 des manuscrits bibliques. — 3° Une nouvelle version et interprétation des quatre Évangiles faite vers 1550, par le P. Jean de Robles, bénédictin du Mont-Serrat (-(-1573), est restée également manuscrite. Ce fut l’Inquisition qui s’opposa à l’impression. L’original se trouve à l’Escurial, sous la cote H 1, 4, et forme un volume de 489 feuillets. (Lettre du P. Fernandez, en date du 3 février 1896.) — 4° Le P. Joseph de Siguenza, hiéronymite, la principale gloire littéraire du couvent de l’Escurial, s’employa lui-même à traduire en espagnol, avec son rare talent, les deux Évangiles de saint Matthieu et de saint Luc ; mais il ne fut pas plus heureux que ses émules. Son écrit est resté manuscrit et se conserve à l’Escurial, sans avoir jamais reçu les honneurs de l’impression.

2° Versions des Psaumes. — 1° Fernand Jaraba, qui écrivait avant la publication de l’Index espagnol, publia à Anvers : 1. en 1540, une traduction espagnole de l’Office des défunts, et des passages de Job, qui en font partie intégrante ; 2. dans la même ville, en 1543, une traduction des Psaumes pénilentiaux, du Cantique des cantiques et des Lamentations de Jérémie. Castro, Biblioteca, t. r, p. 449 ; N. Antonio, Biblioteca hispana nova, t. i, p. 378. Son livre fut proscrit plus tard. Voir l’Index espagnol, au mot Jaraba. — 2° Le P. Benoit Villa, bénédictin du Mont-Serrat, n’eut pas un meilleur sort avec sa Harpe de David ou traduction paraphrasée des Psaumes. Cet écrit, qui avait d’abord été publié en Catalogne, fut édité une seconde fois, en 1545, à Médina del Campo, avec licence et privilège royal (voir Hidalgo., Diccionario de bibliografia espanola, Madrid, 1862, t. i, p. 232), ce qui n’empêcha pas l’auteur de tomber, neuf ans plus tard, sous le coup de la Ve règle prohibitive de l’Index espagnol, et de voir son travail inscrit au nombre des livres prohibés. — 3° Ce fut probablement pour échapper aux effets d’une condamnation de ce genre que le Flamand Cornélius Snoi alla publier à Amsterdam, en 1553, une autre traduction espagnole des Psaumes, qui n’est pas sans mérite, d’après Castro, Biblioteca, t. i, p. 462. — 4° Trente ans plus tard, le pieux Louis de Grenade, dont on connaît le grand renom et le talent littéraire, traduisit partie en vers, partie en prose, le Psautier et les cantiques du bréviaire. Mais son travail dut attendre que l’Inquisition espagnole eût mitigé la rigueur de ses décrets pour être livré à l’impression : il ne fut édité qu’en 1801. Hidalgo, Diccionario, Madrid, 1862, t. i, p. 226. — 5° Jean de Soto, de l’ordre de Saintvugustin, fut plus heureux au commencement du xviie siècle. Il réussit en 1615, avec la protection d’une infante d’Espagne, à mettre au jour une traduction en vers des Psaumes et des cantiques du bréviaire. Cette traduction n’a pas été censurée par l’Inquisition. N. Antonio, Biblioteca, 1. 1, p. 782. — 6° Le

P. Jean de la Puebla, hiéronymite, fut plus réservé. Il s’employa bien à traduire en vers espagnols les Psaumes de David, mais sans les livrer à l’impression. L’original de cette traduction se conserve à l’Escurial. — 7° Antonio de Cacérès y Soto Major, évêque d’Astorga et confesseur du roi Philippe IV, est aussi auteur d’une version littérale des Psaumes, accompagnée de quelques gloses. C’est sans doute pour cela que l’Inquisition la toléra. Elle fut imprimée en 1615, non en Espagne, mais à Lisbonne. Castro, Biblioteca, t. i, p. 472. — 8° Huit ans plus tard, en 1623, parut à Madrid même, et avec approbation, une autre traduction analogue des Psaumes et des cantiques du bréviaire. Elle était due à Joseph de Valdivielso, l’un des chapelains de la cour. Antonio, Biblioteca, t. i, p. 488.

— 9° Le comte Bernardin de Rebolledo, seigneur d’Irian, après avoir combattu vaillamment dans l’armée et rempli aussi avec distinction plusieurs ambassades, s’appliqua semblablement aux arts de la paix et cultiva en particulier la poésie avec un certain succès. Antonio, Biblioteca, t. i, p. 219. On lui doit un ouvrage intitulé Selva sagrada, qui n’est autre chose qu’une traduction en vers castillans des Psaumes, de Job et des Lamentations de Jérémie. La première édition de cet ouvrage parut à Cologne, en 1659 ; elle ne renfermait que les Psaumes. Une seconde fut publiée à Anvers, en 1661, et une troisième à Madrid, en 1778. Ces deux dernières renfermaient, avec les Psaumes, Job et les Lamentations de Jérémie. Hidalgo, Diccionario, t. i, p. 237-238. — 10° Il y eut encore, à la même époque, des versions particulières des Psaumes pénitentiaux ou de quelques autres parties du Psautier ; mais elles ne valent pas la peine d’être nommées.

3° Versions des livres sapientiaux. — 1° L’Ecclésiaste fut traduit en espagnol et annoté, au commencement du XVI » siècle, par un anonyme, qui prit pour modèle le célèbre Arias Montanus. Mais sa traduction ne fut pas imprimée. Elle se conserve en manuscrit à l’Escurial. Castro, Biblioteca, t. i, p. 443 et 444. — 2° Le Cantique des cantiques trouva (vers 1570) un traducteur espagnol dans la personne du célèbre Louis de Léon, de l’ordre des Augustins. Cet écrivain, théologien consommé et littérateur du plus grand mérite, traduisit aussi le livre de. Job. Mais ce double travail ne put être imprimé que plus tard, Job en 1779 et le Cantique en 1798, à Salamanque. Hidalgo, Diccionario, t. i, p. 223 et 239. — 3° Alphonse Ramon, de l’ordre de la Merci, est auteur d’une version espagnole des Proverbes de Salomon. Elle parut à Madrid, en 1629, et n’attira à son auteur aucune condamnation, sans doute parce qu’elle était accompagnée de gloses et d’éclaircissements. Antonio, Biblioteca, t. i, p. 42 et 43.

4° Version de l’Apocalypse. — Le vénérable serviteur de Dieu Grégoire Lopez, missionnaire ou plutôt ermite au Mexique, mort le 20 juillet 1596, en odeur de sainteté, laissa manuscrite une traduction espagnole de ce livre si mystérieux et si obscur. Elle fut publiée après sa mort, en 1678, par le bénédictin Argaiz. Elle a obtenu une seconde et une troisième édition enrichie de gravures, à Madrid, en 1789 et 1804.

Telles sont dans leur ensemble les quelques rares versions espagnoles catholiques, toutes partielles, de nos Livres Saints, que nous présente la période de 1500 à 1780. Elles ne représentent qu’une partie insignifiante des travaux scripluraires qui furent l’œuvre des catholiques espagnols pendant les xvi", xviie et xviii « siècles. On sait assez, en effet, que le xvi » siècle en particulier fut l’âge d’or des théologiens et des exégètes en Espagne. Mais, au lieu de rédiger leurs travaux bibliques dans leur langue maternelle, ces auteurs les écrivirent en latin, avec autant d’abondance que de perfection et de succès. La langue espagnole y perdit sans doute ; mais l’Église entière y gagna, puisque leurs ouvrages profitèrent à plus d$ lecteurs.