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BETHLÉHEM


de bonne heure entouré de la vénération des fidèles. Saint Jérôme, dans une de ses lettres à Paulin, t. xxii, col. 581, raconte que l’empereur Hadrien, voulant détruire, en les souillant par le culte des faux dieux, les trois grands souvenirs du christianisme, le tombeau du Ressuscité, le Calvaire et la grotte de Bethléhem, fit planter, au lieu même de la Nativité, un bois consacré à Thammuz ou Adonis. Si le fait est exact, il faut supposer que le bois et l’idole disparurent bientôt faute d’adorateurs, car Origène, Contr. Gels., i, 51, t. xi, col. 756, n’en dit rien : « Si quelqu’un désire s’assurer, écrit le célèbre auteur alexandrin, en dehors de la prophétie de Michée -et des Évangiles, que Jésus est né à Bethléhem, qu’il veuille bien se souvenir que, conformément au récit de l’Evangile, on montre à Bethléhem la caverne où il est né. Tout le monde le sait dans le pays, et les païens eux-mêmes redisent à qui veut l’entendre que, dans ladite caverne, est né un certain Jésus, adoré par les chrétiens. » Eusèbe, un siècle plus tard, constate la persistance de cet|e tradition, Dem. Ev., vii, 5, t. xxii, col. 540, et dans sa Vie de Constantin, iil, 43, t. xx, col. 1101, il rapporte que « sainte Hélène consacra deux temples au Dieu qu’elle adorait, un au mont de l’Ascension, l’autre sur la caverne obscure de la Nativité… Elle embellit l’auguste réduit par des décorations riches et variées. Quelque temps après, l’empereur lui-même, surpassant la magnificence de sa mère, orna ce même ljeu d’une façon toute Toyale. y> Le pèlerin de Bordeaux vit, vers l’an 333, la basilique que Constantin avait fait bâtir : « lbi basilica facta estjussu Constantini. » Itinera Terrse Sanctse, édit. Tobler, 1. 1, p. 19. Socrate, H. E., i, 17, t. lxvii, col. 121, et Sozomène, H. E., t. lxvii, col. 933, confirment ces irrécusables témoignages, et on sait avec quelle éloquence sainte Paule et sainte Eustochie, dans leur lettre à Marcella, t. xxii, col. 490f 884, célèbrent le site authentique de la Nativité. L’église de Constantin, remaniée par Justinien {Rg. 504, 505), n’a jamais cessé, à travers des péripéties diverses de destruction et de restauration, de marquer la place de l’ancien caravansérail. Nous n’avons pas ici à décrire cette basilique, peut-être le plus ancien édifice chrétien qu’il y ait au monde. Qu’il suffise de dire que, sous le chœur, un peu élevé à sa partie centrale, se trouve la grotte de la Nativité. Elle va du levant au couchant, sur environ douze mètres de long, quatre de large et trois de haut. Dans sa disposition actuelle, imposée sans doute par le désir de transformer en crypte l’excavation du rocher qui primitivement était de niveau avec le sol, le petit sanctuaire représente assez mal une caverne où pénétraient les animaux, car de petits escaliers permettent seuls d’y descendre. Mais il est à croire que l’ouverture principale est cachée sous les tentures et le marbre qui couvrent les murs, probablement dans le long côté du parallélogramme, et peut-être vis-à-vis le lieu dit delà Crèche (fig. 506). Quoi qu’il en soit des détails, la certitude du site ne semble pas douteuse, et l’on a eu raison d’écrire, à l’extrémité orientale de la petite chapelle, autour d’une étoile d’argent encastrée dans le pavé, ces mots qui proclament le plus auguste et le plus consolant des mystères : Hic de Virgine Maria Jésus Christus

NATUS EST.

IL Description. — Bethléhem est aujourd’hui une petite ville de sept mille habitants, bâtie à 777 mètres au-dessus du niveau de la mer, un peu plus haut que l’altitude moyenne de Jérusalem, sur deux collines dont l’une, celle de l’orient, moins élevée que l’autre, se trouve plus large et avec des pentes plus douces. Au nord et au midi se déroulent des vallées pittoresques. Dans les vignes, protégées par des murs de pierre sèche, croissent le figuier, le grenadier, l’amandier et l’olivier. De petites tours de garde, rappelant les passages d’Isaïe, v, 2, ou de Matth., xxl, 33, s’y dressent encore çà et là. Le vin et le miel de Bethléhem sont exquis. Les habitants y sont laborieux, mais turbulents ; les femmes chastes et belles ; les enfants

intelligents et doux. Le climat est à peu près celui de Jérusalem, sauf que les vents y soufflent avec plus de violence. L’ensemble du paysage demeure des plus gracieux. La nuit, quand on n’entend plus que quelques chants de pasteurs et les sonnettes des troupeaux paissant au sommet des collines, tout y porte à de pieuses méditations, .et l’on trouve naturel que David, pâtre avant d’être roi, ait puisé, dans le spectacle d’une nature si belle, les plus poétiques

507. — Grotte des Pasteurs dans les environs de Bethléhem. D’après une photographie.

inspirations de ses cantiques. Cf. Ps. vin. De la vieille cité fortifiée, quelques fragments de remparts subsistent peut-être. S’il était vrai que les trois citernes, Biar Daoûd, creusées dans le roc, à cinq cents mètres nord-ouest de Bethléhem, fussent celles-là mêmes dont David désira avoir un peu d’eau, II Reg., xxiii, 15 et 16 ; I Par., xi, 17-19, il faudrait en conclure que la ville s’étendait alors assez loin vers l’occident, car il est dit que la citerne dont il voulait l’eau rafraîchissante était à la porte de Bethléhem. Mais il serait plus naturel dé chercher la citerne où se hasardèrent à aller puiser les trois braves parmi celles qui sont sur la grande place de l’Église, et qui durent, comme le caravansérail, se trouver à l’entrée de la cité. Tout le monde sait qu’à Bethléhem se rattachent les souvenirs du grand explorateur des Écritures, saint Jérôme, et des pieuses femmes qui vinrent le rejoindre dans sa solitude. On y montre la grotte où l’illustre docteur travaillait durant l’été, et la bibliothèque où il se tenait en hiver, celle-là au bout du souterrain qui fait suite à la grotte de la Natif vite, celle-ci dans le couvent des Arméniens.

A une demi-heure environ de Bethléhem, à l’est, la tradition place la grotte des Bergers auxquels l’ange annonça la naissance de Jésus. Luc, II, 8. Elle est située dans un champ planté d’oliviers, de forme carrée, fermé par dès murs de pierres sèches. On croit que sainte Hélène y avait bâti une église. Il n’en reste que la crypte ou grotte qui