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l’esprit. Le peuple estime que c’est le soleil qui tourne, & bien des Astronomes supposent que c’est la terre. Quand on voyage par eau, l’œil estime que c’est le rivage qui se meut, qui s’éloigne. Dans cette acception il est neutre, & quelquefois actif. Ils repondirent qu’ils estimoient la place imprenable. Vaug. Au reste ce terme n’est pas du style noble.

Estimé, ée. part. Æstimatus, creditus, probatus.

ESTINCELANT. Voyez ÉTINCELANT.

ESTINCELLE. Voyez ÉTINCELLE.

ESTINCELLEMENT. Voyez ÉTINCELLEMENT

ESTINCELER. Voyez ÉTINCELER.

ESTINCELETTE. Voyez ÉTINCELETTE.

ESTIOLER, ou s’ESTIOLER. Voyez ÉTIOLER.

☞ ESTIOMÈNE. adj. de tout genre. Se dit en Médecine des ulcères qui rongent, qui corrodent, qui consument les chairs.

ESTIOMENÉ, ÉE adj. ou part. Terme de Médecine, mangé, rongé, desséché. Monet. Estiomenus, corrosus, obesus. Le verbe estiomener se trouve dans Nicot. Brantôme, dans le premier tome de ses Dames Galantes, (p. m. 247) parle d’une Dame Espagnole qui avoit une cuisse belle, blanche, polie & refaite, & l’autre toute sèche, exténuée & estioménée, qui ne paroissoit pas plus grosse que le bras d’un petit enfant. Il ajoute (p. 248.) qu’il se voit force Dames, qui ne sont pas ainsi estioménées de catharres, mais qui sont si maigres, dénuées, asséchées & décharnées, qu’elles n’en peuvent rien montrer que le bâtiment.

Ce mot est Grec, il vient de ἐσθίειν, manger. Il y a des Auteurs qui l’appellent en Latin ignis sacer, erysipelas. Nicot.

ESTIRE. Voyez ÉTIRE.

ESTIRER. Voyez ÉTIRER.

☞ ESTISSEUSES. s. f. & ESTISSU. s. m. Petites tringles de fer servant dans les manufactures en Soie & chez les Rubanniers à retenir les Roquetins & les canons dans les Cantres.

ESTIVAL. s. m. Nom d’une ancienne chaussure usitée en France, hense, bottine. Æstivale. Par les réglemens que fit le Dauphin Humbert pour sa dépense, & de toute sa maison, il paroît que la chaussure étoit en ce temps là peu différente de celle d’à-présent, si l’on en excepte une espèce de bottines qu’on appeloit æstivalia, henses, ou estivaux. Selon Du Cange, elles étoient alors fort en usage parmi les Nobles & les gens de guerre, qui affectoient d’en porter par ornement & par distinction. Ces bottines étoient faites d’un cuir fort mince & fort uni, teint en pourpre, ou en quelqu’autre couleur. L’habit d’été qui lassoit paroître la jambe à découvert, donna lieu de rechercher cette sorte de parure, que les longues robes d’hiver faisoient supprimer pendant cette saison. Il semble que le nom d’estivaux dont on se sert en quelques Provinces de France, & celui de stivale, parmi les Italiens, pour exprimer ce qu’on appelle botte en François, doivent leur origine à l’ancien mot estivalia, qui n’avoit point une signification si étendue dans les temps dont nous parlons. De Valbonnet, p. 218.

ESTIVAY. Nom de lieu & d’un Monastère. Stivagium. Adr. Vales. Not. Gall. p. 330.

ESTIVE. s. m. Terme de Mer, qui se dit de l’équilibre & du juste contrepoids qu’on donne à chaque côté des bâtimens, pour balancer leur charge, afin qu’ils ne pesent pas plus d’un côté que de l’autre, pour faciliter leur mouvement & leur cours. Æquilibrium, æquipondium. Un Pilote doit avoir soin que son vaisseau ne soit jamais hors d’estive.

ESTOC. s. m. Il signifie originairement un tronc d’arbre, ou plutôt une souche morte. C’est ainsi qu’on dit en termes d’eaux & forêts que les Marchands sont tenus de faire couper & ravaler près de terre toutes les souches & vieux estocs ou étoc. Couper à blanc estoc, c’est abattre tous les arbres, & n’en réserver aucun.

☞ Ce mot se dit aussi d’un long bâton ferré par un bout. Truncus, bacculus ferro munitus. Les paysans des montagnes & des lieux marécageux portent en main des brins d’estoc pour sauter par-dessus les canaux, ou d’un rocher sur l’autre.

Ménage dérive ce mot de l’Allemand stock, qui signifie un bâton, un tronc, une souche, tant pour le propre que pour le figuré.

Estoc, signifie aussi le fer, la pointe d’une arme. Punctum, acies, cuspis. Ainsi on dit, Fraper d’estoc & de taille. Punctum & cæsim.

D’estoc, c’est pointer, pousser le sabre pour le faire entrer par la pointe ; de taille, c’est sabrer, donner des coups avec le tranchant.

Estoc, étoit autrefois une sorte de grosse épée, nommée aussi épée d’armes. C’est la notion qu’en donne Olivier de la Marche, lorsqu’il parle des Tournois & des joûtes de son temps. Et cette arme nommée aussi bâton, qui est la vraie signification d’estoc, ne servoit que pour se battre à pied, & pour pointer & pousser ; & quand elle étoit tranchante, elle servoit aussi pour tailler & pour sabrer : delà est venue la manière de parler d’estoc & de taille, c’est-à-dire, de la pointe & du tranchant d’une épée. Notes sur Cl. Marot.

Estoc est encore une épée d’argent doré, longue d’environ cinq pieds, que le Pape bénit solennellement avec un casque à la fête de Noël. Le Pape Benoît XIII. veut donner au Grand-Maître de l’Ordre de Malte une marque éclatante de son affection. Il dépêche à Maltse un de ses Camériers d’honneur, pour présenter à ce Prince l’estoc & le casque bénits solennellement à la fête de Noël. Vertot.

Les Papes envoient un bonnet & un estoc bénits aux Capitaines qui ont remporté sur les Infidèles & les ennemis de la Religion quelque grande victoire, utile à l’Eglise. Le Pape Clément XI. vient d’envoyer au Prince Eugène de Savoie le bonnet & l’estoc bénits, à cause de sa victoire remportée sur les Turcs près de Pétri-Waradin, comme le Pape Alexandre VIII. les avoit envoyés au Doge de Venise Francesco Morosini ; Innocent XI. au Roi de Pologne Jean Sobieski. Gazette du 24 Oct. 1715. p. 508.

Estoc, est aussi un instrument des Ouvriers qui travaillent en fer & en ouvrages qui demandent quelque poliment. Il sert à tenir leur matière pour la limer, percer & façonner. On ne prononce ni l’s. ni le c de ce mot, & c’est pour cela que les Artisans l’appellent étau. Voy. Étau.

Estoc, en termes de Jurisprudence, se dit figurément pour tronc, ou souche commune, dont plusieurs personnes sont issues. Ainsi estoc se dit figurément de la liaison de parenté qui vient d’une commune souche ; l’estoc étant pris pour le chef dont plusieurs personnes sont descendues en ligne directe, & qui est à leur égard comme le tronc d’un arbre, dont plusieurs branches sont sorties. En Latin on dit communis stipes, pour dire la souche commune dont plusieurs descendans sont issus.

☞ Quand un père ou une mère en mariant leur fille stipulent que les deniers qu’ils lui donnent en mariage, lui seront propres à elle & aux siens de son estoc & ligne, cette clause comprend tous les parens que la fille peut avoir du côté de celui des père ou mère, qui lui a fait le don.

☞ Dans la Coutume de Paris, ces mots estoc & ligne, sont synonymes ; mais ils ne le sont pas dans les Coutumes Soucheres.

☞ On dit familièrement, Cela vient-il de votre estoc, dites-vous cela de votre estoc, pour dire, de votre chef, de vous-même, ou à l’instigation d’un autre ?

Estoc, en termes de Joueurs de Gibecière. On appelle faire l’estoc, lorsque l’on fait passer la carte de dessus dessous, sans que personne s’en apperçoive. Cartam superiorem inferiori mutare. Les Bonneteurs font l’estoc avec une adresse merveilleuse, de sorte que l’œil y est trompé, & ne s’en peut appercevoir.