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DOR

Ce Pays se nomma Doride, comme le précédent, parce qu’il fut habité par une colonie de la Doride de Grèce qui s’y établit, comme nous le dirons au mot Dorien.

DORIEN, enne. s. m. & f. Nom d’un peuple Grec qui habita d’abord en Grèce, & ensuite partie en Grèce, partie dans l’Asie mineure, partie dans les Isles de Rhodes, de Co, & autres pays voisins. Dor, Doris, Doriensis. Les Doriens étoient un peuple de l’Achaïe qui habitoit la Doride de Grèce. Après la guerre que les Athéniens leur firent, & dans laquelle Codrus, en se dévouant pour ses sujets, les rendit vainqueurs ; les Doriens se retirèrent des confins de l’Attique : une partie bâtit la ville de Mégare, entre Athènes & Corinthe ; une autre partie s’alla établir dans la Doride d’Asie, à laquelle ils donnèrent leur nom. Le reste se dispersa dans les Isles voisines, Rhodes, Co, &c.

Dorien, enne. adj. qui appartient aux Doriens. Doricus. Le Dialecte Dorien. Port-R. La langue Dorienne. Les Doriens furent excellens Musiciens ; ce qui fit dire de ceux qui ne s’accordoient point en chantant, qu’ils ne suivoient point l’harmonie Dorienne. Corn. Voyez DORIQUE.

Dorien, se dit en parlant des peuples, les Doriens, & non pas les Doriques ; mais, en termes d’Architecture & de Grammaire, on dit Dorique, ordre Dorique, dialecte Dorique ; en termes de Musique on dit Dorique & Dorien ; mode Dorique, mode Dorien. Voyez DORIQUE.

Dorien. Terme de Musique. Mode Dorien. Voyez DORIQUE.

DORILÉE. Terme de Fleuriste. Tulipe violet & blanc de lait. Morin.

DORIMÈNE. Terme de Fleuriste. Œillet pourpre sur un fin blanc, qui fleurit très-large ; ses panaches sont détachés, mais sa plante est délicate & peu vigoureuse, puisqu’on a peine d’en tirer des marcottes. C’est une production de la graine d’orpheline venue à Compiègne. Morin.

Dorimène, se dit aussi d’une Tulipe lacque violet & blanc. Morin.

DORINDE. Terme de Fleuriste. Tulipe colombin rouge & jaune blanchissant. Morin.

DORIQUE. adj. m. & f. Dorien. Qui concerne les Doriens, qui vient des Doriens. Doricus, a. Le Dialecte Dorique, c’est un des cinq dialectes ou manières de parler qui ont été principalement en usage parmi les Grecs. Le dialecte Dorique a été en usage parmi les Lacédémoniens & ceux d’Argos : ensuite il passa dans l’Epire, dans la Lybie, la Sicile, les Îles de Rhodes & de Crète. C’est celui qu’ont suivi Archimède & Théocrite, tous ceux de Syracuse & Pindare. Port-R. Pour parler juste, il falloit dire que le dialecte Dorique fut la manière particulière de parler des Doriens, après qu’ils se furent retirés proche le Parnasse & l’Asope, comme l’a remarqué Martin Rueland. Ce dialecte passa ensuite aux Lacédémoniens, & autres. Quelques-uns même distinguent le dialecte Lacedémonien du Dorique ; mais au fond c’étoit la même à quelques différences près, qui se trouvoient dans le langage des Lacédémoniens, comme l’a remarqué encore le même Auteur, dans son excellent Traité de la Langue Grecque & de tous ses Dialectes, De lingua Græca, ejusque Dialectis omnibus. L. V. Les Auteurs qui ont écrit dans le dialecte Dorique sont Architas de Tarente, Théocrite, Bion, Callinnus, Pindare, Simonides, Bacchilides, Cypselas, Alcman, & Sophron. La plupart des médailles des villes de la Grande Grèce & de Sicile sentent le dialecte Dorien dans leurs inscriptions, témoins ΑΜΒΡΑΚΙΩΤΑΝ ΑΠΟΛΛΩΝΙΑΤΑΝ, ΑΧΕΡΟΝΤΑΝ, ΑΧΥΡΙΤΑΝ, ΗΡΑΚΛΕΩΝΤΑΝ, ΤΡΑΚΙΝΙΑΝ, ΘΕΡΜΙΤΑΝ, ΚΑΥΛΟΝΙΑΤΑΝ, ΚΟΠΙΑΤΑΝ, ΤΑΥΡΟΜΕΝΙΤΑΝ, &c. Voy. Goltzius. Cela montre les pays où le dialecte Dorique étoit en usage. Voici les règles générales de ce dialecte :

D’ἦτα, d’ω grand, d’ε, d’ο & d’ου l’α fait le dore.
D’ει fait ἦτα d’ου, & dω αν fait encore.
Ote ι de l’infini, & pour le singulier
Se sert au féminin du nombre plurier. Port-R.


Mais elles sont beaucoup mieux expliquées & plus au long dans le IVe Livre de l’Ouvrage de Rueland. Il y marque les différences légères du dialecte de Sicile, de Crète, de Tarente, de Rhodes, de Lacédémone, de la Laconie, de la Macédoine & de la Thessalie, qu’il a pu ramasser.

DORIQUE. adj. m. & f. & subst. Terme d’Architecture : c’est le second Ordre d’Architecture, qui se met entre le Toscan, & l’Ionique. Doricus. Un ordre Dorique. La colonne Dorique a huit diamètres ; son chapiteau & sa base sont un peu plus riches de moulure que la colonne Toscane. Le Dorique a pour ornement les métopes, & les triglyphes. Dorus, Roi d’Achaïe, ayant bâti le premier dans Argos un temple de cet Ordre, qu’il dédia à Junon, donna occasion de l’appeler Dorique. Ce qui rend le Dorique considérable, est qu’il a donné la première idée de l’Architecture régulière, & que toutes ses parties sont fondées sur la position naturelle des corps solides. Quelques temps après que l’ordre Dorique eut été inventé, on lui donna la proportion, la force, & la beauté du corps de l’homme ; &, comme le pied de l’homme est la sixième partie de sa hauteur on donna à la colonne Dorique, en y comprenant le chapiteau, six de ses diamètres, c’est-à-dire, qu’on la fit six fois aussi haute qu’elle étoit grosse ; ensuite on y ajouta un septième diamètre. Alors on pouvoit dire qu’elle avoit la proportion du corps d’un homme ; car le pied d’un homme n’est point, du moins aujourd’hui, la sixième partie de sa hauteur, mais environ la septième. Les Anciens avoient deux sortes d’ordre Dorique, un plus massif pour les temples, & un plus léger & plus délicat pour les portiques de théâtres. Vitruve trouve l’ordre dorique embarrassant, à cause des métopes, & des triglyphes, qui sont l’ornement de sa Irise ; de sorte qu’on ne peut guère employer l’ordre Dorique que dans le pycnostyle, en mettant un triglyphe entre chaque colonne, ou dans l’arœostyle, en mettant trois triglyphes entre chaque colonne.

Cet ordre est ainsi appelé, parcequ’il a été inventé par les Doriens, peuple Grec. Si ses colonnes sont simples & unies sans pilastres, Palladio dit qu’elles doivent être de sept modules & demi, ou de huit modules, & que leur entrecolonnement doit être d’un peu moins de trois diamètres de la colonne ; & Vitruve appelle cette manière de bâtir diastyle. Que si les colonnes Doriques ont des pilastres, leur hauteur, en y comprenant leur base & leur chapiteau, doit être de dix-sept modules plus ⅓ ; sur quoi il faut remarquer en passant que, quoique dans les autres Ordres le module soit le diamètre divisé en 60 parties égales, néanmoins dans celui-ci le module, selon Palladio, n’est que le demi diamètre, & qu’il ne se divise qu’en 30 parties égales. Harris. La colonne Dorique n’a point de base propre : ainsi, dans plusieurs anciens bâtimens, elle n’en a point du tout, comme on le peut voir au temple de Marcellus à Rome ; mais, quand on lui donne une base Attique, elle augmente beaucoup sa beauté. La hauteur de cette base est ½ du diamètre de la colonne. La hauteur du chapiteau est d’un demi-diamètre de la colonne à sa base. L’architrave est de même hauteur. La frise a un module & demi ; & la corniche un module & ⅓. Les triglyphes ont un module, & leur chapiteau une sixième partie de module : les Métopes, ou les espaces qu’il y a d’un triglyphe à l’autre, doivent être de la longueur d’un triglyphe. Cet ordre est solide, & ne doit s’employer que dans des bâtimens grands & solides. L’entablement en est plus massif & plus haut que celui d’aucun autre ordre, à cause que la colonne est beaucoup plus forte ; & il est ordinairement du quart de la colonne. La corniche ne doit point avoir de feuillage, ni aucune garniture ; &, si l’on y met des modillons