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ASCALON

quoique la tribu de Juda s’en emparât, Jwl., i, 18, elle ne resta pas en sa possession. L’exploit de Samson est à peu près le seulWénement, relatif à cette ville, rapporté .par l'Écriture avant la captivité de Babylone ; ce héros s’y rendit de Thamnatha (distant à vol d’oiseau de près de 39 kilomètres) et y tua trente hommes, dont il donna les dépouilles aux Philistins qui avaient deviné son énigme, grâce à la perfidie de sa femme. Jud., xiv, 19. Le premier livre des Rois, vi, 17, mentionne seulement Ascalon avec les quatre autres capitales philistines qui offrirent chacune un tehôr (Vulgate : anus) d’or à Jéhovah, lorsque les Philistins, frappés par la vengeance divine, renvoyèrent en Israël l’arche d’alliance dont ils s'étaient emparés dans un combat. David, dans son élégie suiMa mort de Saùl et de Jonathas, tués à la bataille de Gelboé, recommande de ne point annoncer à Geth et à Ascalon la nouvelle du désastre d’Israël, de peur que les filles des Philistins n’en soient remplies de joie. II Reg., i, 20. Les prophètes nomment quelquefois Ascalon : Amos, i, 8 ; Sophonie, ii, 4, 7 ; Jérémie, xxv, 20 ; xlvii, 5, 7 ; Zacharie, ix, 5, prédisent sa désolation et sa ruine.

Quelques autres traits de son histoire nous sont connus par des sources profanes. D’après Justin, xviii, 3, la ruine de Sidon aurait été l'œuvre d’un roi d' Ascalon qui, par sa victoire, força leshabitants de cette ville à chercher un refuge à Tyr un an avant la guerre de Troie. Les inscriptions cunéiformes nous ont révélé un épisode plus certain et encore plus intéressant de l’histoire de cette ville : il date de l'époque de l’invasion de la Palestine par Sennachérib (701 avant J. -C). « Sidka, roi d' Ascalon, , is-qa-al-lu-na, dit Sennachérib dans le cylindre de Taylor, ne s'était pas courbé sous mon joug ; je pris les dieux de la maison de son père, sa propre personne, sa femme, ses fils, ses filles, la famille de la maison de son père, et je les emmenai en Assyrie. J'établis roi des Ascalonites Sarludari, fils de Rukibti, leur ancien roi, et je lui imposai un tribut. » Cuneiform Inscriptions of western Asia, t. i, pl. 37, col. ii, lignes 58-63. Voir aussi, ibid., l’inscription des taureaux de Koyoundjik, t. iii, pi. 12, lignes 20-21. Le roi d’Assyrie y raconte de plus, ligne 29, qu’il donna au roi d' Ascalon une partie des places qu’il prit à Ézéchias, roi de Juda. On peut déduire de ce récit que les habitants d’Ascalon avaient pris parti avec les Juifs contre les Assyriens, dont, ils avaient été déjà tributaires du temps de Théglathphalasar ( Cuneiform Inscriptions, t. ii, pl. 67, ligne 61), sous leur roi Mitinti. Rukibti était probablement resté fidèle au roi de Ninive, et c’est pour ce motif que Sennachérib donna le trône à son fils Sarludari. Les Ascalonites cpntinuérent à payer tribut aux deux successeurs de Sennachérib, Asarhaddon et Àssurbanipal : ces deux princes nomment « Mitinti, , roi de la ville d’Ascalon », parmi les vingt-deux rois de « la terre d’Occident » qui leur étaient soumis. Cuneiform Inscriptions, t. iii, pl. 16, ligne 5 ; G. Smith, History of Assurbanipal, Cylindre C, ligne 7, in-8°, Londres, 1871, p. 30. Plus tard, du temps de la suprématie des Perses, Ascalon passa sous la domination des Tyriens (Scylax, Peripl., 104, dans les Geographi grxci minores, édit. Millier, t. i, p. 79), puis sous celle d’Alexandre, comme l’attestent ses monnaies (L. Müller, Numismatique d’Alexandre le Grand, 1885, p. 308, pi. n » 1472 et suiv.), et, après lui, sous celle de ses successeurs-, les Ptolémées d’Egypte d’abord (Josèphe, Ant. jud., XII, iv, 5, t. i, p. 451), et ensuite les Séleucides de Syrie, d’après le témoignage du premier livre des Machabées, x, 86, et des monnaies frappées à Ascalon au nom d’Antiochus III, d’Antiochus IV, etc. (Voir Mionnet, Description des médailles, t. v, p. 25, 38, 72, 525, etc. ; Gardner, Catalogue of the Greek coins, Seleucid Kings, 1878, p. 68, 81, etc. ; E. Schürer, Geschichte des jüdischen Volkes, t. ii, Leipzig, 1886, p. 65-67.)

Du temps des Machabées, Jonathas ayant battu les troupes d’Apollonius, envoyé contre lui par le roi de Syrie, Démétrius II Nicator (147 avant J.-C), Ascalon ouvrit ses portes au vainqueur et le reçut à deux reprises avec dé grands honneurs. IMach., x, 86 ; xi, 60. Elle resta fidèle aux Machabées, sous son gouvernement. I Mach., xii, 33. Dans la suite, elle devint ville libre [oppidum liberum, Pline, H. N., v, 14), sous le protectorat de Rome. De l'établissement de son indépendance date une ère qui commence à l’an 104 avant J.-G.Voir Chron., pasc. ad ann.' U. C. 655, et la note ibid., Patr. gr., t. xcii, col. 448. Les années sont marquées d’après cette ère sur un certain nombre de monnaies frappées à Ascalon (fig. 287).


287. — Monnaie d’Ascalon.
ΣΕΒΑ[Σ]ΤΟΣ. Tête laurée de Néron, à droite ; devant, l’extrémité supérieure d’un candélabre. — ꝶ. ΑΣΚΑΛΩ[Ν]. Le génie de la ville, tourelé, debout sur une barque tenant nn trident et Facrostolium ; à droite une colombe et la date AOP (171, c’est-à-dire an 67 de notre ère) ; à gauche, un candélabre.

L’ancienne cité philistine y est quelquefois représentée par un génie dont la tête est couronnée de tours ; il est debout sur une barque qui indique la situation de la ville sur le bord de la mer ; à droite est une colombe qui rappelle le culte de la déesse Atergatis ou Dercéto, en grande faveur auprès des Ascalonites. Cf., sur les monnaies d’Ascalon, de Saulcy, Numismatique de le Terre Sainte, p. 178208. C’est là, disait-on, que Dercéto avait donné le jour à la fabuleuse Sémiramis. Diodore de Sicile, ii, 4, 2, édit. Didot, t. i, p. 83. Cf. Eusèbe, Prasp. Ev., viii, 14, t. xxi, col. 672-673. Voir Atargatis. Le temple qu’on avait érigé à Dercéto dans cette ville était, d’après Hérodote, i, 105, le plus ancien qui eût été construit en son honneur. Lorsque les Scythes, après la défaite de Cyaxare I er, roi des Mèdes, envahirent l’Asie occidentale, ils poussèrent jusqu’en Egypte, d’où Psammétique ne les chassa qu'à force de présents ; à leur retour, un de leurs détachements pilla à Ascalon le temple d' Atergatis (625 avant J.-C.). Hérodote, i, 105.

Josèphe nous fait connaître l’histoire de cette ville à son époque. Hérode le Grand y était né. (Eusèbe, H. E., i, 6, t. xx, col. 85 ; S. Justin, Dial. cum Tryph., 52, t. vi, col. 589-592 ; cf. E. Schürer, Geschichte des jûdischen Volkes, t. i, 1'= part., 1889, p. 233-234.) Quoiqu’elle n’appartînt pas à son royaume, il y fit bâtir de magnifiques portiques, des thermes, des fontaines. (Josèphe, Bell, jud., I, xxi, 11, p. 53.) Après sa mort, sa sœur Salomé reçut en don de l’empereur Auguste le château royal d’Ascalon. (Josèphe, Ant. jud., XVII, xi, 5, p. 688 ; Bell, jud., II, vi, 3, p. 94.) Pendant la guerre des Romains contre les Juifs, cette ville eut beaucoup à souffrir et se montra très hostile à l'égard des sectateurs de la loi mosaïque (Josèphe, Bell, jud., II, xym, l, 5 ; III, ii, l-3, p. 126, 128, 145-147 ; Philo, Légat, ad Caium, 30, édit. Mangey, t. ii, p. 576), de même que, dans la suite, à l'égard des chrétiens. Elle se signala dans les premiers siècles par son attachement au paganisme ; le culte qu’elle rendait aux dieux, les jeux qu’elle célébrait en leur honneur, ont été vantés par les anciens et sont mentionnés dans les monuments épigraphiques. Une antique Descriptio orbis nous apprend que ses athlètes et ses lutteurs étaient les plus renommés de la Syrie. (Geographi grxci minores, édit. Müller, t. ii, p. 519. Pour les inscriptions, voir Corpus inscr. greec, n" 4472, t. iii, p. 237 ; Le Bas et Waddington,