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AMALEC — AMALÉCITE


appliqué à indiquer les doubles noms géographiques pour les localités qui en avaient changé. Cf. ꝟ. 2, 3, 7, 17. Déjà Origène, In Nutn., hom. xix, t. xii, col. 719, se servait de Gen., xiv, 7, pour distinguer les Amalécites battus par Chodorlahomor des Amalécites descendants d'Ésaù. Il est vrai qu’il suit, sans la contrôler, la leçon des Septante, qui ne permet pas d’expliquer le passage par une prolepse : « Et ils battirent les princes des Amalécites et les Amorrhéens. » (Par confusion du i et du i, ils ont lu sarê, « princes, » au lieu de Sade, « champ, pays ; » la version syriaque suit la même leçon que les Septante.) — 2° Que les Amalécites remontent, en effet, à une époque antérieure à Ésaiï, et appartiennent au groupe de populations établies en Ghanaan avant la migration d’Abraham, c’est ce qu’on peut conclure non seulement du titre énigmatique donné par Balaam à Amalec dans son oracle : « Amalec, commencement (aîné) des peuples, » Num., Xxiv, 20 ; mais surtout de l’indication rapide de I Reg., xxvii, 8, qui montre Amalec occupant depuis les temps reculés (mê'ôlam, si le texte n’est pas altéré) la région méridionale avec d’autres peuples chananéens. Avec ces désignations coïncideraient certaines traditions arabes, qui représentent Amalec tantôt comme un fils de Cham et comme le père d’Ad et des Adites, que d’autres rattachent à la ligne de Sem, tantôt comme un frère de Lud et d’Arphaxad. Cf. d’Herbelot, Bibliothèque orient., 1697, au mot Amlik ; de Sacy, Excerpta ex Abulfeda, dans Pococke, Spécimen hist. arab., p. 464. Mais Nôldeke, Veber die Amalekiter und einige and. Nachbarvôlker der Isræliten, Gœttingue, 1864, a montré qu’on ne pouvait faire grand fonds sur ces traditions assez incohérentes, recueillies à une époque bien postérieure à Mahomet et au Coran, ni les regarder comme indépendantes du titre d’aîné des peuples, donné par Balaam. — 3° Il vaut mieux revenir simplement aux données bibliques, et remarquer d’une part que les Amalécites ne sont jamais présentés comme faisant partie de la nation iduméenne, qu’ils en sont plutôt distingués, II Reg., viii, 12, 13 ; I Par., xviii, 11 ; Ps. lxxxii, 7, 8 ; si bien que, tandis que les Iduméens, comme les peuples parents d’Israël, doivent être épargnés et leur territoire respecté, Deut., ii, 4-8, 9, 19, Amalec est voué à la mort, Exod., xvii, 4 ; Deut., xxv, 17-19 ; I Reg., xv, 2-3, et son pays doit appartenir aux Hébreux. Num., xiv, 24-25. D’autre part, jamais Amalec n’est donné comme frère des Israélites, ni pour éveiller en lui quelque sympathie, ni pour faire ressortir l’odieux de sa conduite et expliquer par cette circonstance aggravante la malédiction qui le frappe. « Il est donc vraisemblable, conclut dom Calmet, Dictionnaire de la Bible, édit. de 1730, que les Amalécites dont il est si souvent parlé dans l'Écriture étaient un peuple descendu de Chanaan et dévoué à l’anathème de même que les autres Amorrhéens, et fort différente des descendants d' Amalec, petit-fils d'Ésaù. » La même conclusion est soutenue par Reland, Palxstina, lib. I, ch. xiv, édit. de 1724, p. 78 ; J. D. Michælis, ouv. cit. ; F. K. Rosenmûller, Handbuch der biblischen Alterthumskunde, 1823, t. iii, p. 90-94 ; AVelte, Kirchenlexicon, 1886, 1. 1, p. 673 ; cf. Iperen, Historia critica Edom et Amalec, in-4°, Leovard., 1768. Comme cependant Moïse ne rattache pas les Amalécites à Chanaan, on peut aussi en faire un peuple d’une autre race. — Si un petitfils d'Ésaû et ses descendants portèrent aussi le nom d' Amalec, ce fut peut-être parce que, dans leur situation géographique ou dans leurs relations sociales, ils eurent avec les anciennes populations amalécites un contact plus étroit que les autres tribus iduméennes. J. Thomas.

2. AMALEC. Nom d’une montagne située dans la tribu d'Éphraïm sur laquelle se trouvait la ville de Pharaton, d’où était originaire et où fut enterré un juge d’Israël, Abdon, fils de Hillel. Jud., xji, 14-15. Sur la cause qui fit donner à une localité de la tribu d’Ephraïm le nom d' Amalec, voir Amalécite, col. 429. La position de cette

montagne nous est conservée grâce au village actuel de Fer’ata, à deux heures et demie au sud-ouest de Naplouse, que plusieurs considèrent comme l’ancienne Phir’aton. E. Robinson, Later biblical researches in Palestine, 1856, p. 134 ; V. Guérin, Samarie, 1875, t. II, p. 179-180. C’est à cette montagne d' Amalec que se rapporte sans doute l’obscur et difficile passage, Jud., v, 14 ; Débora, énumérant celles d’entre les tribus qui ont pris part avec Barae à la campagne contre les Chananéens, nomme d’abord : « d'Éphraïm ceux qui ont leur racine en Amalec. » Telle est l’interprétation la plus probable du texte dans son état actuel ; la Vulgate n’en suppose pas un autre, mais sa traduction n’a aucun lien avec le contexte : Ex Ephraïm delevit eos in Amalec. Elle répète ensuite le nom d' Amalec, qui ne se trouve pas dans l’original : Et post eum ex Benjamin in populos tuos, o Amalec. Saint Jérôme, sans doute sur les indications de ses maîtres juifs, entendant le passage comme l’auteur du Targum, y a vu une allusion à la victoire de Saùl de la tribu de Benjamin, et, pour montrer plus clairement à quoi se rapporte le possessif tuos, a ajouté : o Amalec. C’est ce qu’explique une scholie du Correctorium dominicain [Vatican., fonds Ottoboni, mss. 293) : « D'Éphraïm naquit Josué, qui battit Amalec, comme on lit dans l’Exode, et de Benjamin naquit Saùl, qui, lui, détruisit Amalec, ce qui est ici prophétisé. Mais l’addition finale : o Amalec n’est pas dans l’hébreu, mais est suppléée pour le sens. » — « Ex Ephraim fuit Josue, qui percussit Amalec, ut legitur in Exodo ; et ex Benjamin fuit Saul, qui et ipse delevit Amalec, quod hic prophetatur. Sed quod in fine additur o Amalec, non est in hebræo, sed gratia sensus apponitur. » Cf. Vercellone, Var. lection. Vulg. lat., t. ii, p. 98 ; mais il ne signale pas le rapprochement avec le Targum, qui nous montre, comme plus bas pour Tela'îm de IReg., xv, 4 (voir Amalécite, col. 429-430), qu’un certain nombre des variantes propres à la Vulgate viennent des interprétations empruntées directement ou indirectement par saint Jérôme aux paraphrases juives. J.Thomas.

3. AMALEC. Nom d’une localité. Nous lisons I Reg., xv, 5 : « Saùl vint jusqu'à la ville d' Amalec, et mit une embuscade dans la vallée. » Nulle part ailleurs il n’est question de ville portant ce nom, ni même de ville proprement dite appartenant aux Amalécites. Il s’agit plutôt ici du principal campement où se trouvaient en ce moment établis Amalec et son roi Agag. Le nom hébreu Hr, dans son acception générale et conforme à son étymologie ('mi*, « veille, poste d’observation » ), peut s’appliquer à un simple campement de nomades. Les espions israélites sont chargés par Moïse de voir ce que sont les villes ('arîm) où habite Chanaan, « si elles sont des campements (mahânim), ou bien des lieux fortifiés (mibesarîm). » Num., xiii, 19 (20). Les douars des Arabes d’Afrique, venus primitivement de l’Arabie, peuvent, comme le remarque E. H. Pal mer, The désert of the Exodus, t. ii, p. 322, nous donner une idée exacte de ce qu'était ce Hr Amaleq. « Quand on a choisi un endroit convenable pour camper, les troupeaux, qui forment la plus grande richesse de la tribu, sont réunis en un même lieu. On plante les huttes ou les tentes à l’entour. Un petit mur de pierre en forme de cercle fait la clôture de défense ; entre les pierres on met de gros fagots d’acacia épineux, et ces branches entrelacées et armées de pointes acérées (voir Acacia) protègent le campement comme une barrière infranchissable. Tel est ce qu’on appelle un douar. » Et tel était sans doute le 'îr Âmâlêq sur lequel Saùl fit main basse.

J. Thomas.

    1. AMALÉCITE##

AMALÉCITE (hébreu : 'Amâlêqi), nom d’un peuple qui tirait son nom d’Amalec, voir Amalec, et qui est souvent appelé lui-même simplement Amalec. Nous allons : 1° en déterminer la position géographique ; 2° en esquisser l’histoire.

I. Position géographique des Amalécites. — 1° H est