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BÉROTII


colline rocheuse, peu élevée, renferme sept à huit cents habitants. Les maisons sont petites et construites à moitié sous terre. Au bas de la colline, tout près de la route de Jérusalem, coule une source très abondante, dont l’eau, conduite par un canal, probablement antique, alimente un petit réservoir, que surmonte une coupole musulmane. Autrefois elle se répandait dans deux grands bassins placés de l’autre côté de la route et construits en belles pierres de taille. L’un est aux trois quarts détruit ; l’enceinte de l’autre est encore reconnaissable. À quelque distance de là, sur les pentes du coteau, on voit les ruines d’un grand et beau khan, actuellement abandonné ou servant fort peu, mais encore intact et fréquenté par les caravanes au temps de Quaresmius, Elucidatio Terrœ Sanctæ t. ii, p. 787. Ses vastes galeries, voûtées intérieurement, sont soutenues par des piliers carrés d’un mètre quatre-vingts centimètres de côté, bâtis avec des pierres de taille d’un bon appareil, dont beaucoup doivent être antiques. Elles sont éclairées par des espèces de regards pratiqués de distance en distance, ce qui les fait ressembler à des citernes.

Dans la partie la plus élevée du village sont les restes d’une église, qui, d’après le cartulaire du Saint-Sépulcre, fut terminée en 1146, avec l’hôpital qui en dépendait. Elle forme un carré long de trentedeux mètres sur dix-huit, terminé par trois absides en cul-de-four. Elle était divisée en trois nefs ; celle du centre a complètement disparu. Les murs sont encore en partie debout, sauf ceux de la façade, qui sont démolis. Ils ont été construits sur certains points, et principalement aux angles, avec de beaux blocs en bossage, qui proviennent probablement d’un édifice plus ancien. Cf. de Vogué, Les églises de Terre Sainte, in-4°, Paris, 1860, p. 339. Une ancienne tradition rapporte que cet édifice aurait été bâti à l’endroit même où la sainte Vierge et saint Joseph, revenant de Jérusalem, où ils étaient allés pour la fête de Pâques, s’aperçurent de la disparition de l’enfant Jésus, resté dans le Temple, au milieu des docteurs. Luc, ii, 43-46. L’évangéliste n’indique aucun lieu ; il se contente de dire que les parents de Notre-Seigneur « vinrent à une journée de marche ». L’iter diei correspond en Orient à six ou sept heures ; mais cette expression semble marquer ici, non jpas tant le chemin qu’on peut faire en un jour, que la première journée de marche accomplie par la caravane ; d’autant plus qu’il s’agit d’une caravane où se trouvaient des enfants, et dans laquelle bon nombre de pèlerins allaient à pied. La première étape dut donc très probablement avoir lieu auprès de la précieuse fontaine d’El-Biréh, qui de temps immémorial a déterminé la station naturelle du voyageur dont les pas se dirigent de Jérusalem à Naplouse et Nazareth. — Quelques auteurs identifient encore avec El-Biréh la Bérée de I Mach., ix, 4.

Voir Bérée 1.

A. Legendre.

3. BÉROTH, BÉROTHA (hébreu : Bêrôfai, Il Reg., vin, 8 ; Bêrôtâh, Ezech., xlvii, 16 ; Vulgate : Béroth, II Reg., vni, 8 ; Bérotha, Ezech., xlvii, 16), ville d’Adarézer, roi de Soba, prise par David, qui en emporta une immense quantité d’airain. II Reg., viii, 8. Elle est placée par Ézéchiel, xlvii, 16, à la frontière septentrionale de la Terre Promise (pour l’explication du texte prophétique, voirvuRAN, col. 1253). Avant de montrer comment les deux noms correspondent à une même localité, dont nous chercherons l’emplacement, il nous faut dire quelques mots de critique textuelle.

Il est vraisemblable que Bêrôtai et Bêrôpâh se rattachent à Be’êrôf ; on trouve, en effet, I Par., xi, 39, ’7113, Bérôtî (Septante : 6 BY)pu>9£), comme forme apo copée de >n’-|NS, Be’êrôtî (Vulgate : Berothites, « de Béroth » ). II Reg., xxiii, 37. Les Septante, II Reg., viii, 8, ont traduit par Ix t » v èxiex-rwv [noXewv], « des [villes] choisies ; » ils auront donc lu : [i-iyjwirun, de la racine

-ins, « choisir, » au heu de >rnan, « de Bêrôtai, » ou bien

ils auront vu dans le nom un dérivé de tis, bârar, qui

a la même signification. Il est curieux de voir un manuscrit de la Vulgate reproduire Becheroth, tandis que quelques éditions suivent l’hébreu en donnant Berothai. Cf. G. Vercellone, Variée lectiones Vulgatse latinee, 2 in-4°, Rome, 1864, t, ii, p. 353. Dans le passage parallèle de

I Par., xviii, 8, le texte hébreu offre ps, Kûn (Vulgate : Chun), au lieu de Bêrôtai. Il est probable cependant que quelques manuscrits présentaient ce dernier mot, puisque les traducteurs grecs ont conservé ici les mêmes expressions qu’au deuxième livre des Rois, éx twv IxXsxt&v [n<5).ewv]. La version syriaque a de même gardé, .}£.-s,

Berûfi. Josèphe, de son côté, Ant.jud., vii, y, 3, reproduit servilement l’hébreu pso (p3D, mik-kûn, avec la

préposition, . « de Kùn » ), et appelle la ville Mâ^w. Tf at-il dans les Paralipoménes une faute de copiste ? Chun indique-t-il un autre nom de Bêrôfai ou une ville différente ? Impossible de le savoir au juste. Quelques auteurs croient reconnaître Chun dans Kouna, la Conna des Romains, au sud-ouest de Ba’albek, sur les bords pittoresques de VOuadi Yafouféh. Cf. K. Furrer, Die antiken Stâdte und Ortschafien irn Libanongebiele, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, 1885, t. viii, p. 34. Voir Chun. Relevons enfin une singulière variante dans la version arabe, qui pour Kûn donne Ba’albek.

La ville de Béroth prise et pillée par David appartenait à l’Aram Soba, c’est-à-dire à une portion de la Syrie qui, d’après l’Écriture même, confinait au territoire d’Émath (aujourd’hui Hamah, sur l’Oronte). I Par., xviii, 3 ;

II Reg., viii, 9, 10. De son côté, Ézéchiel, xlvii, 16, place Bérotha entre cette dernière ville et Sabarim « qui est entre les confins de Damas et les confins d’Émath » (dans l’hébreu, le pronom relatif’âsér peut se rapporter aussi bien à Bérotha qu’à Sabarim seule). Il est donc naturel de conclure que nous n’avons ici qu’une même ville. Si la direction dans laquelle nous devons la chercher est déterminée d’une façon générale par le texte sacré, son emplacement précis n’est pas facile à trouver. Rien de plus indécis que la ligne qui forme la frontière septentrionale de la Terre Sainte ; aussi la question qui nous occupe est-elle diversement résolue.

1° Il paraîtrait tout naturel, au premier abord, d’identifier Béroth avec l’ancienne Berytus, actuellement Beyrout, la plus importante des cités maritimes sur cette partie de la Méditerranée. La ressemblance entre les deux noms, fin’13, Bêrôtâh, et cajy*j, Beyrout, a de quoi

frapper, et plusieurs exégétes s’y sont laissé prendre. Mais il est très douteux que le royaume de Soba s’étendit jusqu’à la côte. Ensuite aucun des passages scripturaires ne peut faire penser à un port de mer ; Ezéchiel, au contraire, semble exclure formellement cette interprétation ; car, partant « de la grande mer », il trace la frontière vers l’est, en passant par « les confins de Damas », et c’est entre ces deux points qu’il place Bérotha. — 2° Il n’est pas plus permis d’aller chercher notre ville à une extrémité opposée, dans l’ancienne Birtha, aujourd’hui El-Bir ou Birah, sur le bord oriental de l’Euphrate, ou dans la Barathena de Ptolémée, v, 19 ; ces deux cités sont, beaucoup trop à l’est. Cf. G. Winer, Biblisches Realworterbuch, 2 in-8°, Leipzig, 1847, t. r, p. 155. — 3° On ne saurait également voir ici la Bérotha, B^ptôdY), dont parle Josèphe, Ant.jud., V, i, 18. Située « dans la Galilée supérieure, non loin de Cadès », elle est trop au sud. — 4° G. H. Tomkins, dans le Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1885, p. 108-110, a essayé d’identifier Bérotha avec Brisa, sur les pentes orientales du Liban, à quelque distance de Hermel ; mais sa thèse’repose sur une série d’assimilations qui nous semblent peu fondées. — 5° D’autres enfin la reconnaissent dans le