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ARMENIE


qui fait dériver Arménie du harMinni du Targum de Jonathan, et l’explique par har (hébreu) = montagne, et mino (zend) = ciel. Sir H. Ravvlinson suggère le dieu Armennu, qui, suivant une inscription cunéiforme mythologique, était adoré à Suse (G. Rawlinson, Herodotus, t. iv, essay iii). Une autre étymologie a été récemment proposée par M. Darmesteter, Journal asiatique, janvier-février 1891, p. 140. D’après ce savant, l’appellation perse Armina (de laquelle 'Apiievia est dérivée) est un nom artificiel formé par les Perses, dans le but de réunir dans un même nom les deux États principaux de l’Arménie : l’Ararat et le Minni.

B) Ararat. — L’Arménie ni aucune de ses provinces n’est jamais désignée par ce nom dans les inscriptions vanniques. Les rois d’Arménie appellent toujours leur pays Èiaïna. En revanche, ce même pays de Biaïna est constamment appelé Urartu dans les inscriptions cunéiformes d’Assyrie. Le nom Urartu se lit pour la première fois dans le récit d’une campagne de Salmanasar II (860 avant, T.-C). Il serait pourtant beaucoup plus ancien encore suivant quelques savants, tels que Fr. Lenormant, Les origines, t. ii, p. 38, et H. Sayce, Journal of the Royal Asiatic Society, t. xiv, p. 392, qui identifient l’Urartu des Annales des rois de Ninive avec l’Urtu d’une tablette bilingue. Cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. ii, p. 48, recto, 1. 13. M. II. Sayce place ce document au XVIe ou au xviie siècle avant. T. -C. Quelques-uns pensent aussi que le nom Urartu doit encore être identifié avec VArardu (Cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. i, p. 18, 1. 58) des Annales d’Assurnasirpal (885-860). D’après sir H. Rawlinson (dans Y Herodotus de G. Rawlinson, t. iv, essay iii, On the Alarodians of Herodotus) et Fr. Lenormant, Les origines, t. ii, p. 372 et 472, le nom des Alarodiens d’Hérodote, iii, 94, ne serait qu’une variante de celui des Urartiens des textes cunéiformes. Cette opinion est généralement admise. Enfin le nom d' Ararat se retrouve sans déguisement dans celui d’Aïrarad, que les auteurs arméniens de notre ère donnent au bassin de l’Araxe, depuis l’endroit où ce fleuve franchit l’Aghri-Dagh jusqu'à son confluent avec le Kizil-tehaï, à peu près à la hauteur du vieux Djoulfa. — Moïse de Khorène, i, 15, fait dériver le nom d’Aïrarad du roi Ara le Beau, sans expliquer le second élément, arad ; car nulle part, ni dans V histoire ni dans la géographie de cet auteur, je n’ai trouvé l’explication arad — llétrissure, que donne Gescnius, Thésaurus, p. 155 (probablement d’après la traduction latine des frères Whiston), et que, répète Fr. Lenormant, Les origines, t. ii, p. 36. Cf. Rosenmuller, Handbuch der bibl. Alterth., t. i, p. 260. À peu près tous les auteurs contemporains dérivent Ararat de l’assyrien Urartu. Quant à l'étymologie du mot Urartu lui-même, les opinions varient. Sir H. Rawlinson (dans G. Rawlinson, Herodotus, t. iv, essay iii) se demande si ce mot ne seiait pas un composé de ut ; « lune, » et aredh, « terre ; » Urartu serait alors un synonyme de Chaldée, en supposant que ce dernier nom vienne de Khaldi, le dieu suprême des Urartiens et que sir H. Rawlinson croit être le dieu Lune. Cette hypothèse serait en accord avec l’opinion de ceux qui croient que les anciens Chaldéens avaient d’abord habité l’Arménie, mais à une époque fort ancienne (H. Rawlinson, loc. cit.) et non, comme le voulaient Gesenius, Thésaurus, p. 270 ; Heeren, Politique et commerce des peuples de l’antiquité, p. 169, et d’autres, jusqu’au vine siècle avant J.-C. ; ce dernier point ayant été reconnu comme faux depuis le déchiffrement des inscriptions cunéiformes. G. Rawlinson, The five great monarchies, i, ch. in ; Tiele, Babylonisch-assyrische Geschicltte, p. 65. — M. Sayce, The Cuneiform inscriptions of Van, dans le Journal of the Boyal Asiatic Society, t. xiv, p. 394, 6uppose que Urtu est une contraction de Urartu ; mais de ce dernier il ne donne aucune étymologie. D’après Fr. Lenormant, Urartu se compose de ar, montagne, et urtu, pays élevé, appellation dont les Assyriens se servaient

aussi pour désigner l’Arménie. On aurait eu d’abord arurlu, puis ur-artu. Mais Fr. Lenormant n'étend cette étymologie qu'à l’Ararat des Rois, d’Isaïe et de Jérémie ; celui de la Genèse aurait une autre origine. Ce serait l’appellation À ryaratha, c’est-à-dire char des Aryas ou des illustres, parce qu’autour du sommet de l’Aryaratha était censé tourner le char des sept Maharschis brahmaniques, des sept Amescha-çpentas mazdéens, envisagés comme les sept étoiles de la Grande - Ourse ; appellation que les tribus aryennes donnaient au massif montagneux qu’elles considéraient comme le berceau de l’humanité. Lenormant, Les origines, t. ii, p. 36 et suiv. Cf. Obry, Le berceau de l’espèce humaine, p. 8. Ce point de l’hypothèse de Fr. Lenormant a été vivement contesté par le P. van den Gheyn, Le séjour de l’humanité postdiluvienne, dans la Revue des questions scientifiques, 1883, t. xiil, p. 454 et suiv. Quelques auteurs ont cru trouver une désignation de l’Arménie dans l’airai ; Xsfôpievov harmôndh. Amos, iv, 3. Plusieurs des anciennes versions, prenant la première syllabe pour le mot har, y ont vu un nom de montagne. Ainsi les Septante traduisent et ; to opoç tô To(<.[j.ïv (variante : 'Pejj.jj.iv). Théodotio'.. cité par saint Jérôme : mont Mona, et cité par Théodoret : ûij/r^bv ô'poç. Aquila, cité par saint Jérôme, avait mont Armoria ; Symmaque, cité par saint Jérôme et par Théodoret, portait : en Arménie. Saint Jérôme a opté pour ce dernier sens et traduit : Et projiciemini in montes Armenise quee vocantur Armona. Bochart, Phaleg., i, 3, 1. 1, col. 20, édit. de Leyde, 1692, penche pour la leçon mont Mona, et suggère l’identification Mona = Mini = Minyas. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 390 ; Rosenmuller, Scholia in Yct. Test., Amos, iv, 3 ; Keil, Die zwôlf kleine Propheten, 1888, note, p. 193. Voir Armon.

2° NOMS QUI NE SE RAPPORTENT QU’A UNE PARTIE DE

L’Arménie. — A) Menni (hébreu : Minni. Jer., li, 27). — Quelques écrivains, par exemple Bochart, Phaleg., col. 20, 1. 19, avaient cru que le nom de Minni s'était étendu, au moins à une certaine époque, à toute l’Arménie. Cette opinion, basée sur le har-Minni = Arménie, dont nous avons déjà parlé, n’a jamais été très répandue. Toutefois il est généralement admis que le pays de Menni ou Minni, associé par Jérémie à ceux d’Ararat et d’Ascenez, était une province de l’Arménie ; mais on ne s’accorde pas sur la position de cette province. On l’a d’abord identifiée avec le Minyas, au pied du mont Baris (le Masis dos Arméniens, notre, mont Ararat), dont parle Josèphe, Ant. jud., i, iii, 6, d’après Nicolas Damascène. Mais où est exactement le Minyas de Nicolas Damascène ? SaintMartin, Mémoires, t. i, p. 250, pense que c’est la ville de Manasguerd des historiens d’Arménie (Mantzikiert de Constantin Porphyrogénète et de Cédrénus), maintenant Melazguert, dans la vallée du Mourad-Sou (Euphrate oriental ; Arzanias des classiques), Cette opinion, adoptée par Gesenius, Thésaurus, p. 807, etc., est vieillie. Les textes cunéiformes ayant révélé l’existence du peuple de Man ou Mun (Schrader, Keilinscliriften und Al te Testament, 1883, p. 423), on s’empressa d’identifier Minni = Minyas avec la ville actuelle de Van, le » i en assyrien s'échangeant facilement contre un v. Voir Fr. Lenormant, Lettres assyriologiques, t. i, p. 22 ; Babelon, Histoire ancienne de l’Orient, t. iv, p. 245 ; A. Delattre, Esquisse de géographie assyrienne, dans la Revue des questions scientifiques, t. xiv, 1883, p. 125 et passim. — D’après une vue plus récente, le pays de Minni doit être transporté plus à l’est encore. M. Sayce, dans le Journal of tlie Royal Asiatic Society, t. xiv, p. 389 et 400, soutient, non sans beaucoup de vraisemblance, que le royaume de Minni = Minyas = Man se trouvait sur le littoral sud-ouest du lac d’Ourmiah. B) Thogormah (hébreu : Jôgarmùh ; Septante : Qot.va(ii, ©opyofii). On le rencontre quatre fois dans la Bible, à savoir : Gen., x, 3, et I Par., i, 6, où Thogormah est nommé à côté d’Ascenez et de Riphath. les deux autres fils de Gomer ; et Ezech., xxvii, 14 ; xxxviii, 6. — À part