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qui circoncit s’appelle en hébreu Mohel, & on choisit indifféremment qui on veut pour cela. Il suffit qu’on soit capable de cette fonction, qui est un titre d’un grand mérite parmi les Juifs. Le pere peut circoncire son propre fils. Voici de quelle manière cette cérémonie se fait, comme le rapporte Léon de Modène, Part. IV des Cérémonies des Juifs, ch. 8.

On tient prêt dès le matin dans la Synagogue, ou même dans la maison, si l’on y veut faire la cérémonie, deux sièges avec des carreaux de soie. L’un des sièges est pour le parrain qui tient l’enfant, & l’autre est mis là à ce que disent quelques-uns, pour le Prophète Elie, qu’ils croient assister invisiblement à toutes les circoncisions. Celui qui circoncit vient avec un plat où sont les instrumens & les choses nécessaires, comme le rasoir, les poudres astringentes, du linge, de la charpie, & de l’huile rosat, à quoi il y en a qui ajoutent une écuelle avec du sable, pour y mettre le prépuce que l’on coupe. On chante encore quelques cantiques, en attendant la marraine qui apporte l’enfant sur ses bras, accompagnée d’une troupe de femmes ; mais pas une ne passe la porte de la Synagogue. Là elle donne l’enfant au parrain, & aussi-tôt les assistans crient, baruch haba, c’est-à-dire, le bien venu.

Le parrain s’assied sur son siège, & ajuste l’enfant sur ses genoux ; puis celui qui circoncit, développe les langes. Il y en a qui se servent d’une pincette d’argent pour prendre du prépuce ce qu’ils en veulent couper. Celui qui circoncit, prenant le rasoir, dit : Béni soyez-vous, Seigneur, qui nous avez commandés la Circoncision, & en disant cela, il coupe la grosse peau du prépuce ; puis avec les ongles des pouces il déchire une autre peau plus délicate qui reste ; il suce deux ou trois fois le sang qui abonde, & le rend dans une tasse pleine de vin. Ensuite il met sur la coupure du sang de dragon, de la poudre de corail, & d’autres choses, pour étancher le sang, à quoi il ajoute des compresses d’huile rosat, puis il enveloppe le tout.

Cela étant fait, il prend une tasse pleine de vin, & après l’avoir béni, il dit une autre bénédiction pour l’enfant, en lui imposant le nom que le père souhaite, prononçant ces paroles du chap. XVI d’Ezéchiel : Et j’ai dit, vis en ton sang, &c. Et en mêle temps il lui mouille les lèvres de ce vin où il a rendu le sang sucé. Après quoi on récite le Pseaume 128 entier : Bienheureux tout homme qui craint le Seigneur. Le parrain rend ensuite l’enfant à la mairraine, pour le porter à la maison, & le remettre entre les mains de la mère. Tous ceux qui ont assisté à la cérémonie, disent au père en s’en allant : Puissiez-vous ainsi assister à ses nôces. Voyez Léon de Modène, & la Synagogue de Buxtorf, ch. 4.

La manière de circoncire dont les Juifs se servent, est différente de celle des Turcs. Car ceux-ci, après avoir coupé la peau, n’y touchent plus ; au lieu que les Juifs déchirent en plusieurs endroits le bord de la peau qui reste après la Circoncision, avec les ongles des pouces ; & c’est pour cette raison que les Juifs circoncis guérissent bien plus facilement que les Turcs. On connoît parmi les Juifs ceux qui se mêlent du métier de circoncire, parce qu’ils ont l’ongle du pouce fort grand.

Chez les Turcs on ne circoncit pas les enfans aussi-tôt qu’ils sont nés, & on les consacre seulement par cette cérémonie. D’abord on leur met quelques grains de sel à la bouche, en disant : Plaise à Dieu que son nom soit toujours aussi savoureux que le sel que j’ai mis à ta bouche, & qu’il t’empêche de goûter les choses de la terre. Quand ils ont sept ans, un Médecin vient les circoncire dans la maison du père. La Circoncision se fait toujours avec une grande cérémonie. Entre les parens & les amis qui y assistent, un sert de parrain à l’enfant, & tous ensemble ils sont régalés d’un superbe festin. Ils n’y viennent point aussi sans présens, les hommes donnent des vestes de précieuse étoffe, des chevaux, des armes ou des bijoux, & les femmes quelque gentil ouvrage de leurs mains. Du Loir, pag. 137, 138.

Circoncision est aussi la Fête que l’on célèbre le premier de Janvier, en l’honneur de la Circoncision de Notre-Seigneur, auquel on lui imposa son nom. Christi Circumcisionis dies sacer. Le premier jour de Janvier étoit autrefois un jour de jeûne institué pour s’opposer aux superstitions payennes qui se faisoient ce jour-là en l’honneur de Janus. Voyez le second Concile de Tours, Can. XXII, &c. quatrième de Tolède, Can. XI, &c. La Messe se disoit ce jour-là à deux heures après midi, pour dire None de suite, & ne rompre le jeûne que vers les trois heures. On ne voit pas précisément quand ce jeûne a cessé, & quand la fête a commencé. Apparemment ce n’a point été partout en même temps. Voyez les Notes de M. Chastelain sur ce jour.

En termes de dévotion, on appelle Circoncision de cœur, Circoncision des levres, le retranchement des mauvais esprits & des mauvaises paroles.

Circoncision se dit encore figurément, pour signifier les Juifs ou la nation Juive, comme le mot de Prépuce, pour signifier les Payens ou les Gentils. Ainsi il est dit au 15e de l’Epitre aux Romains, que Jésus-Christ a été Ministre de la Circoncision, afin de ratifier les promesses faites aux Pères. Et au 2e de l’Epitre aux Galates, S. Paul dit que la prédication de la Circoncision avoit été commise à Pierre.

Pierre de la Circoncision. C’est une pierre qui se taille en couteau, & dont les Juifs se servent pour la Circoncision. Nous avons une Dissertation sur ces pierres par M. Mahudel, de l’Académie des Belles Lettres.

Circoncision. (Cap de la) Les vaisseaux l’Aigle & la Marie, que la Compagnie des Indes envoya en 1738, à la découverte des Terres Australes, trouvèrent le premier de Janvier 1739, une terre fort haute, toute couverte de neiges, & fort embrumée. Elle leur parut un comme un gros cap, qu’ils nommèrent le cap de la Circoncision, parce que c’étoit le jour de la Circoncision. Cette terre leur restoit à huit ou dix lieues dans l’est nord-est. Ce Cap est par les 54 degrés de latitude méridionale, & les 27 à 28 de longitude. Promontorium Circumcicionis. Voyez la Relation de ce voyage dans les Mémoires de Trévoux 1740. Art. XII. Février.

CIRCONFÉRENCE. s. f. La ligne courbe qui renferme un espace circulaire ; ou la surface qui termine une chose ronde. Circumductio, linea orbem circumcurrens, circumductus, circuitus, circumferentia. Toutes les lignes tirées du centre à la circonférence d’un cercle, & qu’on appelle rayons, sont égales entr’elles. Une partie de la circonférence s’appelle arc. L’angle du centre est double de celui de la circonférence. On appelle circonférence concave, celle qui regarde le dedans. Concava. Et circonférence convexe, celle qui regarde le dehors. Convexa. On appelle circonférence d’ellipse, la ligne courbe qui forme l’ovale. Elliptica. Euclide, L. III, propos. 20.

Circonférence se dit aussi du tour ou pourtout des figures irrégulières. Circuitus, circumductus. La circonférence, le tour de cette ville, est de quatre lieues.

☞ On dit aussi en Médecine, que le sang est porté du centre à la circonférence par les artères, & rapporté de la circonférence au centre par les veines ; pour dire, que le cœur le pousse vers les extrémités, & que le sang revient des extrémités au cœur.

CIRCONFLEXE. adj. Accent qui marque une syllabe longue. Circumflexus accentus. Les Grecs avoient trois accens, l’aigu, le grave & le circonflexe. En françois on figure cet accent avec un