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BLÉ


Connut sept années d’abondance, suivies de sept années de stérilité ; elles avaient été prédites par un songe mystérieux que Joseph expliqua au Pharaon : sept épis pleins, sortant d’une même tige, dévorés par sept épis maigres. Gen., xli, 5, 7, 26, 27. Grâce à la prudente administration de Joseph, établi viceroi, on remplit les greniers de l’Egypte, Gen., xii, 35, 49, de sorte que non seulement les habitants n’eurent rien à souffrir, mais les étrangers des pays environnants, pressés par la famine, descendaient dans la vallée du Nil pour acheter du blé. Gen., xlh, 2, 3, 6, 19, 25, 26 ; xun, 2 ; Act., vii, 12. Quant au fclé à sept épis croissant sur une même tige, il est assimilé par plusieurs au Triticum compositum, que l’on voit encore en Egypte (fig. 551). Comme Je blé était la nourriture habituelle du peuple, on le voit toujours figurer dans le texte officiel des listes d’Offrande :  ; à faire aux défunts, « ar le mort se nourrissait comme pendant la vie. De même dans les peintures funéraires, on voit souvent représentées toutes les scènes agricoles du labourage des terres, de l’ensemencement, de la moisson, du battage, du vannage des blés, de la mise des grains dans les greniers. Voir Agriculture, fig. 45, 46, 47, 48, col. 277-283. Elles nous aident à comprendre les mêmes pratiques, usitées autre fois chez le peuple hébreu, revenu d’Egypte en Palestine, pratiques du reste à peu près communes à tout l’Orient. — Dans les tombes égyptiennes, on a retrouvé des grains de blé assez bien conservés pour qu’on ait pu reconnaître le Triticum sativum ou blé ordinaire, le Triticum turgidum et le Triticum durum. Il était curieux de semer ce blé, peut-être contemporain de Moïse ou de Joseph : on a plusieurs fois tenté l’expérience. Le comte de Sternberg aurait vu quelques grains du blé ordinaire germer et fructifier. Faivre, La variabilité des espèces et ses limites, in-12, Paris, 1868, p. 171. Un autre essai fut fait à Saint-Pol-de-Léon et donna, dit-on, des épis magnifiques, mais une farine insipide. Cf. F. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, 5e édit., 1889, t. ii, p. 171, note 3 ; Magasin pittoresque, 1858, t. xxvi, p. 80 ; cf. Revue archéologique, 6e année, p. 603. Mais on a contesté ces expériences, et l’on prétend que les grains fournis par les fellahs n’étaient pas anciens. Magasin pittoresque, (oc. cit. "W. Smith, Dictionary of the Bible, t. iii, p. 1745 ; cf. G. Maspero, dans Matériaux pour l’histoire primitive de l’homme, novembre 1887, p. 479. D’ailleurs il a été constaté que les grains de blé placés dans les tombes avaient le plus souvent subi une torréfaction, ou avaient été enduits d’une sorte de vernis, pour mieux conserver cette nourriture destinée au défunt, en la momifiant en quelque sorte. Cet enduit résineux -a bien permis à la fécule de garder ses propriétés chimiques, mais a étouffé tout germe de vie. V. Loret, La flore pharaonique, 2e édit., 1892, p. 21.

3. La Palestine, pour être fertile, avait besoin plus que l’Egypte du travail de l’homme, et elle ne pouvait rien donner si Dieu ne la fécondait parla pluie du ciel. Deut., Si, 10-12 ; mais, avec la bénédiction divine, elle produisait rôb dâgân, « des céréales en abondance. » Gen., xxvii, 28, 37 ; c’était une « terre de blé, » Deut., viii, 8 ; xxxiii, 28 ; IV Reg., xviii, 32 ; « du meilleur blé », Deut., xxxil, 14 ; Ps. lxxx (hébreu, lxxxi), 17 ; Ps. cxLvn, 14. Toutefois le peuple ne doit pas oublier que le blé, comme les autres céréales, « est le bien de Jéhovah, » Jer., xxxl, 12 ; c’est lui qui le donne à Israël, Ose., ii, 8 (hébreu, 10) ; les moissons obéissent à la voix de Dieu. Ezech., xxxvi, 29 ; Ps. cm (hébreu, civ), 14 ; civ (hébreu, cv), 16 ; Matth., "VI, 8, 11. Si Israël est fidèle, Jéhovah bénira ses céréales et donnera la pluie en son temps pour les bonnes récoltes de grains, Deut., xi, 14 ; Ose., ii, 22 (hébreu, 24) ; si le peuple est infidèle, au lieu de blé il recueillera des épines, Jer., Xli, 13, ou bien Dieu lui retirera ces biens, Ose., Il, 9 (hébreu, 11) ; Agg., i, 11 ; ses ennemis les dévoreront et jie lui laisseront rien, Deut., xxviii, 51 ; Thren., ii, 12, jusqu’à ce qu’il revienne au Seigneur. Is., lxii, 8. Aussi le

psalmiste remercie Dieu d’une abondante récolte, Ps. lxiv (hébreu, lxv) : c’est Dieu qui a préparé la terre, arrosé les sillons, amolli le sol par des pluies fines, béni la semence et revêtu les collines et les vallées de riches moissons. Ps. lxiv, 10-14. Il n’est donc pas possible de douter que la Palestine n’ait été très fertile en blé. Cf. B. Ugolini, De re rustica veter. Hebrssor., dans Thésaurus Antiq. sacrar., t. xxix, col. m-ix ; Guénée, Mémoires sur la fertilité de la Judée, à la suite des Lettres de quelques Juifs, édit. de Lyon, 1819, t. iii, p. 297-460. A l’époque romaine, on voit souvent des épis de blé représentés sur les monnaies judaïques comme une des

552. — Épis sur une monnaie d’Hérode Agrippa I". BAEIAEQE ArPin… Tabernæulum ou dais (symbole de la puissance royale). — ^. Trois épis (image symbolique de la Judée, d’après les uns ; dOB oblations faites à Dieu dans le temple, d’après les autres).

principales productions du pays (fig. 552). Maintenant encore, malgré les longs siècles de domination musulmane, la Palestine montre sa fécondité, dès qu’on se donne la peine de la cultiver un peu. Elle offre quantité de plaines fertiles en blé, comme les plaines de la Séphéla, de Saron, de Caïpha, de Zabulon, d’Esdrelon, etc. A. J. Delattre, Le sol en Egypte et en Palestine, dans les Études religieuses, novembre 1892, p. 403. En parcourant la Palestine au printemps, on peut se rendre compte de l’étonnante fertilité de ce sol, et juger de ce qu’il devait produire lorsqu’il était bien cultivé par une population nombreuse. Dans la peinture de l’âge d’or messianique, les prophètes n’ont garde d’omettre ce trait des riches moissons couvrant non seulement les plaines, mais jusqu’au sommet des montagnes, et par les ondulations de leurs épis hauts et épais manifestant à tous la bénédiction divine, Ps. lxxi (hébreu, lxxii), 16 : sous ces images saisissantes pour une population agricole est annoncée l’abondance des biens spirituels. Cf. Zach., ix, 17.

3° Semailles. — On semait le blé en Palestine après les pluies du mois d’octobre, en novembre et même en décembre : cela dépendait des régions et aussi du plus ou moins d’abondance des premières pluies. Deut., xi, 14 ; Jer., v, 24 ; Jac, v, 7. Car, après les chaleurs brûlantes de l’été, la terre était tellement desséchée et durcie, qu’il était impossible d’ensemencer avant que le sol eût été amolli et disposé à recevoir le grain dans son sein. Ps. lxiv (hébreu, lxv), 10. « Donne une bonne portion de semence à ton champ en Tischri, et ne crains pas de semer même en Casleu ( décembre), » dit un Targum sur l’Ecclésiaste, xi, 2. On semait le blé un mois environ après l’orge ; il en était de même en Egypte : aussi, dans ce dernier pays, le blé ne fut-il pas frappé par la grêle comme forge, lors de la septième plaie, parce qu’on le semait et qu’il levait plus tardivement. Exod., ix, 32. Après avoir labouré le sol et tracé les sillons (voir Agriculture, col. 282), on ensemençait le tlé soit ordinairement à la volée, en faisant ensuite fouler la terre par des animaux domestiques, Is., xxxii, 20, soit en le semant avec soin par rangées, en distançant les grains pour assurer des’épis plus abondants. Is., xxyiu, 25. Cf. Strabon, xv, 3, 11.

Le grain de froment ainsi enseveli sous la terre y meurt, et dans la mort se développé le germe de vie. Joa., XII, 24. C’est d’abord, dit saint Marc, iv, 27, 29, une petite herbe qui sort de terre, puis un épi, et l’épi se remplit de grains. Alors on y met la faucille, car c’est le temps de la moisson. Le blé sur pied, la tige ou chaume s’appelle qâmâh,