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CRO

par un Ecclésiastique nommé Porte-Croix. Dans la vie de S. Samson, premier Evêque de Dol en Bretagne, L. II. C. 10. il est marqué que ce Saint faisoit porter devant lui une croix bénite, & ornée d’or & d’argent & de pierreries. M. l’Abbé Fleury en conclut en général, Hist. Eccl. L. XXXIII p. 425. que l’on portoit devant les Evêques une croix bénite, & ornée d’or & d’argent. Ce seul exemple suffit-il pour prouver cet usage ? Il paroît par la narration que c’étoit par une dévotion particulière que S. Samson avoir fait faire, & avoit béni cette croix, & qu’il la faisoit porter devant lui. Voyez Acta Sanct. Benedict. sæc. I, p. 165.

Croix, en ce sens, se dit aussi des mêmes figures que portent les Chevaliers de divers Ordres, soit à leur cou, au bout d’un ruban en écharpe, soit sur leurs habits. Elles sont différentes par leurs figures, ou par leurs émaux. La croix des Chevaliers du S. Esprit, de S. Lazare, de Malte ; & on appelle Chevaliers Grands-Croix, ceux qui tiennent le premier rang dans l’Ordre de Malte.

Croix pectorale. Terme d’Evêque. Crux pectoralis. C’est une croix d’or que les Evêques & les Abbés Réguliers portent au cou, qu’ils prennent après avoir pris leur aube, avant que de mettre l’étole.

Grand-Croix. La première dignité de l’Ordre des Chevaliers de Malte après celle de Grand-Maître. Primaria inter Militenses equites dignitas ; & c’est parmi les Grands-Croix qu’on choisit le Grand-Maître de l’Ordre. Le corps du Grand-Maître d’Aubusson fut porté à l’Eglise de S. Jean sur les épaules des principaux Grands Croix. Bouh.

Grand-Croix. Chevaliers de l’Ordre de S. Louis, institués en 1693. Primarii Ordinis Sancti Ludovici Equites. Il y a huit Grands-Croix ; ils ont le privilège de porter la croix de l’Ordre attachée à un large ruban rouge qu’ils portent en écharpe. Ils portent aussi une croix en broderie sur le manteau, & sur le juste-au-corps.

Croix. Se dit des guerres entreprises autrefois par les Princes Chrétiens pour chasser les Infidèles de la Terre-Sainte, parce que ceux qui s’engageoient à ces guerres portoient une petite croix sur leur habit. En ce sens prêcher la croix, c’est exhorter les Fidèles à ces guerres. Prendre la croix, c’est s’enrôler dans ces guerres, & pour marque de son engagement, mettre la figure d’une croix sur ses habits. On ne le dit en ce sens que dans ces deux phrases. Ad sacrum bellum proficisci, sacræ militiæ nomen dare. La croix, selon le P. Menestrier, a été non-seulement la marque des Croisades & des voyages d’Outremer, mais encore la marque de la liberté, sur-tout dans l’Italie. C’étoit autrefois une espèce de pénitence qu’on imposoit, de se tenir long-temps les bras étendus en croix. Ç’a été aussi un examen dont on s’est servi pour vérifier les crimes dont on ne pouvoit avoir de preuves. Dans ce comique jugement de la croix, on donnoit gain de cause à celui des deux Plaideurs qui tenoit le plus long temps ses bras élevés en croix. Il étoit en usage en France dans le neuvième siècle.

On le dit aussi des Ordres de Religieux qui se distinguent par diverses figures de croix. La croix des Mathurins a les branches comprises sous des arcs de cercles. Une croix de S. Antoine est faite en forme de T, &c.

Croix (Ordre de la vraie) ou de la Croisade, ou de la Croisée. En 1668, un grand incendie ayant consumé tous les bijoux de l’Impératrice Eléonore de Gonzague, femme de l’Empereur Ferdinand III, qui l’épousa en 1651, cette Princesse étoit inconsolable de la perte d’une petite croix d’or, dans Laquelle étoient renfermés deux petits morceaux de la vraie croix, lorsqu’un Cavalier l’ayant cherchée la trouva au milieu des cendres, l’étui, dans lequel elle étoit, brûlé, le cristal dont elle étoit ornée, fondu, & le bois de la sainte croix aussi entier que s’il n’avoit pas été plusieurs jours au milieu d’un brasier de charbons ardens. L’Impératrice, en reconnoissance du recouvrement miraculeux de cette précieuse relique, qui est aujourd’hui dans l’Abbaye de S. Germain des Prés à Paris, institua un Ordre, ou une Société de Dames, sous le nom de Constellation de la croix pour marquer que la croix doit être la constellation qui nous conduit dans le chemin du salut, comme l’étoile polaire conduit ceux qui vont au nouveau monde. Voyez l’Abbé Justiani, T. II. C. 91. Cet Ordre ne fut institué que sous Léopold en 1688.

Sainte-Croix de Fontavelle. (Ordre de) Ordo Sanctæ Crucis de fonte Avellano. Le B. Ludolf, Evêque de Gubio au Duché d’Urbin en Italie, est l’Instituteur de l’Ordre de Sainte-Croix de Fontavelle, sous la Règle de S. Benoît. Cet Ordre a pris son nom du lieu où il a commencé comme beaucoup d’autres. Ce lieu, qui est au Diocèse de Gubio, & non pas d’Eugube, comme dit M. Chastelain ; ce lieu, dis-je, se nommoit originairement Font-Avelines. Fons Avellinus, parce qu’il y a là une fontaine qui étoit entourée de noyers, dit M. Chastelain ; il falloit dire d’Aveliniers, ou de Coudriers. S. Pierre Damien étoit Moine de Sainte Croix de Fontavelle.

Croix de S. Dominique & de S. Pierre Martyr. (Chevalier de la) Il y a eu un Ordre militaire de ce nom que les Inquisiteurs Dominicains donnoient. Les statuts de cet Ordre portent pour titre : Règle & statuts des Chevaliers du saint Empire de la Croix de Jesus. Il y a bien de l’apparence que cet Ordre n’étoit que celui de la Milice de Jésus. Voyez le P. Hélyot, L. III, C. 22.

Croix rouge (Ordre de la). Chevalier de la Croix rouge. Ordre de Chevalerie du Royaume de Bohême. Ordo, ou Equites Crucis rubræ. Les Chevaliers de la Croix rouge ont une Eglise à Prague. Voyez la Gazette 1723, p. 528.

Croix (Filles de la). Nom de Congrégation de filles qui instruisent les jeunes personnes de leur sexe. La première de ces Congrégations fut établie en Picardie l’an 1625, sous la direction de M. Guérin, Curé de … qui leur prescrivit des réglemens. En 1636, la guerre & des persécutions ayant obligé les quatre filles qui la composoient, de se réfugier à Paris ; le P. Lingendes, Jésuite, les adressa à Madame de Villeneuve, Marie Luillier, qui les plaça à Brie-Comte Robert. Cette Dame obtint l’an 1640 de Jean-François de Gondy, Archevêque de Paris, l’érection de cette Compagnie de Filles en Congrégation, sous le nom de filles de la Croix. Elle fut autorisée par Lettres-Patentes du Roi vérifiées au Parlement de Paris l’an 1642. Alors Madame de Villeneuve & les Filles qui demeuroient avec elle à Vaugirard, firent les vœux simples de pauvreté, chasteté, obéissance & stabilité entre les mains de M. Froyer, Curé de S. Nicolas du Chardonnet, que l’Archevêque de Paris leur donna pour Supérieur. Toutes les filles de la Croix ne font pas ces vœux, mais toutes s’exercent aux œuvres de charité spirituelle qui leur conviennent, auprès des personnes de leur sexe. P. Hélyot, T. VIII, C. 17.

Demi-Croix. s. m. Qui ne se dit pas seulement dans l’Ordre de Malte, mais encore en d’autres Ordres militaires, comme dans celui de S. Etienne en Toscane, où il y a aussi des Demi-Croix.

La confraternité de Ste Croix des Luquais est une Société ou Confrérie de Pénitens établis à Luques en Italie.

Sainte-Croix de Conimbre en Portugal (Chanoines Réguliers de). Congrégation de Chanoines Réguliers formée sur celle de S. Ruf, dont elle a pris les Constitutions, les réglemens, la forme & la manière de gouvernement. Elle commença en 1131, par le zèle d’un Chanoine & Archidiacre de la Cathédrale de Conimbre, nommé Tellon, aidé par onze personnes de piété. Don Paterne, Evêque de Conimbre, lui donna l’habit de Chanoine Régulier dans sa Cathédrale. Il prit la résolution de réformer les Chanoines Réguliers en établissant une nouvelle Congrégation,