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BABYLONIE


Babylonie, soit d’Assyrie, les ont heureusement complétés et éclaircis ; toutefois les documents babyloniens le cèdent en deux points aux documents assyriens : la plupart des inscriptions royales s’occupent plus à relater les constructions de chaque souverain que les faits politiques ; de plus, elles sont datées souvent par un événement remarquable, ouverture d’un canal, construction d’un temple, cérémonie religieuse, etc., qui ne nous apprennent rien au point de vue chronologique, tandis que la chronologie assyrienne est exactement fixée par la liste des limu ou éponymes. À la vérité, les Babyloniens ont dressé des listes des événements employés comme date, année par année, mais jusqu’ici on n’en possède que quelques petits fragments peu utilisables. Y. Scheil, Les formules de chronologie en Chaldée et en Assyrie, dans la" Revue biblique, avril 1893, p. 216. Plusieurs listes royales ont permis cependant d’arrêter les grandes lignes de l’histoire babylonienne jusqu’au xxv siècle avant J. - G. Le point fixe de cette histoire est l’ère de Nabonassar, en 747, qui sert de point de départ au canon chronologique de l’astronome alexandrin Ptolémoe, et qui est au contraire presque le point d’arrivée de nos listes babyloniennes.

Des inscriptions babyloniennes, utilisées par les Assyriens, rapportaient l’origine du monde, l’histoire du déluge, la colonisation de l’Assyrie ; puis on entrait dans la période historique proprement dite, lzdubarGilgamès, le héros de la légende du déluge, paraît correspondre au Nemrod biblique. Nous voyons par les inscriptions qu’à l’origine la Babylonie formait un réseau de petites principautés plus ou moins indépendantes les unes des autres. Vers l’an 3800 régnaient à Akkad, l’Achad biblique, Sargon l’ancien et Naram-Sin son fils ; des inscriptions astrologiques nous montrent que dès lors ils firent des conquêtes assez lointaines, en Syrie et jusqu’à la péninsule sinaïtique ( ?). À une époque également fort ancienne, peut-être même plus ancienne encore, Tell-Loh ( Si-pur-la[ ?]) était la capitale d’un petit royaume où l’on a retrouvé beaucoup d’inscriptions et de ruines curieuses, avec une série royale dont le nom le plus connu est celui de Gudéa. En même temps la ville d’Ur, la patrie de Tharé, possédait une dynastie puissante, à laquelle Tell-Loh finit même par appartenir. Les souverains d’Ur prennent le titre de roi de Sumer et d’Akkad, qui paraît indiquer une domination ou du moins une suzeraineté sur la Babylonie entière, du nord au sud. Ur-Bagas ( ?) et Dun-gi ( ?), son fils, ont, en effet, laissé des constructions à Ur, à Arach, à Larsa, à Nippour, à Cutha, etc., ainsi que leurs successeurs ; mais les grandes villes babyloniennes conservaient souvent leur roi, qui devenait simplement vassal de celui d’Ur ; il arrivait même de temps en temps que les rapports étaient renversés, et que des princes comme ceux de’Isin prenaient le titre de roi d’Ur et de toute la Babylonie.

La Babylonie eut ensuite à subir, vers 4e xxme siècle, une invasion élamite, conduite par des princes Koudourides, ainsi nommés du premier élément de leur nom royal ( Koudour-Lagamar, Koudour-Nankounta, etc.). Une inscription d’Assurbanipal nous apprend que Koudour Nankounta envahit la Chaldée et pilla Arach vers 2245 ; plusieurs inscriptions de Koudour -Maboug et Rim-Akou, son fils, nous apprennent qu’ils maintinrent leur domination au moins sur la partie méridionale de la Babylonie et la Syrie : la Bible, corroborant de son témoignage ces données historiques, nous les montre s’étendant jusqu’aux régions transjordaniennes. Larsa, l’EUasar biblique, suivant l’hébreu, Gen., xiv, 1 (voir Amraphel et Arioch), fut la capitale babylonienne de ces conquérants, qui de là exercèrent leur suprématie ou leur suzeraineté sur les autres villes chaldéennes, Arach, Ur, Éridou, Lagas ; ils allèrent jusqu’à prendre le titre de roi de Sumer et d’Akkad, quoiqu’ils ne paraissent pas avoir occupé la Babylonie même. Une dynastie nationale dont nous avons tous les noms se maintint de 2419 à 2115 avant J.-C. C’est à

cette dynastie, et probablement à Hammourabi, qu’on doit l’expulsion des envahisseurs. Hammourabi a laissé de nombreuses inscriptions qui nous apprennent que sous son règne la Babylonie fut florissante, qu’il s’appliqua à construire des temples, à creuser des canaux, des forteresses, etc. C’est durant cette période que les enfants de Tharé, ancêtres des Hébreux, quittèrent la Chaldée et la ville d’Ur, pour se diriger, par la Mésopotamie septentrionale, vers la Palestine. À cette même époque, le triomphe de la partie sémitique de la population chaldéenne sur la partie chamitique ou couschite devint définitif : la langue suméro-akkadienne cessa d’être d’usage vulgaire et passa à l’état de langue morte et savante.

Une seconde invasion vint bientôt interrompre la prospérité de Babylone, celle des Kassi, les Cosséens ou Cissiens de la géographie classique, descendus de montagnes à l’est du Tigre. Frd. Delitzsch, Wo lag das Paradies, p. 31, 124, 128 ; Die Sprache der Kossâer, p. 62-63 ; Pognon, dans le Journal asiatique, 1883, t. ii, p. 422-425 ; Id., Inscription de Bavian, p. 122-124 ; Records of the Past, new ser., t. i, p. 16 ; t. v, p. rai, 107 et suiv. ; The Academy, 13 août 1892, p. 133. Leur domination sur la Babylonie dura près de six siècles (1747-1170), durant lesquels leurs inscriptions montrent qu’ils s’assimilèrent la langue, la civilisation et la religion de leurs sujets ; mais elles sont muettes sur le côté politique, et ce sont les inscriptions assyriennes dites synchroniques qui nous apprennent que dès lors l’Assyrie commença la lutte contre la Babylonie, son ancienne métropole. C’est durant cette même période que la Babylonie entra en relations avec l’Egypte. Les conquêtes des pharaons de la xviii 8 dynastie, principalement Tothmès 1Il et Aménophis II, dans le Boutennou, le Naharanna ou la Syrie, jusqu’à Cadès et Charcamis, leur permirent de soumettre passagèrement au tribut quelques princes babylonieus ou du moins assyriens, et de mentionner comme vassaux les princes d’Assur, Singar ou’Senkéréh, et peut - être Arach. Maspero, Histoire ancienne, 1886, p. 198-204 ; G. Rawlinson, History ofancient Egypt., t. ii, p. 234-235, 255 ; Records of the Past, Annals of Tothmes III, t. ii, p. 46, 49, 61, new ser., t. v, p. 25-42. Mais les tablettes de Tell el-Amarna, tout en confirmant le fait de rapports suivis entre l’Egypte et la Babylonie, nous montrent que les monarques kassites de Babylone traitaient avec les pharaons sur le pied d’égalité ; elles nous permettent aussi de constater qu’à cette époque la civilisation, et probablement l’autorité de Babylone, s’étendaient sur toute la partie occidentale de l’Asie : la langue babylonienne, plus ou moins modifiée, était alors la langue de chancellerie de toute la Syrie et de la Palestine, y compris Jérusalem, dont les Hébreux n’avaient pas encore fait la conquête. Mais comme les inscriptions historiques chaldéennes de cette époque font, pour ainsi dire, totalement défaut, nous ignorons la marche de ces agrandissements successifs de l’influence ou de la domination babylonienne ; toutefois les inscriptions de Tell el-Amarna, émanées un peu de partout, ne laissent aucun doute sur le fait lui-même. Records of the Past, new ser., t. ii, p. 57-71 ; t. iii, p. 55-90 ; t. v, p. 54-101 ; t. vi, p. 46-75 ; P. Delattre, Proceedings of the Society of Biblical Archseology, décembre 1890, p. 127 et suiv. ; H. Winckler, Der Thontafelfund von El-Amarna ; Halévy, dans le Journal asiatique, 1890, t. xvi, p. 298 et tomes suiv.

En tout cas, l’autorité de l’Egypte cessa d’être réelle en Babylonie, si elle l’y fut jamais, dès la XIXe dynastie, surtout vers la fin de cette dynastie, qui marque pour l’Egypte une période d’abaissement. Alors l’Assyrie, qui n’était dans l’origine qu’une colonie babylonienne, commence avec Babylone une série de luttes qui finit par l’extinction de la monarchie assyrienne. Ces luttes, interrompues par des traités de paix peu durables, commencent dès le xive siècle ou la fin du xve. — Babylone secoue le joug des KaSSites vers 1170 ; peu après, de 1055 à 1049, nous voyons roi de Babylonie un Élamite dont le nom nous est