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1789
1790
BIBLIQUES (SOCIÉTÉS) — BICHE


Saints dans toutes les langues et tous les dialectes. À la fin de 1889, elle avait dépensé depuis son origine un peu plus de deux cent soixante - quinze millions de francs, et imprimé cent vingt-quatre millions de volumes, se décomposant ainsi : Bibles complètes, trente-sept millions ; Nouveaux Testaments, cinquante-huit millions ; portions détachées, vingt-neuf millions. Près de quatre millions de volumes ont été mis depuis en circulation chaque année. Les langues ou dialectes représentés dans cette masse de volumes étaient de deux cent soixante - quinze en 1889. Quelques nouvelles traductions ont été exécutées depuis. La Société britannique fait distribuer ses volumes par des colporteurs chargés de pénétrer partout et d’employer leur zèle à répandre la Bible traduite dans la langue du pays. Ils la vendent ordinairement à prix très réduit, la moitié des frais de la Société étant couverts par des dons volontaires. En 1888, huit cent sept colporteurs bibliques circulaient, dont soixante en France, quatre-vingt-dix-sept en Russie, cent soixante-six dans l’Inde et à Ceylan, cent douze en Chine, etc., et ils ont réussi à placer près de neuf cent quatre vingt-deux mille exemplaires. La Société britannique possède aussi des dépôts dans tous les pays. De 1820 à 1890, il est sorti du seul dépôt de Paris près de huit millions quatre cent mille volumes. Cf. G. Browne, History of the British and Foreign Bible Society, 2 in-8°, Londres, 1859 ; (Bagster), Bible of every Land, in-4°, Londres (1869) ; La Société biblique britannique et étrangère, notice ùitS, Nancy, 1889 ; Le Livre universel, in-32, Paris -Bruxelles, 1878 ; Reed, The Bible Work of the World, in-S a, Londres, 1879. — La Société biblique de Berlin étend surtout son action sur les pays de langue allemande et les colonies de l’empire. — La Société biblique américaine imite dans l’Amérique du Nord ce que l’Angleterre fait chez elle au point de vue biblique.

II. Résultats de l’ceuvre. — Les résultats matériels qu’enregistrent les Sociétés bibliques attestent leur activité et leur libéralité, mais on peut néanmoins leur adresser de justes critiques. — 1° En principe, la lecture seule de la Bible, faite sans préparation, sans direction et sans règle, par des gens qui ne sont même pas toujours en état de la comprendre, ne saurait former des chrétiens.

— 2° Au simple point de vue de la fidélité des traductions, les difficultés de l’œuvre sont à peu près insurmontables. On sait tout ce qu’il a fallu de patience, de science et de travail pour traduire les Livres Saints dans nos langues européennes. Et cependant ces langues sont formées de très longue date à l’expression des idées philosophiques et théologiques les plus délicates. L’Évangile a été prêché dans une langue avec laquelle elles ont une multitude de points communs. Enfin les mœurs que supposent les récits des Livres Saints ne sont pas, en général, assez éloignées des nôtres pour nous dérouter dans l’intelligence du texte sacré. Mais il en est tout autrement de la plupart des dialectes dans lesquels les Sociétés bibliques font passer la Sainte Écriture. Un très grand nombre d’entre eux manquent de mots et de tournures pour exprimer les notions théologiques, en particulier celles de foi, de grâce, de salut, etc., et même pour rendre certaines idées abstraites élémentaires, comme celle d’immortalité. Bien plus, quelques dialectes sont d’une telle pauvreté, que les termes les plus usuels de nos contrées ne s’y trouvent même pas. Ainsi en setchuana, dialecte de l’Afrique méridionale, le nombre huit ne peut s’exprimer que par la tournure : « dix moins l’abaissement de deux doigts. » La Bible n’en a pas moins été imprimée tout entière en ce dialecte, en 1858. Il ne faut pas oublier d’ailleurs que si nos langues européennes se prêtent avec une facilité relative à la traduction des Livres Saints, c’est qu’elles se sont formées chez des peuples déjà chrétiens, imbus d’idées bibliques et évangéliques. Les dialectes de l’Asie orientale, de l’Afrique, de l’Océanie, de l’Amérique primitive, sont dans des conditions bien différentes. À la difficulté que la plupart des langues présentent en elles mêmes pour rendre le texte des Livres Saints, s’en joint une autre presque aussi grave, et inhérente aux moyens dont on est obligé de se servir pour l’exécution de ces traductions multiples. Chacune d’elles est entreprise, la plupart du temps d’après la version anglaise, par un missionnaire protestant, qui ne peut guère posséder à fond la langue plus ou moins barbare dans laquelle il doit faire passer le texte sacré. Il s’aide dans son travail du concours d’indigènes qui ne connaissent que très superficiellement la langue maternelle du missionnaire, et en tout cas n’ont pas l’habitude d’exprimer, même dans la leur, des pensées très abstraites ni très relevées II se dresse ainsi devant les traducteurs des obstacles que le plus beau zèle du monde ne peut surmonter. C’est ce qui faisait dire à de Sacy, dont les Sociétés bibliques citent volontiers quelques pages dans lesquelles leur zèle et leur dessein reçoivent des éloges : « Il y a des traducteurs qui semblent avoir cru que, lorsque le texte ne leur offrait pas un sens clair et satisfaisant, il leur suffisait de donner à chaque mot de l’original un équivalent quelconque, sans s’embarrasser s’il résultait de la réunion de ces mots un ensemble que l’intelligence pût saisir. » Considérations sur les nouvelles traductions des Livres Saints, dans le Journal des savants, juin 1824, p. 327. Les missionnaires catholiques se sont plaints bien souvent des effets déplorables produits parmi les populations qu’ils évangélisaient par la distribution de tels livres. « Le zèle des missionnaires protestants, écrivait l’un d’eux, consiste ici comme partout à répandre force Bibles. Si leurs traductions reproduisaient la pure parole de Dieu, sans altération et avec un style intelligible, peut-être pourrait-on espérer que ces semences, quoique jetées par une main ennemie, finiraient sous l’influence de la grâce par porter quelques fruits. Mais elles renferment des erreurs si monstrueuses, elles sont écrites d’une façon si barbare, que les indigènes les plus instruits, tout en reconnaissant les caractères et les mots de leur langue, n’y comprennent rien et ne peuvent.saisir l’enchaînement des pensées. » Annales de la Propagation de la foi, t. lxxii, septembre 1840, p. 458. Depuis lors, la Société biblique a revisé les traductions qu’elle a reconnues fautives, et toutes assurément ne sont pas également répréhensibles. Cependant, en somme, comme l’a dit le protestant Reuss, il y a là « une fabrication entreprise avec bonne intention, mais nécessairement imparfaite ». Geschichte der heiligen Schriften Neuen Testaments, 5e édit, 1874, t. ii, p. 239. III. Condamnation des Sociétés bibliques par l’Église.

— Alors même que l’œuvre entreprise par ces Sociétés serait irréprochable par son côté philologique, elle n’en demeurerait pas moins dangereuse, comme le principe d’examen individuel qui l’inspire. Il y a dans l’Écriture des passages obscurs et difficiles qui ont besoin d’être expliqués, et la lecture du texte seul de la Bible faite par des ignorants incapables de le comprendre, faute des éclaircissements nécessaires, peut leur être funeste. Aussi la uie et la IVe règle de l’Index règlent-elles que les fidèles ne doivent pas lire indistinctement toute sorte de versions. En 1757, Benoît XIV formula la rv B règle de l’Index en ces termes : « Si ces versions de la Bible en langue vulgaire ont été approuvées par le SaintSiège apostolique, ou éditées avec des notes tirées des saints Pères ou d’autres savants catholiques, elles sont permises. » Pie VIII confirma ce décret en 1829. Aucune des Bibles éditées par les Sociétés protestantes ne remplit ces conditions. Elles sont toutes sans notes et sans explications d’aucune sorte. Aussi les souverains Pontifes les ont-ils condamnées : Léon XII, dans son encyclique du 3 mai 1824 ; Pie VIII, dans son encyclique du 24 mai 1829 ; Grégoire XVI, dans l’encyclique du 8 mai 1844 ; enfin. Pie IX, dans l’encyclique Quanta cura, du 8 décembre 1864, Syllabus, % iv. II. Lesêtre.

    1. BICHE##

BICHE, femelle du cerf. Voir Cerf.