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BETHPHAGÉ


viennent plus claires, malheureusement contradictoires : les unes montrent Bethphagé entre le sommet du mont des Oliviers et Béthanie ; les autres au sud du même mont, prés de la route qui contourne la montagne. La plupart des relations du xiie siècle nous indiquent la première situation. « À une verste de Béthanie, du côté de Jérusalem, dit le moine russa Daniel, trad. Khitrowo, p. 22, se trouve une tour érigée sur le lieu où Marthe rencontra Jésus ; c’est là aussi que le Christ monta sur l'âne après avoir ressuscité Lazare. » De Noroff, au lieu de tour, traduit colonne (p. 36). La rencontre de Jésus et de Marthe n’ayant pu avoir lieu que sur une des voies de Jéricho, l’indication de l’higoumène ne saurait désigner qu’un lieu au nord de Béthanie, sur le chemin qui rejoint l’ancienne voie, la plus au nord, de Jérusalem à Jéricho. Voir Béthanie 1. « Entre la même Béthanie et le sommet du

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1308, dont un exemplaire a été publié par M. de Vogué, dans Les églises de la Terre Sainte, et l’autre par Bongars, à la suite des œuvres de Marino Sanuto, indiquent clairement Bethphagé au sud du mont des Oliviers. Ce plan marque trois chemins se dirigeant de Jérusalem à Béthanie : l’un, le plus septentrional, passe au nord de l'église de l’Ascension ; le second passe au sud de cette églfèe, à la même distance que le premier ; le troisième, plus au sud encore, contourne tout le mont des Oliviers. Sur son trajet est le figuier maudit, et il porte cette inscription dans le premier exemplaire : VIA X SE ASELLU, et dans le second : VIA, XPI SUP ÀSELLTJM..

Les indications du P, Burkard (1283), Descriptio Terrm Sanctse, 2 8 édit. Laurent, p. 62, paraissent analogues à ce plan. Bethphagé est pour lui « à un jet de pierre, à gauche, sous le mont du Scandale, dans une vallée. On monte de

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--T =" 513. — Pierre de Bethphagé. 'Face nord et face ouest. D’après un dessin de M. G. Guillemot. La face nord représente l’anesse etl'ânon qu’on va amener à Jésus. Sur la face ouest, maintenant effacée, était figurée sans doute l’entrée triomphante de Jésus à Jérusalem.

mont des Oliviers, dit Jean de Wurzbourg (en 1130), à peu près au milieu, était Bethphagé… ; deux sortes de tours de pierre, dont l’une est devenue une église, y subsistent encore et en marquent la place. » Descript. T. S., c. vu ; Pair, lat., t. clv, col. 1074. Théodoric (vers 1172) n’est pas moins explicite : « Jésus-Christ, venant à Bethphagé, lequel lieu est au milieu entre Béthanie et le mont des Oliviers, et où l’on a bâti en son honneur une chapelle convenable, envoya deux de ses disciples pour lui amener l’anesse et son ànon ; et lui, se tenant sur une grande pierre que l’on voit à découvert dans la chapelle, monta sur l'âne et s’avança vers Jérusalem par le mont des Oliviers, tandis qu’une foule nombreuse vint à sa rencontre à la descente de la montagne. » Libettus de Lotis Sanctis, édit. Tobler, 1865, p. 52. Après les croisades, les Fran. ciscains ne cessèrent, jusqu’en 1652, de se rendre chaque année, le jour des Palmes, à ce lieu intermédiaire entre Béthanie et le mont des Oliviers, pour partir de là en procession vers la Ville sainte ; la chapelle et la pierre avaient disparu, mais la population de Jérusalem y voyait encore Bethphagé. Cf. Quaresmius, Elucid. Terrse Sanctse, lib. iv, peregr. x, c. x, xi et xii, 1639, p. 331-336.

En 1877, on découvrit fortuitement en cet endroit un bloc de pierre carré, adhérant au sol, d’un peu plus d’un mètre de chaque côté, et couvert sur ses faces de fresques et d’inscriptions latines remontant évidemment au temps des croisés. La peinture, au nord (fig. 513), représente un castel, une foule, une ânesse avec son ânon ; celle de l’est, des personnages portant des palmes et une inscription détériorée ; au sud, du côté de Béthanie (fig. 514), la résurrection de Lazare ; à l’ouest est une inscription où on lit entre autres mots : BETHPHAGE. Les Pères franciscains acquirent, en 1880, le terrain renfermant la pierre, et découvrirent, à trois pas à l’est, le cintre d’une antique abside. Ces découvertes corroborent les témoignages des pèlerins, et montrent assez clairement que la croyance générale du XIIe siècle voyait Bethphagé en cet endroit (fig. 515).

Cependant le plan de la sainte cité et des environs, de

514. — Pierre de Bethphagé. Face sud et face est. D’après un dessin de M. G. Guillemot. La face sud représente la résurrection de Lazare ; la face est, la foule qui accompagne Notre-Seigneur le jour des Rameaux.

là par le coté sud, en tournant le mont des Oliviers ; on arrive au lieu où le Seigneur monta, et aussitôt apparaît la ville avec le Temple et le Saint Sépulcre ». Le P. Ricoldi (1309) vient de Béthanie « à Bethphagé, à un mille, près du mont des Oliviers, et trouve le lieu du figuier qui se dessécha sur l’ordre du Seigneur, et le lieu où le Seigneur envoya ses deux disciples ». Liber Peregrinacionis, ibid., p. 109. Le Liber sanctorum locorum Terne Jérusalem de Fretellus, Patr. lat., t. clv, col. 1048, et le Tractalus de distantiis locorum Terræ Sanctm d’Eugésippe, Patr. gr., t. cxxxiii, col. 1000, qui sont du milieu du xip siècle, font passer de même entre le mont des Oliviers et le mont du Scandale la route qui de la vallée de Josaphat mène par Bethphagé à Béthanie.

A moitié chemin entre Jérusalem et Béthanie, à un mille à peu près de l’une et de l’autre, à droite du chemin de Jérusalem à Jéricho, à peu de distance sous le mont du Scandale, près de l’endroit où, depuis le moyen âge an moins, on montre où était le figuier qui se dessécha, à l’endroit où le mont des Oliviers tourne vers le nord, sur une petite colline, prolongement de la montagne qui s’avance dans la vallée, on remarque une dizaine de citernes ou excavations indiquant la situation d’un village antique. Le nom ancien a disparu, et l’on se contente de dénommer l’endroit el-Biâr, a les puits. » Ces restes de village, les seuls que l’on trouve entre Jérusalem et Béthanie, sont sans douteceux du petit village dont parlent Burkard et Ricoldi, et qu’ils regardent comme Bethphagé.

La première identification est plus généralement adoptée ; mais la seconde peut s’appuyer sur plusieurs raisons qui ne sont pas sans valeur. 1° Tandis que le chemin par le sommet du mont des Oliviers était sinon impraticable, du moins peu propice au dessein du Seigneur, celui du sud s’y prêtait au contraire très bien. 2° Ni le site ni les environs du premier lieu désigné ne paraissent convenir aux indications des Talmuds ; on n’y voit pas d’endroit pouvant servir d’assiette à un village ; on n’y remarque pas non plus de traces sensibles de son existence, tandis