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ANTIOCHUS III LE GRAND — ANTIOCHUS IV ÉPIPHANE


des souffrances qu’endurent les Juifs lui est imputable, et le prophète s’élève, Dan., XI, 14, contre ceux qui prennent parti pour lui contre le roi d’Egypte, de même que la lettre conservée dans II Mach., i, 13-16, adressée à des Juifs habitant l’Egypte, et bien disposés par suite en faveur des Ptolémées, leur dit que la mort d’Antiochus III les a tous délivrés d’un grand péril, parce que, si ce prince avait réussi à s’emparer du trésor du temple de Nanée, il aurait sans doute entrepris de se venger sur l’Egypte de tous les affronts qu’il avait reçus. Le texte grec de II Mach., i, 12, qui est le texte original (rendu avec une nuance inexacte dans la Vulgate), parle d’une guerre qui était « préparée » contre les Juifs. Quoi qu’il en soit, du reste, de cette guerre, et quoique Antiochus III, qui avait eu jusque-là tout intérêt à ménager les Juifs, afin de les gagner à son parti dans sa lutte contre l’Egypte, les eût, en effet, bien traités, au témoignage de Josèphe, Ant. jud., XII, iii, 3, 4, le roi de Syrie aurait difficilement résisté à la tentation de les pressurer, pour être en état de payer aux Romains les sommes dont il leur était redevable, de sorte que la mort de ce prince fut pour les Juifs, comme pour les Égyptiens, une délivrance. Voir Flathe, Geschichie Macédoniens, t. ii, p. 225 et suiv. ; Clinton, Fasti hellenici, t. iii, p. 314 et suiv. F. Vigouroux.

3. ANTIOCHUS IV ÉPIPHANE, huitième roi de Syrie ( 175-164 avant J.-C ; de l’ère des Séleucides, 137-149) ; fils et second successeur d’Antiochus III le Grand (fig. 174). I Mach., i, 11 ; Appien, Syr., 45. C’est de tous les rois

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174. — Antiochus IV Épiphane.

Tête barbue et laurée du roi Antiochus 17. — ^. BA2IAEQÏ

antioxot ©eût Eni*ANors nikh<ï>opo[T].

Jupiter, assis sur son trône, tient dans la main droite une Victoire, et s’appuie de la gauche sur son sceptre.

séleucides celui dont les Livres Saints parlent le plus longuement, Dan., xi, 21-45 ; I Mach., 1, 11-67 ; ii-m ; vi, l-16 ; II Mach., iv, 7-ix, 29, celui dont la mémoire est restée la plus odieuse aux Juifs à cause de la persécution qu’il fit subir aux serviteurs fidèles du vrai Dieu. Il s’empara du trône, à la mort de son frère Séleucus IV Philopator, au détriment de son neveu, qui régna plus tard sous le nom de Démétrius I" Soter. Il est connu dans l’histoire sous le surnom d’Épiphane, ’Emçavr^, « illustre, » sous lequel il est désigné I Mach., i, 11 (grec, 10) ; II Mach., IV, 7 ; x, 9, 13 ; mais son caractère extravagant lui fit donner, par allusion à ce titre, le sobriquet d’Épimane, ’Em|iav^ ; , « fou. » Athénée, x, 438. Sur ses monnaies, comme pour justifier le reproche d’orgueil que lui font les Écritures, Dan., xi, 36 ; II Mach., v, 21 ; IX, 21, non content du titre d’Épiphane, il prend aussi celui de Qe6 ; , « dieu, » et de Nixriçépot, « victorieux, » qui était celui de Jupiter Olympien. Son père Antiochus III avait été obligé de le donner comme otage aux Romains (188 ans avant J.-C), pour exécuter une des conditions du traité de Magnésie. I Mach., i, 11 (10) ; Appien, Syr., 45. Il demeura àRoine jusqu’en 175, où son frère Séleucus IV, peu de temps avant sa mort, lui fit rendre la liberté, en substituant à sa place son propre fils Démétrius. Antiochus n’était pas encore

de retour dans sa patrie et se trouvait à Athènes, lorsque Séleucus IV lut empoisonné par Héliodore. Voir Héliodore. Ce dernier s’empara du trône ; mais Antiochus, aidé par Eumène et Attale, le chassa facilement, et profitant de l’éloignement de son neveu Démétrius, héritier légitime de la couronne, qui l’avait remplacé comme otage à Rome, il le supplanta « et obtint le royaume par la fraude ». Dan., xi, 21 ; cf. Tite Live, xli, 20 ; Jean d’Antioche, fragm. 58, dans Mùller, Histor. grsec. fragm., t. iv, p. 558.

Le caractère du nouveau roi de Syrie nous a été dépeint par Polybe, son contemporain, dans les termes suivants : « Il aimait à s’échapper de son palais, loin de ses courtisans, et d’aller errer çà et là dans la ville, accompagné seulement d’un ou deux serviteurs. On le rencontrait surtout dans les boutiques des orfèvres qui travaillaient l’argent et l’or, s’entretenant sans fin avec les ciseleurs et les autres ouvriers, et leur témoignant un grand amour pour leur art. Il se plaisait aussi à se mêler familièrement aux gens du peuple, et même à manger et à boire avec les hôtes qui se trouvaient chez eux. Lorsqu’il apprenait que des jeunes gens se réunissaient quelque part pour se régaler, il s’y rendait sans s’être fait annoncer, accompagné d’une trompette et d’une cornemuse, de soite que la plupart s’enfuyaient, effrayés par son arrivée imprévue. Souvent il se dépouillait de ses habits royaux, se revêtait d’une toge, et allait briguer une charge sur la place publique ; il prenait alors les uns par la main, il embrassait les autres et les priait de lui donner leur voix, tantôt pour les fonctions d’édile, tantôt pour celles de démarque. Quand il avait obtenu la dignité sollicitée, il s’asseyait à la manière romaine sur un siège d’ivoire, il écoutait attentivement les affaires qui se traitaient sur l’agora, et il rendait ses sentences avec beaucoup de zèle et de soin. De tout cela il résultait que les gens sensés ne savaient que penser sur son compte : les uns croyaient que c’était un homme simple, les autres que c’était un fou. Dans la distribution de ses présents, il se conduisait d’une manière analogue : à ceux-ci il donnait des osselets, à ceux-là des dattes, à d’autres de l’or. S’il rencontrait par hasard des personnes qu’il n’avait jamais vues, il leur faisait aussi des dons auxquels elles ne s’attendaient en aucune façon. Dans les sacrifices qu’il offrait dans les villes et dans les honneurs qu’il rendait aux dieux, il surpassait tous les autres rois. La preuve en est dans le temple de Jupiter Olympien à Athènes, et dans les statues élevées autour de l’autel de Délos. Il avait coutume de se baigner dans les bains publics, lorsqu’ils étaient tout remplis de gens du peuple, etc. » Polybe, xxvi, 10. Cet écrivain, comme plusieurs autres historiens de l’antiquité, rapporte de lui beaucoup d’autres traits semblables. Ils s’accordent tous à montrer en lui un prince prodigue, Dan., xi, 24 (voir Antiochide), vaniteux, ami du faste, de l’ostentation, des constructions somptueuses, des spectacles pompeux, se mêlant aux danseurs et luttant d’adresse avec eux, fréquentant la populace, plein de mépris et de dédain pour les grands. Cf. Polybe, xxviii, 18, 3 ; xxix, 9, 13 ; xxxi, 3 et suiv. ; Diodore, xxix, 32 ; xxxi, 16 ; Tite Live, xli, 20 ; Ptolémée VII Évergète II, 1, et Héliodore, 6, dans Mùller, Histor. grœc. fragm., t. iii, p. 186 ; t. iv, p. 425. En tout il se portait aux extrêmes et aux excès, et ce sont ses extravagances qui lui firent donner par Polybe, xxvi, 10, le surnom d’Épimane, au lieu de celui d’Épiphane. Par beaucoup de traits de son caractère, il présageait Néron.

Tel était le roi sous la domination duquel tombèrent les Juifs après la mort de Séleucus IV Philopator. À toutes ses autres manies, le nouveau souverain joignait celle de se poser en réformateur religieux, et d’aimer à intervenir dans les questions liturgiques et théologiques. Ses prédécesseurs avaient laissé à leurs sujets de Palestine pleine et entière liberté dans l’exercice de leur culte, mais il n’allait plus en être de même sous son gouvernement.

Les relations des enfants d’Abraham avec leurs maîtres.