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sent comme un Dieu après sa mort, aind que le témoigne Clément d’Alexandrie dans son Exhoitation aux Nations.

ÉDEN. s. m. Nom de lieu, dont il est fait mention dans l’Ecriture. Eden. Le pays d’Eden est l’endroit où étoit le Paradis terrestre ; d’où vient qu’on l’appelle le Jardin d’Eden. Les Septante disent aussi Edem, mais il faut dire Eden ; car ce lieu vient de l’Hébreu I3, ;, Eden, qui signifie, délices. De-là v.ent que les beptante, & S. Jérôme dans la Vulgate, prennent quelquefois ce nom pour un appellatif, & non pas pour un nom propre. S. Jérôme, par exemple, traduit Paradljus voluptads, Gen. IL 8. Lccus voLuptdcis,Ib. 10. mais ailleurs. S. Jérôme lui-même en fait un nom propre, comme Gen. IV. 16. où il dit, conformément à l’Hébreu & aux Septante, que Caïn, rejeté de Dieu, habita à l’orient d’Eden. Les Septante en font aussi un nom de lieu, Gen. II. 8. lors même que les Septante, ou S. Jérôme, traduisent par un nom appellatif ^p ?.’, ou voluptas, ce n’est pas qu’ils ne prennent le nom d’Eden pour un nom propre, mais ils veulent faire sentir en Latin, ou en Grec, ce que signifie ce nom, & ce qu’étoit le lieu auquel on l’avoit donné, comme le nom Hébreu le faisoit connoître, car tout le monde convient que ce lieu fut appelé Eden ; « ; c’elV à-dire, délices, parce que c’étoit un lieu délicieux & tres-agréable. De plus, tous les Pères de l’Eglise, Grecs & Latins, comme l’a remarqué le savant M. Huet, tous les interprètes de l’Ecriture, anciens & modernes, & tous les Orientaux, demeurent d’accord qu’Eden est un nom local, tiré de la beauté du lieu ; comme Plucentia chez les Latins, Callicorus & Callicolona, chez les Grecs, Beauveau, Beaumanoir, Beauménil, parmi nous,- Hypsa, Enna, Jalysus, & les champs Elisées, ainsi nommés par les Phéniciens, Belvédère chez les Italiens, &c. Le texte Hébreu montre encore qu’Eden est un nom de lieu ; car il porte, Gen. II. 8. que Dieu planta un jardin M’JJ dans Eden : la proposition exprimée par la lettre ^ désigne clairement, suivant son principal & plus naturel usage, la situation du jardin dans Eden. Outre cela, Gen. II. 10. il est dit, Et un fleuve sortoit L’ya, d’Eden ; & Gen. IV. 16. Caïn s'arrêta, dans le pays de Nod., 13yjTJ3p, à l'orient d’Eden. Si Eden étoit seulement un nom appellatif, & non pas un nom propre, il n’eût pu être mis seul, comme il l’est en ces endroits, il eut fallu dire. Un fleuve sortoit du pays de la volupté, Caïn s’arrêta à l'orient de la Région de volupté, & non pas sortoit de la volupté ; s’arrêta à l’orient de la volupté. Enfin Eden est le nom de plusieurs autres lieux, comme nous le dirons ci-aprés.

On convient donc allez de la signification de ce mot, & de sa qualité ; mais on ne convient pas de même de la situation du pays d’iTctJ/z. Sans rapporter ici toutes les opinions qu’on a publiées sur cela, & dont quelques-unes mêmes sont extravagantes, celles qui font piusraisonnables s’accordent à le placer en général dans l’Asie. Dureste il y a trois ou quatre sentimens qui ont eu plus de cours. Le premier met le Paradis Terrestre dans la Terre-Sainte, habitée dans la fuite des temps par les Israëlites. Un autre le place à Dam.as, ou vers Damas, dans la Syrie. Ces deux sentimens font (1 peu soutenablis, que nous ne nous arrêterons point à les expliquer davantage. D’autres croient qiEdcn étoit la partie de la Mésopotamie la plus méridionale, en tirant vers le conl-luent de l’Euphrate & du Tigre. Vantil a expliqué & soutenu ce sentiment, dans un ouvrage imprimé en Hollande.

Hopkinfon, dans une Dissertarion sur ce sujet, place le pays àEden au-dessous du confluent du Tigre & de l’Euphrate, à l’occident de ces deux fleuves joints ensemble. Voici comment il conçoit lachose. Quand l’Euphrate, en coulant du norcl au midi, est parvenu aux montagnes de la Chaldée verslesj’degcé de latitude, il rebraulTe tout-à-

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coup chemin, & remonte du midi au nord ^cs-’qu’au, 5.= degré de latitude. La il tourne à l’Orient ^ mais à peine a-t il commencé sa course de ce côtélà, qu’il lesépareen deux branches. L’une prend fou cours au midi, & va se jeter dans le golfe Persique : c’est là cet ancien lit de l’Euphrate dont Pime parle, L. VI. C. 16. Se que les chaldéens, dit-il, avoient enfin tan, à force d’en détourner les eaux pour arroser leurs campagnes : c’est le Géon, Itlon Hopkinfon ; car ce nom, qui vient de mj, exzre, educere, marque un lleuve que l’on dctournoit, & que l’on répandoit en différens endroits par les saignées que l’on y faisoit. L’autre branche de l’Euphrate continue encore quelque temps son ciiemin à l’orient, après quoi elle se sépare encore en djux, dont l’une court encore au midi, & va se joindre au Tigre vers le 34 degré de latitude c’est l’Euphrate ; c’est far cette branche qu’étoit Babylone : l’autre, allant toujours à l’orient, rencontre après quelques lieues le Tigre, auquel elle se mêle, & dont elle prenoit le nom. A quelques lieues de cette réunion, le Tigre jette une branche qui va se joindre à l’Euphrate, un peuau-deflTus de lendroit où il entre dans le Tigre. Cette btanche étoit le Phison. Selon Hopkinfon, c’est le pays que renferment & qu’arrosent ces quatre fleuves, que son appela & ’^e« Se c’est dans la partie orientale, c’est-à-dire, furie bord du Tigre, & dans l’Isle qu’il faisoit avec le Phison, qu’étoit le Paradis terrestre.

La dernière opinion que nous avons à rapporter, est celle de Bochart, & de l’illustre M. Huet, qui placent le pays àEden plus bas que ne lait Hopkinlon, sur les bords du fleuve que forment l’Eupluate & le Tigre joints ensemble car, selon la table qu’en a donnée M. Huet dans son 1 laité de lajituation c’u Paradis Terrestre, le Tigre & l’Euphrate, après s’être joints ensemble à la hauteur environ du 54^ degré de latitude & quelques minutes, ne sont plus qu’un seul fleuve, que l’on appeloit autrefois le Pajitigris, Se qu’on nomme aujourd’hui Schat-il-Arah, c’est-à-dire, le fleuve des Arabes. Ils roulent ainsi réunis dans un même lit jusqu’environ le 31.^ degré de latitude J où ils fourchent, Se vont le dégorger dans le golre Perlsque. C’est sur le fleuve des Arabes, entre le 3 i & le 34.^ degré de latitude, (ju’ils mettent le pays d’Eden, au milieu duquel ce fleuve passe & ce fleuve est celui dont l’Ecriture dit qu’il sort du pays d’Eden, Se que hors de là il le divise en quatre branches : ces quatre branches font deux au-dessus d’Eden, & deux au dessous ; deux au-dessus, qui font l’Euphrate & le Tigre avant leur jonétion ; deux au dessous, qui fjut tes deux branches par lesquelles le Schat-el-Arab, ou fleuve des Arabes, le décharge dans le golte Persique. Celle qui est à l’orient est le Gchon, Se celle de l’occident est le Phison. Calvin, Scaliger, les Docteurs de Louvain, Se plusieurs autres ’après eux, qui ont suivi les premiers ce sentiment, confondoient mal- à-propos ces fleuves, ^rprenoient la bouche orientale du Schat-el-Arab pour le Phison, & l’occidentale pour le Géhon. Bochart & M. Huet ont corrigé cette erreur, & expliqué ce sentiment, de sorte qu’il lÏQU. est aucun qui paroissè aussi probable.

Les preuves qu’il y avoit un Eden à l’endroit que ces Auteurs marquent, sont tirées du quatrième livre des Rois XIX. 12 d’Haïe XXXVII. 12 où il est parlé des enfans d’iï’tle// qui étoient en Thalaflar, c’est-à-dire, Talacha, ville de Babylonie, que Ptolomée place sur le canal commun du Tigre & de l’Euphrate : quand le Géographe Etienne a parlé d’une ville d’Adana située sur l’Euphrate, on ne peut presque douter, dit M. Huet, qu’il n’ait entendu quelque réduit des habitans du pays d’Eden qui en aura tiré son nom. Quand Ezéchiel XXVII. 23. fait le dénombrement des peuples avec qui la ville de Tyr trafiquoit, il met ensemble Haran, & Chene & Eden. Huet, fruite du Puradis sert. C.

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