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ACCHO — ACCOMMODATICE (SENS)

dans les inscriptions de Thothmès III, parmi les noms géographiques qui appartiennent à la Palestine septentrionale. À l'époque du siège de Tyr par Salmanasar V (727-722), elle est au pouvoir des Tyriens ; car un passage de Ménandre, rapporté par Josèphe, Ant. jud., IX, xiv, 2, nous apprend qu’elle leur fit alors défection et se soumit aux Assyriens. Sennachérib (704-680), dans sa campagne contre Ézéchias, roi de Juda, s’en empara, et la mentionne après Sidon, Sarepta, Hosah et Achazib. Cf. Prisme de Taylor ou Cylindre C de Sennachérib, Cuneiform inscriptions of Western Asia, t. i, pl. 38-39 ; F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 4e édit., Paris, 1885, t. iv, p. 212. Elle est également citée dans une inscription d’Assaraddon (680-667), relative aux campagnes de ce prince contre les Philistins et les Égyptiens. Cf. Vigouroux, ouv. cité, t. iv, p. 258. Enfin, sous le règne d’Artaxerxès II (405-359), elle sert aux Perses de base d’opérations contre l’Egypte : « Ako, dit M. Maspéro, était, sur la côte méridionale de Syrie, le seul port assez grand pour recevoir les flottes de la Perse, assez sûr pour les protéger contre les tempêtes et contre les surprises. Pharnabazos y établit son quartier général. Pendant trois années, vivres, munitions, soldats de terre et de mer, vaisseaux phéniciens et grecs y affluèrent ; … et au commencement de 373 l’expédition était prête à partir. Elle comptait deux cent mille soldats et vingt mille mercenaires, trois cents trières, deux cents galères à trente rames, et beaucoup de vaisseaux de charge ; » Histoire ancienne des peuples de l’Orient, 4e édit., Paris, 1886, p. 645.

Ces détails nous montrent quelle était dès ce moment l’importance d’Accho, importance qui devait grandir de plus en plus. Reconnue pour être, par sa situation, la clef de la Syrie, servant de débouché à la route commerciale de Damas à la mer, sa possession devint du plus grand prix au point de vue politique. Aussi les rois se la disputèrent avec acharnement, surtout après le démembrement de l’empire macédonien. Rattachée à ce moment à l’Égypte, comme le reste de la Phénicie, elle prit le nom de Ptolémaïde ; puis, plus tard, conquise par Antiochus le Grand, elle revint à la Syrie. Ptolémée, v, 62. Quand les Machabées se levèrent pour défendre leur patrie et leur foi, Accho Ptolémaïde se posa entre eux et les rois de Syrie tour à tour comme uu objectif important, ou un point dangereux, ou un rendez-vous naturel. L’an 163 avant J.-C, Simon poursuivit les ennemis qu’il avait en Galilée jusque sous les murs de Ptolémaïde, dont il ne put néanmoins s’emparer. I Mach., v, 15-22. Antiochus Eupator (164-162), vaincu par Judas Machabée, fit la paix avec lui, et « l'établit chef et prince depuis Ptolémaïde jusqu’aux Gerréniens ». Mais les habitants de la ville ne voulurent pas accepter le traité conclu, et c’est à grand’peine que Lysias parvint à apaiser leur mécontentement. II Mach., xiii, 24-26. Vers l’an 152, Alexandre Balas, prétendant au trône de Syrie, se rendit maître de la place, I Mach., x, 1 ; mais Démétrius Soter, briguant l’amitié du peuple juif et de Jonathas, « donna la ville et son territoire au sanctuaire qui est à Jérusalem, pour les dépenses nécessaires aux choses saintes. » I Mach., x, 39. Alexandre, vainqueur de son rival, célébra à Ptolémaïde son mariage avec Cléopâtre, fille de Ptolémée Philométor, roi d’Egypte ; et, sur son invitation, Jonathas s’y rendit avec des présents qu’il offrit aux deux monarques. I Mach., x, 56-60. En 145, Démétrius II Nicator, débarrassé de ses deux compétiteurs, Alexandre et Ptolémée, manda dans la même ville Jonathas, qui s’insinua dans la confiance du roi et en reçut beaucoup d’honneurs. I Mach., xi, 22-26. Mais Tryphon, conspirant contre le jeune Antiochus, et craignant de rencontrer dans le héros juif un adversaire redoutable, attira perfidement ce dernier à Ptolémaïde, où il le fit prisonnier, et mit à mort tous ses partisans. I Mach., xii, 45-48.

La ville s'étant plus tard rendue indépendante, Alexandre Jannée (106-79) l’attaqua sans succès, et en leva le siège dès qu’il apprit que Ptolémée Lathyre, roi de Chypre, venait de débarquer à Sycaminos avec une nombreuse armée. Josèphe, Ant. jud., XIII, xii, 2-4. Celui-ci s’en empara ; mais, bientôt après, Cléopâtre, sa mère, reine d’Egypte, la lui enleva. Ant. jud., XIII, xiii, 1, 2. Tigrane, roi d’Arménie, la prit à son tour, lors de son incursion momentanée en Syrie. Ant. jud., XIII, xvi, 4. Enfin Hérode le Grand, dans sa munificence pour certaines cités étrangères, la dota d’un gymnase comme Tripoli et Damas. Bell, jud., i, xxi, 11. Élevée par l’empereur Claude au rang de colonie romaine, Ptolémaïde reçut le titre de Colonia Claudii Cæsaris. Pline, H. N., v, 17. Reland décrit plusieurs de ses monnaies où ce titre de colonie est marqué. Palæstina ex mon. vet. illustrata, Utrecht, 1714, t. ii, p. 538. Deux notamment, la première de Trajan, la seconde d’Adrien, représentent la ville sous la figure d’une femme voilée et tourellée, assise sur un rocher que la mer environne. De la main droite elle tient trois épis, emblème de la fertilité du sol, et à ses pieds est l’image d’un fleuve, évidemment le Bélus (Nahr Na’man). La monnaie que nous reproduisons ici, fig. 17, est un tétradrachme au nom d’Alexandre ; l’original est conservé au Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale. Pour les monnaies autonomes et impériales d’Accho-Ptolémaïde, voir de Saulcy, Numismatique de la Terre Sainte, Paris, 1874, p. 154-169, pl. viii.


17. — Monnaie d’Accho.
Tête imberbe d’Alexandre, à droite. — R°. Zeus ou Jupiter aétophore (porteur d’aigle), assis, a gauche. Sous le bras droit de Jupiter, on lit, en caractères phéniciens, ACV (Accho) et la date 34 (278-277 avant J. C.) de l'ère des Séleucides. Beaucoup de monnaies portant l’effigie d’Alexandre ont été ainsi frappées longtemps après son règne.


Saint Paul, après avoir prêché l'Évangile en Macédoine, en Grèce et en Asie, venant de Milet à Jérusalem, termina au port de Ptolémaïde « sa navigation », son voyage par mer ; puis, « ayant salué ses frères, demeura auprès d’eux pendant un jour. » Act., xxi, 7. Dès les premiers siècles de l'ère chrétienne, la ville devint le siège d’un évêché ; pendant les croisades, elle acquit une très grande importance. Voir V. Guérin, Description de la Palestine, Galilée, t. i, p. 512-525 ; E. Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. iii, p. 92-100.

A. Legendre.

ACCOMMODATICE (Sens). Ce sens n’est pas, à parler strictement, un sens de l'Écriture, directement ou indirectement voulu par le Saint-Esprit ; c’est une signification attribuée plus ou moins arbitrairement aux paroles sacrées, et distincte de leurs sens réels, littéral et spirituel. Elle résulte de l’adaptation du texte à un sujet étranger au contexte.

Cette adaptation se fait de deux manières. Le texte, appliqué à une personne, un objet, une situation différents de ceux qu’avait en vue l’auteur inspiré, garde-t-il son sens premier et naturel, l’accommodation a lieu par extension. L’application est fondée sur quelque ressemblance, sur l’analogie et une sorte d’identité morale des situations. Ainsi un pécheur emploierait pour excuser sa faute les paroles d’Eve : Serpens decepit me, Gen., iii, 13 ; un aveugle exprimerait son malheur comme Tobie, v. 12 : crf